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général, avec tous les droits & prééminences qui
y font attachés , telles & fur le pied qu’ elles ont
été déférées dans leurs provinces refpeérives , &
prifes en pofïeffion , dans l’année 1766 , par le
préfent feigneur ftathouder-héréditaire, pour une
partie effentielle de leur conftitution & forme de
gouvernement y & qu’ ils fe les garanriffent réciproquement
par forme de confédération comme
une loi fondamentale de l’état , promettant de
ne point fouffrir que, dans une des provinces de
la confédération, l’on s’écarte jamais de cette loi
falutaire & indifpenfable pour le repos & la fureté
de l’état ». -
La réfolution des Etats - Généraux, en vertu
de laquelle cet aéte a été paffé 3 portoit : « qu’ il
en feroit drelfé deux expéditions en forme, dont
l’une feroit remife à fon alteffe, l’autre au con-
feil d’état de la république , pour être gardée
parmi les autres pièces authentiques qui concernent
l’union , & que de plus il feroit frappé une
médaille pour conferver , ainfï qu’il s’eft pratiqué
plufïeurs fois en des cas femblables, la mémoire '
de cet événement, vu qu’un pareil a été folemnel
eft du plus grand intérêt pour la république, &
doit fervir au raffermiffement de l’union ».
■ Nous n’examinerons pas en détail quelles feront
les fuites de cette révolution extraordinaire.
Nous nous permettrons feulement quelques quef-
tions, dont le temps donnera la réponfe.
i° . L ’aétede l’ union d’Utrecht eft imparfait &
vicieux dans prefque tous fes points , ainfi que
nous l’avons démontré, & ainfi que tout le monde
en convient ; il étoit abfolument néceflaire de
corriger ce paéle fédéral : on ne le corrigera point,
& quelles en feront les fuites.
2°. Les conftitutions , le régime politique &
l’adminiftration des diverfes provinces offrent des
imperfections & des défauts fans nombre. Il en
réfulte des abus crians, & une divifion affez ordinaire
entre les divers états : ces abus ne doivent
ils pas augmenter après ce qui vient dé fe-
paffer 3 & dans quelle proportion !
30. Les bornes de l’autorité du ftathouder n’ont
jamais été fixées d’une manière pfécife 5' fes par-
tifans lés plus zélés doivent avouer qu’ il l’avoit
étendue malgré les réglemens : les diverfes ré-
folutions qu’on a prifes relativement à ce pouvoir,
fur la fin des troubles, font auffi vagues , & ne
donneront-elles pas lieu aux memes abus &: à des
^bus encore plus grands ?
40. Si on veut alfurer au ftathouder tous les
pouvoirs dont il jouiffoit par ufurpation, ou en
vertu des lo ix , ne convient-il 'pas d’établir fut-
ce point un réglement très - détaillé : fi on néglige
çe foin ? quelles en feront les fuites , &
p r o
quel fera le moyen d’empêcher de nouveaux troubles
?
50. Dans la pofition où fe trouvent les Provinces
Unies 3 n’ eft-il pas d’une importance majeure
de régler & de fixer d’ une manière precife
le pouvoir des Etats-Généraux ? L ’adminiftration
militaire & le régime qu’on a fuivi jufqu’ à prefent
fur le cantonnement, la répartition & la foldo
des troupes , n’eft-il pas inconcevable ? Si l’Europe
entière ne l’avoit point vu , imagineroit-on
qu’ au milieu de ces troubles on n’a pu favoir a
qui les troupes devoienr obéir ? & ce point ef-
fentiel rie pouvant être déterminé qu’après qu’on
aura réglé d’ une manière invariable l’autorité des
Etats-Généraux, celle du ftathouder, & celle
des états particuliers de chaque province, quels
feront les effets de cet ordre des chofes, ou
plutôt de ce défordre, fi on ne le change point ?
6°. Quel eft , relativement à la population &
au commerce, le nombre d’hommes qu’ont perdu
les Provinces-Unies par la dernière révolution ?
