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<i autant plus d’être connus, qu’ils renferment le
plan d’une monarchie parfaite j plan d’après le quel
on diroit que M. de Montefquieu a développe
la nature & les principes du gouvernement
monarchique. Denys fut à peine tombé fous les
coups de les afiaffîns, que les fyracufains fe divisèrent
en deux fa&ions, également puilfantes,
egalement nombreufes : l’une demandoit hautement
le recabli/fement de la tyrannie , & l ’autre
ne vouloit recevoir que le gouvernement popu- j
laire : tous jetrèrent les yeux fur le fage Platon
& remirent à fa décifion le fort de leur patrie!
vin état 3 leur dit-il, ne fauroit être heureux , ni
fous le pouvoir arbitraire , ni dans la confufîon
d une trop grande indépendance. L ’état Je plus
heureux eft celui où le peuple eft fournis à des
monarques qui font eux-mêmes alïùjettis aux loix.
Je vous confeille donc , 6 fyracufains , de recon-
noitre pour vos rois , & le fils de Dion votre libérateur
3 & celui du jeune Denis votre dernier
fouverain , & celui de l’ancien Denis fon prédé-
celleur. Mais afin qu’ils ne puiûent abufer de leur
autorité , choififfez parmi yous un confeil compote
de vieillards fages & éclairés, entre les
mains defquels vous remettrez la puiffance légif-
lative & le foin de l’adminiftration de l ’état ;
en forte néanmoins que les rois exercent tous les
droits d’une fouveraineté pleine, entière & illimitée,
fur les chofes faintes & le culte des
dieux. Qu’enfuite le peuple affembié crée un confeil
de trente^çinq magiftrats ; & que ceux - ci
dépofitaires & eonfervateurs des lôix publiées
par les vieillards, tiennent perpétuellement une
balance exafte entre les privilèges de la nation &
J autorité des princes : qu’ils décident auffi delà
paix & de la guerre 5 mais toujours en préfence
4e l'avis des confeils des vieillards & du peu-
P»e aifemoje. Quant aux affaires criminelles, c’eft
encore a l'ordre confervateur des loix en qui ré-
h de efientiellement la puiffance coa&ive, qu’il
appartient de les juger, & non aux rois qui ne
peuven& pas même aûifter à de tels jugemens
parce que, pères du peuple, protecteurs des citoyens
& premiers prêtres de l’éta t, les condamnations
à la mort & a 1 ex il, ou feulement à la
prifon , aviliroient la fainteté de leur caractère. |
Quelques auteurs penfent que cette forme dé
gouvernement eft due au génie de Platon , & jjs
affurent qu avant lui perfonne n’avoit imaginé un
plan de monarchie auffi heureux : mais un croit
plus communément qu il ne fit que donner aux
fyracufains l’idée des gouvernemens qu’il a voit
trouves établis dans 1 Egypte & dans l’ Inde,
• ^ a .P^uPart de^ fes lefteurs , même les hommes
mftruits , ont pris pour des queftions politiques,
pour des aliénions ou des projets formés & combines
par cet auteur, fes métaphores & fes allégories
5 enforte qu’on a méconnu jufqu’au fujet
principal de fes dialogues. C e fut ainfi que le
phUofophe U plus ç ç lm 4e fon fiçcle, f'homtne
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le plus lavant, en un mot le vertueux Plotki
crut qu il lui feroit pofîîble de fonder un gouvernement
femblable dans toute fes parties à la république
de P la to n . Il ignoroit que cet excellent
ouvrage n eft qu une comparai fon perpétuelle entre
les qualités qui concourent à rendre l’homme
julte, avec, la parfaite harmonie des différents
1 efforts qui contribuent à former le meilleur des
gouvernemens polfibles. Mais PI0tin, échauffé
I. par 1 éloquence de Platon, n’apperçut point le
i kut 4® ce dialogue $ &, y voyant toujours une
forme de gouvernement, il crut que l’exécution,
pour peu qu elle fût bien conduite, en feroit.
fort aifee. C e projet chimérique fut adopté par
I empereur Gallien qui, beaucoup moins éclairé
que Plotin , & par cela même plus prompt à fe
lailfer feduire , defigna au philofophe une ville
d Italie , perfuade qu un homme qui avoit fi bien
faifi les idees de Platon3 n’auroit aucune peine à
établir cette nouvelle forme d’adminiftration».
