
4e Amérique le mieux vêtu, ibdevea cette fiipé*.
riorité a 1 avantage qu'il avoit d'avoir des animaux
domeftiques qui lui fervoient à cet ufage, le. lama
& le pacp.
1-es toifons du lama & du paeo étoient utile-“
mène employées au Pérou r avant que l'Empire eût
iutvi un joug étranger. Culco en fabriquoit, pour
J uiage de la cour , des tapifferies ornées de fleurs ,
d oiteaux , d arbres affez bien imités. Elles fer-
v®;ent ailleurs à faire des mantes qui couvroient
une çhemife de coton.
La fierté & les habitudes des conquérans, qui
leur rendoient généralement incommodes ou m.é-
prifables tous les ufages établis dans les contrées
qur fervoient de théâtre à leur avarice ou à leur
fureur, ne leur permirent pas d'adopter l'habillement
des péruviens. Ils demandèrent à l'Europe
tout ce qu elle pofiédoit de plus fini , de plus magnifique
en toiles 8c en étoffes. Avec le temps,
les tréfors qu on avoit d’abord pillés s'épuisèrent j
& il ne lut plus poffible d'en obtenir de nouveaux
qu en faifant de grandes avances, & en fe
m'rant a des travaux d'une utilité douteufe. Alors
lés profufions diminuèrent. Les anciennes fabriques
de coton , que loppreffion avoit réduites à
preique rien , reprirent quelque vigueur. Il s'en
eieva d un autre genre, & leur nombre a augmenté
fu.cefllvement.
Avec la laine de vigogne, on fabrique , dans
plufieurs provinces, des bas, des mouchoirs, des
écharpés. Cette *.ine,. mêlée avec la laine extrêmement
dégénérée des moutons venus d'Europe,
fert a faire des tapis & des draps paffables- Cette
dernière feule eft convertie en lerges & en d'autres
étoffés groflières.
Les manufa&Lires de luxe font établies à Are-
quipa , à Cufco & à Lima. De ces trois grandes
villes partent tous les bijoux & tous les diamans,
toute la vaiffelle des oarticuliers & toute l'argenterie
des eglifes.. Ces ouvrages, font groflière-
ment travailles 8c mêlés de beaucoup de cuivre,
On ne retrouve guère plus de goût & de perfection
dans les galons , dans les broderies ,
dans les dentelles qui fartent des mêmes atte-
Jiçrs.
D autres- mains s'exercent à dorer les cuirs ;
faire- avec du bois & de l’ivoire des morceaux d<
jnarqueterié & de fcu-lpture, à tracer quelque
figures fur des marbres trouvés depuis peu ;
Cuenca , ou- fur des toiles de lin venues di
l'ancien- hémifphère. Ces productions d'un ar
imparfait fervent à la décoration desmaifons, dé
palais, des temples. Le deffin.n'en, eft pas abfo
Jument mauvais; mars les couleurs manquent d\
vérité & ne font pas durables. Cette induftri«
appartient preiqu'exclufivement aux indiens fixé.
? C u fc o , & moins opprimés, moins abrutis fu
ce théâtre de leur première gloire que dans tou
1#- rçffç»
■ Mines du Pérou,
On trouve dans te pays des incas > des mines
de cuivre, d’étain, de foufre, de bitume, qui
font généralement négligées. L'extrême befoin a
procuré quelque attention à celles de fel. On y
taille ce fofllle en. pierres proportionnées à la
force des lamas & des pacos deftinés à les dif-
tribuer dans toutes les provinces de l'Empire éloignées
de l’océan. C e fel eft de couleur violette
& a des veines comme le jafpe. Il n'eft vendu,
ni au poids, ni à la mefure , mais en pierres ,
dont le volume eft à-peu-près égal.
Une nouvelle matière a été découverte depuis
peu dans ces régions : g eft la platine, ainfi app
e l^ du mot efpagnol plata, dont on a fait le
diminutif plaûna ou petit argent.
Aujourd'hui que ceux qui gouvernent les nations
ont des moyens faciles pour s'éclairer en con-
fuitant les académies , on ne peut douter que le
gouvernement efpagnol ne s'empreffe de tirer parti
de la platine, dont il paroît jufqu'ici qu'il eft le
feul polfelFeur , & dont il peut faire un ufage utile
pour fa nation 8c pour la fociété toute entière.
