
garçons, que quelques mères élèvent dans les
travaux réfervés aux filles, dans l'intention de
les fouftraire aux périlleux h a fa rds des combats.
Les habitans de Kadiak font hofpitaliers ; ils ont
coutume d'offrir aux étrangers une coupe d’eau
fraîche j puis ils leur fervent de la chair de baleine
, de la viande de lion de mer, du poiffon ,
des baies arroiées d ’huile de poiffon, & du fa-
rana bouilli, affaifonné avec de la même huile.
Us ne font fatisfaits que lorfque l’on mange tout
ce qu’ils vous offrent ; plus on mange , plus ils fe
croient honorés, & ce que l’on ne peut pas
manger , c ’eft les obliger que d’en emporter les
reûes. Lor'qu’on eft ralfafié des mets qu ils fe
font empreflés de vous offrir, ils vous préparent
un bain de vapeur ; ils vous y conduifent, puis ils
vous portent à boire une jatte de graifle de veau
ou d’ours marin fondue.
« Les habitans des îles Ëfdok’ff, ditM.Saue r,
»> vont à la chaffe en février fur la côte de Kadiak.
*» Ils continuent la chaffe du Kotie ( efpèçe de
#ï phoque) pendant tout le mois de mars. En
” avril ils partent de Kadiak, & fe rendent dans
" les îles voifines pour*y cnaffer les loutres de
» mer, dont la fourrure n’eft jamais plus belle
" qu en avril ou en mai. Ils pourfuivent dans le
»> même temps les veaux mat ins & les lions de
*’ mer j ils ramaffent des oeufs d’oifeaux aqua-
9> tiques. Le premier juin ils commencent la pêche
»» de la baleine & des autres poiffons $ ils ramaf-
« fent la racine de farana & cueillent diverfes
** efpèces de baies. Ils continuent la pêche & la
»• chaffe jufqu’ à la fin d’oôtobre,-temps où ils
H regagnent leurs habitations d’hiver. Ils paffent
» le mois de novembre à fe vifiter les uns les
« autres, à donner des feftins à la manière des
** Ounalafchkans, & à fe livrer à la danfe en fe
»3 couvrant d’ un mafque ou en fe peignant le
» vifage. »
Ces infulaires, autant qu’on peut en juger par
les foibles renfeignemens qu’ on a fur leur population
, ne font probablement pas au nombre de
plus de 6oo.
Kamtchadales. Les habitans du Kamtchatka ne
font plus aujourd’hui ce qu’ils étoiént avant la
domination rufiè; leur religion, leurs moeurs,
leur langue même, font changées. Ils étoient
idolâtres, ils font chrétiens du rit grec ; ils étoient
fauvages, mais libres & heureux ; ils ont une
fauffe apparence de civilifation, & ils l’ont pauvres
& affervis. Ces peuples prétendent être aborigènes
de leur péninfule montueufe & volcanique ;
ils fe nomment dans leur idiome , ltolmatchs. Naturellement
doux & hofpitaliers, ils aiment paf-
fionnément les liqueurs l'piritueufes. Leur principale
occupation eft la pêche pendant l’é té ; au
printemps, ils vont dans les marais & parmi les
rochers à la recherche des oeufs d’oifeaux aquatiques,
qu’ ils confervent enfuite pendant toute
l’année dans de l ’huile de poiffon j l’automne ils
vont à la recherche du fourrage pour leur bétail ;
l ’hiver ils fe tiennent prefque toujours enfermés
dans leurs maifons. Leur nourriture confifie en
poiffon fec pendant l’été & falé pendant l’h iv e r>
en racines & en baies de diverfes plantes. Malgré
les tentatives réitérées du gouvernement ruffe ,
les naturels du Kamtchatka n’ont point encore pu
s’adonner à la culture de la terre.
Leur population , bien inférieure à ce qu’ elle
étoit jadis, ne s’élève pas aujourd’hui à iyoo
naturels.
Tchoutskis. Ces peuples, indigènes du verfant
occidental de l ’Afie feptentrionale vis-à-vis l’ Amérique
, fous le cercle polaire, font divifés en
deux tribus, l’une ftationnaire & l’ autre errante.