70. Quel effet produira la dernière révolution
fur la profpérité nationale ?
8°. Quel fera dans cinquante ans le fort de
ces provinces ?
90. La révolution qui vient de s’y opérer ,
n’ en prépare-t-elle pas une autre plus grave encore
? & après cette autre révolution qui fe préf
pare, quel rôle joueront les Provinces-Unies dans
le monde politique ?
io ° . Y auroit-il aujourd’hui quelques moyens
de prévenir l’affervifFement des Provinces-Unies ?
S e c t i o n I X e.
Des provinces hollatidoifes dans lJInde, en Afrique
6? en Amérique , de la compagnie hollandoife des
Indes orientales, remarques fur Iétat aétuel
des Provinces-XJnies.
Nous avons parlé à l’article C a p , de la colonie
du cap de Bonne - Efpéranc.e } à l’article
G u y a n e & Su r i n a m , de l’ établiffement de la
Guyane hollandoife 5 à l’article Eu s t a ch e ( S. )
1 &c. des établiffemens que les hollandois ont formés
dans les ifles d’Amérique 5 à l ’article C ey-
l a n , Ja v a , M oluqües , Su m a t r a , & c .
des établiffemens qu’ ils ont formés en Afie : nous
allons faire ici des obfervations plus générales.
Jufqu’ à la découverte des côtes occidentales
de l’Afrique, d’ une route aux Indes par le cap
de Bonne-Efpérance, & fur-tout jufqu’à la dé-
. couverte de l'Amérique, les peuples de l’Europe ne
fie fe connoiffoient, ne fe vifitoient guère que
par quelques incurfions barbares, ■ dont le pillage
étoit le but , & la dévaftauon tout le fruit. A
l’exception d’ un petit nombre de tyrans armés,
qui trouvoient dans l ’oppreffion des foibles les
moyens de foutenir. un luxe extraordinairement
cher j tous les habitans des différens états étoient
réduits à fe contenter de ce que leur fourniffoient
un territoire mal cultivé , une induftrie arrêtée
aux barrières de ^chaque province. Les grands
événemens qui fixent, à la fin du quinzième fiè-
cle , une des-plus brillantes époques de l’hiftoire
du monde, n’opérèrent pas dans les moeurs une
révolution auffi rapide qu’on eft prompt à l’imaginer.
Quelques villes anféatiques , quelques républiques
d’Italie alloient, il eft vrai, chercher
à Cadix & à Lisbonne, devenus de grands entrepôts,
ce que les deux Indes envoyoient de rare
& de précieux : mais la conformation en étoit
tout-à-fait bornée , par l’impuifiance où étoient
les nations de payer. Elles languiffoient, la plupart,
dans une léthargie entière j la plupart igno-
roient les avantages & les reffources de leur territoire.
Ilfalloit, pour mettre fin à cet engourdîffement,
un peuple q u i, forti du néant, répandît la vie
& la lumière dans, tous les efprits, l’abondance
dans tous les marchés ; qui put offrir toutes les
produirions à plus bas prix, échanger le fuperflu
de chaque nation avec ce qu’elle n’avoit pas 5
qui donnât une grande activité à la circulation
des denrées , desmarchandifes, de l’argent 5 q u i,
en facilitant, en étendant la confommation , encourageât
la population , tous les genres-d’induf-
trie. L ’Europe, dut aux hollandois tous ces avantages.
.
Lorfque les généreux habitans des Provinces-
Unies levèrent la tête au-defîus de la mer & de
la tyrannie , ils virent qu’ils ne pouvoient affeoir
les fondemens de leur liberté fur un fol qui ne
leur ôffroit pas même les foutiens de la vie. Ils
fentïrent que le^commerce q u i, pour la plupart
des nations , n’eft qu’ un intérêt accefïbire, qu’un
moyen d’accroître la maffe & le revenu des: productions.
territoriales , étoit la feule bafe de leur
exiftencè. Sans terre & fans productions, ils ré-
folurent de faire valoir celles des autres peuples ,
affurés que d elà profpérité univerfelle fortiroit
leur profpérité particulière. L ’événement juftifia
leur politique.
