
nainiftre de leur engagement. Deux amans y trou-
voient-ils quelqu’oppofition dans leurs familles ?
ils s’évadoient enfemble à ' cheval : le garçpn
montoit en croupe derrière fa maîtreffe , & dans
cette fituation., ils alloient fe présenter devant le
magiftrat. La fille déclaroit qu'elle avoit enlevé
fon amant a pour l'époufër. On ne pouvoit , ni
fe refufer à ce voeu fi formel, ni la troubler
enfuite dans la poffeflion de ce qu'elle aimoit.
A d'autres égards, l'autorité paternelle étoit ex-
ceffive. Un chef de famille, dont lés affaires fe
trouvoient dérangées , avoit le droit „d'engager
les enfens à fes créanciers : punition bien capable
, ce femble, d'attacher ün père tendre au
foin de fa fortune. L'homme fait acquittoit par
un ail de fcrvice une dette de m liv. io fols.
L'enfant au - deffous de douze ans étoit obligé
de fervit jufqu'à vingt & un ans pour la même
fomme. C'eft une image des anciennes moeirs
patriarchales de l'orient.
Quoiqu'il y ait des bourgs & même quelques
villes dans la colonie, on peut dire que la plupart
des habitans vivoient ifolés dans leurs familles.
Chaque propriétaire avoit fa maifon au
centre d'une vafte plantation , bien environnée de
haies vives. Auffi chaque paroilfe de campagne
fe t-rouvoit-elie. avoir douze ou quinze lieues de
circonférence. A une fi grande diftance des églifès,
les cérémonies de religion ont peu d'influence.
On ne préfentoit les enfans au baptême que plu •
fleurs mois, & quelquefois un ou deux ans après
leur naiffance. Sans dogmatifer, fans difputer fur
le culte, dans un pays où chaque fe&e avoit le
fien, on honôroit l’être fuprême par des vertus
plus que par des prières. L'innocence & 1*infcience
gardoient les moeurs plus Jurement que des pré
ceptes & des controverfes.
La Penfylvanie a pris part à la querelle des
colonies américaines avec leur métropole ; en
général les quakers & les autres habitans , trop
pacifiques, ont développé moins d'énergie & de
courage j mais ils- ont eu affez de fermeté pour
ne pas abandonner la caufe commune } & le traité
de p a ix , les a déclaré libres & indépendans
çomme les. douze autres provinces.
S e c t i o n I I e.
! ger, & de donner aux individus qui le compofent,
la faculté de jouir de leurs droits naturels, & des
autres biens que l'auteur de toute exiftence a
répandus fur les hommes j & toutes les fois que
ces grands objets du gouvernement ne font pas
remplis, le peuple a le droit dé le changer par
un aCfce de la volonté commune , & de prendre
Çanffitution de la république de P enfilvanii '■* telle
qu'elle a été établie par la convention générale ,
élue a çet effet, & affemblée a Philadelphie > dans
fes féances y commencées le 15 juillet \J~j6 , &
continuées par des ajournemens fuçcejjifs , jufquau
2.8 feptembre fuivajit.
Les objets de l'inftitution & du maintien de
tout gouvernement doivent être d'affurer l'exif-
jençe du corps politique de l'éta t, de le proté-
les mefures qui lui paroiffent néceffaires pour
procurer fa sûreté & fon bonheur.
Les habitans de cette république s'étant jufqu'à
préfent recoriîuis fujets du roi de la Grande-
Bretagne , uniquement en confidération de la
protection .qu’ils attendoient de lui., & ledit roi
ayant non-feulement retiré cette protection , mais
ayant commencé & continuant encore, par un
efprit de vengeance 'inexorable , à leur faire la
guerre la plus cruelle & la plus injurte, dans
laquelle“ il emploie non-feulement les troupes de
la Grande-Bretagne, mais encore des étrangers
mercénaires, des fauvages & des efclaves, pour
parvenir au but qu'il s'eft propofé & qu'il avoue ,
de les réduire à une entière & honteufe foumiffioti
à la domination defpotiquë du parlement britannique
i ayant en'outre exercé contre lefdits habitans
pluheurS autres aÇtes de tyrannie ( qui ont été
pleinement développés dans, la déclaration du
congtès général ) , ce qui a rompu & anéanti tous
les liens de fujétion & de fidélité envers ledit
roi & fes fucceffeurs, & fait eeffer dans ces
colonies tous les pouvoirs 5c toutes les autorités
émanés de lui.
Comme il ell absolument néceffaire pour fe bien
être & la sûreté des habitans defdites colonies,
qu’elles foient déformais des états libres & indépendans
, & qu'il exifte dans chacune de leurs
parties une forme de gouvernement jufte, permanente
5c convenable , dont l'autorité du peuple
foit la fource unique & d'unique fondement ,
conformément aux vues de l’honorable congrès
américain.
Nous , les repréfentans des hommes libres
de Penjilvanîe, afïemblés extraordinairement &
expreffément, a l'effet de tracer un gouvernement
d’après les pçincfpes expofés ci - deflus ;
reconnoîflant fia bonté du modérateur fuprême
de l'univers ( lui qui feul fait à quel degré de
bonheur, fur la terre , le gente humain peut par*
venir , enperfeCtionnant l'art du gouvernement : )
reconnoîflant la fuprême. bonté qu'il a de permettre
que fe peuple de cet'fetat fe faffe , de font
propre & commun confentemept, fans violence ,
& après en avoir mûrement délibéré, les loix.
