
»ais foutes les autres font reçues fuivant leur poids
& leur titre.
Nous avons dit à l'article Ba r b a r e sq u e s
avec quelle facilité les puiffances européennes ré-
primeroient les odieufes pirateries des peuples de
■ Maroc 3 d'Alger , de Tunis & de Tripoli, fi elles
Vouloient fe réunir, & combien il eft à regretter
que des vues particulières d'intérêt les éloignent
d'une ligue aufli jufte. Voye% l'article B a r b a -
^.esques. ;
M A R T IN ( Saint' ) , ifle d’Amérique, l'une
des Antilles : elle appartient à la Hollande &
à la France.
L ’ifle de Saint-Martin eft fituée entre Tifle de
l'Anguille & celle de Saint - Barthelemi : elle a
dix-fept ou dix-huit lieues de circonférence , mais
Bioins de terrein que cette dimenfion ne paroî-
troit l'indiquer, parce que fes baies font multipliées
& profondes. En pouffant des fables d'un
cap à l'autre, l'océan a formé fur les côtes beaucoup
d'étangs plus ou moins^ grands , la plupart
‘ très-poiffonneux. L'intérieur du pays eft rempli
de hautes montagnes qui fe prolongent prefque
par tout • jufqu'à la .mer. Elles étoient couvertes:
de bois précieux, avant qu'on les eût dépouillées
de cet ornement pour y établir des> cultures auxquelles
elles fe trouvèrent plus propres que les.
plaines & les vallées. Le fol eft généralement
léger, pierreux, trop expofé à de fréquentes' fér
chereffes, &ypeu fertile y mais le ciel eft pur &
le climat d'une Xalubrité remarquable. Dans ces
parages ip on navigue] sûrement, facilement, j ,&
la multiplicité, l'excelltnce des mouillages qu’on
y trouve empêchent de fentir bien vivement la
privation desports. ..
Les François &:les hollandois abordèrent, en
1638, à cette ifle déferte, les premiers au nprd,
& les féconds au fud. Ils y vivoient en paix &
féparément, lorfque les efpagnols , qui étoient
en guerre ouverte avee l'une & l’autre nation,
les attaquèrent, les battirent, les firent prifon-
jiiers, & s'établirent à leur place. Le vainqueur
ne tarda pas à fe dégoûter d'un établiffement
dont la corifervation lui coûtoit beaucoup, fans
lui rapporter le moindre avantage > & il l'abandonna
en 1648, après avoir détruit tout ce qu'il
ne lui étoit pas pofiible d'emporter.
Ces dévaluations n'empêchèrent pas les deux
puiffances qui avôient déjà fait occuper Saint-
Martin , d'y envoyer quelques vagabonds, auflî-
tôt qu'on j e fut évacué; Ces colons fe jurèrent
■ une fois mutuelle} & leurs defcendans ont été
fidèles à cet engagement, malgré les animofîtés
qui ont fi fouvent divifé les deux métropoles.
Seulement le partage s originairement trop inégal,
du territoire s'eft peu-à-peu rapproché. De dix
pille cent quatre-vingt quarrés de terres, chacun
de deux mille cent toifes quarrées , que
contient Tifle, les François ri'en pofsèdént plus
que cinq mille neuf cents quatre, & les hollapdois
font- parvenus à s'en approprier quatre mille
cent foixante-feize.
La culture du tabac fut la première qu'entreprirent,
àfSaint-Martin 3 le^ fujets de la cour
de Verfailles. Ils l'abandonnèrent pour l’indigo,
qui^ fut remplacé par le coton, auquel on a ajoute
le lucre , depuis qu'en 1769 il a été permis aux
etrangers de s’établir dans cette partie de l'ille.
On y compté aéluellemqrit , dix-neuf plantations
qui donnent tous les ans un million péfant de
fucre brut, d'un beau blanc, mais de peu de
confiftance, & un plus grand nombre d'habitations
qui produifent deux cents milliers de coton.
