
à la patrie , facrifices indifpenfables dans les cir-
conftances & juftes dans leurs principes , puisqu'il
eft hors de doute que le ftathoudérat , tel
qu'il a été rétabli au milieu des troubles de 1747,
renferme , dans la trop grauue étendue de fes
pouvoirs & de fon influence , le germe de fa
propre deftruétion , ou la perte de la conftitution
républicaine.
Les états d'Over-HTel réfolurent d'abolir le réglement
illégal & inconflitutionnel de 167/ , &
d'en former un nouveau. Pour travailler à ce
dernier ouvrage , de concert avec le llathou-
d e r , ils avoient établi une commifiion qui de voit
fe concerter avec les commiffaires du ftathouder.
Les conférences furent ouvertes le n avril 1787,
mais rompues cinq jours après, parce que les
inftru&ions des commiffaires ftathoudériens leur
enjoignoient de prendre pour bafe ce même réglement
inconflitutionnel, dont S. A. croyoit ne
pouvoir pas fe départir, & dans lequel elle ne
vouloit admettre que certains adouciffemens. C e pendant
l’illégalité & l'abfurdité de ce réglement
dans un gouvernement républicain avoient été
plus d'une fois démontrées iufqu'à l’évidence ,
notamment dans l'avis que portèrent le 14 mars
précédent à l'affemblée des Etats d'Over - Iffel 3
contre la proteftation de la pluralité de la nobleffe 3
fept membres de l'ordre équeftre. Il expofe fï bien
les raifons & les motifs du parti patriotique, que
nous croyons devoir l'inférer ici.
« Ils refpe&ent avec le feu baron van de Ca-
pellen du Pol la conflitution flathoudérienne
•comme créée par le, peuple, & ils la regardent
comme étant infiniment plus propre à la fituation
de la république, que nel’étoit la précédente conftitution
fans ftathouder , dans les dernières années
qui précédèrent l’introduélion du ftathoudérat: ma s
iis avouent avec la même franchife, ( & ç'eft
l'unique point ici en conteftation ) , que ce n'eft
pas la conftitution flathoudérienne , renfermée
dans les bornes où elle étoit circonfcrite depuis
l'établiffement de la république , & jufqu'au réglement
de 16 7 5 , ('bornes dans iefquelles elle
auroit du refler) ----- que ce n'eft pas, difentils
, cette conflitution qui eft dangereufe pour le
pays : ils fe plaignent que ces bornes aient
éée outrepaffées, & ils regrettent q ue, par le
réglement qu'on fait avoir été impofé aux régens,
de force , & d’une manière tout-à-fait illégale
en 167 cette conftitution ait été altérée au
point que les vices qu’on y a -introduits , doivent
efife&uer un jour la perte de la liberté de l'état
la ruine de la nation. Ils admettent pour certain
que la meilleure partie de la nation, en ré-
rabliffant le ftathoudérat , n'a eu d'autre but que
de donner plus d’aétivité & d’unanimité aux ré-
iolutions & à l’exécution des objets qui concern
â t les intérêts généraux de la confédération ,
par l ’influence jufte & par les confeils falutaires
de celui à qui les charges les plus éminentes &
les commiflions principales avoient été confiées
dans toutes les provinces de la confédération ,
avec le commandement des forces de terre &
de mer de toute la république, & à qui l’on
avoit accordé le droit d'entrer & de fiéger dans
le plus grand nombre des affemblées d'état, particuliérement
de la province la plus puiffante >
que ces mêmes citoyens ont defiré de réunir par
ce moyen les intérêts particuliers des confédérés \
de prévenir toutes les odieufes divifions & lçs
abus dans la direction générale des affaires publiques
; de frayer les voies à des propofitions
d'amélioration générale , qu'une perfonne , revêtue
de tant de dignités éminentes , pourroit féconder
de toute fon influence, tandis que les
intérêts ou les idées perfonnelles de quelques
aliemblées ou régens pourroient fe trouver dans
une trop grande oppofition } de faire conferver à
tous & chacun fes droits & privilèges j en un
mot, de faire fervir le ftathoudérat au bien-être
commun du pays. Voilà les bornes , dans Iefquelles
lefdits membres de l'ordre équeftre, ainfi que la
partie la plus confîdérable & la plus éclairée de
la nation , defireroient encore aujourd'hui de voir
ramener le ftathoudérat, dont, dans ce cas ,
l'exercice convenable pourroit être en tout temps
