
domaine du roi de Pruffe , fuavant un arpentage '
& une évaluation qu'on revoit 8c qu'on change ;
de temps en temps. Les propriétaires fécuhers y
payent depuis vingt jufqu'à vingt-cinq pour cent -
de leur revenu > & les eccléfiaftiques depuis quarante
jufqu'à quarante-cinq. L'arpentage & 1 e-
valuàtion de la Siléfie ont été faits par ordre du
Toi a&uel, & > à ce quon d it, fort exa&ement.
Selon cette évaluation , les terres qui appartiens j
nent à l'évêque de Brellau , font taxées à vingt-
cinq pour cent de leur rente > les autres^ revenus
des eccléfiaftiques des deux religions, à cinquante
pour cent j les commanderies de l'ordre teutoni-
que & de l'ordre de Malthe, à quarante pour
cent j les terres en fief noble, à trente-huit &
un tiers pour cent ; & les terres en roture , a
trente-cinq & un tiers.
On dit que l'arpentage & l'évaluation de la
Bohême a été l'ouvrage de plus de cent ans.^ G e
travail n'a été achevé qu'en 1748 par ordre de l’impératrice
reine. L'arpentage du duché de Milan ,
commencé fous Charles V I , n'eft fini que depuis
1760. On le regarde comme le plus exaét: qu on
ait jamais fait. Celui de la Savoie & du Piémont
a été exécuté fous les ordres du feu roi de Sardaigne’.
' t
Dans les domaines du roi de Pruffe , le revenu
de l’eglife eft taxé beaucoup plus haut que celui
des propriétaires laïcs. Le revenu de 1 églife eft
communément un impôt fur le revenu des terres,
i l n'arrive guère qu'on l'applique à leur amélioration
, & que ce qu’on y emploie tourne à l'augmentation
du grand corps du peuple. C eft: probablement
par cette raifon que fa majefté pruf-
fienne a cru qu’il étoit raifonnable ^de le faire
contribuer davantage aux befoins de 1 état. ^
En Siléfie , les terres nobles font taxées à trois
pour-cent plus haut que celles en roture Sa majefté
pruflîenne a fans doute imaginé que les privilèges
& les différentes fortes d'honneurs attachés
aux premières, compenferoient affez cette
petite charge de plus, tandis qu'une légère charge
de moins dédommageroit les autres de l'humiliation
où elles font par rapport aux premières. En
d’autres pays , le -fyftême . d'impofition ne fait
qu’-aggraver cette inégalité. Dans les états du roi
de Sardaigne & dans les provinces de France ,
fufettes à-ce qu'on appelle taille réelle , h taxe
tombe entièrement fur les terres en roture , &
e'eft un abus.
Quêlqu'égale que puiffe être d'abord une taxe
fur les terres", affifie fuivant un arpentage & une
évaluation générale, elle ne peut l'être long-tems.
Pour en prévenir l'inégalité, il faut que le gouvernement
donne une attention pénible 8c continuelle
à toutes les variations dans l'état & le
produit de chaque différente ferme ^du pays. Les
gônvernemens de Pruffe , dé-Bohême , de Sardaigne
& du duché de'Milan font a&uellement
cet embarras , qui convient fi peu à la nature
du gouvernement, qu’ il n'eft pas vraifefn-.
hlable que les chofes reftent long-temps fur 1$
même pied > & que fi elles y reftent 3 cette am
-tention occafionnera probablement a la longue
plus de peine' & de vexation aux contribuables ,
qu'elle ne les foülagera. Enfin, fi jamais on éta-.
blit des Cadaftres dans les grands royaumes , il
eft difficile qu'on s’y livre, d'une maniéré exacte9
aux travaux fans nombre qu'exige leur renouvet-
lement : lorfqu'il fera queftton de les renouveller ,
on fera prefque toujours ce qu'on a fait dans la
généralité de Montauban.