^Les travaux font dirigés par quatre-vingt 'familles ,
trente-deux françoifes, les autres angloifes , 8c
dont la" réunion forme une populatioh blanche
de trois cents cinquante-une perfonnes de tout
. âge & de tout fexe. Elles n'ont que douze cents
efclaves., C'eft trop peu pour l'étendue des cultures
j mais les colons de la partie hollandoife,
propriétaires des meilleurs terreins de la françoife,
font dans l'ufage d'envoyer leurs noirs au nord,
„ lorfque les travaux font finis au,fud. Avant 1765,
il n'y avoit point eu, d'autorité régulière dans ce
' foible & miférable établiffement. A cette époque,
On lui donna un chef qui n’a encore attiré aucun
navigateur de læ métropole. C'eft toujours
chez leur voifin que Ls françois vont chercher
ce qui leur eft néceffaire, c'eft à lui ,qu'ils livrent
toujours leurs productions.
La colonie hollandoife eft’habitée parfix cents
■ trente - neuf blancs & trois, mille 'cinq cents dix-
’ huit noirs, occupés à exploiter trente-deux fucre^
; ries qui produifent ordinairement feize cents miT
■ liers de fucre, & à faire croître cent trente milliers
de coton. C e revenutrôp modique eft groflï par celui
que donne un étang falé, dans les années qui ne
; font pas exceflivement pluvieufes.Dès l’aurore, des
efçlavès s'embarquent fur des bateaux plats : ils
râmaffent, pendant la journée le fiel qui eft fur la
fuperficie' de l'eau , & regagnent vers la nuit le
rivage,, pour y reprendre le lendemain une occupation
qui ne peut être continuée que durant les
mois de juin, de juillet & d’août. Les ifles voî-
fînes achètent quelques foibles parties de cette production
, dont la valeur totale peut s’élever à
cent mille écus : mais, elle eft principalement livrée
aux provinces de l'Amérique feptentrionale, qui
enlèvent suffi le mm & le fucre de la colonie,
tandis‘ qué le coton eft livré aux navigateurs de
la Grande-Bretagne. Il, ne relie ,rien ou. prefque
rien pour les negocians fi aCtifs de la république ,
& il faut en dire la raifon., ;
L ’établifferpent de Saint-Martin, quoiqu'Hol *
landois, n'eft pas habité par. les Hôljandois. A
peine y voit-on/cinq ou. fix familles de cette
nation , qui, ont même une efpèce de honte d'en
être. Tout le refte eft.ànglois, : les hommes la 1
la langue, les ufages. Le préjugé a été poufle
fî loin , que les. femmes vont fouvent faire leurs
couches à Anguille, ifle Britannique, qui n eft j
éloignée que ’ de deux lieues, afin que leurs en-
fans ne foient pas privés d'une origine regardee
dans le pays comme la feule illuftre.^
Saint Martin & Saint-Barthelémi dépendent de
la Guadeloupe , quoiqu’elles en foient éloignées
de 4 y & y 8 lieues. Voyez les articles G u a d e l
o u p e & F r a n c e .
M AR TH E (Sainte- ) , province ou colonie de
l ’Amérique méridionale , appartenant à 1 Efpagne.
Indépendamment des articles généraux, Espagne,
M e x iq u e & P é r o u ,. nous avons cru devoir
faire des articles particuliers fur quelques-unes des
provinces ou colonies de l'Amérique méridionale. _
La province ou colonie de Saint-Matthe , qui
a quatre-vingt lieues du levant au couchant, ôe
çerit trente du nord au midi, fut, comme les
contrées de fon voifinage, découverte malheu-
reüfement à l’époque défaftreufe où les.rois d Efpagne,
uniquement occupés, de leur agrandiffe-
menten Europe, ne demandoient à ceux de leurs
fujets qui paffoient dans le nouveau-Monde, que
le quint de l’or qu'ils ramaffoient dans leurs pillages.
A cette condition, des brigands que pouffoient
l ’amour de la nouveauté , urfe paflion défordon -
née pour des métaux, Pefpoir même de mériter
le ciel, étoient les arbitres & les féuls arbitres
de leurs, allions. Ils pouvoient:, fans quon les
en punît ou qu'on les, en blâmât, errer dans une
région , ou dans une autre ,, conferveu une
conquête ou l’abandonner, mettre une terre en
valeur ou la détruire', maffacrer des peuples ou
les traiter avec humanité. Tout convenoit a la
cour de Madrid , pourvu qu'on lui envoyâ^beau-
coup de richeffes. La fouace lui ën paroiffoit toujours
honnête & -toujours purë.
Des ravages, des cruautés qu’on ne peut exprimer
voifines, qui donnent en échange des vetemens
& quelques objets de peu de valeur. Voye^ les
articles indiqués au commencement de celui-ci.