Hors une feule, la nature n'a point formé de
mines d'or 8c d'argent dans ce qu'on appelle
les vallées du Pérou. Les groîFes ma (Fes de ces
précieux métaux qui s'y rencontrent quelquefois,
y ont été tranfportées par des embrafemens fouv
terreins, des volcans , des tremblement de terre ;
par des révolutions que T Amérique a efifuyées,
effuie encore tous les jours. Ces maffes détachées
s'offrent auffi de temps en temps ailleurs. Vers
l'an 1750 , . on trouva, non loin de la ville de la
Paz , un. morceau d’or qui pefoit quatre-vingt-
dix marcs, C'étoit un cqmpofé de fix différentes
efpèces de ce précieux métal, depuis dix - huit
jufqu'à vingt - trois karats & demi. On ne voit
que peu de mines, & de bas ^ alor, dans les
monticules voifins delà mer. C'eft feulement dans
les lieux très-froids & très-élevés qu'elles font
riches & multipliées.
Sans avoir des monnoies, les péruviens con-
noiffoient l'emploi de l'or & de l'argent qu'ils
réduifoient en bijoux , ou même en vafes. Les
torrens & les rivières leur fourniffoient le premier
de ces métaux : maispour fe procurer le fécond,
il fafloit plus de travail 8c plus d'induit rie. Le
plus fonvent on ouvroit la terre , mais jamais II
profondément que l'es travailleurs ne puffent jetter
eux-mêmes le- minerai fur les bords de la fo ffe
qu’ils ay oient creufée, ou' dü. moins l’y faire arriver
en le tranfmett.int de main en main. Quelquefois
auffi l’on perçoit, le flanc des montagnes ,
& l’on fuivoit, dans un efpnce toujours très-peu
étendu , les différentes veines que la fortune pou-
voit offrir. C'étoit par. lé moyen du. feu qu'é-
toient fondus les deux métaux, qu’ils étoient dégagés
des matières étrangères qui s'y trouvoient
mêlées. Des fourneaux , où un courant d'air rem-
plilfoit la fonction du fouffiet, entièrement inconnu
dans ces régions, fervoient à cette operation
difficile.
P o rco , peu éloignée du lieu on un des lieute-
nans de Pizarre fonda , en 15-59, la ville de la
Plata, Porco étoit, de toutes les mines que les
incas faifoîent travailler la plus abondante 8c la
plus connue. Ce fut auffi la première que les
efpagnols exploitèrent après la conquête. Une
infinité d'autres ne tardèrent pas à fûivre.
Tou tes, fans exception , toutes fe trouvèrent
d ’une exploitation très-difpendieufe. La nature
les a placées dans des contrées privées' d’eau,
de bois , de vivres, de tous les foùtiéns' de la
v ie , qu'il faut fa:rê arriver avec dé grandes difficultés
à travers des déferts immenfes. Ces difficultés
ont été furmontées, le font encore , avec
plus ou moins de fuccès.
Plufieurs mines qui eurent de la’ réputation ont
été abandonnées fucceffivément. Leur produit,
quoiqu'égal à celui des premiers temps, né fuf-
fifoit plus pour foutenir les dépenfes qu'il falloit
faire pour l'obtenir. Cette réyolution eft réfervée
à beaucoup d'autres.
On a été forcé de renoncer à dés mines qui
avoient donné de fauffes efpérances. De ce nombre
a été celle d’Ucantaya, découverte en 1703,
foixante lieues au fud-eft de Cufco. C e n'étoit
qu'une croûte d'argent prefque maffif, qui’ rendit
d'abord beaucoup , mais qui fut bientôt
épuifée.
Des mines très-riches ont été négligées, parce
que les eaux s'en étoient emparées. La difpofition
du terrein q u i, du fommet des cordelieres , va
toujours en pente jufqu'.à la mer S u d , a du rendre
ces événeme.ns plus communs au Pérou qu'ail-
leurs. Le mal s'eft trouvé quelquefois fans remède
j d'autres fois on l'a réparé; le plus fou-
vent il s'eft perpétué, faute de moyens d'aélivité
ou d’intelligence.
