
O T T Ô T T
Comnène, les turcs pillèrent les îles de C h io ,
de Lesbos, de Rhodes & de Samos. C e fut vers
ce temps - là que les françois commencèrent les
fameùfes croifàdes contre lès'turcs & les farrafins.
L'un 1204, Alexis Mirtylle ayant été déchiré par
le peuple , apres un règne de deux mois & demi,
Baudouin, comte de Flandre > l'un des feigneurs
de l'armée françoile , fe rendit maître de Conf-
tantinople & de l'empire , lequel paffa aux fran-i
ç o is , qui le pofledèreht jufqu’en 1260. Loffque
Baudouin faifoit cette conquête, Alexis Gom-
nène tenoit la Colchide 3 ou la province de Tré-
bifonde, à titre de principauté » fous lés empereurs
de Conftantinople. Voyant Conftantinople
entre les mains des François , il fe déclara fou-
verain , fans néanmoins prendre le titre d'empereur
} ce fut Jean Comnene qui prit le premier
-cette qualité d'empereür de Trébifonde. Dans le
même tems , un troifième empire fe formoit dans
la Thrace j Théodore Lafcaris prétendoit avoir
un double droit à l'Empire : il avoit époufé Anne
Comnène , fille d’Alexis Comnène , empereur ,
& veuve d'Ifaae Comnène , q u i, en renonçant
à l’empire , s’étoit contenté du titre de febajlà-
crptor j* cju’il avoit inventé. Il prit donc le titre
d'empereur 3 & réfida à Andrinople , tandis que :
les empereurs françois avoient leur fiège à Gofif:
tantinople. Mais Jean & Théodore fes arriérés-:’
petits-fils,'Jui ayant fuccedé en bas âge, eurent pour
tuteur Michel Paléoîogue > qui chaffa Baudouin
de Conftantinople l'an 1259 - , fit mourir,
l’année fui vante, fes deux pupilles * & fe déclarant
lui - même empereur , réunit l'empire qu'ils
avoient pôffédé à Andrinople, à celui de Conftan5
tinople » dont il s'étoit déjà rendu maître. En ‘462, ;
Amurat I , empereuf des turcs, prit Andrinople,
qui devint la capitale des ottomans, déjà maîtres
de l'Afie mineure, & furtout de la Bithynie. Il ne
reftoit à l’empire d'Orient que quelques provinces
délabrées. L'an 1340 , les Paléologues furent ren-
verfés du trône, par Jean Cantacufene , qui fut
détrôné à fon tour par Jean Paléoîogue. C e fu f
fous l’empire de ce dernier que les turcs prirent
Andrinople. Pour achever la deftru&ion de ce
malheureux éta t, Emmanuel Paléoîogue , après
un règne de trente & un an s , laiffa fept ms :
Jean, qui lui fuccéda , & régna vingt-fept ans 5
Andronic , qui fut prince de Theffalônique : il
la vendit aux vénitiens & mourut dé la lèpre 4
Théodore, qui alla chez un de fes oncles defpote
de la Morée : Démétrius, qui régna à Sparte j
Thomas , qui eut Corinthe j Manuel, lequel fe
retira auprès de Mahomet I I ,. qui le retint tou-
jours prifonnier} & enfin conftantin, qui fuccéda
a Jean , fon frère. C e fut fous Conftantin, que
Conftantinople fut prife d’ affaut le 1$ mai 1453»
& devint la capitale de l'empire turc comme
elle Teft encore à préfent. Nous allons entrer
dans quelques détails fur les turcs qui opérèrent
cette grande révolution.
