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que la répartition de cette dépenfe feroit a rai-
fon de ntott cinquièmes pour le premier, & de
deux cinquièmes pour les féconds : que fi l'empe-
xetir diminuait fon contingent, les Etats-Généraux
diminueroient le leur dans la même proportion
qu'à la veille d'une guerre ce corps feroit porté à
40 pille hommes , & que fi les hoftilités avoient
déjà éclatées j il feroit renforcé félon le befoin :
que la formation ou divifion des garnifons ordinaires
dans les places feroit à la difpofition des
Etats-Généraux , mais qu’on ne pourroit les augmenter
que du confentement des deux parties
contractantes : que les gouverneurs , les comman-
dans & états-majors, feroientà leur choix, mais
que ces portes ne feroient point confiés à des
perfonnes défagréables à l'empereur, ou dont il
auroit lieu de fufpe&er la fidélité 5 qu'au furplus
ces officiers étant logés, & percevant les émo-
lumens des ouvrages de fortifications, ils ne pour-
roient point tomber^ à fa charge non plus qu'à
celle des Etats-Généraux : que ces officiers majeurs,
foit pour la garde des places, foit relativement
aux fervices militaires, feroient fubor-
donnes aux Etats-Genéraux en prêtant ferment à
l'empereur , qu'ils conferveroient & défendroient
ces places pour le compte de la maifon d'Autriche
: que les troupes des Etats Généraux y au-
roient pleine & entière liberté de religion, &
que cette puiffance pourroit les faire changer de
garnifon quand elle le jugeroit à propos ; qu’il lui
feroit permis, même en temps de gu e r red 'au g - ,
menter les fortifications , mais que pour y conf-
truire de nouveaux ouvrages il faudroit en avertir
le gouverneur-général des Pays-Bas Autrichiens,
& obtenirfon aveu. Il fut convenu de plus qu'ou-
ïre les revenus perçus ^par les Etats-Généraux,
dans la partie du quartier fupérieur de Gueldre,
à eux cédée, l'empereur leur paieroit annuelle- ,
ment 500,000 rixd. ou 1,250,000 florins.de Hol- •
lande pour l’entretien des garnifons, celui des
places, & pour leur approvifionnement en munitions
de guerre & de bouche pour l'exécution
de cet article', on établit un comptoir de barrière
dans la ville d'Ypres, &c.
Nous avons d it, à l'article Barrières , que
l ’empereur ne voulant plus avoir de garnifons
hollandoifes dans les villes de fes domaines, ni
payer a la Hollande, ce qu'il avoit promis, les
hollandois en .ont effectivement retiré leurs
troupes, & que cette affaire qui, à une autre
époque, auroit peut être attiré une guerre , n'a
point eu de fuites fâcheufes.
S e c t i o n I Ve.
Des manufactures & du commerce des Provinces-
Unies \ réflexions politiques fur ce commerce, fur
la richejfe des Provinces-Unies & les effets de
cette richejfe.
C ’eft au commerce, aux manufactures & aux
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fabriques que les Provinces-Unies doivent principalement
leur grande population & la multitude
de leurs villes. Le nombre de briqueteries qu'entretiennent
la Hollande méridionale & la province
d'Utrecht, eft immenfe ; elles fourniflènt des
pierres cuites à la confommation du pays & à
l'étranger : il eneft.ainfi également des pipes &
de la poterie, parmi lefqudles celles de Gouda
tiennent le premier rang. La faïence ou fauffe
porcelaine de Dclft eft de la meilleure qualité i
fouvent elle égale en beauté celle qui nous vient
de la Chine.
Au relte, cette fabrique de porcelaine de Delft
eft bien tombée aujourd'hui.
La garence de Zéelande & de quelques autres
cantons des Provinces - Unies eft un des articles?
de commerce le plus avantageux, & , excepté le
peu qu’on a cultivé dernièrement en Angleterre ,
la ^Hollande en fournit tous les pays étrangers au
prix qu'elle veut y mettre : les fermiers & les*
propriétaires favent tirer parti de cette fource de
richeffes. On tire de la Hollande du borax 8c
une quantité co-nfidérable d'empois bleu 8c blanc«.