Mais la fuprême puilfance de Gallien , fécondée
par le zèle & la prudence de Plotin, ne put
parvenir à remplir les grandes vues qu’on avoit
cru appercevoir dans' cette prétendue république.
Ç e n’ctoient que leurs propres idées , leurs chi-
: mères, leurs erreurs que Plotin & Gallien cher-
choient a realifér , & ils n’appercevoient pas que
des difficultés invincibles en rendaient l ’exécution
impraticable. C a r , a fuppofer même que Platon
fe fut propofe une nouvelle forme de gouvernement
, l’empereur Gallien penfoit-ii qu’en don-1
liant une ville à Plotin , celui-ci y trouvât on
qu’il put y former des hommes d’une autre ef-,
pèce-que ceux qui exiftoient ? Et Plotin ne fa-
voit-il pas q ue , de fon temps comme aujour-
d hui 3 l’efpecé humaine étoit infiniment dé^eV
nérée, & très-différente de la fociéré que P'aton
rafîemble dans les murs de fa republique? Pen-
foit-il à l’impoffibilité phyfique ou il feroit de
trouver furja terre un nombre affez confidérable
d’etres auffi parfaits que ceux qu’il eût fallu pour
peupler un tel état, même en fuppofant qu’on
Un donneroitpeu détendue? quel légillateur
01 croît fe flatter de raffembier la plus petite fo-
ciéte pofîîble, dont chacun des membres feroit
toujours vertueux, fans défaut, fans foibleffe ?,
31 le grand laton avoit eu fériéufement cette
idee, on ne le placeroit pas au nombre des fa-'
ges de la Grece j & tout ce qu’on pourroit dire
de plus favprable pour lui , ce feroit qu’il 'eft
bien different d imaginer & décrire des maximes
fubumes , ou de croire & d’affurer qu’ il eft fort
aife de les fuivre. Platon étoit très - éloigné de
penfer auffi follement, & de former des projets
auff peu raifonnables. '
L exemple de Plotin & l’inutilité des tentatives
de Gallien ne femblent avoir détrompé perfonne,
& 1 on continue à ne voit dans ce dialogue qu’ un
plan de gouvernement. Les publiciftes, les polir
pqyçs & plufieursphijofophes îîiçrpe trouvent
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que des principes, fut l’adminiffration publique,
des projets de.réforme j des leçons fur les devoirs
d e y ’hom^é^' l’égaid de la fociété., des .préceptes,
fur les obligations.des fujets ; envers l ’état,
.du prince envers le peuple, des magiftrats envers
fes citoyens.
On diroit qu.e Platon a. prévu cette erreur ;
xar il a foin , prefqûe à chaque page, d’indiquer,
fous le nom de Socrate , le véritable objet de fes
r a i f o q n e m e n s , , 1 1 explique & développe f i fou-
vept le fens de fon allégorie, qu’il eft difficile
de comprendre par quelle bizarrerie on s’eft obf-
tiné à ne voir, dans cet écrie que le plan & l ’idée
d’un gouvernement parfait : c ’eft bien mécon-
nottre 8c l’efp.rit de Socrate & le génie de Platon.!.
Quand on feroit .tenté de prendre cette
fuite de réflexions morales & philofophiq.ues fur .
la jujtice pour un .difeours politique , cette- erreur
ne devroit pas durer long-temps , fur-tout
après la fâge réflexion de/ Socrate , qui dit dans
le cinquième livre : « Quelles ont été nos vues ,
« quand.nous avons cherché à découvrir l’effence
s» de la juftice , & quel devroit être l’homme
*? véritablement jufte ? Je demande la même chofe
*» au fujet de l’injufripe & de l’homme injufte 5
« queHes ont été nos vues ? Nous ne nous forn-
»p.mes propofés,; que de trouver deux modèles
» accomplis, l’un de^vertu , l’autre de vic.e. En-
« fuite nous avons confidéré tour-à-tour l’ un &
39 l’autre de ces modèles, afin d’être plus en
39 état de juger du bonheur ou du malheur de
*9 leur condition , & de conclure, d’après nos
sa propres réflexions ,& notre jugement , que nous
39 ferons plus ou moins heureux , plus pu moins
39 malheureux, fuivant le degré de reffemblance
39 que nous aurons , ou avec l’un, ou aveo l’au-
»3 tre : c a r , au fond , je n’ai jamais penfé, &
3î mon deflein. n’a pas été de prouver- que ni
»9 l’un ni l’autre de ces deux modèles exiftât fur
>9 la terre 39.