Leur premier pas établit, entre les peuples de
l ’Europe, l’échangé des produirions'du Nord
avec celles du Midi. Bientôt toutes les mers fe
couvrirent des vajffeaux de la Hollande. C ’étoit
dans fes poits que tous les effets commerçables
venoient fc réunir ; c ’étoit de fes ports, qu’ils
étoient expédiés pour leurs destinations refpeiri-
ves. On régloit la valeur de. to u t , Sc c’ étoit avec
une modération qui écartoit toute concurrence."
LJambition de donner plus , de . Habilité , ; plus
(Rcon. polit. 6’ diplomatique. Tom, 111.
I d’étendue à fes entreprises, rendit avec le temps
1 la république conquérante. 5a domination s’étendit
fur une partie du continent des Indes , &
fur toutes les illes importantes de l’Océan qui
l’ environne. Elle tenoit affervies, par fes forte-
refTes ou par fes efeadres, les côtes d’Afrique
où elle avoit porté le coup-d’ oeil attentif & prévoyant
de fon utile ambition. Les feules contrées
de l’Amérique, où la culture eût jette les germes
des vraies richeffès, reconnoiffoient fes loix.
L ’immenfité de fes combinaifons embraffoitl’uni-
vers, dont elle étoit lame par le travail & l’ induftrie.
Elle étoit parvenue à la monarchie univerfelle
du commerce.
T e l étoit l’état des Provinces-Unies -3 lorfque
les portugais, fe relevant de h langueur & de
l’inairion où la tyrannie efpagnole les avoit plong
é s , réuffirënt à leur arracher en 1661 la partie
du Brefil qu’elles avoient conquife fur eux. Après
ce premier ébranlement de leur puiffance , les
hollandois auroient été chaffés du* Nouveau-
M ond e , s’il ne leur fût refté quelques petites
ifles, en particulier celle de Curaçao, qu’en
1634 ils avoient enlevée aux caftiilans qui la pof-
fédoient depuis 1 y27. Voye% l’article C u r a ç ao ..
De la compagnie hollandoife des Indes orientales.
Elle dut fes premiers fuccès au bonheur qu’eurent
fes navires de s ’emparer, dans moins d’un
demi-fiède, de plus de trois cents vaiffeaux portugais.
Ces bâtimens, dont les uns étoient def-
tinés pour l’Europe, & les autres pour différentes
échelles de l’Inde, étoient chargés des dépouilles
de l’Afie. Ces richdfes, que les équipages
avoient la fidélité de ne point entamer, forrhoient
à la compagnie des retours immenfes , ou fer-
voient à lui en procurer. De cette manière, les
ventes étoient fort confîdérables, quoique les.
envois fuffent très-médiocres*
L ’affoibliffement de la marine portugaife enhardit
à attaquer lés établiffemens de cette nation ,
& en facilita extrêmement la conquête. On trouva
des fortereffes folidement-bâties ,' munies d’une
artillerie nombreufe, approvifionnées de tout ce
que le gouvernement &c les riches particuliers
d’une nation conquérante avoient dû naturellement
y raffembler. Pour juger fainement de cet avantage
, il ne faut que faire attention à ce qu’il en
a coûté aux autres peuples pour obtenir la per-
miffion de fe fixer où leur intérêt les appelloit ;
pour bâtir des maifons , des magafins, des forts >
pour acquérir Tarrondiflement néceflaire à leur
conférvation ou .à leur commerce.
Lorfque la compagnie fe vit en pofieffion de
tant d’ établiffemens fi riches 8c fi foliées, elle na
fe livra pas à une ambition trop vafte. C ’eft fon
commerce qu’elle voulut étendre, & non fes
conquêtes. On n’eut guère à lui reprocher d’in-
juftices, que celles qui fembloient nécefihires à