
appuyé la proteftation , la pluralité des voix l’approuva,
& l'affemblée fe fépara dans la plus
grande confufion. .
C et événement changea entièrement la confti-
tution de la Pologne , 8e ce royaume fut dès-
lors plus que jamais pn proie aux défordres & aux
faétiofts ; mais., malgré la grandeur des abus ,
cette innovation favorifée par des intérêts particuliers
j n’ en fut pas moins confirmée. Les
grands officiers de là couronne, à qui leurs offices
étoient affinés pour leur v ie , & qui jouif-
fment d'une grande autorité dans l'intervalle des:
diètes, virent avec plaifir la durée de ces affiem-
blées abrége'e, & leur autorité ajfoiblie par le
liberum veto. Une partie de la noblelfie penfoit de
“ ème par une autre raifon : un gentilhomme accule
d'un crime capital ne pouvant être jugé ,
fuivant les loix de la Pologne , que par la diète
générale, c'étoit acquérir en quelque forte le
droit d’impunité que de faire dépendre l’exiftence
de ce tribunal, du caprice d’un feul de fes membres.
D'autres redoutoient , dans la diète, le
pouvoir qu elle a de lever de nouveaux fubfides ;
mais ce qui contribua plus que tout le relie à
perpétuer cetteioLfunefte , ce fut l'influence des
puifTances voifines , intéreffées à entretenir en Pologne
le défordre & l'anarchie. Il leur fuffifoit ,
depuis ce nouvel établiffement, d’avoir acheté
le fuffrage d'un feul nonce, pour s’alfurer que la
diète ne pourroit prendre aucune réfolution contraire
à leurs intérêts.
Dès lors auffi la décadence de la Pologne a été
toujours plus fenfible ; les affaires publiques y
ont été négligées , les mefures les plus nécefiai-
res fans ceffe contrariées, & on remarque que,
dans l'efpace de cent & douze ans, quarante-
huit diètes ont été rendues inutiles par l’ exercice
in veto. Il y en eut fept de diffoutes fous le règne de
Jean Cafimir , quatre fous Michel Wienowiecki,
fept fous Jean Sobieski, & trente fous les deux
Auguftes. Dans ces intervalles, la juftice & les
loix font reliées fans force ; 8e, fi l’on excepte le
-règne de Sobieski, la guerre même a été conduite
fans vigueur & fans fuccès. Convaincus de
ces abus par une fatale expérience, les polonois
auraient enfin aboli fans, doute le liberum veto 5
mais les .puifTances co-partageantes , dingées par
d'autres motifs , ont confacré, cette lo i , & elle
efl encore aujourd'hui en pleine force, Il efl ef-
fentiel d’obferver que ni le roi ni les fénateurs
ne peuvent exercer ce droit, & qu'il appartient
exclulivement aux nonces ou de'putés de la. no-
bleffe. Pour prévenir les maux d'une anarchie
totale , les polonois ont enfin imaginé de chercher
un remède au liberum veto dans une nouvelle
efpèce. de diète q u i, çonfervant la forme
ordinaire des diètes, en diffère cependant en ce
ppint effentiel, que les affairés s'y traitent à la
pluralité des voix. Alors elle s'affemble fous l’autorité
d’une., confédération que les loix pertnettent
lorfqifil s*agit de défendre la perfonne du
roi, dans le cas d'une invafion de l'ennemi, ou
pendant un interrègne.
Mais jees diètes n'exercent pas le pouvoir législatif,
& elles ne peuvent ni faire ni abroger
les loix.
De la diète d3éleftion.
