
des remarques fur le gouvernement & le produit
des poffeflions de l’Efpagne hors de l’Europe :
voyei auiïî l’article Pérou.
M IL A N O IS ou' D U CH É DE M I L A N ,
pays d’ Italie, appartenant à la maifon d’Autriche :
il eft borné à l’oueft par le Piémont 8c le Montfer-
rat 5 au nord, par la Suiflfe ; à Lorient, par le
territoire de la république de Venife 8c les duchés
de Mantoue, de Parme 8c de^ Plaifance ; enfin,
au fud , par les états de la république de Gênes.
Sa plus grande largeur du fud au nord eft d’environ
vingt-cinq milles communs d’Allemagne, & fa
plus grande longueur du couchant au levant d’environ
27 milles.
Présis de Vhifloire politique du Milanois.
Dans le quatorzième fiècle, un gentilhomme
milanois , nommé Matthieu Vifconti, s’en rendit
maître, & fa fouveraineté fut confirmée par l’empereur
Henri V II. Vers la fin du même fiècle,
Jean Galeas obtint de l’empereur Venceflas le titre
de duc a & Valentine, fa fille , époufa le duc
d’Orléans , 8c les prétentions des rois de France
fur ce duché ont été fondées fur ce mariage. A la
mort du dernier duc de cette branche , François
Sforce, qui avoît époufé fa fille naturelle, fe concilia
tellement l’amour des Milanois, qu’ils le choi-
firent pour duc en 14JO. Sous le règne de fes def-
cendans, la France chercha à leur enlever ce pays ;
mars Charles - Quint le prit fous fa protection
comme un fief impérial ; 8c bientôt après , il en
donna l’inveftiture à fon fils Philippe I I , roi d’Ef-
pagne.^ Les rois fes fuccelfeurs en confervèrent la
poifeffion jufqu’après la mort de Charles II. Dans
la longue guerre que produifît la fucceffion de ce
prince , tout \e Milanès fut conquis en 1706 par
Farmée impériale, & l’empereur en prit poftefïion
comme d’ un fief impérial. La paix de Bade de 1714,
la quadruple alliance-de 1 7 18 , 8c la paix d’Aix-
la-Chapelle de 174S, ont confirmé la maifon
d’Autriche dans la poffeffion de ce duché, à la
réferve de la partie qu’elle-même a cédée à la
maifon de Savoie, c’eft-à-dire, des provinces
d’Alexandrie 8c de Valence, avec tout le diétriét
compris entre le Pô 8c léTenaro , ainfi que la province
de Lomelline 8c le Val de Seffia 8c leurs dépendances
, qui furent abandonnées en 1703 par
l’empereur Léopold au duc de Savoie, le tout à
titre de fiefs de l’empire ; comme l’avoient pofledé
les rois d’Efpagne ; ces provinces furent ainfi fépa?
.rées à pèrpétuité du duché de Milan, fauf le domaine
direél de l’empire romain. En 1736, l’em,-
pereur céda encore au duc, le Tortonois & le
Novarrois comme fiefs de l’empire, avec les quatre
fpigneuries de S. Fedeie, Torre di Forti, Gravedo
8cÇampo Maggiore. En 1743, Marie-Thérèfe,
reine de Bohême 8c de Hongrie, en vertu du
trajté de Worms, abandonna pour elle & fé? hé- |
ritiérs, au roi de Sardaigne, leVigevatiafc 8c cette
partie du Pavefan qui eft entre le Pô 8c le Tefin ;
enforte que ce dernier fleuve, depuis,l’endroit ou
il fort du lac majeur jufqu’à fa réunion avec le P o ,
forme la limite entre les deux états ; elle fe
réferva cependant les ifles formées par le canal
vis-à-vis la ville de Pavie : au refte^, le roi de *
Sardaigne obtint la liberté de la navigation fur le
T e z in j fes bateaux ne font fournis ni à la vifite ,
ni à aucun péage ; 8c dans ce canton, le canal
dont nous parlions tout-à-l’heure, n’eft point regardé
comme marquant la frontière. Le roi de Sardaigne
obtint en outre de la reine d’Hongrie cette
partie du Pavefan qui eft fituée fur le bord méridional
du P ô , avec le diftriéfc de Bobbio 8c la portion
du duché de Plaifance qui eft au couchant de
la N ura, à commencer de la fource de cette rivière
jufqu’à fon embouchure dans le Pô : mais en 1740,
lors de la paix d’Aix-la-Chapelle, le roi de Sardaigne
rendit cette partie à l’infant Dom Philippe.
