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réponlî j mais .cette belle réponfe ne changera
nen a la vente des faits : fi ces faits font e x a c tes
, pourquoi la plupart des nouvelles répuMi-
ques américaines montrent-elles tant de zèle pour
i jflraiichiffement de leurs nègres > & pourquoi
tous les lionnetes citoyens des Etats - Unis gé-
millent-ils fur la cupidité des provinces du fud .
qm mettent des oblhcles à cet .-.ffranchiffe-
ment.. - ; . • . . , • •
r l / 0“ V e ,CrainJ rons P2S de Ie redire' encore ,
rien n eft plus affreux que la condition du noir
dans tout I archipel américain. On commence par
Je flétrir du fceau ineffaçable de l'efclavâ« en
Jn.primant avec un fer, chaud fur fes bras ou fur
les mammejl.es le nom ou la marque de fon maî-
/ ,H " e «bâtie étroite, mal-faine, fans coftv
modites, lui fert de demeure. Son lit eft une
Claie plus propre à-brifer le corps qu'à le repo-
Jer Quelques pots de terre’, quelques plats de
bois forment fon ameublement. La toile groffiêre
qui cache une partie de‘ fa nudité, ne'Ie garant
tu ni des cha eurs infupportables du jour ,
ni des fraîcheurs dangereufes de la nuit. C e qu'on
lui donne de manioc, de boeu f falé, de morue,
de fruits & déracinés, ne foutient qu'à peine !
fa miferable exiftence. Privé de tou t, il eft condamne
a un travail continuel, dans un climat
brillant, fous le fouet toujours agité de fes con
aucteurs.
L'Europe retentit depuis un fiècle des plus faines
, dés- plus fublimes maximes de la morale. La
fraternité de tous, les hommes eft établie de la
maniéré la plus touchante dans d'immortels éciits.
Un s indigne des. cruautés civiles ou religieufes
de nosfferoces ancêtres , & l'on détourne les regards
de Ces fiècles d'horreur & de fang. Ceux
de nos voifins que les barbarefques ont chargés
de chaînes, obtiennent nos fecours & notre pi-
malheurs même imaginaires nous arrachent
des larmes-dans le filence du cabinet, &
fur-tout au théâtre. Il n'y a que la fatale dèftinée
des malheureux nègies qui ne nous intérèffé pas
Un les- tyrannife, on les mutile, on les brûle
on les poignarde, & nous l'entendons dire froidement
& fans émotion. Les tourmens d'un peuple
a qui nous devons nos délices, ne vont jamais
jufqu'à notre coeur. 1
L état de ces efclaves, quoique partout déplorable,
éprouvé quelque variation dans les colonies.
Celles qui jouiffenr d'un fol étendu, leur
donnent communément une portion de- terre qui’
doit fournir à tous leurs befoins. Ils peuvent employer
a fon exploitation une partie du dimanche
& le peu de momens qu'ils dérobent les autres
jours au temps de leurs repas. Dans les ijles plus
reflerrces , le colou fournit lui-même la nourri- I
ture, dont la plus grande partie a paffi les mers
L ignorance, l'avance ou la pauvreté ont introduit
dans quelques-unes un moyen de pourvoir à
« ‘ qwjftançe des ’degrés:, egalement deftnjfteqr7
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p0uî le,s h°mm,e.s & pour la culture. On leur açr
or e le fatnedi ou un autre jour pour gagner,,
oit en travaillant dans les habitations-voifines,
loiten les pillant,dé quoi vivre pendant la femaine.
. , utie c.cs différences tirées-de là lituatîbn lo-
I cale des établi jicmeps dans les -ifles de l'Àméri-
I Chaque nation européenne a une manière de
traiter les efclaves, qui lui eft propre. L ’éfpagnoi
en tait les compagnons' de fon indolence j le portugais,
les inftrumehs de fes débauches j le hol-
landois, les viâimes.de'.ibri avarice'.'’ Aux,, yeux
de « j | f id L |U font des êtres purement phyfi-
ques , qu il ne faut pas ufer où détruire faiis.'né-
Cejhtç : mais jamais il né fe famiîiàrife ’ avec* eux y
jamais^ il ne leur foui i f , jamais il ne leur parlé.