qu'il jugera les plus juffes 5c les meilleures pour
gouverner fa future fociété : pleinement convaincus
que c ’eft pour nous un devoir indifpen-
fable d’établir les principes fondamentaux de
gouvernement les plus propres à .procurer 1e bon*
heur général du peuple de cet état & de fa pollé-
r k é , & à pourvoir aux améliorations futures , fans
partialité & faps préjugé pour ou contre aucune
dalle«
claffe, feCfce ou dénomination d'hommes parti eu-
lières, quelles quelles fojent : en vertu'de l'autorité
dont nos conftituans nous ont revêtus, nous
ordonnons , déclarons & établiffons la déclaration
des droits & 1e plan de gouvernement fuiyans,
pour être la conrtitution de cette république , &
pour ' y demeurer en vigueur à jamais fans alteration
, excepté dans les articles que l'expérience
démontrera par la fuite exiger des améliorations,
& qui feront corrigés ou perfectionnés en vertu
de la fufdite autorité *du peuple , par un corps de
délégués compofé comme l'ordonne ce plan de
gouvernement, pour obte.nr & aïïurer d une
manière plus efficace , le grand objet 5c le véritable
but de tous gouvernemens > tels que nous les avons
expofés ci-deflus.
C H A P I T R E P R E M I E R .
Jdéclaration des droits des habitans de 11 état de
Penfilvanie.
A r t i c l e I cï.
Tous les hommes font nés également libres &
indépendans, 5c ils ont des droits certains, naturels,
effentiels & inaliénables^, 1 parmi lefquels
on doit compter le droit de jouir de la vie &
de la liberté , 5c de les défendre : celui d'acquérir
.une propriété, de la pofleder 5c de la
protéger ; enfin celui de chercher 5c d’obtenir
leur "bonheur & l î sûreté.
II. Tous les hommes ont le droit naturel &
inaliénable d’adorer le Dieu tout - puifîanf, de
la manière qui leur eft di&éë par leur confidence
& leurs lumières: Aucim homme ne d oit, ni. ne
peut- être légitimement contraint à embraffer une
forme particulière du culte religieux , à établir ou
entretenu: un lieu particulier du culte , ni à" fou-
doyer des miniffres de religion contre fon g ré ,
ou fans fon propre & libre confentément : aucun
homme qui recpnnoît I'exiftence d'un Dieu , ne
peut être juftelnent privé d'aucun droit civil
comme citoyen , ni attaqué en aucune manière * à.
ràiifon de fes fen.time.ns, en matière de religion ,
bu de la forme particulière de fon culte : aucune
puiffance dans l'état ne peut ni ne doit être revêtue
, ni s'arroger l'exercice d'une autorité qui
puiffe, dans aucun cas , lui permettre de troubler
ou de gêner le droit de la confidence dans
le libre exercice du culte religieux.
III. Le peuple de cet état a feul le droit ef-
fentiel & exclufif de fe gouverner & de régler
fon adminittration anterieure.
iV . Toute autorité refîdànt-ôriginairement dans
je peuple , & étant par conféquent émanée de
1 û s enfuit■ que tous les officiers du goiiver-
Qicon. polit. diplomatique. Tome 111.
nement revêtus de l'autorité , foit légiffatrice,
foit exécutrice, font fes mandataires , fes fer-
vitëurs , & lui font comptables dans tous les
temps.
V . Le gouvernement eft , ou doit être înf-
titué pour'Tavantage commun , pour la protection
Ôc la sûreté du peuple, de la nation
ou de la communauté ; & non pour 1e profit
ou l'intérêt particulier d'un feul homme , d'une
. famille , ou d’un affemblage d’hommes qui ne
font qu'unespartie de cette communauté. La communauté
a le droit- inconteftable , inaliénable &
imprefcriptible de réformer, changer ou abolir
le gouvernement, de la manière qu’elle juge la
plus convenable, & la plus propre à procurer
le bonheur public.
VI. Afin d’empêcher ceux qui font revêtus de
l’autorité légiflatrice ou exécutrice de devenir ■
oppreffeurs, le peuple a le droit, aux époques
qu'il juge convenables , de faire rentrer -les
officiers dans l'état privé , & de pourvoir aux
places vacantes par des élections certaines & régulières.
VII. Toutes fes élections, doivent être libres:
& tous les hommes libres ayant un intérêt fuffi-
fant, évident & commun, & étant attachés à la
communauté par les mêmes liens ; tous doivent
avoir un droit égal à élire les officiers, & à être
élus pour les différens emplois.
VIII. Chaque membre de la fociété a le droit
d'être protégé par elle dans la jouiflance de fa vie,
de fa liberté & de fa propriété : il eft par conféquent
obligé de contribuer pour fa part aux frais
de cetre protection , de donner, lorfqu'il eft né-
ceflaire, fon fervice perfonnel ou un équivalent ;
mais aucune partie de la propriété d’un homme
ne peut lui être enlevée avec juftice , ni appliquée
aux ufages publics, fans fon propre confentement,
„ou celui de fes repréfentans légitimes : aucun
homme qui fe fait un fcrupule de confcience de
porter les armes ne peut y être forcé jultement,
lorfqu'il paye un équivalent ; 5c enfin les hommes
libres de cet état ne peuvent être obligés d'obéir
à d'autres loix qu'à celles qu'ils ont con-
jfenties pour fe bien commun , par eux-mêmes
ou par leurs repréfentans légitimes. -
IX. Dans toutes les pourfuites pour crime, un
-homme a le droit d’être entendu par lui & par
fon confeilj de demander la caufe 8c la nature
de l'accufation qui lui eft intentée ; d'être confronté
aux témoins j d'adminiftrer toutes les preuves
qui peuvent lui être favorables j de requérir
une inftruCtion prompte & publique par un juré
impartial du pays , fans l'avis unanime duquel il
ne fauroit être déclaré coupable. R ne peut pas