Les Tchoutskis ftationnaires font aélifs & laborieux
; ce font lesinduftriels de ces parages ; leurs
canots, leurs arcs, leurs lances, leurs flèches,
leurs vêtemens & tous leurs uftenfiles, font faits
avec beaucoup d’élégance & de folidité. C e
font eux qui fourniffent de tous ces objets les
Tchoutskis errans,• & comme leur induflrie ne les
empêche pas de fe livrer à la guerre, ils leur
vendent auflî les hommes & les femmes qu’ ils
font prifonniers dans les combats.
Les Tchoutskis ftationnaires ont pour l’hiver des
habitations fouterraines de formf carrée, au milieu
defquelles eft placé un foyer formé ^de quatre
grofles pierres. Us brûlent, pour fe chauffer, des
os de baleine qu’ ils arrofent avec de l’huile de
poiffon. Pendant l’ été ils habitent fous des tentes
faites de peaux de veaux marins. Ces hommes
font grands, robuftes & bien faits; ils paroiffent
avoir le plus grand mépris pour les hommes d’ une
taille médiocre. Les traits de leur vifage font beaux
& réguliers, fuivant le Journal du commodore
Billings ; leurs jambes & leurs bras font tatoués,
de manière qu’ on y lit le nombre d’ennemis qu’ ils
ont tués & de prifonniers qu’ ils ont faits. Leurs
femmes font d’une taille moyenne ; elles ne font
point dépourvues de grâce, & leur figure, a fies
régulière , n’eft pas fans agrémeas. Par une forte
de coquetterie analogue à celle de ces peuples
fauvages, le tatouage de leurs joues forme deux
efpèces de gourmettes , qui depuis les tempes
defeendent en pointe jufqu’au menton ; leur
menton eft tatoué aufli, de même que le front*
Leurs bras font également ornés de deflîns tatoués
depuis l’épaule jufqu’ aux premières phalanges des
doigts. Leurs cheveux noirs, également partagés
fur le front, retombent en deux treffes fur leurs
épaules.
Les Tchoutskis ftationnaires forment une peuplade
de 2 à 3000 mâles.
Les Tchoutskis errans ont les mêmes caractères
phyfiques & le même langage que les ftationnaires.
Très-fouvent ils font en guerre avec les peuples
des côtes de l’ Amérique feptentrionale, de l’ autre
côté du détroit de Bering. Leurs querelles naif-
/
fent ordinairement de leur rivalité pour la chaffe
des animaux marins.
Ces peuples fe regardent comme des êtres
fupérieurs & comme les plus indépendans des
hommes. Ils ont le plus grand mépris pour les
peuples voifîns, dont ils fe font craindre. Les
rennes forment la principaV richeffe de cette
peuplade, à laquelle on donne aufli le nom de
Tchoutskis-Renncs. Le produit de leur pêche, ou
les fourrures des animaux qu’ ils tuent à la chaffe,
leur fervent à fe procurer par échange, auprès
dés Tchoutskis ftationnaires ÔC des Ruffes, tout
ce dont ils ont befoin.
Quoiqu'on ne connoiffe pas la religion des
Tchoutskis, on fait cependant qu’ ils honorent trois
principales divinités : le Dieu du fe u , celui du
bien & celui du mal. On conçoit facilement que
ce culte foit en rapport avec les idées de ces
peuples , chez qui les befoins phyfiques font tout,
& qui partageant l’année en deux faifons, l’été &
l’ hiver, doivent confidérer le feu comme un bienfait
du ciel. Les images de leurs dieux font des
morceaux de bois furmontés d une tête groflière-
ment fculprée- Leurs cérémonies religieuses confident
principalement en facrifices. Ils immolent
des rennes en leur donnant un coup de lance, &
fi l’ animal tombe du côté droit ou du côté gauche,
c ’eft un préfage heureux ou malheureux \ ils prennent
enfuite du fang de la vidtime , ils en jettent
une partie vers le fole il, une autre vers la mer, &
une autre vers la terre ou les montagnes- Leurs
magiciens ou leurs prêtres examinent enfuite les
entrailles de la vidtime . & décident s’ il y a lieu à
efpérer quelque mal ou quelque bienfait.
Il peutparoître affez fingulier de retrouver chez
ces fauvages des pratiques religieufes & des préjugés
relatifs au coté droit ou au côté gauche, ainfi
qu’au nombre trois3 qui rappellent certaines idées
de quelques peuples éclairés de l’ antiquité, fi
l’on n’étoit point fondé à croire que l’ orgânifa-
tion de l’homme fait naître en lui des fenfations
& des idées en rapport avec cette organifation ,
& qui doivent être les mêmes à différentes latitudes.