Un diroit. qu'il craint dé leur iaiïïer'.foupçonner;
que la nature ait .pu mettre entt'eux & lui-queir’
que trait de rélïembtancq. Auffi en 'eft-il haï- Le,
riançois, moins fier, moins dédaigneux', accorde
aux africains une forte, de moralité > & ces malheureux
, touches de 1 honneur clé fe voir traité?,
comiiie des créatures prefque intelligentes , parodient
oublier qu'un maître'impatient'dé faire.’
tort une , outre prefque toujours la ;mèfuïe- ‘de
J®* fouveht manquer de-
fubfiftances.f , r '■ - f
Les opinions-même des européens influent fur
le fort des nègres dé 'l'Amérique.* Les. proteftans'
qui n ont pas 1 efprit de profelytifme les laiïTenf
V!vre dans le mahométffitie'oû dahsïïdoiâtiié où
Us font nés, fous .prétexté qu'il feroit indigné
de tenir fes frères éif Chrift danàla' féfvitude.'
J-.es catholiques leur donnent quelques inftruc-
nons, les baptifent ; jf-ais leur charité ne-Tétend'
pas plus loin que les .ceremonies d’un baptême,
prefque toujours inutiles pour des hommes qui
pour la plupart ne craignent pas les peines d'un
enter auquel ns font.,.difent-ils-, accoutumés dès
: cette vie..
Tout les rend infeniîbles a cette crainte 1 &
: les tourmpns- de leur fèrvitudé, 8c les malades-
• auxquelles, ils font fujèts.ep Amérique. Deux leur
font particulières, c ’eft le pian 8c le mal d-ef- '
: somac.
... j qui .eft un g .maladie particulière
aux negres, & qui les fuit d'Afrique en’
; Amérique, fe gagne par naiffaiice , 'Si fe c'o.n-‘
traite par cdmijiumqatidn. Il eft commun a'uxjdeiix'
lexes. Un en eft atteint à fo u t âge', mais ; plus
particulièrement dans 1, enfance & dans la jéuneffe :
Les vieillards ont rarement des,forcés fuffifantes’
pour reiiifer atix longs & violons traitemens qu'il
exige. o '
Tous les nègres venus de Guinée, ou nés aux
1 i » hommes & femmes, ont le pian une fois
en leur vie.
Il eft prouvé que quatorze ou quinze cens mille
nqjrs3 aujourdhui épars dans les colonies européennes
du nouveau-Monde, font. 1,es-relies in-
fçrtünés de huit ou neuf millions d'efclaves qu elles.
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ont reçus. Cette deftr^&ion horrible ne.pe.ut pas
être l'ouvrage du climat, qui fe rapproche beaucoup
de celui d'Afrique 3 & moins encore des
iiialadies qui 3 de l’aveu de tous les obfervateurs,
moiflohnent peu de viétimes. Sa fource doit être
dans le gouvernement des efclaves. N e pour-
roit-on pas le corriger ?
Le premier pas dans cette réforme, feroit
d’apprendre à connoître l ’homme phyfique & mo-
Ceux qui vont acheter des noirs fur des
cqt^s barbares 3 . ceux qui les mènent en Amérique
, ceux fur:tôu£ qui dirigent leur indulhie,
fè croierit obligés par éta t, fouvent même pour
leur propre dureté,, d’opprimèr ces malheureux.
L ’ame des cbnduéleurs fermée a tout fentiment
de corripaflioh, ne cohnoît de refTorts que ceux
de la ^crainte ou dé Jj violence ^ & elle les emploie
avec toute la férocité d’une autorité pré-
c ?>re; Sj les propriétaires des habitations, cefiant
dé dédaigner le foin de leurs efclaves , .fe livroient
à une ocçLipation dont tout leur fait un devoir,
ils abjurerôient bientôt ces erreurs cruelles. L ’h i f 1
toire de tous .les peuples leur déni outre roi t que j
pour rèhdré l’efclavage: utile, il faut du moins
l e . rendre doux y que la force ne prévient point
les révoltes de ' l ’ame ; qu’ il eft de l’intérêt du
maître que l’efclave_ aime ;a vivre j & qu’il n’èn.
faut plus rien attendre0 dès qu’il ne .craint plus,
de mourir/
Ce., trait de lumière , pu’fé dans le fentiment,
mehèroit à beaucoup de réformes. On fe rer,droit
à la néceflité de loger , de vêtir, de nourrir convenablement
des êtres condamnés à la plus pénible
Tervitude qui ait exifté depuis, l’origine de
l ’efclavage. On fentiroit. qu’il n’eft pas dans 1-a
nature , que ceux qui né recueillent aucun fruit/
de leurs fucurs, qui,n’agiffent que par dès im-
pulfiqns étrangères , puilfent avoir la même | | |
tèllig^nce, la même 'économie, la même a&ivité
la ideme force.;, que l’homm^ qui jouit du'pro-.'