P LEBISCITE : voyez le diélionnaire de Ju-
xifprudence : nous en parlerons auffi à l’ article
R qm b .
P L E N IP O T E N T IA IR E , celui quia un plein
pouvoir d’agir.
On le dit particuliérement des miniftres publics
que les fouverains envoient pour entamer
une négociation fur la paix, fur un mariage, ou
fur d’autres affaires importantes.
Le titré de plénipotentiaire donné fans celui
d ambaffadeur , même à un grand feigneur , ne
conftitue qu’ un mimffre du fécond ordre. Une
U ai fiance illuftre & une dignité peifonnéile relèvent
le caraéière du miniftre. Mais c’eft au ca-
râ.éteré feul , &c non a la naiffance, aux dignités
& aux qualités pei Cannelles, que les honneurs
font dus. Le plein pouvoir honore, parce-quYl
parqué la confiance du maître : mais il ne défi-
Q&con. polit, & diplomatique, Totn, 111•
gne qu’un procureur dont la procuration eft arn’
p ie , & ne regarde que l ’effet des traités. La
qualité repréfentative & les honneurs éclatans ne
font attachés qu’au titre d’ambafladeur 5 & nul
ne. l’ eft fi , dans fes lettres de créance ou dans
fes pouvoirs, .il n’a nommément le titre d’ambaf-
fadeur. Le plénipotentiaire ne doit pas prétendre
aux honneurs réfervés. aux ambafladeurs, parce
que le, droit de repréfentation eft attaché éminemment
au feul titre d’ambaffadeur. Voye^ les
articles A mbassadeurs & Ministres p u -
b-l ic s . -
PLESSE, baronie d’Allemagne. Voyc^ l’article
Silésie prussienne.
PO L ITIQ UE -: la politique en général eft cetta
feience qui fournit des règles à ceux qui gouvernent
les états, pour atteindre les différens buts
qu’ils doivent fe propofer, ou c’ eft la fcience de
gouvernement, l’art de régner. Il paroîtqif aujourd’hui
la yaleur de ce mot eft moins étendue j qu’on,
donne le nom d’écononr'e politique ou de fcience
de l’adminiftration aux règles fur le régime intérieur
d’un éta t, & qu’il feroit convenable de reftrein-
dre celui de politique à la fcience qui traite des
combinaifons extérieures propres à un état. Nous
avons traité en détail des diverfes parties de l’économie
politique & dé tous les points de l’admi-
niftrati.on, & nous traiterons ici l’article Politique
d’après l’acception générale.
Nous avons déjà parlé de la politique à l’article
A ffaires Etrangères : nous allons ajouter ici
des remarques, générales.
Chaque état, chaque nation , chaque corps
politique a pour but fa confervation ou fa durée,
& la félicité de tous ceux qui en font membres.
La conftitution la plus parfaite eft fans doute celle
.qui peut prolonger fa durée, procurer à fes citoyens
tous les biens dont ils font fufceptibles ,
& éloigner d’eux la plus grande fomme des maux
qui les menacent.
Pour y parvenir, l’état doit, fe propofer cinq
objets fondamentaux : i° . il faut perfectionner la
nation qu’on doit gouverner : 2 . il faut introduire
un bon ordre dans l’état, y entretenir la
fociéré , & y faire obferver les loix : 30. il faut
établir dans un état une bonne & exaète police :
4°. il faut rendre l’état floriffant & riche , non
de cette richefie faétice qui éblouit les peuples ,
mais de cette véritable richefie qui leur donne de
l’abondance & delà fatisfaâion : 5°. il faut rendre
l’état formidable en lui-même & refpeétable
à fes voifins. De ces cinq objets découlent toutes les
règles de détail que la politique enfeigne, & dont
la réunion forme la fcience du gouvernement.
, Un corps ou.peuple de barbares, quelque nombreux
qu’ il puiffe être , ne fut jamais heureux
jamais-.formidable long-temps; il arrive avec la
rapidité d'un torrent, & il dilbaroît de même
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