Enfin le roi d’Efpagne obtint de plus la partie du
comté d’Anghiera, qui eft fur le bord occidental
du lac majeur; de manière que la ligne de démarcation
entre les états de la reine d’Hongrie & ceux
du roi de Sardaigne, commence aux frontières de
la Suiffe, traverfe le milieu de ce lac dans toutè
faflongueur, 8c fuivantle cours du Tefin,, finit à
l’endroit où cette rivière fe jette dans le Pô ; mais
avec les modifications que nous venons d’indiquer
relativement à ces limites : les' fujets des deux,
puiflfances ont la navigation libre fur ces deux fleuves
; & chacune peut fur fa rive faire les réparations
qu’elle juge neceffaires, pourvu qu’ elles ne
tendent point à repouflfer l’eau fur la rive oppofée,
8c que du côté du roi de Sardaigne on ne gêne
point l’entrée de l ’eau dans le canal qui conduit à
Milan.
S o l, ProduStions.
Le Milanes eft un des meilleurs pays de l’Europe
j 8c il en eft peu qui foient d’un auffi grand
rapport pour le fouverain.
Il eft arrofé de rivières , de ruifïèaux > 8c
plein de canaux ; il produit prefque des grains
de toutes les efpèces. Après la première récolte,
on y feme communément du bled de Turquie. On
-y cultive auffi beaucoup de riz;, mais cette culture
eft préjudiciable à la falubrké de l’air. Les pâturages
y font excellens, fur-tout dans le diftriét de
Lodi ; les beftiaux y font dans le meilleur éta t, 8c
le fromage, qu’on nomme mal-à-propos parmefan,
fe fait-dans ce canton, & l’Italie entière en conformité.
Le Milanes produit auffi de bon vin 8c
diverfes fortes de fruits. On y trouve une quantité
confidérable de m u ri ers .Suivant le travail fait en 1774
par ordre de l’ impératrice reine, le duché de
Milan feul eomprenoit 192 milles quarrés-, 8c une
i population de i , i 10,000 habitans : c’eft environ
I 1159 par lieue quarrée^
Commerce»
Commerce.
Le commerce du Milanes n’eft plus auffi
confidérable qu’il étoit j il fe fait principalement
dans l’intérieur du pays, 8c fes habitans,
dit M. Bufching , tirent encore plus de mar-
chandifes de l’étranger qu’ ils n’en exportent : mais
ce fait eft très-douteux, ou plutôt il n’ eft pas vrai.
Ils fabriquent beaucoup de draps 8c de toiles de
lin. Us ont de la foie en grande quantité ; mais elle
n’approche pas de la beauté de celle du Piémont.
On la tranfporte au dehors crue, filée 8c travaillée.
Les étoffes de lame qu’on y fabrique, relient
pour la plupart dans le pays j mais on exporte
des bas , des gants 8c des mouchoirs de foie.
Les galons d’or 8c d’argent, les broderies
les franges communes, les ouvrages de cuir, foit
en blanc, foitenfumac, font les principales*pro-
duétions des manufactures. On y travaille auffi l’ ac
ie r , le c ry lla l, les agathes, les aventurines 8c
autres pierres.
M . Roland de la' Plâtrière dit que l’entrepôt,
les commiffions 8c toute efpèce de commerce en
gros^à Milan, font un foible objet, vu la fituation
de cette ville ; que le pays eft foulé, 8c qu’il offre
une trille comparaifon avec les bailliages fuiffes
qui l’avoifinent, qui en font partie, dont le fol eft
moins fertile, mais cultivé par un peuple libre. '
Il ajoute que les arts y languilfent, 8c que cette
langueur pourroit bien venir des impôts qui enché-
ïiffent les matières premières 8c la main-d’oeuvre ;
qu’il ne fe fait dans tout le Milanès que quelques
draperies communes ; que la fabrique des camelots,
tombe ; que toute la quincaillerie fe tire du dehors 5 j
que Milanès tire des toiles deSuilfe Sc de Siléfie,
éc beaucoup de foierieS de Ly on, quoiqu’ elles
paient des droits énormes. Il relève les exagérations
des autres voyageurs fur le commerce du
Milanes avec la France ; mais il convient que l’article
des foies 8c du riz emporte la balance , 8c
même en paiement, 8c que toutes les années nous
foldons cette balancé avec notre numéraire.
