
» commun, le .roi n’étoit que (impie liîuFruItkr
•» du domaine , & que lui & Tes officiers payés 3
»? Je Turplus des revenus devoit fe garder pour les
» affaires de la république 5 que le fonds & la pro-
■ *> priété du domaine appartenoient au peuple 5
» qifainlï les députés des provinces pourroient
»3 bien confentir à l’aliénation perpétuelle du do-
03 maine 3 fi les provinces les y autprifoient., mais que
33 fi les provinces y confentoient 3 Tintérêt du peu-
w pie devroit en détourner , parce que le peuple
33 s'obligeroit par-là, lui & toute fa poftérité, à
33 nourrir êc entretenir le roi & le royaume , &
» feroit une ouverture inévitable à mille impofi-
»> tions , dépouillant le roi de tout ce qu’ il peut
33 avoir pour l'entretien de fon état j & qu'énfin
33 ce confentement devoit encore moins être don-
33 né par les députés, dont plufieurs étoient ab-
»3 fens & déjà congédiés, & qui tous manquoient
*> de pouvoir ». Ainfi Bodin étoit de notre avis :
le peuple peut confentir à l'aliénation du domaine
: les impôts que craignoit cet auteur, font
établis 5 & l'aliénation du domaine devant aujourd'hui
prévenir les impôts , que le produit de ces
domaines remplaceroit, Bodin confeilleroit de les
aliéner, s’il vivoît encore. Mais pour revenir à
la négociation entamée par Henri III , Bellie-
vre 3 commifiaire envoyé par le roi à l'alTem-
blée du tiers état, dit que, quoique par les loix
du royaume le domaine fût inaliénable, ces loix
n'avoient point lieu en temps de néceflité } qu'il
y alloit du falut du peuple î que les loix qui
avoient été établies pour la manutention de l'état,
dévoient être favorablement interprétées , 8c non
pas tourner à la-ruine du peuple } qu'il étoit plus
convenable de vendre une partie dû domaine pour
conferver l'autre, que d’expofer le tout fi on ne
vendoit rien, 8c qu'une telle vente fe devoit plutôt
appeller confervation qu'aliénation du domaine.
Le tiers-état répliqua q ue , par la loi fondamentale
du royaume, cette aliénation étoit défendue
, & que les députés n'avoient aucun pouvoir
des provinces d'y confentir 5 que le domaine
du roi peut fe comparer aux biens d'une femme
que le mari ne peut aliéner 5 que j e domaine de
l’églife n'eft pas aufli privilégié que le domaine
du roi i que le domaine de l'églife fe peut alién
e r , fuivant les canons, en certains cas ^ & en
©bfervant les formalités nécefiaires ; mais que le
^domaine du roi efr une colonne qui foutient l'é tat
, & qu'il faut plutôt la fortifier que la détruire
j que le domaine du roi étant aliéné, tout
moyen feroit ôté au roi d'entretenir fon état &
affigner à l’avenir dots, douaires 8c apanages ;
que c'étoit une chofe inouïe que le domaine fût
vendu à perpétuité fans rachat j que cela ne $'é-
toit jamais pratiqué, quoique le royaume fe fût
trouvé en plus grand danger qu'il n’étoit alors ;
que cela ne s'étort pas même fait du temps du
toi Jean 5 que le domaine étant aliéné, il feroit
üêcdfaire * pour J'emretien de l'état du foi a d en
remplacer autant qu'il en feroit ôté $ & que cèitê
nouvelle acquifition retomberoit furie tiers état,
& non fur la nobleffe & le clergé * qui y don^
neroient aifément leur confentement. Le tiers-
état prit donc la réfolution de ne point toucher
au domaine , 8c propofa au roi d’autres expédient
pour foutenir la guerre. Nous ne nous permettrons
pas d'attaquer ces raifons : les protecteurs du peuple
avoient peut-être raifon alors ; mais il eft clair
(que les protecteurs du peuple doivent demander
■ l'aliénation du domaine : car fi on ne l’aliène pas,
de nouveaux impôts font indifpenfables j 8c l'on
fait bien que ces impôts tomberont fur le peuple.
Au refte, cette fermeté du tiers-état produific
l'ordoqnance de B lo is , que j'ai indiquée plus
haut.