On s'attacha d'abord de préférence aux mines
d'or. Les gens fages ne tardèrent pas à fe décider
pour celles d'argent , généralement plus
fuivies, plus égales, & par conféquent moins:
trompeufes. Plufieurs des premières.font cependant
encore exploitées. Des fuccès aftez fnivis
font regarder celles de Lutixaca, d'Araca, de
Suches, de Curacaua, de Fipoani, de Cacha-
camba , comme les plus, riches.
Entre celles, d’argent q u i, de nos jours, ont
le plus de réputation, il faut placer celle de
Huantajaha, exploitée depuis quarante à cinquante
ans, à deux lieues de la mer, près de la rade
d Iqueyque. En creufant cinq ou fix pieds dans
la plaine , on trouve fouvent des rnaffès détachées
qu'on ne prendroit d'abord que' pour un
mélangé confus de gravier & de fable , 8c qui à
l'épreuve rendent en argent les deux tiers de leur
pefanteur. Quelquefois il' y en a d'e fi pondérables
, qu’en 174.9 on en envoya deux à la cour
d'Efpagne , l'une de cent foixante-quinze livres,
8c l’autre de trois cent!: foixante - quinze. Danà
les montagnes, le métal eft en filon 8c de deux
efpèces. Celle- que dans la contrée on nommé
bana , fe coupe comme le r o c , 8c prend la
route de Lima , où elle eft «r xvaillée-. Elle donne
le plus fouvent une , deux , trois , quatre ~8c jufqu'à
cinq parties d'argent pour une de pierre-.
L'autre eft purifiée par le moyen du feu dans le
pays même. Si cinq de ces quintaux ne produi-
fent pas un marc d’argent, elle eft jetyée dans
les décombres. C e mépris vient de l'exceffive
cherté des vivres , de l’obligation de tirer J’eau
potable de quatorze lieues, de la néceffite d'aller
moudre le minerai à une diftance très-confidé-
rable. , . . -
A trente lieues nord-eft d'Arequipa, eft Cayl-
loma. Ses mines furent découvertes très-anciennement
; on ne celTa jamais de les exploiter , &
leur abondance eft toujours la même.-
Celles du Potofi furent trouvées en Un
Indien, nommé Hùalpa, qui pourfuivoit des
chevreuils, faifit, dit-on , pour efcalader des rocs
efearpés, un arbriffeau dont les racines fe détachèrent
8c laifsèrent appercevoit un lingot d'argent.
C e péruvien s’en fervit .pour fes ufages, &
ne manqua pas de retourner à fon tréfor toutes
les fois que fes befoins ou fes défirs l'en follici-
toîent. Le changement arrivé dajis fa fortune fut
remarqué par fon concitoyen Guanca, auquel il
avoua fon fecret. Les deux amis ne furent pas
jouir de leur bonheur. Il fe brouillèrent ; & 1 in-
diferet confident découvrit tout à fon maître
Villaroel, efpagnol établi dans le vôîfinage.
Cette çonnôiffance échauffa rapidement les ef-
pritSe Plufieurs mines furent' auffi tôt ouvertes dans
une montagne qui a la forme d un cône , une
lieue de circonférence, cinq à fix cents toi fes
d’élévation, 8c la" couleur d'un rouge < « :ur.
Avec le temps, une montagne moins conüdéra-
bîê 8c qui fort de la première, fut également &
auffi heureufement fouillée. Les tréfors qu on ti-
roit de Tune & de l'autre furent l'origine d'une
des plus grandes & des plus opulentes cités du
Nouveau-Monde. a .
Dans aucune contrée du globe, la nature n'offrit
jamais à l'avidité humaine d'auffi riches mines
que cel es du Potofi. Indépendamment de ce qui
ne. fut pas enregiftré & qui s'écoula en fraude,
le quint du gouvernement , depuis 1545' jufqu'en
• 1 , monta à 36,470,000 liv. chaque année.
Mais cette prodigieufe abondance de métaux ne
tarda pas à diminuer. Depuis 1 564 jufqu'en 1585 ,
le quint annuel ne fut que de 15,187,489 liv.
4 f. Depuis 1585 jufquen 1^624, de 1^2,149,994
liv. 12 f. Depuis 1624 jufqu'en 1633 , de 6,074,
• 997 liv. 6 f. Depuis cette dernière époque , Je
produit de ces îjnines a fi fenfiblement diminue ,