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l%éritiet de fcs foins , que , pour rétablir îë calme
, le ininift.ère public fe crut obligé de faire
arracher ces racines faiutaires. Heureufement les
chinois, occupés fans relâche de ce qui peut
(contribuer à leur fortune, les avoient confervées
à 1'écart. Peu à peu on s’eft familiarifé- avec une
innovation fî avantageufe, & c'eft aujourd'hui une
des meilleures reffources de la colonie.
' Indépendamment de-ée qui fert à la nourriture
des naturels du ;pàys & des conque'rans, ces ifles
offrent un grand nombre d'objets propres au commerce
d in d e en Inde : le tabac , le riz , le rot-
tin , la cire, les huiles, les cauris, l'ébene , le
poiffon feché, les réfines, les bois de fapan ;
mais- plus particuliérement ces nids d'oifeau, ces
nerfs de cerf deffé.chés , ces biches de mer que
tous les peuples de l'Afie , fur-tout les chinois ,
recherchent fi- avidement.
Jufqu'ici l'on n'a cultivé le fucre que pour la
confommation de la colonie. La crainte de le voir
un peu •renchérir, en a fait défendre l'exportation
fous des peines graves. C e t aveuglément ne fauroit
durer. Bientôt il fera permis de fournir à la plus
grande partie de l'Afie une pfoduérion à laquelle
le fol des Philippines left très - favorable. On y
joindra peut-être le fer'.
Il eft abondanr& d'une qualité fupérîeure dans
tout l'Archipel. Cependant on n’ en avoit jamais
ouvert'aucune mine, lorfque, vers l ’an 1768 , '
Simon de Auda-s'avifa heureufement d'établir
des forges. Le fuccès pn eût été plus affurc, fi
cé gouverneur aérif eût'commencé moins d'ouvrages
à la fois-; s'il eût laifle mûrir un peu plus fes
projets ; s ’il! eût employé, pour faire réuflîr fes
entreprifes., des moyens plus conformes à l'hu-
tftanité & à la juftice-.
L'exceilent cuivre, répandu dans plufieurs des
Philippines s ne mérite pas moins l’attention du
gouvernement. C e métal fe r t , dans les Indes ,
aux vafes du culte public, à des uftenfiles d’un
ufage journalier, à des monnoies qu’il faut rç-
nouveller fansj celle , parce que Je peuple ne
montre pas moins d'empreffement à lés enterrer
qu'en ont les hommes riches pour enfouir des
tréfors plus précieux. Les hollandois tirent du
Japon de quoi’fournir à'tous ces befoins; Ils perdront
néceffairement cette branche de leur commerce,
fî i'efpagnol , forti de fa léthargie, ofç
entreprendre de lutter cbntr'éux.
Lès Philippines ont, fur les autres colonies européennes,
l’avantage: depoffédér de l'or. Les
indiens en trouvent quelques parties-dans le fable,
ou dans là vafe des rivières qui le çha'rient. C e
qu'ils en amaffent peut monter à cinq ou fîx cens
mille livres par an. Us le livrent en fecret aux
navigateurs étrangers q u i, de leur c ô té , leur fournirent
quelques marchandifes. Autrefois on l'en-
voyoit en Amérique , puifque Çawpndish en
trouvapour 6y8,8ôj3'livt:es fur le galion qui vo-
gùoit vers Si l’E jp g r ie , abjurant fes
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anciennes maximes, encouriigeoît ce Retire de travail
, en laiffant à ceux qui s'y confacreroient,
1 ufage •'entièrement libre des richeffes qu'il leur
procurerait, ne fe ménageroit-elle pas un moyen
de plus pour commercer avec utilité: dans , les
mer des Indes ?
Elle ne ferait pas réduite à defîrer que les navigateurs
étrangers vinïïenr chercher fes produirions.
Comme les Philippines fourniffent en
abondance les matériaux d’une marine bien ordonnée,
fes fujets pourraient fréquenter tous les
marchés, & ajouter le bénéfice du fret à fes autres
avantages.