Le lieu fixé par les loix pour Téleélion du roi
eft la plaine de Vola , à environ trois milles de
Varfovie. Au milieu de cette plaine il y a deux
enceintes.réfervées Tune au fenat, l'autre aux
nonces. La première qui.eft de forme ovale eft
environnée d'un folTé & d'une efpèce de rempart ?
c'eft au milieu de cette enceinte qu'on élève
dans les temps d'éleétion un bâtiment de bois
appelé Szopa, ouvert de tous les côtés ? près de
là eft l'autre enceinte deftinée aux nonces, où il
n’y a aucun bâtiment : les nonces s’affemblent
en plein air, enfuite les deux ordres le réuniffent
dans l'enceinte des nonces, en obfervant le même
ordre que dans les diètes ordinaires : le liège du
primat eft placé dans le milieu , c'eft lui qui exerce
tous les droits de la royauté pendant l'interrègne
5 il notifie aux états la mort du ro i, & affem-
ble les diètines & la diète de convocation qui précède
celle de l'élection , & fe tient toujours
à Varfovie : cette diète de convocation exerce
à fon gre le pouvoir législatif,& détermine en par-.
ticulier les articles des paiïa conventa qui feront
preferits au nouveau roi : elle fixe auffi le temps
de la diète de Téleéticrn ? l'intervalle entre la mort
du dernier roi & la nomination de fon fuccef- -
feur n'eft point déterminé ; la durée en dépend
des intrigues des candidats , ou du bon plaifir
des puifTances étrangères qui donnent la loi à la
Pologne. C'eft toujours un temps de troubles &
de défordres ? le royaume eft divifé en une mul- H
titude de partis & de faélions^, l'exercice de la
juftice y eft ltypenciu, & les nobles y jouiffent
d'une pleine impunité. Au jour fixé la diète de
l'éleétion s'affemble , & auffi long-temps qu'elle
dure, Varfovie & fes environs font un théâtre
de troubles, de violences & fouvent de fcènes
fanglantes : les principaux feigneurs ont de grands
corps de troupes à leurs ordres , & ne pâroifïent
à la diète qu'accompagnés d'une fuite nombreufe
de vaffaux & de domeftiques ; le gentilhomirfe
qui en a le moyen, tâche de les imiter en paroif-
fant auffi efeorté de fes fervitéurs & de fes ef-
claves. Lorfque la diète de l'éleélion eft affem-
blée, les deux ordres féparérrient s'occupent des
divers réglemens que la circonftance exige? ils
en confèrent enfuite enfemble j les jvatïa conventa
font lus & approuvés , le jour de Te'le&ion eft
fixé , & Ton donne audience aux miniftres étrangers.
Toutes ces affaires l'occupent plufieurs jours
de fuite, & elles ne feroient peut-être jamais ter-
1 minées fans la crainte des puifTances étrangères
qui ont toujours des troupes cantonnées dans le
voifinage de la plaine de leleétion. Au jour fixé
pour Téleétion, le fénat & les nonces fe réunifient
de nouveau , & la nobleffe formant diflférens
corps, félon Tordre des provinces, fe tient à l'entour
avec fes bannières déployées devant elle,
& les principaux officiers de chaque dictrid à
cheval.
Le primat ayant prononcé les noms des candidats,
fe met à genoux & chante une hymne?
enfuite il fait le tour de la plaine, s'adreffant à
chacun des corps delà nobleffe, fuivant Tordre
des palatinats ayant ainfi recueilli les fuffra-
g e s , il ne lui refte plus qu’à proclamer le candidat
élu. Chaque noble ne donne pas fon fuffrage
féparément; cela exigeroit un temps infini ?
mais la nobleffe de chaque palatinat fait connoî-
tre fon choix au primat lorfqu'il fait fa tournée.
La cérémonie étant ainfi terminée, Taifemblée fe
fépare le jour même.
Le jour fuivant, le fénat & les nonces retournent
à la plaine ? le candidat élu eft proclamé
de nouveau, & on lui envoie un député pour
l'informer de fon é le dion , car aucun candidat
ne peut être préfent. La proclamation faite , la
nobleffe fe retire & la diète eft diffoute , après en
avoir ordonné une autre pour la cérémonie du
couronnement..
Toutes les éledrons font conteftées ? mais depuis
quelque temps la crainte d'une armée étrangère
les rend unanimes pour le moment j s'il y a
line oppofition, le parti qui n'approuve pas Télé
dion fe retire? s'il eft foible il s'en tient à des
proteftations ? s'il a une certaine force, on ne tarde
pas avoir éclater une guerre civile. Sans la crainte
des troupes étrangères chaque éledion feroit fui-
vie encore , comme autrefois , de défordres & dé
fcènes fanglantes. Ainfi les polonois tirent quelques
avantages d'un mal qui eft dans le fait un
fujet d'opprobre p©ur la nation & de fcandale
pour les étrangers. Nous parlerons des confédéia-
tions dans la fedion fuivante.