Tous les rois de France , depuis Charles V
jufqu'à Charles V I I I , ont juré à leur facre de
conferver la fouveraineté , les droits 8c la dignité
de la couronne de France, & de ne les aliéner
ni tranfporter à perfonne. Mais depuis Charles
V I I I , cette claufe n'a été inférée dans le ferment
d'aucun de nos rois. C'eft ce qu'a remarqué l ’auteur
du Cérémonial françois. « Il femble , dit
» cet auteur, qu’il ait été jugé fuperfiu 8c inu-
» tile de ftipuler de nos rois, qu'ils n'aliéneront
33 les droits de l a . couronne 5 d’autant que pro-
33 mettant de défendre 8c de protéger leurs fu- •
» je ts , de les maintenir en paix, de leur admL
33 niftrer bonne juftice & ufer de clémence • &
33 miféricorde envers eu x , ils ne le pourront
» faire, s'ils confentoient jamais ou permettaient
qu'ils .tombaient fous la domination 8c feigneu-
33 rie d’un prince étranger ». Cette raifon n’eft:
point fatïsfaifante du tout : le miniftère a fenti
depuis le facre de Charles V I I I , <pe les befoins
de l’état obligeroient peut-être à l'alienation du do 3
maine, dont le produit fe trouvoit avantageufe-
ment remplacé par des impôts confidérables.
Les jurifconfultes expliquent les motifs qui ont
déterminé nos rois à rendre leur domaine inaliénable
: mais on vient de voir que le domaine n a pas
toujours été regardé comme inaliénable : voici
les motifs de cette prétendue inalienabilite. |
1 ° . « C 'e ft la naiffance qui élève nos rois fur
k trône , & non le hafard de l’éleêtion , ou la
voix des foldats toujours vénale ».
Iϰ. ce II faut que l'état ait des fonds fixes 8c
certains. C'eft de-là que dépend fa fureté & fon
repos ", Les domaines ne rapportent prefque plus rien.
111°. '« En France l'avidité des courtifans eft
bornée par là fagefie du prince , au lieu q u e ,
fous certains empereurs romains, ellle tarifloif
toutes les fources des finances33 : on ne Pfut r*~
•pondre ici comme on le voudroit , ou plutôt nous ;
avons prouvé combien le tréfor royal foàjfre de ces
concevions de domaines qu'on obtient fous un prince ,
& qu'on rend fous un autre avec des dedommagement
excejfifs,
I V \ «t retrait ns fait aucun tort aux par*1.
1 n m
ticuliers ; ils n*achètent qu'à cette condition ».
V ° . « Il eft fort avantageux à l'éta t, parce
qu'il eft une relfource allurée contre l'aliénation
». Ce retrait a pu être utile ; mais l'eft-il à
préfent
VI°. ce Les particuliers infèrent fouvent cette
faculté de rachat , dans les contrats de vente
•qu'ils paflent entr'eux. Pourquoi ne feroit-eile pas
de droit pour le r o i33 ? Elle fera de droit, quand
elle fera a l'avantage de l'état.
V I i° . ce Les terres du domaine confiftent ordinairement
en" duchés & autres apanages, diftin-
gués par des titres éclatans qui étoient inconnus
à l'Empire romain ». Cela n eft point du tout exact j
é* f i les empereurs romains n aliénèrent le domaine
que pour l'avantage de l'état, i l faut les imiter. .i
Mais s'ils les aliénèrent pour enrichir des ' courti**
fans , i l ne faut pas fuivre leur exemple : nous ne
difons pas que le domaine de la couronne eft atnfi
aliénable : nous voulons que le produit de Valiénation
foit appliqué aux befoins de l ’état, .
V I I I0. ce Si en France on a reçu ou introduit
le droit d'aîneffe, le retrait féodal & le lignager
pour la confervation des familles , pourquoi ne
^garderoit-on pas le retrait perpétuel pour la .confervation
de la couronne, fous la grandeur de laquelle
toutes les familles du royaume fe repofent 8c font à couvert ? C e principe inconteftable doit
empêcher l'aliénation des domaines particuliers
;des couronnes». U doit empêcher cette aliénation ,
.tant qu elle efi avantageufe a l'état,
« Les jurifconfultes flamands;, difent encore’
quelques publiciftes , prétendent que-leurs princes
ne peuvent faire le moindre préjudice aux
droits de leur fouveraineté».