Cette activité préparerait les liaifons de la colonie
avec fa métropole. Dans le cahos où font
plongées les Philippines , il n’ eft pas aifé de voir
ce.qu’elles pourraient fournir un jour à l’Efpa-
gne. Actuellement elles lui offrent de l’alun, des
peaux de buffle, dé la caffe , des Bois de teinture,
du falpêtre, de l’écaille de tortue, de la
. nacre de perlç que le chinois a achetée jufqu’ici
.pour la revendre, dans Canton, aux européens
; le triple de ce qu’elle lui courait ; du cacao qui ,
quoique venu du Mexique, n’a pas dégénéré ; de
l’indigo que la nature brute produit libéralement.
Un homme éclairé voulut effayer, en 17 50 , de
donner à cette riche plante tout ce qu’elle pouvoir
recevoir de perfection par là culture. On
s'éleva généralement & avec Fureur contre cette
nouveauté. Il fallut que le marquis d'Obando ,
alors gouverneur , prît ce citoyen fous fa fauve-
garde & lui alfignât un terrein fermé, ou il pût
continuer avec fûreté fes opérations. Les expé.
riences furent toutes très - heureufes ; & depuis
cette époque, l'on s’occupe, mais avec trop peu
dé vivacité, d'une teinture fi précieufe.
L’Efpagne aurait p u , depuis, deux fiècles, naturaliser
fur Ton territoire , fi voifin des Molu-
ques , les épiceries. Peut-être elle aurait partagé
ayecles hollandois cette fource de richeffes. N'eft-
il pas temps de fe réfoudre à une expérience dont
1^ plus, grand inconvénient eft d'être inutile.
Cette couronne pourrait être excitée par l'ex*
cellente qualité du coton qu'on cultive dans les
Philippines, à y élever, avec le fecours des ha-
bftans du continent, de belles & nombreufes
manufactures. En attendant le fuccès toujours lent
des nouvelles entreprifes, même les mieux combinées
, I’ efpagnol achèterait dans les marchés
étrangers les foieries, les toiles, les.autres pro-
duCrions de l'Afîe convenables pour fa patrie,
& il les obtiendrait à meilleur marché que fes
concurrens. La colonie ,* dont les revenus montent
à 2,728,000 livres, a coûté jpfqu'içi annuels
lement à l’Efpagne 527,500 liv.
Il eft difficile de prévoir l’ effet en bien ou en mal
qiie produira fur les Philippines la nouvelle corn-?
pagnie qui porte leur nom, & nous nous contenterons
d'avertir le leÇteur qu'il trôuvera, à
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l'article Espagne, des détails fur ce nouveau régime.
L'établilfement formé aux ifles Marianes ayant
un rapport direCt avec celui des Philippines, nous
crayons devoir en parler ici.
Jles Marianes & de l établijfement que les
efpagnols y ont formé,
1 Lorfque la cour de Madrid , devenue ambi-
tieufe par fes. fuccès au Mexique Ôc au Pérou ,
eut conçu le projet de former un grand établif-
fement en Afie , elle’ s'occupa férieufement des
moyens de le faire réuffir. C e projet devoit rencontrer
de grandes difficultés. Les richeffes de
l ’Amérique attiraient fi p.uiffamment les efpagnols
.qui confentoient a s'expatrier, qu’il ne paroiffoit
pas poffible d’engager, même les plus miféra-
bles, à s'aller fixer aux Philippines , à moins
qu'on ne/confentît à leur faire partager ces tréfors.
On fe détermina à ce facrifice. La colonie
naiffante fut autorifée à envoyer tous les ans ,
dans le Nouveau-Monde, des marchandifes de
l ’Inde , pour y être échangées contre les métaux.
Ce.tte liberté illimitée eut des fuites fi confi-
dérables, qu’elle excita la jaloufie de la métropole.
On parvint à calmer un peu les efprits ,
en bornant un commerce qu’on croyoit & qui
«toit en effet immenfe. C e qu'il devoit être permis
d’en faire dans la fuite, fut partagé en douze
mille aérions égales. Chaque chef de famille en
avoit une, & les gens en place un nombre proportionné
à leur élévation, Les communautés re-
ligieufes furent comprifes dans l'arrangement ,
fui.vant l'étendue de leur crédit ou l'opinion qu'on
avoit de leur utilité.