En 1666 la taille réelle y fut affffe , fuivant
un arpentage & une évaluation qu'on dit fort
exaëls. En 1-727 , l'afl’.ettc etoit devenue ah*
fôlument vicieufe. Le gouvernement n'y trouva
pas dè meilleur remède que d’impofer fur toute la*-
généralité une taxe additionnelle de cent vingt
mille livres. /Cette taxe eft mife fur les différent
diftriéis fournis à la taille par 1 ancienne af-
fiette : mais on ne la lève que fur celix qui, dans1
l'état des chofes, font moins chargés par l’ancienne
répartition qu'ils ne doivent l'être, & on
l'applique au foulagement de ceux qui font fur-
chargés. Deux .diftridts, par exemple , dont 1-iin
doit être annuellement taxé à 900 liv. & l'autie à
1100 livres,-forft taxés à 1600 liv. chacun par
l'ancienne affiette. Par la nouvelle taxe additionnelle,
ils font impôfés chacun à iigo liv. ; mais,
on ne la lève que fur celui qui n eft point affez
chargé, & bn l'applique entièrement au foûla-
gemer.t de celui qui l'eft trop , 8c qui par confisquent
ne paye que 900 liv..j le gouvernement n'y
gagne &: n'y perd rien.. Il remédie Amplement
aux inégalités provenant de l’anciéiane répartition.
L'application fie fait à la difcrction de l'intendant
de la généralité , & par çonféquent doit être
arbitraire. Les adminilîrations provinciales vont,
changer cemê'me régime , 8c elles produiront fur
cet article toüte forte de biens.
Taxes qui font proportionnées non a la rente, mais
au produit des terres. 1
Les impôts fur le produit des terres font dans
la réalité des impôts fur la rente ; 8c quoiqu’ils
puiffent être d’abord avancés par le fermier, ils
font payés finalement par le propriétaire. Il n’y
a point de fermier q u i, avant de s'engager, ne
calcule à quoi peut fe monter la tîixrne eccléfiaf-
tique, qui eft une taxe de cette efpèce.
La dixme & toutes les autres taxes fèmblâbJes
font fouvent des taxes fort inégales fous l'apparence
d'une parfaite égalité, parce qu'une certaine
portion du produit, dans différentes fit nations
, équivaut à une portion de rente fort différente.
Il y a des terres riches d'un fi grand produit,
que la moitié de ce produit fivffit. pleinement
pour faire rentrer au fermier le capital qu'il
a mis à la culture, & pour lui rendreies profits
ordinaires des fonds de ferme tels qu'on, les sei
s p
tire dans les environs. S'il n'y tivoit point de dix*
çne, if feroit en état de payer comme rente aü ;
propriétaire l'autre moitié , o u , ce qui revient au
même , la valeur de l’autre moitié. Mats u la dixme
lui enleve un dixième du produit, il faut qu il
demande un rabais du cinquième fur la rente ,
fans,quoi il ne ppurroit plus retrouver fon capital
Bc le profit ordinaire. Dans ce cas , au lieu
de fe monter à la moitié du produit ou a cinq
dixièmes, la rente ne fe montera plus qu’a quatre
dixièmes, Dans les terres pauvres, au contraire,
le produit eft quelquefois fi petit & les frais de J
culture fi confidérables, qu’il ne faut pas moins
que les quatre cinquièmes du produit pour remplacer,
le cjoital du fermier avec les profits ordinaires.
Dans ce c a s , quand il n'y autour point
de dixme , la-.rente du propriétaire ne. pourroit
excéder un cinquième ou deux dixièmes de tout
le produit. Mais fi le fermier paye en dixme un
dixième du produit, il faut qu'il le paye de moins
fur la rente du propriétaire , q u i, par confe-
quent., fe trouvera réduite à un dixième de tout
le produit. v ,
Si la dixme eft fouvent une taxe fort inégalé
fur la rente , elle eft auflï toujours un grand
découragement aux améliorations <que: pourroit
faire le propriétaire &r à la culture du fermier. ,
La dixme a rélégué long-temps la culture de la
garance aux Provinces^Unies, qui étant habitées !