Les diètes tenues depuis le traité de partag
e , & les changemens qu’on a faits à la corifti-
tution ont été fort paifibles : les fearices de celle de
1784, furent remarquables par Tefprit de conciliation
qui les accompagna : divers projets utiles y
furent propofés avec un zèle défintéreffé,, difeutés
avec décence , approuvés fans nulle oppofition.
La confiance au roi a été fi marquée, qu'à l'unanimité
on lui accorda pour iô ans, du trefor
tre la cour de Pétersbourg & lé duc de Courlan-
d e , agréé. — La vente des places militaires ,
permife en faveur des officiers qui auront fervj
14 ans, mais feulement à la valeur de 4 années
d'appoiutement.
de la république, une fomme annuelle de 700,000
florins.
Cette diete accorda une indemnifation au prince
Radziwil, Palatin'de Wilna , de 300,coo flor.
annuels pendant 10 ans, pour Tamortiffement de
fes prétentions fur la république. C e prince avoit
été à-peu-près ruiné par les derniers troubles. — »
Le tréforier de Lithuanie fut abfous de fa geftion.
— Le projet de ratification de l ’accord fait en- |
Le nouveau confeiJ permanent fut autorifé à entamer
des négociations de commerce avec la cour
de Berlin.
On y régla beaucoup d'autres objets, dont
nous ne parlerons pas ici.
La diète de 17^6 , n'a pas été moins tranquille.
On y régla divers objets qui font la fuite de la
guerre civile & du démembrement. Pour donner
aux lecteurs une idée des points que difeute aujourd'hui
la diète, voici les propositions fur lesquelles
le roi demande la délibération des états.
I . Lorfque Tempereur a aboli en Galirîe un
grand nombre de communautés eccléfiaftiques ,
dont les revenus avoient leur fondation en Po-
logne, le verfement des revenus fufdits de Polo-
gne en Galicie a du ceffer d'autant plus naturellement,
que le.même fouverain a ordonné que les
revenus originairement fondes en Galicie pour les
eccléfiaftiques exiftans en Pologne, ne doivent
plus être verfés en Pologne. O r , comme certaines
conventions ont été paffées à cet égard avec
la cour impériale & royale, la nature de la chofe
exige que les conventions reçoivent leur immutabilité
par l'autorité des états de la république.
II. Comme, félon la convention du mois de
novembre dernier, la démarcation qui a eu lieu entre
les poffeffions de certains habitans de Pologne
& dè Siîéfie, doit être ratifiée par les états ref-
peélifs à la diète prefénte, la convenance du projet
de ratification qui fera préfenté aux états à
cet effet, eft évidente. O r , comme les circcnf-
tances.quL feront expofées plus amplement aux
états, ont exigé que meffeigneurs Mycielski ,
ZakrzeWski, K rzy ck i, Rogaünski, & Broni-
kowski, fiffent pour le fuccès de cette convention
les facrifices volontaires'& vraiment patriotiques
d’ une partie confidérable de leurs propriétés ; la
juitice même parle 8c intercède pour eux auprès
des états de la république, pour qu’il foit pourvu
à leur dédommagement, & que le projet tjui fera
préfenté à cette fin aux états de la république foit
agréé.
III. Puifque les nouveaux réglemens monétaires
, publiés dans les différens états de l'Europe,
ont changé confidérablement la proportion réciproque
entre l’or 8c l’argent, ce dont les fuites
affeélent fenfiblement auffi notre pays; le roi regarde
comme néceffaire, que la diète préfente ordonne
que, fans changer aucunement la forme,
le poids, ni la valeur interne de notre monnoie
d’argent polonoife, courante depuis vingt ans , il
foit feulement ftatué, qu’ au fieu que le ducat