
dans la fuite : elle retourna en 7 jo fous la
domination des rois' des- Afturies , & retomba
en 7)9 fous celle des barbares* Les frah-
çois la leur enlevèrent en 778. Les infidèles s’en
remirent en pofieffion,. 8c la perdirent pour toujours
en 8d6. Cette place repaffa la même année
fous la puiffance des françois, fes derniers maîtres
chrétiens. En 831 une partie de la Navarre fe-
coua le joug ; mais une famille particulière y régna
depuis le rqilieu du neuvième fiècle.
Ignigo-Arifta eft le premier qui ait régné dans
la haute-Navarre 3 •&* fes dèfcendans occupèrent
ce trône jufqu’ en 1234. En 1316 Jeanne , en
qualité de fille mineure île Louis Butin , devint
héritière de ce royaume qu’ elle apporta à' fon \
mari Philippe, comte d'Evrêux. En 1 5 îz , Fer- I
dinand l’enleva à Jean Sire d’AIbret , . qui
en étoit ro i, du chef =de Catherine de Foix fa
femme, dernière héritière de. Charles , comte
d’Evrêux. Le pape le féconda dans cette entre--
prife , & leur prétexte fut que ce prince, étpit
allié de Louis X II , fauteur du concile de Pife.
Louis XII fecourut Jean. d’ AIbret 5 mais l-aéti--
vite du duc d’Albe fendit cette éntreprife inutile
, & força le roi de Navarre & la PalifTe à
lever le fiège de Pampelune. Catherine de poix
difoit au roi fon mari , après la perte de ce royaume
: ce Dom Jean, fi- nous fuffiôns nés , 'vous
» Catherine, 8c moi Jean , nous-n’aurions jamais
» perdu la Navarre ?ô.
La baffe-A^ViîrreeiV, comme nous l’avons dit, une
des mérindades ou bhilliagesf 3 dont le royaume entier
de Navarre eft çompofé. Elle éft féparée de la
Navarre efpagnolépar les Pyrénées. C e pays fut'oc-
cupé jadis par les vafeonSou gafeons, lorfqu’ ils paf-
fèrent les monts pour s’établir dans la Noyempopu-
lanie fur la fin du fixième fiècle : àuffi tous fes habi-
tans font-ils bafques , 8c parlent- ilsda langue qui eft
la même que celle des bifcàyens efpagnols..
. Tout ce que Jean d’AIbret 8c Catherine, reine
de Navarre fa-femme , purent recouvrer des états
que Ferdinand, roi d’Arragon & de Caftille ,
leur enleva en 1511 , fe réduifit à la baffe-Navarre
, qui n’a que huit lieues de long fur cinq de
large. On lui donne pourtant le nom de royaum
e , & les rois de France ajoutent ce titre au
le u r , d’après un "iifagë qui femble bien au defïous
de leur grandeur. Voye[ les articles E s p a g n e . 8c
F r a n c e .
N A V IG A T IO N : l’art ou l’aétion de naviguer,
c*eft-à*dire , de conduire, un navire d’un lieu à
un autre par le chemin le plus fu r , le plus court
te le plus commode. Nous n’ envifagerons ici ce
mot que fous fes rapports avec là politique 5 fes
autres rapports appartiennent au dictionnaire de
la Marine;
La navigation offre trois avantages politiques :
i ° . l ’occupation qu’elle donne aux gens de mer , ]
dont elle eft la meilleure pépinière ; 2Q. la conf- !
truétion des navires , qu’il faut conjîdérer comme
une fabrique 3 & 30. l’utilité qu’ elle procure au
commerce par le tranfport des denrées & des manufactures
, tranfport qui , outre la commodité,'
; devient lucratif au peuple: qui le fait. Ces trois objets
méritent d’être développés plus clairement.