Les turcs , originaires de laTartarie ou de la
Scythie, n’ont eu ce nom que dans le moyçn
âge, Se ils ne le regardent eux*mêmes que comme
un titre d'honneur qu’ils partagent avec les- tarares
de les Mongoles. Le mot turc, adjectif, lignifie
éminent j & le même mot, fubftantif, lignifie
un chef $ ainli, le chef d’une horde, ou la horde
même, peut fe nommer turki, ki chez les tartares
défigne une troupe ou horde. Les feythes ou fartâtes
à qui on a donné le nom propre de turcs*
habitoient jadis entre la mer noire & la mer caf-
pierme, & ils ne fe font fait connoîtreque dans
le feptième lîècle. Ils fervirent, fous l'ïmpereur
d’orient, Héraclius à la conquête delà Perle : en-
fuite les califes arabes ou farrafins en composèrent
leur garde, & ils en employèrent un grand nombre
dans leurs armées ; les tartares s’emparèrent peu
à peu de l’autorité, déposèrent Se établirent à leur
gré les califes, & même quelques gouverneurs
de cette nation fe rendirent indépendans, furtout
dans le neuvième fiècle. Les turcs ainli liés aux
farrafins ou arabes fe trouvèrent difpofés à em-
braffer le mahométifme , ce qui les unit davantage
; leurs conquêtes fe firent en commun , & à
lia longue les turcs étant devenus les plus forts ,
jles farrafins difparurent, pour ainfi dire , & furent
îconfondus avec eux. Quant à l’ origine préçife
]de l’Empire ottoman, la voici telle que l’hiftoiré
ïdîï prince Gantemir la rappotte. La horde ogu-
jzienne , conduite par Tschingis chan, paffa de la
grande tartarie aux bords de la mër cafpiennë ,
“en Perfe & dans l’Afie mineure . & y fit de
grandes conquêtes. Le fchâch Soliman , prince
de la ville de Nerai au voifinage de la mer C a s pienne
Se feigneur dé Merufchahjan , efpéra les
'mêmes *fucces , il fe mit à la* tête de 50000
h.ommes , l’an 12 14, paffa le Gaucafe, traverfa
rAzerbejan ou là Médie . & pénétra jusqu’ aux
frontières de Syrie j il fût arrêté dans les incur-
fions par les tartares qui avoient fuivi Tfhingis
Chan j mais il pénétra de nouveau en 1219 dans
l’Afie mineure & jufqu’aux bords deTEuphtate.
Le bruit de fes exploits étant parvenu à la cour de
Perfe, on y donna à Solyman & à fon peupie le
nom de turc , qu’on donnoit communément aux
peuples qüê Tfchingis Chan avoit amenés de
la Tartarie. Son petit-fils Ofman s’empara de '
diverses provinces & places ; dè^l’Empire grec
dans l’Afie mineure * & il prit en f j o d , dans
la Ville de Carachifan, le nom d’empereur des of-
mans. Il établit fa réfidencê à Yenghifeheri ; Se
entr’autres conquêtes, il fe rendit maître enu 32^
de Prufa, ville de Bithynie, appellée aujourd'hui
Burfa y fon fils & fon fucceffeur Otchanef y fixa
fon féjour. Celui-ci qui eut pour femme Theodora,
fille de l’empereur grec Cautacuzérres^ayant fait paf-
fer fon fils Solyman & Amurat en Eufope, le premier
fe rendit maître de' la ville de^Gallipolis ,
& l’autre de celle de Tyrilos. Amurat fuccéda
à fon pèrç & conquit les villes d'À n cy te , d’Ano
T T
drînople .& de Philippopolis en i$6o , créa.les
janiftaires en 13^2, s^empara de la Servie & fit
une irruption dans la Macédoine & dans l’Albanie.
Son fils Baja,z:et qui lui fuccéda , étendit
fes conquêtes en Eiirope Se en Alie", rèmporta
une viéloire für lès chréti'^né' à Nicopplis, 8c fut
enfuite lui - même vaincu & Fait prifonnier par
Tamerlan. Ses fils fe difpùtèréntrl’Empire, Ma- !
«omet I en deipeura le1 maître : fon fils Anu-
^■ at II y entr’autres expéditions , vainquit les
hongrois^ près de Varna en 1444. Mahomet I I ,
le plus célébré des empereurs turcs, prit Cpnftan-
tmople ,en 1453', & reduifit tout l’Empire grec
fous fon obéinance. Les turcs dilênt qu’ il le pof-
feda par dfoit de lîicceflîon , & ils en concluent
que la foümiflion dès grecs doit être plu?: entière.
Leurs prétëritibnS font fotidées, fans doute, fur le
mariage d’Orchanes avec Theodora , fille de l'em*
pereur Cantaçuzenes. Quoi qu’ il en fo ît, Mahomet
II pendant fon règne conquit douze royaumes
& 200 villes. Bajazet II & Sèlim I reculèrent les
bornes de leur empiré én Europe, en Afie & en
Afrique. Soliman I fe dîftingua par plus d’une victoire
remportée fur les hongrois , & par un code
de loix qu’il publia. Les empereurs fuivans ne
furent pas fort heureux dans leurs expéditions.
