
raineté de la province & l'indépendance des régens
3 qui partagent , avec' le ftadhouder, toutes
les partions & les. foiblefies attachées à l'humanité
».
« Les mêmes .membres , de l’ordre-équeftre ,
en appellent pour appuyer leur fentiment à i'ex-
perience depuis 17 4 7 , jufqu'à nos jours : mais
quels que foient les-argumens qu'ils croient pouvoir
en tirer en faveur , du ftadhoudérat en: général,
jamais il n'en réfultera que cette Utilité
pour notre province j fe fonde fur le réglement
fuf-mentionné, & qu’elle n'auroit pas e'té encore
plus grande en s'appuyant fur un réglement; plus
modéré & plus convenable à une république libre-.
Depuis 1747 jufqu'à la dernière guerre anglojfe,
il n'avoit- encore exifté que peu de cas, dans
lefquels tout, ce que ce réglement a de pernicieux
pût fe •manifêfter. Une longue paix 3 un
commerce afîez; florifiant , laifloient régens &
bourgeois dans une parfaite fécurite à l'égard des
progrès 3 par lefquels notre forme républicaine
dégénérait en un gouvernement abfolument & j
tout-à-fait dépendant du ftadhouder. Cependant s
les négocians^n'avoient pas effacé de leur fou-
venir les pertes immenfes que leur avoit fait
effuyer le défaut de protection pendant la guerre
maritime , qui dans l'intervalle avoit éclaté entre
-nos voifins. Ces pertes fraient trop préfenses à
leur • mémoire pour ne pas penfer 3 pendant
que nous étions attaqués nous-mêmes à des
moyens qui puflent diminuer la trop grande influence
du ftadhouder fur les régens 3 auxquels
ils dévoient attribuer en grande partie3 finon uniquement
tout ce qu'ils avoient fouffert, & rendre
ceux - ci indépendans , au point qu'ils puflent ,
fans autre intérêt qu'uniqaement celui du bien-
être de l'état & de la nation , prendre les me-
fures les plus vigoureufes contre un ennemi, qui
nous avoit opprimés de la manière la plus injufte ;
& que, fi des confeils pervers détournoient le
ftadhçuder de la pourfuite férieufe de la guerre,
ils puflent v oir ,. par leurs propres yeux, énoncer
leur propre fentiment, 8c non parler un langage
qui leur étoit diClé par autrui. L'influence fans
bornes, que de pareils réglemens donnoient au
ftadhouder, tant en Over-Iflel que dans les provinces
voifines, qui le rendoit prefque maître
abfolu des régens , qui y dirigeoit toutes les réfo-
lutions d’état à fon gré , qui les faifoit publier
à fon bon plaifir, — tette influence a
ouvert les yeux à tous les citoyens ; & dès
çe moment une revifîon de plufieurs évenemens
anciens , mais fur-tout celle d'un enchaînement
de faits récens, a conftaté l'expérience de l’ utilité
du réglement , ( à laquelle néanmoins ,
meffieurs de l'ordre équeftre en appellent) & l’a
établie fi fort en faveur de la pluralité des états,
qu’il feroit plus poffible de dire qu'il fait nuit
en peia midi, que de fouçenir encore à préfent |
qu*une fi gtande influence des feigneurs ftadhou-
ders fur le gouvernement du pays , fur-tout dans
des tems de trouble intérieur & d'une guerre
étrangère, n'eft pas évidemment permeieufe. pour
la patrie , & qu'elle n'ôte pas. tout -.à jjqfait à la
nation la confiance, q u i, fi jamais, certainement
dans des tems de perplexité publique , lui eft
fi tn.cb.fp e n-fab le me n t nécertaire à l'égard de fes
repréfentans , puifqu'elle doit foupçonner bientôt
( 8c plût au Ciel que ce n'enflent jamais été que
de fimples foupçons ! ) que ceux, à qui elle a
confié fes intérêts les plus chers , fuivent plutôt
l'impulfion toute puiflante, qui les. entraîne vers
les intérêts du difpenfateur exclufif de toutes les
grâces ou de ceux qui. en diipcfent fous fon.nom ,
qu'un mouvement libre & défintérefiépour voter
en confcience comme l'exigent les vrais.intérêts
de l'état ».
