
du ferment qu'il avoit prêté au grand-maître de
l'ordre teutonique ; & peu de temps après , l'em-
pereur Charles-Quint l'admit au nombre des princes
de l'Empire , ce qui procura aux livoniens la
liberté d’appeller des jugemens prononcés par leurs
tribunaux à la chambre impériale quifiégeoit alors
à Spire. C e fut vers cette époque que le luthé-
ranifme commença à s'introduire dans le pays.
Le czai-Yvan Wafiliev/icz y fit une invafîon,
& tâcha de le foumettre vers le milieu du feiziè-
me fiècle ; les troubles que ce prince caufa, en-
gegèrent la ville de Revel & l'Efthonie à fe mettre
lous la protection des fuédois : c'eft-Ià l'origine
des prétentions que cette couronne forme fur la
L iv o n ie & des prérogatives de l'Efthonie, pré-
fréablement à la. L iv o n ie . Le grand-maître Got-
thard Kettler céda la L iv on ie au roi de Pologne
comme grand-duc de Lithuanie, réfîgnà folemnel*
lement fon titre de grand-maître, & devint en
l j 6 i premier duc de Courlande, après avoir prêté
foi & hommage à la Pologne. Les poîonois prirent
pcfleflion de Riga & de la tonie. De
tels événemens firent de ce pays une pomme
de difcorde , pour laquelle la Ruflie, la Pologne
& la Suède verfèrent beaucoup de fang Tef-
pce d*environ un fiècle ,. c'eft-à-cfire , depuis
i yûi jufqu'en 1660 , époque du traité d'Oliva.
Par ce traité , la L iv o n ie fut abandonnée à ta couronne
de'Suède , & la Diina fut aflignée comme
limite entre les pofiTeflîons fuédoifes & polonoi-
fes. La paix de N y ftad t, conclue en 172.1 , fit
pafifer ce pays fous la domination rafle. Voici le
contenu de l'article quatrième : “ la Suède aban-
m donne pour toujours à l'empire de Ruflie les
» provinces de L iv o n ie , d'Efthoniè , d'Ingerma-
» nie & une partie de la Carélie, outre le diftriét
» du fief de Wibourg, avec les villes & forte-
às reffes de Riga , Diinamünde, Pernau, Rével,
» Dorpat, N a rv a , Wibourg, Kexholm & au-
*> très villes, fortereffes, ports, places fortes ,
3> diftriCis & rivages appartenants auxdites pro- .
33 vinces, ainfi que le ifles d'Oëfel , de Dagoë &
33 de Mon , & toutes autres fituées depuis les
33 frontières delà Courlande,le long des rivages
33 de la L iv o n ie y de l'Efthonie & de l'Ingerma-
33 nie,' au bord oriental de Rével, dans le paflage
93 de Wibourg , ainfi & de même qu'elles étoient
33 poflédées par la-couronne'de Suède»3. Parles
articles^ & 10 , fa majefté czarienne promet de
maintenir tous les habitans des provinces'de L i v
on ie , d'Efthonië & de l'ifle d 'O ë fe l, tant les
nobles que les bourgeois, ainfi qpe les villes ,
magift'rats, communes, tribus, & c . dans les
droits, privilèges , us & coutumes, dont ils jouif-
foient fous la. domination fiiédoife j d'y çonferver
la liberté de confidence , & de.îaifler la religion , :
proteftante & ce qui en dépend, fur l'ancien pied ;
avec cette réferve feulement que les grecs:auront ?
également l'exercice fibre de leur religion. La
Suède à la. vérité * en 1741 de recouvrer
quelques-parties-de ces provinces 5 mais loin'd'y
réufîir, elle perdit encore une portion de la Fihr
lande ; & parle traité d 'A b o , en 1743 la Ruflie
fut maintenue dans la poffeflion de toutes ces conquêtes,
& de quelques diftri-Cts de! la Finlande.
Culture, productions. Le fol y. eft d'une .bonté
médiocre. Il feroit facile de defféeher 5es marais
qui font en grand nombre,. & . de les convertir
en terres labourables > mais comme on! < néglige
prefqUe entièrement cette rèffource ; ils occupent,
pour ainfi dire, la moitié dès deux duchés. On
peut dire la même chofe des prés , qui, ne pro-
duifent que du mauvais foin & en petite quantité.