utile à la patrie : mais ils ne fauroient s'imaginer
que ç'âit été alors ou que ce puiffe être jamais
le voeu bien réfléchi & calme de la nation
de fe donner , fous le nom de ftathouder , un
maître plus abfolu, revêtu d'une autorité plus
illimitée , que ne l'a jamais été aucun des feigneurs
féculiers ou eccléfiaitiques , auquel les Provinces-
Unies ont obéi ; qu'ils aient voulu , par le choix
d'un pareil maître * ôter à leurs régens, & par une
conféquence naturelle aufli à eux mêmes, la fa-^
culte morale de juger & de voter , relativement
aux intérêts publics, uniquement d'après leurs
propres lumières & le témoignage de leur confidence
: que la précipitation avec laquelle
le ftathoudérat a été rétabli en 1747 par-tout dans
la république , noramment aufli en la province
d'Over-IffeJ ; —— la confternation &, la terreur
qu'une invafion hoftile avoit répandue dans tous
les efprits; — & le defir, qui animoit plufieurs
des régens à cette époque, de voir s’opérer un
nouvel ordre des chofes 5 -----que ces circonftances,
prifies enfemble, ont été uniquement les
caufies externes - & reconnues qui ont porté
avec la dernière inconfidération , & contre la
véritable intention de l'ordre équeftre & des
villes d’O ver-Iffel, d'une extrémité à l'autre ; ce
dont entre plufieurs a titres-preuves une des plus
manifeftes , c'eft que l'ordre équeftre & les villes
ayant créé le prince Guillaume IV leur ftathoud
e r , & c . fans qu'on leur accordât, comme il
auroit convenu, le temps, néceffaire pour une
délibération mûre & calme , & pour ainfi dire
à la h âte , & lui ayant,conféré cette dignité fur
telles inftru&ions qu'on jugeroit les plus utiles &
les plus avantageufe's pour la république & la
province, ils ont néanmoins été privés de la faculté
de former des inftru&ions fi hautement né^
ceffaires *par le refus que fit ce prince de fe fou-
mettre à des inftru&ions : refus q u i, la chofe
n'étant plus en entier, força ces régens , maigre
eux &c contre leurs intentions, à introduire de
nouveau l’odieux réglement de 16 7 5 , & les re- j
duifit à la néceflité de devoir adopter un moyen
que l'expérience dé plufieurs années a prouve au- ;
jourd'hui être à plufieurs égards, beaucoup pire
que le mal qu'en vouloit prévenir > favoir, l'établif*
femefit du ftathoudérat, d'après le réglement de
i 6y f , qui met les régens dans la dépendance la
plus abfolue du ftathouder, puifqu'ils font contraints
à abandonner entre fes mains, non-feulement
le pouvoir que, dans le fait, il exerce arbitrairement
de nommer les régens des villes &
de les démettre à fon bon piaifir, mais aufli la
difpofition directe 8c immédiate des principales
charges & de toutes les commiflions qui font à
remplir dans la province , fans la moindre précaution
contre les abus qui peuvent naître d’un
pouvoir aufli illimité. Cependant, à ce que jugent
les fouflignés, & avec eux la pluralité des
membres des états, .ainfi que la partie la plus
notable des citoyens , tant en cette province que
dans les autres, un abandon pareil déroge, linon
directement, du moins dans fes effets bien
réellement à l'autorité (ouveraine de l'état, puif-
qu'elle rend non-feulement les feigneurs ftathou-
ders maîtres abfolus de la moitié d&> gouvernement
de la province , ( favoir, de la régence des
villes qui conftiruent avec l'ordre équeftre fes
états d'Over-Iff. I ):^Tnais aufli que le pouvoir ,
qui leur avoit été laïffé de conférer les principales
charges & toutes les commiflions d'état à
qui il leur plairoit & d'en exclure d'autres à leur
bon piaifir, devoir avoir pour fuite néceffaire que
tous les régens de la province fuffent dans la
dépendance la plus abfolue 8c la plus complette de
la volonté & des defirs de celui, delamaindtw
quel ils dévoient txclivfîvement & fans cefl’e demander
& attendre tous les avantages de la régence
j pouvoir qui n’avoit jamais été déféré aux
anciens feigneurs fouverains , quels qu'ils aient
é t é , & qui en effet mettoit entre les mains des
feigneurs ftathouders l'autorité fuprême, fur-tout
fi l’on confidère en même temps qu'on leur avoit
laiffé la difpofition prefqu'abfolue des troupes à
la répartition, tant de la province d'Over-Ifxei que
des autres «.