Cette proteftation d'une partie de l’ordre équef-
tre de la province d'Over-Iffel fe trouvoit à la
fuite d’une-réfolution des états de cette provincé ,
où , par un motif qu’on ne peut concevoir, ils
s'étoienr rapprochés du fyftême fiathoudérien.
Nous obferverons ici qu'une des caufes qui a
facilité & précipité la dernière révolution, c'eft
l'jnftabilité des vues 8c des ré fol lirions des provinces
de Groningue & d'Over-Iffel. D'une année
à l'autre, on les voyoit adhérer fortement
aux vues de la province de Hollande, & s'en
écarter. Les députés d’Over-Iffel à l'afifemblée dès
Etats-Généraux varioient auflî dans leurs opinions.
Cette variation étoit une fuite des intrigues fe-
crettes, ou des entreprifes 8c des violences du
parti fiathoudérien. Le conferl d'état qui, durant
l'été de 1787 , avoit entrepris d'effeétuer une
médiation , informa bientôt les états de Hollande
« que ceux deGueldreScd’Amersfoort avoient
réfuté d'entrér dans des conférences., à moins
que la Hollande ne retirât fes forces, qui cou-
vroientla ville d'Utrecht, ainfi que les ordres donnés
à cet égard au général van-Ryffej, ; mais qu'il
avoit répondu auxdits état?, pour- lès détourner
d'une pareille détermination : c'eft pourquoi il
prioit la Hollande de ne pas couper encore les
voies à des conférences amiables ». Les états
d’Over-Iffel & de .Groningue envoyèrent des députés
aux états de Gueldre 8c d'Amersfoort,
pour les engager à fe défifter de leurs mefures
violentes : mais en vain, & les premiers déclarèrent
au député d'Over-Iffel que fa million leur
étoit défagréable. Les états d’Over-Jrtel réfolu-
rent : « i° , de mander pour le 12 juin leurs députés
à l’affemblé des Etats-Généraux, pour qu'ils
euflent à rendre compte de la conduite qu'ils
avoient ofé tenir , en concourant avec" les députés
de Gueldre, d’Utre cht, 8cc. aux résolutions
contre la Hollande , au mépris des
volontés connues & des intentions les plus ex-
preffes de leurs commettans : i ° . de faire également
rendre compte au ftathouder, en fa qualité,
de capitaine-général d'Over- Iffe l, du procédé
qu'il s'étoit permis, en faifant marcher, contre
le voeu qu'ils lui avoient fi éxprertement fait con-
noître, le régiment de van der Hoop, cavalerie ,
qui étoit à leur folde 8c à celle de la Hollande,
pour l'employer dans la province d'Utrecht : 30.
de faire également rendre compte au général van
der Hoop de la défobéiffance qu'il avoit commife
envers eux, en conduifant leurs troupes à l'attaque
d'une ville de la république , contre la dé-
fenfe la plus pofitive qu'ils lui en avoient faite ».
Il eft clair qu'à cette époque le parti patriotique
dominoit aux états, 8c qu'au moment où une
partie de l'ordre équeftre fit la proteftation inférée
plus hau t, les partifans du ftathouder firent
pencher la balance.
A-peu-près à la même époque, on répandit
dans toute la Hollande, 8c probablement' dans
le refte de la république , une efpèce de mani-
fefte du ftathouder, qui étoit à tous égards une
déclaration de guerre contre les états de iâ province
de Hollande & contre tous les citoyens ,
qui pouvoient refter fidèles--à cette affemblée fou-
veraine. Ceux qui * fàifoient parler lé ftathouder
dans cette pièce , ofoient dire que les états de
Hollande fe laifîoient gouverner par une cabale ,
8c c’étoit contre-cette cabale qu’ il invitoit tous
& chacun à l’aider 8c- à l'affilier. Il commençoit
par ces mots : « Nous, Guillaume V , par la grâce
de Dieu , prince d'Orange, &c. Il difoit que
L . N . & grandes puiffances avoient pris à fon
égard des réfolutions précipitées & illégales; qu'il
s'affure que ces réfolutions, relatives au commandement
de la garnîfon de la Haye 8c à fa fuf-
penfîon en qualité de capitaine-général de la province
de Hollande, feront retirées fur le champ
& préalablement à tout ; que L. N . & G. P. le
juftifieront & le laveront entièrement des calomnies
infâmes & des menfonges , dont on a flétri
fa réputation dans leur affemblée ; qu'elles le ré
tabliront dans la joui flan ce 8c l'exercice de toutes
fes prééminences légitimes 8c de fes droits ,* 8c
qu'ainfi elles le mettront à même, fans bleffer la
dignité due à fa haute naiffan.ee 8c à fes illuftres
relations, de retourner au plutôt dans leur province
, 8cc ».