duit entier de Tes peines , qui ne/fuit" d\titre di-
retfién que celle de fa volonté./Par degrés, on
arrivèrent à cette modération politique, qui con-
fifte à épargner les travaux, à mitiger bs peines
à rendre l| l’homme une partie,, de fes. droits *
pour en retirer plus Turei^ent lê tribut des devoirs
P.Pjui impofe. Le réfultat de'-cette fa^e éeo- |
ndipie feroit la confervation d’un.-grand nombre
d ôfclaves que les maladies , eau fées par Je chà- i
gt*n ou 1 ennui , enlèvent aux colonies. Loin-
d’aggraver le joug qui les. accable, on cherche*- ‘
joit a_ en adoucir, a en diflîper même l’idée , en
favorifant un goût naturel, qui femble particulier
aux nègres. - ‘ ‘ ■ ’
; 4 urs organes font fîngulierement fenfîbles à la
puiftance. de la mufîqüe.. Leur oreille eft fi «jtifte ,
que dans leurs dàn-feè / la mefure cl’une çhânfon
l£s fht, fauter & retomber cênt, a la foi§, fri»pi
pane' la terre, d’uti feul' coup. Sufpehd'us 'j. pour
aipu dire à la voix du chanteur là'cordé
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d’un inftrument, une vibration de l’air eft l’ame
de tous ces corps; un fon les agite , les enlève
& lés précipite. Dans leurs'travaux, le mouve-
i ment'de leurs bras ou de leurs pieds eft toujours en
cadence. Ils he font rien qu’en chantant, rien fans
avoir l’air de danfer. La mufique chez eux anime
le courage, éveille l’indolence. Oh Voit fur tous
les mufcles de leurs corps toujours nuds l’ex-
prefljon de cette extrême fenfibilité polir l’harmonie.
Poètes p muficiens, ils fubordonner.t tou/
joürs la parole au chant, parla liberté qu’ ils fe.
réfervent d’alonger ou d’abroger les mots pour les
Appliquer à un air qui leur plaît. Uft. objet., un
.événement frappe un nègre ; il en fait aufli-tôt
le fujet d’ une chanfon.
Un pehchant.fi vif pourroit devenir un grand-
mobile entre des mains habiles On s’en ferviroit
pour établir des fêtes , des jeux, des prix. Ces
amufem.ens, économifcs avec intelligence, emp.ê-
cherbient la ftupiditéfi ordinaire dans les efcla-
|vès’, al 1 ége;foient leurs travaux , & les préferve-
roient de ce chagrin, dévorant qui les confume
8c abrège leurs ‘ jours. Après avoir pourvu à la
; confervation des noirs apportés d’Afrique, on
s’occuperoit de ceux qui font nés dans les illes
même..
C e ne font pas Ies nègres qui refufent de fe
.multiplier dans les chaînes de leur efclavage. C ’ eft
la cruauté de leurs maîtres , qui a fu. rendre inutile
le voeu de la nature.. Nous exigeons des r.é-
^ greffes , des travaux fi durs avant & après leur
■; grefleflè , que leur fruit n’ arrive pas à terme , ou
fur'vit peu a l’accouchement. Quelquefois même
on voit des mères , défefpérées par les chatimens
que la foibleffe de leur état leur oçcafîonne , ar- ,
racher .leurs enfans du berceau pour les étouffer
dans leurs bras:, & les immoler avec une fureur
■ mêlée de vengeance 8c de pitié^ pour en priver,
des màîtrés barbares. Cetfe atrocité ouvrira peut-
être les yeux des européens. Leur fenfibilité fera
réveillée par' des intérêts mieux raifonnés. Us
connoîtront qu’ils perdent plus qu’ils ne gagnent
à outrager perpétuellement l’humanité ; & s’ils
ne deviennent-'pas les bienfaiteurs de leurs efclaves',
du moins ceffe-ront-ils d’en ,être les bour-
r'eaux.
On les verra peut ;êtré fe déterminer à rompre
lès fers des mères qui auront élevé un nombre
confidérable d’enfans jufqu’à l’âge de fîx ans. Rien
n’égaleTappas de la liberté fur le coeur de l’homme.
Lesnégreffes animées par l’efpoir d’un.fi grand
avantage , auquel toutes afpireroient, & auquel
peu parviendroient, feroient fuccéder -à la négligence
& au crime, la vertueufe émulation d’élever
des en fans, dént le nombre & la confervation
leur affureroiènt ’un état tranquille.
Après, avoir pris dés rpefures fages pour ne pas
priver leurs habitations des fecours que leur offre
une fécondité- prefqù’ incroyable, ils fongeront à
nourrir , à étendre là culcure par la population „