Un pays bien peuplé , dont les provinces font
fituées le long de la mer 3 qui a des côtes d’ une
grande étendue , où les habitans nailfent avec du
. goût pour la vie maritime, peut employer à la
navigation un fort grand nombre d’hommes , qui
tous gagnent beaucoup plus à ce métier qu’ils
n’auroient fait en travaillant fur terre , ou en
s appliquant à une profeffion commune. O r , comme
les gens de mer vivent prefque toujours à
bord de leurs vaiffeaux , où ils ne fauroient faire
de grandes _dépenfes , ils rapportent dans leur
patrie, au fein de leur famille , l’ épargne qu’ ils
ont pu faire fur leurs gages, ou le profit d’ un
. petit trafic. C et argent eft un bénéfice pour l’état
, 8c il augmentera maffe de fes richenes. Il eft
impoffible d’avoir une grande marine militaire ,
| fans qne grande marine marchande ; & Ladminif-
tration angloifé a bien fenti la vérité de ce principe
: elle vient de s’occuper de la pêche du hareng
, afin que la multiplication de fes navires
marchands & de fes matelots ajoute à la force de
fes efeadres ; & la Rufiie -3 qui depuis le czar
Pierre a entrepris tant de chofes fans avoir les
moyens préliminaires, arme des vaïffeaiîx de guerre
dans fes rades : mais elle n’aura jamais une marine
redoutable, tant, qu’ elle n’aura pas une marine
marchande plus étendue.
«L’utilité que le commerce tire de la navigation.
par le tranfport des naarchaiïdifes, n’eft pas moins
fenfible. Lorfqu’un état n’a pas une marine marchande,
les négocians font dans la nécëfiité d’attendre
l’arrivée .des-navires étrangers, dont on
n’eft jamais le" maître.- Les marchandifes qu’on
veut envoyer' au-dehprs, 8c celles qu’on fait ve-
nir de letranger, reftent long-tems dans lès ma-
gafins, s’y gâtent ou y reçoivent du dommage ,
confument des intérêts, 8c i’occafion , -je moment
du débit fe perd quelquefois fans refiourçe.
Mais ce n’eft pas tout encore ; la- navigation eft
utile fous un autre point de vue ; car Jes frais de
tranfport faifant toujours partie de la valeur d’une
marchandife , il eft clair que les confommateurs
étrangers de toutes. les marchandifes exportées
font obligés; de payer les frais de la navigation
qu’ont fait nos fujets. Enfuite la valeur des marchandifes
importées fur nos propres vaifieaux diminue
, dans la balance générale du commerce ,
de tout ce qu’a coûté le fret. Dans un pays qui
fait un grand commerce', il eft difficile dé calculer
ce double avantage..
De ces principes inc-unteftables éft refaite fine
maxime politique : tout état qui éft à portée d’avoir
une navigation 3 doit y encourager -fes .fujets
par tous les moyens poffibles 5 car un peuple qui
laiffe faire par d’ autres une navigation qu il pout-
roir entreprendre lui-même, diminué fes forces
réelles & relatives en faveur des nations rivales.
La navigation fur les fleuves 8c rivières em-
braffe les mêmes objets que la navigation rira ri-
rime , 8c eft aufii utile au commerce. Les nations
q«i entendent bien leurs intérêts , cherchent à
encourager cette navigation [ut les rivières qui
traverfent leur pays par toutes fortes' de facilités
, 8c par une liberté raifonnable ; cejles qui
les entendent mal, croient parvenir au même but
par la gêne & par de petites chicanes. Il eft affez
rare , dans, notre continent, que les deux bords
d’ün fleuve, depuis fa fource jufqu’ à fon embouchure,
appartiennent au même état; au contraire
, les plus grands de c.es fleuves, comme
le Rfiin , l’Elbe > & c . traverfent piufieurs
pays , avant de porter leurs eaux à la mer. C ’ eft
ce qui a donné lieu à beaucoup de c'onteftations
entr& les puiffances pour les limites du domaine
& de la propriété de ces- fleuves , que chacune
a tâché, d’étendre à fon avantage. Le droit uni- !
verfel des, gens, fondé fur les principes les plus
clairs du droit naturel , a décidé i ° . qu’une rivière
,: entant que rivière , appartient au peuple
dont elle arrofe les terres : z° . que cette pro- •
priété s’étend auflî loin que les limites de chaque ■
fouverain dont elle traverfe le pays ; 8c 30. que-
fi les deux rives oppofées ne font pas fous, la même
domination, le milieu de la rivière fervira de limite,
enforte que le domaine de chaque moitié
appartiendra au fouverain qui eft le maître du
bord. j „ : •'> '
Cette difpofition équitable du droit des gens,
auquel tous les fouverains ont acquiefcé, a donné
Jieu à des établifiemens fages 8c à diverfes méprises.