par des presbytériens , 8c par confisquent affian-
chies de cet impôt deftruétif, faifioient une forte
de monopole de cette plante utile pour la teinture
contre tout le refte de 1 Europe. Les dernières
tentatives pour en introduire la culture en
Angleterre , n'ont été faites que d apres un
ft.itut qui a ordonné qu’en place de toute ef-
pèce de dixme, on ne prendroit que cinq fehelings
par acre fur la garance. . , x
Une taxe fur les terres proportionnées non a
la rente , mais au produit, eft le principal revenu
de divers états de l'A fie , comme il eft le principal
revenu de l’églife dans la plus grande partie
de l'Europe. L'empereur de la Chine perçoit la
dixième partie du produit de toutes les terres de
l'Empire. L 'eftimation.de cette dixième partie elt -
cependant fi modérée, que dans plufieurs provinces
elle n'excède pas , dit on , le treizième du
produit ordinaire. On dit que la taxe iur les terres
ou fur la rente des terres', qu’on éroit dans 1 U-
fage de payer au gouvernement mahometan du
Bengale, avant que ce pays tombât au pouvoir
-de la compagnie angloife , fe montoit environ au
cinquième du produit. C'eft a quoi 1 on prétend
que fe montoit auflï la taxe fur les . terres de 1 ancienne
Egypte. • / /r
On dit qu'en Afie cette forte de taxe interelle
le fouverain à l'amélioration & à la culture des
terres. On ajoute que les fouverains de la Chine,
ceux du Bengale, tandis qu'il rétoit fournis au
gouvernement mahometan, 8c ceux de 1 ancienne
I M P ’5
Egypte , ont eu h plus grande attention à faire
& entretenir de bons chemins & des canaux navigables
, afin de favorifer le plus qu ils pouvoient
Taccroiffement de la quantité & de la valeur de
chaque partie du produit, en ouvrant a chacune
le marche le plus étendu que comportaient leurs
domaines. Mais la dixme de Uglife ell divifee
en tant de petites portions, qu aucun de les pi
priétaires ne fauroit avoir un interet de cette nature.
Le curé d’une paroiffe ne trouveroit jamais
.fon compte à faire un chemin ou un canal pour
donner au loin un débouche au produit de la
paroiffe. Ces impôts , quand ils font deftmes a
1* entretien de l’état, peuvent avoir,quelques avantages
qui en contrebalancent l’inconvement. Uel-
tinés & entretenir l'églife ils n ont que leurs in-
convéniens oui ne font çompenfes par rien.
Les taxes fur le produit des , terres peuvent
être levées ou en. nature, pu en argent..
Le cure d’ une paroiffe ou un homme d une petite
fortune , qui vit de fon bien , peuvent trouver
quelquefois de l’avantage a recevoir en.nature,
l ’un fa. dixme, & . l'autre fa rente. L efpace où
il faut recueillir Sc la quantité a recueillir , ion-
fi peu de chofê , qu’ ils peuvent avoir l oeil lur la
perception de chaque partie de ce qui leur e: t
dû. Si les rentes d’ un homme fort riche etoient .
en nature dans une province eloignee , il ferait
en grand danger de perdre beaucoup par a ne
gligence, & enc'ore plus pat la faute de fes tac-
teurs & de fes agens. La perte du f™Yer3m, ’
par la mauvaife conduite &. la déprédation de
fes colle&eurs, feroit néceffairement encore plus
grande; On dit cependant qu’une partie du revenu
public fe touche en nature à la Chine. Les mandarins
& les autres receveurs font fort mterefies
à continuer une pratique'fujette a bien plus d a-
bus & de malverfations que le paiement en argen..
Une taxe fur le produit dés terres, levee en
argent, peutfe lever ou fuivant une appréciation
qui fuive les variations du prix courant, ou lul-
vant une évaluation fix e, c’ eff-à-dire toujours
à tant le bojlTeau de b le d , pat exemple, quel
qu’ en foit le prix courant. Le produit d une taxe
levée de la première façon changera, félon toutes
les variations qui arriveront dans le produit
réel des terres, félon les progrès ou la de,cadence
de la culture. Le produit d’ une taxe levee de la
fécondé manière variera non-feulement fuivant les
variations dans le produit de la terre , mais fuivant
celles qui arriveront & dans la valeur des
métaux précieux , & dans la quantité de ces métaux
contenus en différens temps fous une meme
dénomination de la monnoie. , , . ,
■ Si au lieu d’une certaine portion du produit de
la terre, ou du prix de cette portion, 1 on doit
paver une certaine fonime d’argent, en compen-
fation de toute taxe ou dixme , 1 impôt eft pour
lors exactement de la même nature que la taxe
angloife fur les terres. 11 ne hauue 6c ne baill»