« Les réflexions que nous venons d'expofer,
ajoutoient - ils , doivent faire convenir tout
homme impartial, que c'eft plus un jeu de mots
que quelque'chofe de réel , lorfque l’on fait la
diftinélion, ce que les feigneurs ftadhouders exer-
• cent tous ces droit , .non de leur propre c h e f,
mais àu nom de l’ordre-équeftre 8c ôes villes. »
E t , puifqu’il rie s’ agit ici que d’une vaine iüu-
fion de mots, les fouflignés ont nommé à jufte
titre , dans leur propofition, le ferment prêté
fur le réglement, un ferment contradictoire,
puifqu’il implique certainement une contradiction
notoire de jurer, « qu’on ne déférera jamais
la fouveraineté des états à qui que ce fo it , ni
en tout ni en partie « î & puis > dans le même
inftant, &■ ( pour ainfi dire ) d’une feule haleine,
d'affirmer au contraire d’une manière non-moins
folemnelle , « qu'on obfervera & exécutera le
réglement de régence ” , c'eft-à-dire , un réglement
, par lequel on ne déféroit pas, il eft vra;,
aux feigneurs ftadhouders la fouveraineté entière
, mais certainement une partie très-notable
d'icelle, & des droits régaliens majeurs d'une
nature fi effentielle , que déférés héréditairement
ils les rendoient, par leur exercice même,
maîtres & poffeffeurs de toutes les autres parties
principales delà fouveraineté, particulièrement de
celles qui ont rapport à l'état de la confédération
j de forte que les membres du gouvernement
de la province repréfentoient bien, de nom
& en apparence la fouveraineté, mais que dans
le fait ils n'étoient que de Amples inftxvnens pour
exécuter la volonté & le bon piaifir des ftadhouders
fucceflifs : & , cette contradiction une
fois prouvée, il s'enfuit que les membres de l'état
ne peuvent ni ne doivent plus fe croire tenus
par un ferment , qu'ils ont prêté de bonne fo i,
mais au préjudice évident du pays, & au dam
du bien-être national ; au contraire, ils font obligés
de s'en délier mutuellement, ou plutôt de
s'en regarder comme déchargés ipfo facto, afin
de pouvoir s'occuper fans trouble des corrections
à faire néceffairement dans ledit réglement
ce. Les membres de l ’ordre-équeftre qui ont
protefté contre lés réfolutions des états , attribuent,
È eft vrai, tout le danger qu’il y a dans
l’exercice de ces droits régaliens par M. le ftad-
holider héréditaire , uniquement à la pufillanïmité
& aux vues d’intérêt particulier de ceux qui font
revêtus, d’une charge , Ôc non au pouvoir même
de celui qui la leur a conférée j & certainement
les fouflignés font bien loin de vouloir laver de
pareils régens & autres perfonnes en place du
reproche de foibleffe qu’ils méritent : mais il,
ne faut que peu connoître le coeur humain pour
fe faire une idée des effets & de l’influence,
qu’ affure un pouvoir fi illimité de conférer toutes
les charges & toutes les commiflions dans tous
les teins à un fi grand nombre de régens déjà
favorifés , ou qui demandent encore ou attendent
des grâces. Ainfi , de quelque côté que vienne
la faute , il eft toujours certain que cette influence
doit néceffairement produire l’effet le plu$
dangereux pour le bien-être du pays, la fouve