Mahomet IV s’empara, il eft vrai, de l’ifle de
Candie en 1Û69 , Se aflîégea Vienne en 1683 ;
mais la guerre qu’il fit en Hongrie lui fut
contraire. Sous Soliman I I , Achmet II & Muf-
tapha , les hongrpis . & les vénitiens remportèrent
plufieurs avantages fur les turcs , ce qui
engagea Muftapha II en 1699 à conclure la paix
de Carlowitz j Achmet III fit celle dé Paffarowitz
en 1718 > & Mahomet V , par la paix de Belgrade
en 1739 , a rendu à l’Empire .une moitié de la Ser-j
vie & une partie de la Valachie. Son frère Ofman
Ibrahim, qui lui fuccéda, eut pour fucceffeur fon
fils Muftapha III.
C ’eft donc, abufivement qu’on donne à l’empire
des turcs le nom d’ottoman, au lieu de celui
d’Ofman , fon premier fondateur.
S e c t i o n J I e.
description des diverfes provinces européennes de
F Empire Ottoman , G* remarques fur ces provinces.
Tays de F Europe entièrement ajfujettis a F Empire
d'Ofman , autrement dits Rumeli ou Rum, ceft-
a-dire , pays des Romains.
Le's géographes turcs donnent ce nom à l’Europe
en général, & en particulier à la Grèce moderne ,
non compris la Morée.
I L illy rie Turque.
Elle comprend : I. Uns portios du royaume de
Croatie , entre les rivières d’Unna & de Veibas.
II. Une portion de la Dalmatie • qui s’étend
depuis la Bofnîe jufqu’ à 1‘Albaaie.
O T T . 457
TIÏ. Le royaume de Bofnie, dît Rama , ainli
nommé des rivières de Bofna & de Rama, à moins
qu'on ne veuille que le premier nom lui vienne du
peuple des Bofsènes.
' C e .royaume'ell réparé de l’Efclavonie, par la
Save au nord , de la Servie ,pat le Drino ( tir. )
au levant , de la Dalmatie par des mpntagnes
au. midi , & de la Croatie , par la rivière de
Verbas au couchant : il a 2.8 milles de longueur,
& de 1 r à 28 de largeur ; le fol y eft favorable à
l’agriculture & à l’entretien du bétail ; il produit
du viri, & les montagnes renferment des mines
d’argent. Les habitans defceiident des efclavons &
ils en parlent la langue. Ils profeflent la religion
fîrçcquç!, mais le mahométifme y a beaucoup de
{éclateurs. Plufieurs croates mécontens fe font retirés
dans ce pays, que les turcs conquirent en 1465
8c 14S9. Avant qu’il paflat fous leur domination
, il étoit commande par un B an , allié des
Hongrois : aujourd'hui c’eft un pacha qui y commande,
& on le divife en trois fangiacats ou
comtés.
. IV . Le. royaume de Servie , qui tire fon nom
des ferviens qui l’habitent, & que les hongrois
nomment Srrkefch - Orfsag , & les turcs Laswila-
gcli ou province ie Lazare : Lafi ou Lazare , en
étoit le maître lorfqu’ils le conquirent en 156c.
La partie orientale , appellée Rafcie de la rivière
Rafca qui y coule, eft l'ancienne Dardanie. Les
habitans fe divifent en ferviens & rafeiens , &
ils parlent l’efclavon : ils font attachés à l’églife
grecque, quoiqu’il y ait aufli beaucoup de ma-
hométans parmi eux. On y fabrique des toiles &
des étoffes de coton. Lorfque ia Servie étoit encore
alliée des hongrois , un defpote la gouver-
noit. A la paix de Paffarowitz , conclue en 1718 ,
l’empereur des romains obtint la plus grande partie
de ce royaume, qu’ il fut obligé de rendre
aux turcs en 1759 par la paix de Belgrade. A u trefois
la Servie propre , diftinguée de là Rafcie,
comprenoit le bannat de Mazovie : on la divife
maintenant en quatre fangiacats ou comtés.
11° La Bulgarie.
La Bulgarie eft bornée au nord par le Danube;
à l’orient par la mer Noire ; au midi par le mon t
Hémus, qui la fépare de la Romanie ; à l’occident
par la Servie. Elle tire fon nom des Bul-
gares, & elle formoit autrefois la partie inférieure
de la Moëfie. Elle a 72 milles de longueur fur
vingt de largeur au milieu, & 40 près de la mer
Noire.
Le pays eft en général fort montqeux ; mais ,
dans les vallées & les plaines, le fol eft extraordinairement
fertile , & ' il produit en abondance
du bled & du vin. Les montagnes ne font pas non
plus ftériles, & elles fourniffent fur tout de bons
I pâturages.
Les bulgares tulgari, vulgari, que les hongrois
nomment bulgarok, font célèbres dans l ’hiiloirc
N n n i