Les Tchouskis de l ’une & de l’autre tribu font
fort attachés à leurs femmes & à leurs enfans.
M. Sauer dit que fi une femme étoit infidèle,
'elle fêroit abandonnée par tous fes compatriotes
Cependant il paroît que ce n’eft que chez les
Tchoutskis errans qu’ on obferVê Ces idées, qui annoncent
des fnoe'-.rs affez pures ; les Tchoutskis
ftationnaires , au contraire, offrent leurs efclaves
& même leurs femmes aux étrangers ; & il arrive
fréquemment que lorfqu’une femme n’eft pas contente
de fon mari, elle le quitte pour en prendre
un autre.
Cette peuplade ne paroît pas être moins eon-
fidérable que la précédente; ainfi on peut l ’évaluer
à environ 3000 mâles.
Tongoufes. Ces Tartares habitent les bords de
l’ Indigirka; ils font fournis à un ch e f qui prend le
titre de prince. Les voyageurs les repréfentent
comme tellement indolens, q u e , s’il faut en croire.
le témoignage du capitaine Billings, ils ne fortent
de leur apathie ordinaire que pour fat is fa ire aux
befoins de la nature ; la faim feule les entraîne
vers la chaffe. Comme ils font peu fer.fibles aux
effets du froid & de la chaleur, & qu’ils favent fe
contenter de ce que la nature produit dans leur
contrée, fermée en quelque forte à l'accès des
hommes par de hautes montagnes & l ’Océan
glacial, ils font heureux, libres & joyeux.
Ces peuples pafteurs errent avec leurs troupeaux,
depuis l'embouchure du fleuve Amour,
jufqu’au lac Ba-ïkal. Ils parcourent dans tous les
fens le vafle baflin d elà Léna; mais ils ont foin
d ’éviter la rencontre des Yakouts, en recherchant
principalement les montagnes. Souvent même ils
s’avancent jufque fur les frontières de la Chine ,
où plufieurs ont confervé , dit-on, quelques éta-
bliffemens. Ils aiment à changer fréquemment de
réfidence : il eft rare que leurs tentes relient plus
de fix jours fixées à la même place.
Les Tongoufes n’ ont point encore etnSraffi le
chriftianifme^ quelques-uns font baptifés, mais
le plus grand nombre eft idolâtre. Us ont des devins
& ils lâcrifient aux mauvais génies. Ils font
toutefois religieux obfervateurs de leur parole, &
lorfqu’ils font le commerce avec les Ruffes, ils
fe font refpe&er par leur loyauté.
La polygamie eft en ufage chez eux ; ils ref-
pe&ent la chafteté de leurs femmes, mais il n’eft
pas rare de voir un père offrir fa fille à un ami ou
à un étranger. Chez eux le mariage eft une forte
de marché: le Tongoufe qui choifit une compagne
, offre au père de c e lle -c i, un certain
nombre de rennes, ou bien il s’offre à travailler
, pour le père pendant un temps déterminé.
Les Tongoufes font d’une taille médiocre ,
mais il font fort agiles- Ils ont les yeux petits , le
nez aplati, & la phyfionomie douce , animée
; & riante. C e n’eft peut-être pas exagérer leur
nombre que de le porter à environ 30,000 mâles.
Yakouts. Le pays fitué fur la rive gauche de la
Léna eft habité par une horde de Tartares mongo
ls , auxquels on donne le nom de Yakou-s,
quoiqu’elle prenne celui de Sokhas. Ces peuples,
qui habitoient jadis les environs du lac Baïkal,
font divifés en plufîeurfc tribus, répandues dans
les plaines qu’arrofent l’O k h o t , l’Omicon, le
Momo, l’ Indigiika, l'Alafey , la Kovima &
l’ Tana, tandis que les Tongoufes habitent les
montagnes. D’autres Yakouts habitent les bords
- dmWilhoui, de l ’Aldan & de l’Qud , & les prairies
qui s’étendent au fud des montagnes de Vir-
khoransky. Ceux de cette dernière contrée font
généralement d’une taille élevée ; ils ont depuis
cinq pieds fix pouces jufqu'à fix pieds : ils fonj:
agiles & robuftes. Les autres, & furtouteeux qui
fe rapprochent le plus du Nord, font d'une taille