Les fils cruds ou blanchis qui y arrivent de l-*Al—
; lemagne , y reçoivent une nouvelle préparation ,
& on les converti en toiles de toutes efpèces ::
on les retord, & on en fait des dentelles qui ne
le cèdent à celles d'aucun autre pays. L'JEurope
entière ne fournit point de toiles de table aufli
fines que celles de la province de Frife. Les da-
maffées, qui nous viennent delà Hollande, font
recherchées par tout. Les habitans des Provinces-
Unies ont, au fuprême degré, le talent de fabriquer
les toiles & de les blanchir 5 les toiles de
Clèves & de Juliers qu'on blanchit à Harlem ,
& que l'on vend pour des toiles de Hollande _v
forment une branche importante, 8c elle l'étoit
encore d’avantage avant que les fabriques de toiles
d'Irlande & d'Ecoffe euffent la perfection qu'elles
ont- maintenant.
Les habitans des Provinces - Unies n'excellent
pas moins dans la fabrique des papiers. Toutes
les provinces font pleines de moulins à fcîe. On
y prépare des bois qui viennent de la Norwège
& Ade la mer Baltique. Lorfqu'ils font en état
d'être employés dans la confirmation des maifons
ou des navires, on les conduit en Efpagne, en
Portugal 8c en d’autres pays étrangers, & c'eft
un grand objet de commerce. Les raffineries de
fucre font auffi très-nombreufes.
C e pays n'a jamais été célèbre par fes manufactures
5 les Provinces* Uni es ne fabriquent pas
un tiers des marchandifes néceffaires à leu r co r -
fommation. Les draps fins de Leyde & d'Utrecht
ont eu de la renommée 5 mais , dans ces derniers
temps, le prix de la main-d'oeuvre a fort augmenté,
& ces draps font devenus plus chers etr
proportion de leur largeur, que les draps d’Angleterre
fuperfins. La plus grande partie de ceux
qui s’y fabriquent encore, font exportés chez
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l ’étranger, tandis que le peuple 8c les troupes
font habillés de draps -de Yorkshire , d Aix la-
Chapelle 8c de Verviers.
Ainfi , les manufactures de coton , de laine 8c
de foie déclinent fenfiblement, & il faut attribuer
cette décadence à la fuppreffion de quelques
privilèges & à la multiplicité des impôts qui
hauffent le prix de la main-d’oeuvre. Les pays
étrangers ont offert 8c offrent tous les jours plus
d’avantages aux manufacturiers, 8c on ne doit
pas,s’étonner que ces arts défertent les Provinces-
Unies. Les légiflateurs & les adminiftrateurs de
ces provinces le voient fans douleur. Ils ont imagine
les loix & déterminé les ufages les plus favorables
au commerce de leur pays : leur plan
eft d'une profondeur & d'une fageffe admirable ;
mais ils femblent avoir, calculé qu'il leur convient
mieux de faire le commerce des marchandifes qui
Portent des fabriques de tous Jes pays , que d a •
voir des fabriques propres : s'ils ont conferve
celles des toiles , c'eft qu'ils ont des eaux &
des prairies en abondance, 8c que leur pofition
offre fur ce point des avantages qu'ils n ont pas
voulu perdre. Au relte., il y a encore quelques manufactures
de laine, de coton & de foie à Harlem,
à L e yde, à Amfterdam, à Utre cht, dans la
mairie de Bois-le-Duc, & le pays fitué au-delà
de là Meufe. v
Mais quoique Xts Provinces-Unies foient tres-
peuplées , le haut prix des denrées & de toutes
les chofes néceffaires à la vie y empêchera toujours
le progrès des manufactures ; dans une
étendue de terrein auffi petite, ou on compte
deux millions d'ames , le pays ne produit pas
des fubfiftances pour le quart de la population ,
8c par confëquent il faut tirer le refte, quelquefois
à grands frais, des autres états : d'ailleurs,
il y a des droits confidérablés fur toutes les denrées
j le confommateur paye de cinquante à foixante
pour cent par-delà le prix d’achat du grain qui
s'importe en Hollande, 8c le boeuf 8c le mouton
paient environ trois fols 8c demi tournois de
droits d'accife : tout le relie eft taxé en proportion.