Chaque nation a tâché de rendre [fes
rivières navigables. On a fait des efforts pour
les déblayer, pour enlever le s (bancs de fable ; ‘
on a marqué les écueils, dre fie des fanaux, &
encouragé la conftruétion dés navires , bâteaux ,
& c . Mais on a cherché en même-tems à rendre
cette navigation profitable aux fouverains , qui
tous ont voulu établir fur les bords des fleuves,
des péages , où les bateliers-font obligés de payer
de certains droits, tant pour leurs bâtimens que
pour les marchandifes qu’ils tranfportent. Cet
ufage eft fufceptible de bien des critiques. Premièrement
, fi on ne fe laiffe pas dominer par:des
fyftêmes trop généraux, on ne fauroit condamner
îndiftin&ement tous les péages. C ’eft une ef
pèce de droit de douane ou détaxé que l’ on im-
pofe furies marchandifes d’entrée ,.taxe qui peut
diminuer les autres charges qu’on feroit. obligé
de mettre fur le peuple fans ce fecours ; mais qui
porte aufii fur les marchandifes de tranfic, lef-
quelles ne font que pafier Amplement par notre
pays, où elles ne font ni achetées ni vendues ,
8c par conféqueht c’eft uiie contribution qui eft
payée par les etrangers8c qui diminue les cha^:-
ges de nos fujets eh même-tems qu’elle augmente
nos richeffes. Mais on a beaucoup abufé de ce
moyen : on a porté trop, haut le tarif de ces
péages, & on les a trop multipliés. L ’accroiffe-
ment de ces droits renchérit les marchandifes
d’entrée 3 8c par conféquent les chofes néceffai-
res à la fubfifrance des citoyen^ :* il renchérit la
main-d’oeuvre 8c nuit au :bon 1 marché de nos
manufactures. Il nuit encore au commerce de
réexportation, parce que d’autres peuples ne tirent
plus de nous des marchandifes que nous avons
fi fort renchéries. Enfin il fait un tort irréparable
au commerce d’ entrepôt 8c de tranfit , parce
que les négocians étrangers, qui afferviffent tout
au calcul, cherchent & trouvent bientôt d’autres
routes pour l’envoi de jeurs marchandifes »
dès que' nous rendons la nôtre trop difpendieufe.
On pourroit donner des exemples bien frappans
de cette affertion, & faire voir que l’ ignorance
de quelques financiers fur cet objet a caufé plus
d’une fois la perte du bénéfice que les navigateurs
de leur pays auroient pu faire fur le tranfport
des marchandifes étrangères , &r d’une branche
fort lucrative de: commerce. C ’eft donc une
règle générale que fi la détrefie du fife ne permet
pas d’abolir les droits de péage , il faut fe
garder de les hauffer fur les rivières 3 au point
que le’négociant étranger puiffe faire voiturer au
même prix, ou envoyer par mer, en faifant un
grand détour : voici une autre règle conftatée
par l’expérience : la nation qui fuppnmeroit tous
les péages , y gaeneroit beaucoup après quelques
arinées i; 8c il eft temps d’abolir tous ces péages
particuliers ,’ injuftes ou mal- fondés, qui appartiennent
à des particuliers : ils gênent le commerce
8c rinduftne ; 8c quand ils feroient juftes ,
la profpérité générale exigeroit ce facrsfice ou
l’échange de la propriété de quelques individus.
Secondement, fi nous fournies les maîtres d’une
rivière depuis fa fource jüfqu’à fon embouchure ,
quelle eft la néceffité de multiplier lés péages , 8c
d’en établir de diftance en diftance? Rien ne caufé
plus de gênes inutiles à la navigation, rien n’arrête
fi mal-à-propos le tranfport des marchandifes
, qui doit être très-prompt. Les batteliers
font mécontens 8c avec raifon , lorfqu’ils font
obligés , à chaque moment, d’interrompre leur
marche pour compter avec des douaniers, & faire
vifiter leurs navires. Pourquoi ne fait-on pas payer
au premier péage , à un péage unique, à l’ entrée
du pays, tous les droits dont on veut charger la
navigation ? Pourquoi faut-il tant de fois revenir
à la charge ? Pourquoi les denrées & marchandifes
confommées par nos fujets domiciliés proche
l’embouchure d’une rivière, doivent-.elles
payer moins que celles qui font confommées par
nos fujets qui demeurent près de la fource, ou
dans la capitale ? Il faut que dix péages rendent
annuellement la même fomme que deux péages
pouiroient rendre.