« Un chancelier du duché de Brabant a „écrit
que le duc ne peut aliéner le moindre domaine ,
me fût-ce qu'un fîmple 8c léger droit de péage 5
■ 8c que de même que , fuivant les loix civiles, la
dot ne peut être aliénée par le mari, le patrimoine
de la couronne ducale eft comme une dot
• indivifible que la république a apportée au prince
pour lui fervir à en foutenir les charges ». L'ignorance
ou la légéreté de ces publiciftes eft cu-
.rieufe. Le peuple du Brabant a confervé fes états
& fes privilèges : on ne l'accable pas d'impôts
fans fon aveu > il Veille à l'adminiftration des domaines,
8c nous n’ajouterons rien de plus-
« Les jurifconfultes allemands, ajoute-t-on ,
fuppofent que le fouverain domaine d’un é ta t,
qui a été une fois incorporé à l’Empire, ne peut
plus fe perdre , ni exprefîement en vertu d'un
àéte pofitif, ni tacitement par la voie du délaif-
fement, ni abfolument par la force de la pref-
cription. Les empereurs d'Allemagne , à leur couronnement
, jurent de réunir à l'Empire tout ce
qui en a été féparé fans limitation de temps , 8c
quelques confentemens que leurs prédéceffeurs y
puififent avoir donné ». C ’eft encore un exemple
çhoifi, L'Empire eft fournis à des çapituUî
N ï
tîons éc à des*loix qu’on exécuté i ht bowferva-
tion du domaine y eft utile, du moins dans le
fyftême adopté par le corps germanique 5 8c il ne
faut pas faire de pareils rapprochemens,
« Les loix de Brandebourg ne permettent point
à l'électeur, ayant des états en propre, d’ aliéner
pour toujours & fans retour fes états , fes
fujets, ni même les nouvelles acquifirions qu’il
peut faire. Ces loix veulent qu’ en cas de contravention,
l’éie&eur ou fon fuccefleur foit en
droit de revendiquer ce qui a été-ainfi aliéné,
8c de s’ en remettre en pofléfïion ». C ’eft ce que
difent les vieilles capitulations.
« Selon les efpagnols, c’eft un principe fotir
damental, 8c l’une des plus anciennes conftitu-
tions de leur monarchie, que le royaume d’Ef-
" pagne eft inaliénable j que les efpagnols vivent
toujours fous leurs propres rois, & que la couronne
d’Efpagne ne peut être ni annexée, ni incorporée
à aucune autre ». Voil^ comment les ju-
riftopfultes & les publiciftes traitent la plupart
des queftions : après quelques phrafes, ils font
bien loin de la matière qu’ ils paroiflent difeuter :
ils nous parlent i c i , ainfi que dans le paragraphe
précédent, de l’aliénation de la couronne 8c de.
l ’état, & il s’agit du domaine.
ce Les italiens citent un ferment de non in-
feudando , que les papes font en prenant poffeflioii
du fouverain pontificat. Ils difent qu’aucun pape
n’a . le pouvoir d’aliéner ce qui a été donné à
S. Pierre 8c au Saint-Siège , & que, par les bulles.-,
de Pie-V & de Clément V I I I , un état incaméré
eft inaliénable pour toujours ». Eh qu’importe J
on connaît les bonnes raifons qui veillent au main-,
rien de l’état précaire de l’ églife , 8c les féodiftes.,
les canoniftes 8c les jurifconfultès ultramontains
penfent néanmoins que le pape peut aliéner ,
à titre d’inféodation , des feigncuries fouve-
raines, du confentement des cardinaux.
« L e s turcs, ajoute-t-on , ne peuvent aliéner
aucune partie de leur domaine j ils allèguent auflî
les conftitutrons de leur Empire 8c les loix de
l’alcoran, & favent fe faire non - feulement une
loi politique , mais auflî une religion, de l’intérêt
de l’é ta t, contre tout démembrement de l ’Empire
». C ’eft donner une dernière preuve de juf-
tefte ; & c ’eft très-bien fait aux jurifconfultes de-
: parler de la conftitution de l ’empire ottomao j çàr-
ils l’ont beaucoup étudié.
ce Tous les princes chrétiens, aftèmblés fôl'ern^-
nellement dans le treizième fiècle , convinrent ,
par e.ux ou par leurs, ambaflad.eurs,,. que le domaine
de leurs couronnes feroit inaliénable, &
que lés portions qui en auroient été démembrées ,
y feraient réunies;33, Ou fe. tint: cette- belle ajfern-,
- bléç ?
Enfin, en admettant le principe 8c-les faits fur
lefquels nous no,us fouîmes permis quelques remar-
! ques., çe pEi^dpe devroit être borné à Vufrg$
Ê 4