Sur le peu de prairies d'un terroir fé e , on
lai fie croître dubois ou des brouflailles, du bois
d'aulne & de bouleau que l'on coupe, enfuite. On
conduit fur celles qu'on laboure , du bois de pin
ou de fapin, ou bien même des brouflailles , dont
on fait des tas par rangées; on les convre de
tourbes & on les réduit en cendrés. Les terres
ainfi brûlées rapportent^ la première année, du
froment ou de l'excellente orge ; la fécondé année,
du feigle affez bon , &r la troifième de la
bonne avoine.
Il y a des diftriCts qui font encore fertiles à la
quatrième année, & les meilleurs produifent jul-
qu'à la cinquième ; mais il faut avoir foin d'y
femer des grains de moindre qualité : cette
préparation ruine la. terre pour quinze ou vingt
ans. Lorfqu'on ne la brûle pas, & que l'on fe
contente d y mettre du fumier, ils rapportent
davantage 5 & fi on y remue Amplement le fol
avec la charrue & la herfo , on en fait d'excellentes
prairies. On y plante peu de légumes-
L'agriculture pourroit etre améliorée & devenir
plus utile 5 les mauvaifes années & les
temps de guerre ont toujours étéx fuivis de la famine.
Dans les années fertiles, on exporte beaucoup
d'orge & de feigle. On commence d'abord
par fécher ces deux efpèces de grains * ce qui
change l'orge en malt , & rend le feigle plus pro- '
pre à être eonfervé ; car on peut alors Je garder
vingt années & même au-delà. On s'applique peu
à la culture du houblon , enforte qu'on eft obligé
de s'en pourvoir chez l'étranger. Les habitans de
l'Efthonie ne cultivent que la quantité de lin &
de chanvre néceflaire à leur confommation.
En hiver , les traîneaux facilitent finguliérement
le commerce intérieur & le commerce extérieur
avec l'a Ruflie, la Lithuanie & la Pologne.
,.Population. Autrefois on rencontrait beaucoup
de villes & de bourgs en Livonie j mais la plupart
ont été détruits par les fréquentes guerres
que ce pays a efluyées, & l'on en voit, à peine
.encore quelques traces. On n'em compté aujourd'hui
que neuf dans les deux duchés. Le plat pays
offre à peine une maifon noble médiocrement
bâtie. Les villages font composés de maifon s ifo-
lées , à une certaine diftance les unes des autre?.
Le pays pourroit nourrir, beaucoup plus de
monde; U feuene, la;pefte & la famine y ont
calife des ravages effraÿans. Le nombre des ha-
bitans peut être calculé d'apres les exemples fui-
vans. La valeur des-biens eft eftimee Juivant le
nombre de ce qu'on appelle kake ( certaine portion;
de terre ) . e'eft-à-dire, fuivant le nombre
des mâles propres au travail, depuis 1 âge de quinze
ans jufqu’à cinquante. D'après les,.calculs, que
nous avons fous les yeux » il doit y avoir dans les
deux duchés iû,cQo hal*es. En Livonie 3 qn compte
dix’ payfans pour un hake ; & .comme il y a environ.
yooo.hakes, le total des pay fans peut monter
à 5 0 ,0 0 0 ce qui fait une population bien
foible , : eu égard à la grandeur du pays- Outre
les. allemands & un petit nombre de fuédois, ces
deux duchés font habités par des lettpniens & des
efthoniens 5 malgré la différence de leur origine
, ces peuples ont à-peu-près les mêmes moeurs
& les mêmes ufages. ■
Pay fans nobles. Tous les fàjets font ferfs.,
& leur fervitude approche de celle des efclaves
romains. Leurs maîtres ne leur doivent, .& en
général ils ne leur laiflent rien au-delà de ce qui
eft abfolument néceflaire pour leur fubfiftance 5
ils peuvent les vendre ou les échanger Suivant leur
bon plaifir , les féparer de leurs, enfans, & exercer
fur eux les droits les plus tyranniques ; mais
ils n'ont pas celui de les punir de mort , parce
que la noblefie a c e fle , fous la domination füé-
doife , d'exercer la jurifdidion criminelle. La mi-
fèi-e des pay fans eft extrême , & ils fouffrent
beaucoup de la faim depuis ie printemps jufqu’à
la récolte. Les pay fans lettoniens fonq un peu
«joins malheureux que les pay.faiis efthoniens. On
trouve beaucoup de ruffes dans ces duchés.