. M A R T IN IQ U E , ifle d'Amérique, l'une des
Antilles , appartenant à la France.
, furent la fuite néceffaire de ces principes
abominables. La défolation fut univerfelle. On en
■ voit- encore par-tout les funelles traces, mais plus
particuliérement à Sainte-Marthe. Après que ces
deftru&eurs eurent dépouillé lès peuplades de l’or
-qu'elles avoient ramaffé dans leurs rivières , des
perles qu'elles .avoient pêchées fur leurs côtes ,
ils di(parurent. Le peu d'entr'eux qui s'y fixèrent,
éleverent une ou deux villes & quelques bourgades
Cette ifle a feize lieues de longueur & quarante-
cinq de circuit, fans y comprendre les caps qui
s'avancent quelquefois de deux bc trois lieues dans la
mer. Elle éft extrêmement hachée , .& par-tout
entrecoupée de monticules qui ont le plus foii-
vent la forme d'un ,cône. Trois montagnes dominent
qui font reliées fans communication, juf-
qu'à ce qu'elle ait été ouverte par l'aélivité infatigable
de quelques miflionhàires Capucins ^ qui
■ font parvenus, de nos jours, à réunir dans huit
hameaux trois mille cent quatre-vingt-onze Mo-
tilones ou Euagiras , les plus féroebs des fauvages
indépendansqui la traverfôient.' L à , végète leur
méprifable-poftérité, nourrie fervie par quelques
indiens ou par quelques nègres. Jamais la
métropole n'a envoyé un navire dans cette con-^
tréer & jamais elle n'en a reçu la moindre pro-
duâion. L'induftrie & l'aétivité s’y réduifent à
livrer en fraude des beftiàux , furtout des mulets
aux hollandois & aux autres cultivateurs des ifles
fur ces petits fommets; La plus élevée
porte l'empreinte ineffaçable d'un ancien volcan.
Les bois dont elle eft couverte , y arrêtent fans
ceftb les nuages, y entretiennent une, humidité
mal faine , ‘qui achève de la rendre affreufe, inac-
ceffible,, tandis que les deux autres font prefque
entièrement cultivées. De ces montagnes ,
mais fur-tout d e.la première, fortent les nom-
breufes fources dont l'ifïe eft arrofée. Leurs eaux-
qui coulent en foibles ruiffeaux , fe changent en,
. tôrrens au moindre orage. Elles tirent leur qua-
■: Üté du terrein qu'elles traverfent : excellentes en
! quelques endroits , & fi mauvaifes en d'autres
qu'il faut leur fubftituer pour la boiffon, celles,
qu'on ramafie dans les faifons pluvieufes.
H.ifioire'politique de cette colonie. Denambuc ,
qui avoit fait connoître la Martinique, partit en
iô$y de Saint-Chriftophe, pour y établir fa na-
! tion. C e , ne fut pas de l'Europe qu'il voulut Ér
; rer fa population. Il prévoyoït que des hommes
: fatigués par une. longue navigation , périroient la
; plupart en arrivant , ou par la mifère qui fuit
: prefque toutes des émigrations. Cent hommes qui
: habitôierit depuis long-temps dans fon gouvernement
de Saint-Chriftophe, braves, aélifs , accoutumés
au travail & à.la fatigue,, habiles à
défricher la terre , à former des habitations ,
abondamment pourvus de plants de patates & de
toutes les graines ! convenables, furent les.feuls
fondateurs ;de la nouvelle colonie.
Leur premier établiffement fe fit fans trouble.
Les naturels* du pays, intimidés par les armes à
fe u , ou féduits par des proteftations y abandonnèrent
aux françois la partie de Tifle qui regarde
le couchant & le midi, pour fe retirer dans l'autre.
Cette tranquillité fut courte. Le caraïbe ,
voyant fe multiplier de jour en jour ces etrangers
entreprenans, fentit qu'il ne pouvoit éviter
fa ruine qu'en les exterminant eux-mêmes , & il
affocia les fauvages des ifles voifines .a fa politique.
Tous enfemble ils fondirent fur un mauvais
fo r t , qu'à tout événement on avoit conftruit :
mais ils furent reçus avec tant de vigueur, qu'ils
fe replièrent, en biffant fept ou huit cents de
leurs meilleurs guerriers fur la place. C e t échec
les fit difparoître pour long-temps, & ils ne revinrent
qu'avec des préfens & des difeours pleins
de repentir. On les accueillit amicalement, & la
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