
du furabondant qu'on exporteroit en Europe;,!!
le commerce étoit libre > celui de fes agens,
tend à mettre des bornes à la production naturelle
de tous les objets dont ils trafiquent , de
ce quielt deftiné pour laconfommation intérieure,
aufli bien que de ce qui ell deltiné pour l'exportation
j à dégrader la culture de tout le
pays & à le dépeupler : il tend à réduire la
quantité de toutes fortes de produit, même celle
des chofes nécelfaires à la vie , s'il plaît aux
commis d'en faire commerce > il tend à la réduire
à ce qu'ils peuvent en acheter, & à ;ce
qu'ils comptent en vendre avec les bénéfices qu'ils
veulent en tirer.
Par la nature de leur fituation, les .commis
doivent être aufli plus difpofés à .foutenir, avec
une févérité rigouréufe, leur propre intérêt contre
celui du pays qu'ils gouvernent, que leurs
maîtres ne peuvent l'être à foutenir les leurs. Le
pays appartient à leurs* maîtres, & des maîtres
ne peuvent guère s’empêcher d’avoir quçlqu'égard
à l’intérêt de ce qui leur appartient. Mais il n'appartient
pas aux commis. L'intérêt réel de leurs
maîtres, s’ils étoient capables de l'entendre, eft
le même que celui du p a y s & c'eft feulement
par ignorance & par la baffefle des préjugés mer-
cantilles qu'ils viennent à l'opprimer. Mais l’intérêt
réel des commis n’ eft point du tout le même
que celui du pays, & quand ils feroient parfaitement
inftruits, ils n’ en feroient pas moins oppref-
ïeurs. Aufli les réglemens d'Europe, quoique
fouvent foibles j ont été en général diCtés par
de bonnes intentions. Il a paru quelquefois plus
d’intelligence, & peut être moins de bonne volonté
, dans ceux qu’ont établi lés commis.
C ’eft un gouvernement bien fingulier que celui
où il tarde à chaque membre de l’adminiftration
de quitter le pays, & de n’avoir plus rien à faire
avec le gouvernement, 8c où chaque membre,
du moment qu'il en eft dehors avec toute fa
fortune, devient aufli indifférent à- tout ce qui
s’y pafle, que fi le pays avoit été englouti par
un tremblement de terre.
Nous blâmons ici le fyftême du gouvernement,,
la fituation des employés , & non -leur caractère.
Ils ont agi félon la dire&ion naturelle de. leur pofi,-
tion , & ceux qui ont crié le plus haut n’auroient
peut-être pas mieux fait qu’eux. Dans la, guerre
& les négociations, les confeils, de Madras. 8c
de Calcuta fe font conduits enplufieurs occafions
avec une fermeté & une fagefle qui auroient fait
honneur au fénat de Rome dans le s , plus beaux
temps de la république. Cependant le?,membres
de ces confeils ont été élevés dans des profef-
fîons bien différentes de celles de la guerre &
de la politique. Leur pofition feule, fans éducation
, fans expérience, ou même fans exemple,
femble avoir formé tout-à-coup en eux les grandes
Qualités qu'elle exigeoit, & leur avoir irifpiré
les talens 8c les vertus, dont le germe leur etoit
caché à eux - mêmes. Si donc elle les a élevée »
dans certaines occafions*. à des aérions -de magnanimité
qu’ôn ne pouvoit guère en attendre ,
il ne faut pas s’étonner que , dans d’autres, elle
les airpouffés à des exploits d'une nature ün peu
différente.
Ces fortes de compagnies font préjudiciables à
tous égards. Elles nuifent plus ou moins aux pays
où elles font établies, & l'ont deftruérives pour
ceux qui ont le malheur de tomber fous leur gouvernement.
La nation angloife s’appropriera tôt ou tard les
pofleflions territoriales de’la‘compagnie : il eft fur
qu'alors les peuples de l'Inde feront mieux gou-
verrnés, & que la Grande-Bretagne tirera plut
de fruit de fes domaines afiatiques.
Si on examine, en effet, l'état aétuel de la
compagnie angloife-, on fera étonné du peu de
bénéfices, de fes immenfes domaines.
Les calculs fur la population .de ces domaines
varient, & nous n'avons pu nous former encore
un réfultat fixe. On l’ évalue à i 5 & 10 millions *
& dans des pamphlets ©u des difçours prononcés
au parlement , on l’a porté quelquefois à trente
millions : cette dernière quantité eft fans douté
exagérée , • lors même qu’on y comprendroit
la population de la nababie d'Arcate , du pays
dé Tanjaour, de la nababie d’Oude, & de toutes
les contrées de l’Inde où les anglois dominent par
leurs troupes ou par leur influence. Son gouvernement
eft vexatoire & tyrannique : il a jufqu’içi
impofé des tributs trop confidérables, fans fe
fouvenir qu’avec ce fyftême on augmente le pro^
duit de l’année aétuelle pour diminuer celui de
l’année fuivante : mais les guerres font utiles aux
employés & à l’adminiftration qui fe trouve dans
l’Inde : il -e-ft de leur intérêt d’exciter des troubles
, des révoltes, des révolutions & des dé-
trôrnemens ; & ces opérations funeftes & odieux
fes à tant d’autres égards , font funeftes au tréfor
de la • compagnie.
La compagnie des Indes fit remettre en 1786
l’état fuivanç fur le bureau de là chanibre des
communes.
L ’ état de la dette de la compagnie des Indes
orientales, pour laquelle cette compagnie a pris
des engagemens aux préfidences refpeérives du
fort William, du fort Saint-George de Bombay,
Le voici :
Au fort William, /e 30 juin 178 5.