La noblefie qui eft nombreufe, eft prefque
toute originaire d'Allemagne, & particuliérement
de la Thuringe , de la Weftphalie, de la Poméranie
, de Mecklenbourg & d'autres contrées du
.cercle de la bafle-Saxe. On y rencontre aufli des
familles danoifes , fuédoifes & polonoifes. On
diftingue les familles .-qui fe font établies lors, de
l'arrivée des chevaliers porte -.glaive , de celles
qui font venues après eux. La matricule de Livonie
3 dre fiée en 17 4 7 , en compte cinquante-
deux. En général, cette matricule renferme cent
foixante-onze familles.
Dans le temps que ces duchés appartenoient à
la Pologne, l'in^tgenat ne fut accordé qu'à t è.r-
peu de familles é tra n g è re so n l’accorda plus
facilement fous la do.minàtion fuédoiFe , & on eft
devenu plus facile encore fous le gouvernement
rafle. On trouve peu de barons & de comtes, ÿ
.& le furpluff .de la noblefle .jouit des mêmes droits
qu’aux. L'Efthonie. & l'ifle d'Oëfel ont leur noblefle;
particulière,, ainfi que .îeyrs. états & . leur
bauc de noblefie. Mais, d'après un arrangement
fait; entre la. noblefle. des .deux duchés, ' les familles
de l'un jouiffent 1 de l'indigenat dans l'autre
, faüs - avoir befoîn d'une cdnc’eflron par tienlière.
Les nobles fe font prelque toujours voués
au métier des armes; ceux qui n'ont aucun penchant
pour cet état, vivent à la campagne, d'autres
font leurs études pour fe rendre propres à
exercer les emplois civils du pays : ces emplois
ne font donnés qu aux indigènes. Les privilèges
& \ les capitulations ftipulent aufli que la
noblefie des deux duchés aura toujours un droit
de préférence fur les charges dépendantes de la
cour impériale.
Etats de la noblejfe. Les- privilèges de la noblefle
ne fe font pas affoiblis fous la domination
rufle ; ils ont au contraire été confirmés, &
les domaines que le gouvernement fuédois lui
a enlevés, lui aont, été rendus. La noblefle
d'Efthonië. forme une; diète tous les trois
ans à R e v e l, • après en avoir averti le gouverneur
général, & à fion défaut le gouverneur en fécond,
lequel en annonce la tenue par des lettres,-
L'alfemblée eft ouverte par l'élection d'un capitaine
de la noblefle , qui répond au maréchal
provincial, & qui, à la fin de fon exercice , doit
obtenir la première charge de confeiller provincial.
On délibère à cette diète fur tous les objets
qui .concernent l'avantage du pays & les prérogatives
& libertés de la noblefle : on y nomme
une députation , à laqueJle font-joints les con-
feillers provinciaux , convoqués par le capitaine
de la noblefle ; il les convoque toutes lés fois-
qu'il furvient des matières importantes , & qui
exigent une délibération commune. Les diètes de
Livonie reflemblent en tout à celles d'Efthonië ,
fi ce n'eft que. dans celles-là le capitaine de la
noblefle eft appelle maréchal provincial.
t Entr'autres objets, on y eft occupé du maintien
des privilèges & de l'adminifti-ation de la
caiffe de la nobjefle. Après i'éleebion du maréchal
provincial, qui a rang de colonel, on pro*
cède à celle aes confeillers provinciaux , s'il y a
des places vacantes. Ceux-ci ont rang de lieutenant
colonel ; & les deux candidats, à qui la noblefle
a, donné le plus de fuffrages , font préfen?
tés au gouverneur- général pour être confirmés,
& cette confirmation fe fait en faveur de celui
qui réunit le plus de voix. Le magiftrat de Riga a
le droit d'envoyer deux députés à la diète de
Riga , pour y ODÎner fur les biens patrimoniaux
de la ville , ou lorfqu'il s'agit de conceflions pécuniaires
: cet ufage exifte depuis le temps des
chevaliers porte-glaives...
Outre-la diète , on trouve à Riga un confeil
provincial qui change tous les mois , & déJi«-
hère avec le gouvernement impérial furies-moyens
les plus faciles d'exécuter les ordres de la Ruf-
fie. C e tribunal, ainfi que. le maréchal provinc
ia l, ,eft particuliérement chargé de veiller air
main tien des privilèges du p ay s , 8e il a en même-
temps l'infpeélion des poftes..
Les ports établis le long.'de la mer Baltique,
les fleuves navigables & le lac de Peipus fon«;