On envoya dans le même temps à Amfterdam
une requête à figner, qui avoit les mêmes vues,
8c qui probablement fortoit de la même tnHîn que
le manifefte ; 8c il en réfulta parmi la populace
8c les matelots du Kattenbourg une émeute qui
coûta la vie à plufieurs perfonnes, 8c qui con-
duifitr à la potence quelques-uns des chefs. Il eft
fur aujourd'hui que la première origine de ces
excès a été la fîgnature d'une requête ou’ on avoit
dépofée en divers, lieux pour la faire fouferire ,
même par la plus vile populace, en faveur de
la caufe ftathoudérienne > 8c que les violences
qu'on fe permit dans l’an de ces endroits pour
contraindre les parta ns à figner , furent, pour
ainfi dire , le fignal du ravage,. On jetta dans le
canal un des citoyens qui refinfèrent de fouferire >
8c ce vacarme ayant attroupé beaucoup de monde
autour de la fna’ifon , ceux qui étoient dedans
firent une fortie à coups de couteaux 8c de fabres
fur -.leurs antagoniftes : le pillage s'enfuivit -, &
la fureur populaire ayant une fois franchi les
bornes , ne connut plus de' frein. Diverfes cîir-
conftances fônt croire que les mefures avoient été
prifes d’avance -pour opérer une révolution en
faveur du ftathouder au moyen d’un tumulte général,
dans lequel quelques-uns de fes partifans
feraient enveloppés. Du moins, dans le quartier
du Kattenbourg ,1a canaille n’ a pas agi fans chefs
plus relevés, Sc oïl en nomme plufieurs qui, dit-
on , c on cl 11 i firent les mutins. En effet, ceux-ci -ont
eu des refiburces inconnues ; 8c peu après que le
pont de leur quartier eut été fo r c é , on vit arriver
une chaloupe avec de là poudre au fervice de
leur artillerie : mais la bravoure de la milice bour-
geoife I’avoit déjà rendue maitrefte de ce pofte
important. Les féditieux du Kattenbourg eurent
une douzaine de tué s , 8c on en faifit quarante .
des plus coupables.
Les députés de Gueldre à l’aflemblée des Etats-
Généraux , 8c ceux des états d’ Utrëcht fiégeant
à Amersfobrt, de concert avec les députes de
Zélande 8c de Frife, firent'prendre bientôt dans
l'afifemblée de leurs hautes puiffances, au mépris
des proteftations les plus expreffes des provinces
de Hollande , d'Over-Iffel & de Groningue., 8c
contre l'avis du cohfeil d'état, une réfolution
qui achevoit de détruire tout moyen d'accommodement*:
ils caffèrent les-nominations que les
états de Hollande avoient faites parmi les officiers
de leurs propres troupes 3 iis défendirent aux ré-
gimens de la répartition fiqUandoife toute fou-
miffion aux ordres de leurs nobles 8c grandes
puiffances 5 ils leur enjoignirent de s'y oppofer
par force , 8c aux officiers démis de reprendre
leur commandement. Ainfi , en réclamant la conf-
titution de la république , ils la violoient ouvertement
; ils s'érigeoient en fouveràins fur le territoire
de la Hollande , 8c ils-ordonnoient la rébellion à
des militaires envers l'autorité fouveraine ,- à qui
ils étoient particuliérement liés par leur ferment
8c par leur folde. Les états de Hollande ré-
folurent le jour même d'enjoindre à leurs troupes
de ne refpeéter aucuns ordres , ni des Etats-
Généraux, ni du confeil d’état. De plus, il fut
mis en délibération de faire fortir du territoire
hollandois, 8c par conféquent de la H a y e , tous
les députés aux affemblées de la généralité , qui
r s'étoient déclarés ennemis de la province. Au
refte, ce n'etoit plus une guerre de débats, de
réfolutions, de remontrances 8c d’invectives aux
Etats- Généraux, dans les états des diverfes provinces
8c à la cour du.ftathouder : ce prince étoit
campé à Zeift avec une arme'e 5 la ville d’Utrecht