Les pommes de terre etant^ la feule denrée
à borf marché , les magiftrats d Amfterdam résolurent,
il y a quelques années, de :mettre un
adroit confidérable fur celles qu on importeroit a
Amfterdam pour y être consommées î mais on
leur repréfenta que les pommes de terre font la
nourriture des pauvres .j qu'il y a à Amfterdam
trente mille perfonnes , qui ne peuvent pas gagner
plus de trois fols par jour;'qu'un pareil
impôt feroit mourir de faim, ces malheureux , &
les magiftrats renoncèrent à leur projet.
Les anciens réglemens & les anciens ufages
des différentes corporations des fept provinces,
& les entraves qu'on a rhifes aux artifans & aux
manufacturiers empêchent les ouvriers étrangers
qui ont du talent, de venir s'y établir : tout retarde
le progrès des arts & des fabriquesj 8c ,
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quoique le commerce de la Hollande foit fi étendu
3 elle eft beaucoup moins avancée fur ces deux
articles que les autres états.
On tire des Provinces- Unies de très-bons cuirs ,
& on y trouve des blanchifferies de cire , qui
ont de la réputation.
Tout le monde connoît l’importance du commerce
des Provinces-Unies, qui font devenues les
fadeurs & les comraiftionnaires du monde entier;
le voifinage de la mer du nord, la proximité
du Zuyderzée, les fleuves 8c les canaux
navigables, la liberté civile & de confcience „
l’induftrie , les richeffes, l'économie & le crédit
de la nation chez l'étranger ; la grande population
, la pêche , la multitude innombrable de navires
marchands, la banque 8c la compagnie des
Indes, tout excite les citoyens au commerce. Si
elles font parvenues à maintenir leur liberté, 8c
à foutenir les guerres les plus difpendieufes, elles
ne le doivent qu'à,leur, commerce 8c à leur navigation.
Leur commerce a été de tout temps le
thermomètre de leur puiffance. Il paroît décliner
journellement. On attribue cette décadence à celui
de l'induftrie , 8c à ce que les hollandois font
aujourd'hui moins économes.. Les manufactures
qu'ont établies les peuples voifins, leur navigation
qui a fait des progrès , nuifent d'ailleurs aux
républiques hollandoifes. Pour rendre a ce commerce
toute fon adivité , on avoit conçu le def-
■ fein d’établir un port libre, 8c de diminuer les
énormes péages que diverfes puiffances font percevoir
fur les fleuves, notamment fur la Meufe.
Aucun de ces expédiens n’a été mis à exécution ;
& , quand on fe feroit fervi de ces moyens, ja-
: mais lés Provinces- Unies n’ auroient rendu à leur
. commerce l’adivité qu’il avoit autrefois. Il di-
■ minuera bien davantage après les arrangemens de
la dernière révolution.
Nous reviendrons, dans la fedion neuvième,
fur cette diminution du commerce des Provinces-
Unies.
Dans fon état a d u e l, il excite encore l'admiration
de tous les hommes éclairés , & on ne l'a
vu nulle, part produire autant de merveilles. Nous
allons dire par quelles adroites combinaifons les
premiers légiflateurs ont ouvert la fource de ces
richeffes, & avec quelle confiance on a fuivi ou
perfedionné cés premières vues.
Les perfécutions .du cabinet de Madrid & de
l'inquifition obligèrent un grand nombre de né-
gocians proteftans de Bruges , de Gand , d'Anvers
& de plufieurs autres villes des Pays Bas >
de fe réfugier dans les marais de la Hollande 8c
de la Zéelande ; contraints de travailler à leur
fubfiftance , ils y formèrent les premiers établif-
femens de commerce, & ils commencèrent à diminuer
celui des grandes villes du Brabant & de
la Flandre.
Le duc d’Albe employoit tous les moyenspour
opprimer les juifs, qui étoient alors les négo-
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