Au re lie , les exportations du Milanes 8c du
Mantouan confiftent en r iz , fo ie I pour environ
trois millions de florins par an, fromages, fruits
fecs 8c confits, huile d'olives, bétail, bled, laine
,8c lin.
Le premier objet dont s’occupent les négocians
milanois, ce font les foies crues 8c organfinées.Cette
branche de commerce exige des fonds confidéra-
bles , 8c les plus riches maifons de Milan s’ en font
emparées exclufivement aux autres, en formant
entr elles une fociété clandeftine. C e monopole
n’eft pas moins nuifible à l’acheteur qu’au vendeur,
8c fait un tort confidérable au commerce général.
L a fociété, dit M . Grofley, qui a traité à fond
cet article, fait acheter les foies du Milanès de
caffine en caffine, ou de village en village, dans
le temps de la récolte, 8c fouvent avant la récolte j
<Ècon« polit, 8? diplomatique^ Torn. l l l .
carefle ne fe fait aucun fcrupule d’accapafèr. Lorf-
que les foies de Bergame, de Vérone 8c des autres
villes de la Lombardie, font raflemblées dans
les magafîns, la fociété écrit en France 8c en Angleterre
que la récolte a manqué, ou qu’ elle a été
peu favorable, 8c fixe en conféquence le prix des’
foies. C e prix n’eft pas toujours fuivi ni adopté par
les autres marchands fubalternes qui ne font point
de cette fociété. En conféquence, les faéteurs dç
France 8c d’Angleterre arrêtent toutes les foies de
ces marchands fubalternes, tandis qùe la fociété
eft obligée de garder les fiennes dans fes magafins.
Mais que fait alors la fociété ? elle annonce en
France 8c en Angleterre que la récolte prochaine
donne les plus grandes efpérances, 8c par cet appât
empêche les fadleurs de rien acheter ; enforte que
le prix des foies des marchands fubalternes baifle
tout-à-coup parce qu’il ne fe préfente plus d’acheteurs.
C ’eft afin que les marchands fubalternes fe
voient obligés de vendre à vil prix ces mêmes
foies à la fociété, qui dans la fuite les revend fort
cher aux crédules1 etrangers ; car le temps de la
récolte n’eft pas fitôt arrivé, que la fociété écrit
aux anglois que les françois, comme les plus voi-
fins, les ont prévenus de vîtefle j qu’ils ont tout
enlevé , 8c qu’il n’en refte plus à la fociété qu’une
certaine quantité ; qu’elle fera obligée de leur vendre
fort cher, 8cc. Elle donne aux françois le
même avis 8c les trompe également. .On voit par
là que cette fociété exerce un monopole qui porte
fur le cultivateur même, parce qu’ en ne recevant
de fes foies d’autre prix que celui qui eft fixé
par la fociété , il tourne vers d’autres objets
une induftrie que l’efpoir feul du gain animoit &
entretenoit ; 8c loin de faire de nouvelles plantations
, il laifle les anciennes tomber en ruine. Dégoûté
de ce monopole établi à Milan 8c à Venife,
8c ruiné par les droits de tranfit établis par le roi
de Sardaigne 8c autres états adjacents, fur les foies
qui ne font que palier fur leurs territoires, Sc par
d’autres droits encore plus forts qu’il faut payer à
Milan , il fe vo it, pour ainfi dire, forcé d’abandonner
la culture des mûriers.
Le fécond objet de ce commerce confifte dans les
galons, broderies d’or 8c d’argent, dentelles, gants,
8c autres marchandifes femblables. Les manufaélu-
res de galons, furent établies par les efpagnols, fous
Philippe II. Tant qu’ils répandirent dans Milanès
les piftoles du Pérou , les galons d’or 8c d’argent
furent très à la mode. Mais depuis que le duché
de Milan eft retourné aux empereurs d’Allemagne
, il ne s’en fait plus de confommation, que
pour les ornemens d’églife 8c les ameublçmens de
palais ; enforte que ni les bourgeois ni les nobles ,
ne portent plus de galons fins.
Les armes à feu, fabriquées à Milan, étoient
autrefois l’objet de l’admiration de toute l’Europe;
8c il n’y avoit point de guerrier un peu célèbre qui
ne voulût avoir des armes de Milan. On voit dans
Brantôme un long-détail dea obligations que U