Principal dé la dette en
roupies çoqrantes . , . 16,150,02$
Intérêt d’icçîui jufqu'à
ce jou r . , , . v. • . , . . 976,1 £8
Roupies, courantes va- -------— -----
larit 3 d . . . . . .
Au
M A D
jDe tautrepart.. . .
Au fort Saint- George, U
30 décembre 1784.
tuatïon de la province de Bengale, d’après les
documens les plus authentiques.
Ses revenus s’élevoient à . . . 5*450,000 liv*
Ses dépenfes annuelles à . . * 4,300,000
Principal en pagodes. . .
Intérêt............................
La pagode valant environ
0 shellings..................
A Bombay y le premier
novembre 1784.
Principal & intérêts en
roupies valant 2 f. 6 d.
M 7 7*9<>9 76,742
1,454,702 font 581,882
21,211,158 2,651,395
T o t a l . . . . . . ................... 5>T 19*991
Nous ne dirons pas avec le parti de l’oppo-
fition que les revenus de la compagnie , loin d'excéder
fa dépenfe, étoient infuffifans i & qu’au
lieu d’avoir, ainfi qu’elle l’avoit fait efpérer, un
furplus d'un million fterling pour payer fa dette ,
alors de 9,000*000 liv. fterling, il fe trouvoit
dans fa balance un déficit de plus d’un million.
M . Haftings aflure que le revenu des pofleflions
territoriales de la compagnie, eft d’environ fix millions
fterling.
M . Smith , l’ un des directeurs de cette
Compagnie , donna des détails très - circonftan-
ciés fur la fituation des affaires de la compagnie.
Il dit que le produit de fes ventesVétoit élevé
en 1784 à 3,300,000 liv. fterling qu'il avoit
tout lieu de préfumer que le produit moyen de
plufieurs ventes confécutives ne tomberoit jamais
au-deflous de cette proportion > que la compagnie,,
loin de fe trouver dans une fituation aé-
faftreufe en Angleterre, feroit non-feulement en
état d’acquitter, fans délai, les arrérages dus à la
douane depuis le mois de Septembre , & qui fe
montoient à 600,000 l iv ., mais aufli d’acquitter
les arrérages précédens, évalués à 500,000 liv.
Il dit que la préfidence de Bombay avoit be-
foin alors d’un fecours annuel de 140,000 liv. }
car il s'en falloit de cette fomme que fes revenus
fufîent proportionnés à fes dépenfes > que fi de
plus on faifoit entrer en ligne de compte l’intérêt
de fes dettes & les-arrérages dûs à l'armée
du fud, le déficit de fes revenus fe monteroit en
tout à 380,000 liv. Les revenus du fort Saint-
George, y -conaprife ■ la fomme payée annuellement
par le nabab d'Arcate , s’élevoient à un
million. Cette fomme fuffifoit à cet établifle-
ment, non-feulement pour faire face à fes dépenfes
, mais aufli pour payer l’intérêt d'une dette
de. 400,000 liv. Cette préfidence n’avoit donc
befoin d’aucun fecours. Il peignit enfuite la fi-
(Scon. polit| & diplomatique. Tom. I I I .
Surplus 1,150,000
Mais il ajouta qu'il falloit fouftraire de* cette
dernière fomme l’intérêt de la dette fondée du
Bengale & le montant des fecours pécuniaires que
cet établiffement fournifloit tous les ans à celui
de Bombay. Ces deux objets réduifoient le fur-
plus à environ 530,000 livres, lefquelles étoient
employées à l'achat des cargaifons de retour. II
fit mention des diverfes économies projettees a
l’égard du Bengale. La cour des directeurs avoit
envoyé des ordres pofîtifs, par l'effet desquelles
les dépenfes de l'adminifcration civile feroient diminuées
de 27 lacques,o£ celles dés autres de-
partemens de 25 lacques de roupies. Ces depenfes
de l’établiflement militaire dévoient également fubir
une réduction évaluée à 90,000 kv. Tous ces
objets ajoutés au furplus énoncé ci-defîus , for-
moient un total de 1,300,000 liv.
Ainfi, félon les hommes les plus portés a exa-
ge'rer la valeur des domaines de la compagnie,
i’établiflement de Bombay coûtoit quelque chofe
en .1785 5 celui de Madrafs ne' rapportoit rien ,
& les revenus de celui du Bengale étoient aflez
modiques.
M . Dundas a donné à la chambre des communes
, au mois de mai 1787 , un état des dettes
& des revenus de la compagnie des Indes dans
le Bengale , qui annonce une. fituation favorable
5 mais quoique ce miniftre ait voté , ainfi que
M. P i t t , pour î’accufation de M . Haftings , on
eft perfuadé qu’ils le trouvent peu coupable, &
que ne craignant pas de le voir condamné, ils
ont voulu effrayer par un grand exemple, &
fuivre ici l’oppofition : d’après ce ftratagème ,
il paroît qu’après s’ être déclarés en apparence
contre l'ancien gouverneur du Bengale, ils ont
voulu le fervir d’une manière décifive j & en
offrant au public la profpérité de la compagnie
au Bengale, montrer les importans fervices de
M. Haftings , & faire tomber fon procès à la
chambre des pairs. Il y a lieu de croire qu’ on n’a
communiqué des dépêches du lord Cornwalis ;
que la partie favorable a ce plan, & qu’on ne
dit rien des dettes 8c des revenus des établifle-
mens dé Bombay & de Madrafs , fournis au gouvernement
de M. Haftings , & dont la pofition
n’ eft pas aufli heureufe : quoi qu’il en foit ,
M. Dundas a dit au parlement, au mois de mai
^ 8 7 ;
ce Les dettes de la compagnie des Indes dans
» le Bengale , montent en tout à 9 millions fterl.
» fur lefqueis il fe trouve un million de dédu^
C c