Les vaiffeaux qui partoient d’abord de l'ifle de
Cebu & enfuite de celle de Luçon , prirent dans
les premiers temps la route" du Pérou. La longueur
de cette navigation étoit exceffive. On découvrit
des vents alifés qui puvroient au Mexique
un chemin plus cou r t, & cette branche de commerce
fe porta fur fes côtes où il s'eft fixé.
Avant la nouvelle compagnie des Philippines,
dont nous avons parlé à l’article Espagne , on
expédioit tous les ans du port de Manille un
vaiffeau d'environ deux mille tonneaux. D'après
des loix qui avoient fouvent varie , ce bâtiment
ne devoit porter que quatre mille balles de marchandifes
, & on le chargeoit au moins du dou-
Les frais de conftruérion , d'armement, de
navigation, toujours infiniment plus confidéra-
bles qu ils ne dévoient l'être , étoient fupporrés
par le gouvernement, qui ne recevoit pour tout
dedommagement que 75,oo^piaftres ou 405,000
livres par navire.
>yEe départ étoit fixé au mois de juillet. Après
s etre débarraffé d'une foule dlifles & de rochers,
toujours incommodes, quelquefois dangereux, le
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galion faifoit route au nord jufqu'au trentième-
degré de.;latimde. Là. commencent à régner des
vents alifes ïqui le menoient à fa deftination. On
penfe.afiTez généralement q ue , s'il s'étoit avancé
plus loin, il aurait trouvé des vents plus forts
6c plus réguliers qui euffent précipité fa marche :
mais il^ étoit défendu , fous les peines les plus grav
e s i ceux qui le commandoient, de s'écarter
de la ligne qu'on leur avoit tracée.
1 elle eft fans doute la raifon qui, pendant deux
fiècles , a empêché les efpagnols de faire la moindre
découverte fur un océan qui aurait offert
tant d'objets d'inftruélion & d'utilité à des na-*
tions plus éclairées ou moins circonfpeftes. Le
voyage durait fix mois, parce que le vaiffeau étoit
furchargé d'équipages & de marchandifes, & qü'e
ceux qui le montoient, navigateurs timides, fai-
foient toujours très-peu de voile pendant la nuit,
& fouvent, quoique fans néceffité , n'en faifoient
point du tout.
Le port d’Acapulco où le vaiffeau abordoit ,
a deux embouchures, dont une petite îfle forme
la féparation. On y entre de jour par un vent de
mer, & l'on en fort de nuit par un vent de terre.
Un mauvais fo r t , - cinquante foldats , quarante-
deux pièces de canon , & trente-deux hommes
du corps d'artillerie le défendent. Il eft également
étendu, fur & commode. Le baffin qui formé
cette belle rade, eft entouré de-hautes montagnes
fi arides , qu'elles manquent même d'eau,
Son air embrafé, lourd & mal - fgin , eft habituellement
refpiré par une foible & malheureufe
population , groflîe à rarrivée du galion par les
négocians de toutes les provinces du Mexique,
qui viennent échanger leur argent & leur cochenille
contre les épiceries , les mouffelines, les
porcelaines, les toiles peintes , les foieries, les
aromates, & les ouvrages d'orfèvrerie de l'Afie.
A ce marché étoit audacieufement confommée
dans le Nouveau-Monde, la fraude audacieufement
commencée dans l'ancien. Les ftatuts avôiént
borné là vente J 2,700^000 liv. , & elle paffoit
10,800,000 livres. Tout l'argent provenant de
ces échanges devoit dix pour cent au gouvernement,
& les faillies déclarations le privoient des
trois quarts du revenu que dévoient lui Former feà
douanes.
Après un féjour d’environ trois mois, le galîofi
reprenoit la route des Philippines avec quefques
compagnies d'infanterie deftinées à recruter 1»
garnifon de Manille. Il fut intercepté trois fois
par les anglois dans fa traverfée..Çe fut Cawen-
dish'qui s'en empara en 158 7, Rogers en 1709,
& ^Anfon en 1742. La moindre partie des richeffes
dont il eft chargé , s'arrêtoit dans la colonie.
Le refte étoit diftribué aux nations qu*
avoient contribué à former fa eargaifon. Voyez
à l'article Espagne les changemens que le nouveau':
régime doit introduire fur cette matière.
i/efpacç immenfe que les galions avoiens à