
deux pointes 6c s'élèvent au-deflus dé la furface
de l'eau. Partout on remarque la fucceflïon & la
fuperpofition des roches, mais elles ne font point
horizontales, elles font inclinées à l’horizon de la
mer, Sr y touchent prefque par l’extrémité de-leur
angles ce qui indique des terrains de formation ancienne.
Toute cette côte eft extrêmement brifée.
L’ïle de Java eft fort grande : fa longueur eft
de 23 f lieues et fa largeur de 25. à 40; fa fuper-
ficie eft d’environ *6,yoo lieues carrées. Elle eft
riche & opulente, & contient plufieurs îoyaumes:
ceux de Bentam, de Jacatra, de Batavia, capitale
des pofl'eflions Hollandaifes; celui de Thé-
tibon j dont le roi eft indépendant du mata-
ram ou empereur, qui a fous fa domination
l’intérieur deTîle, 6c fait fa rélidence à Carta-
fouraj le pays de Tagal & le royaume de Greflie,
qui a fon roi particulier.
L’île produit le blé, le riz, la canne à fucre, le
benjoin, le poivre, & des drogueries de toutes
efpèces. L es autres végétaux font : le bananier
nain ( p if fa n g r a d ia ) , qui produit un fruit très-
délicat; la goyarier commun ( p f id ium p y r i f e r u m ) ;
le yambofier de Malaca (eu g e n ia m a la c e n j î s )$ \ e ca-
tappa ( te rm in a lia c a ta p p a ') \ le papayer ( c a r ica
p a p a y a ) ; le jacquier des Indes ( a r to ca rp u s c om m
u a i s ); l’ananas, &c. L’arbre de tek ( te c lo n a )
règne dans les forêts : c’eft fous fon ombrage que
croiftent les cocotiers, le p a n c r a t ium a m b o in e n je ,
le mufcadier uniforme, plufieurs efpèces Ü a v a r ia ,
d‘ h é lift'e r e s , de b a u h in ia , & cette a g a v e avec
laquelle les habitans font des étoffes. Les marécages
fe couvrent partout des larges feuilles du
n ym p hoe a n e lum b o , & le p i f t ia f t r a t io t e s forme de
belles rofaces à la furface des rivières. Mais la
plus fingulière produêlion végétale de Java eft le
b u k o n -u p a s , dont les émanations donnent la mort.
On a regardé long-temps fon exiftence comme
fabuleufe. Plufieurs voyageurs difent qu’on ne
trouve autour de lui à , plus de 1 y milles de
Tayon, ni créatures vivantes, ni arbres, ni herbes,
ni buiflons; qu’il n’y a que des criminels
condamnés à mort qui ofent franchir cette ligne
redoutable, & qu’ils n’obtiennent leur grâce qu'en
rapportant un peu de .la gomme qui découle
de l’arbre mortifère; qu’enfin, on a remarqué
que fur fept cents criminels qui ont fubi cette
épreuve dans l’efpace de 30 ans, il n’er. étoit revenu
que dix. Il y a fans doute beaucoup d’exagération
dans ces récits. On fait d’une manière
pofitive, par les expériences que M. Lefchenault
a faites fur les lieux , 6c par celles que MM. De-
îille 6c Magendie ont faites en France, qu’il découle
du tronc de cet arbre un fuc vifqueux, jaunâtre,
d’une faveur amère, qui, introduit dans
l'eftpmac ou mêlé au fang par l’abforbtion de la
peau, ou par une incifion, caufe promptement
la mort aux hommes 6c aux animaux; que pris
dans l’intérieur, ce fuc agi fortement fur le l’yftème
digeftif, en produifant par le haut 6c par le bas
des évacuations fuivies d’une mort aufli prompte
que douloureufe; qu’enfin, introduit par une blef-
fure,il fupprime l'a&ion des nerfs 6c caufe une
paralyfie générale à laquelle on ne peut apporter
aucun remède. M. Lefchenault s’eft afluré que
non-feulement on pouvoit approcher cet arbre
fansdanger, mais que les oifeaux, les reptiles &
les infe&es, fe polènt deflus fans qu’il en réfulte
pour eux aucun inconvénient fâcheux. Il a reconnu
qu’il ne faut pas s’arrêter long-temps fous
fon ombre, ni manier imprudemment fon fuc,
parce qu’il en réfulte un mal de tête violent, une
enflure générale, des naufées 6c des vomiflemens
que l’on peut voir fe difliper au bout de quelques
jours, mais qui fouvent peuvent être fuivis de la
mort.
Les animaux de Java font des buffles généralement
petits; des moutons couverts de poils au
lieu de laine ; des chevaux petits mais vigoureux ;
des fangliers, quelques rhinocéros, plufieurs efpèces
de finges; l’écureuil bicolore 6c l’écüreuil
volant ( m o r ch u s ja v a n i c u s ). Les paons font communs
dans les forêts, ainfi que le redoutable b o a -
c o n fir ico r3 lèrpent qui, félon M. Lefchenault, avale
des boeufs & des chevaux, mais dont la morfure
n’eft point vénéneufe. Les rivières font peuplées
d’énormes crocodiles, & pendant la chaleur du
jour on voit, autour des lieux habités, voltiger le
dra gon v o la n t , petit reptile qui fe nourrit dün-
fe&es.
On compte dans l’île dix hommes pour une
femme. La religion du pays eft la manométane
qui y fut apportée par un Arabe dont la tombe
eft en grande vénération.
B o r n é o ou P u l o - K ‘ Lernatan § fut découverte, en
iy n , par dom Georges de Menefcès, portugais.
Ses côtes font habitées par des Malais, 6c l’intérieur
par des peuples appelés B e a jo s ou D a y a k s ,
nation peu connue. L’intérieur de l’île n’ayant
pas encore été fuffifamment exploré, nous ne donnerons
que peu de détails fur fon fol 6c fes productions.
Sa longueur du nord au fud eft d'environ
300 lieues, 6c fa largeur de l’eft à l’oueft
de 200; ainfi elle furpafle la France en étendue.
Elle eft traverfée dans toute fa longueur par
deux chaînes de montagnes dont la plus confidé-
rable, qui paffe par le centre de l’île, eft appelée
M o n t s d e s P u n am s . D autres montagnes bordent
les côtes orientales 6 c occidentales. Il y a lieu de
croire que ces montagnes font peu élevées, puif-
que l’on dit qu’elles forment un plateau marécageux
inondé dans la fai fon des pluies. D'autres
prétendent au contraire que ces montagnes, dont
les plus importantes on: reçu le nom de M o n ta
g n e s d e C r i f ia l3 parce qu’on y trouve beaucoup
de criftaux, font très-élevées, 6c qu’à leur bafe l\
exifte un vafte làc d’où fortent les principales rivières
de l’île. Ce qu’il y a de certain , c’eft que
plufieurs de ces montagnes font des volcans
éteints, que d’autres fument encore, & qu’elles
font les-principales caufes des terribles tremble- |
mens de terre que l’ on relient dans l’île. Les plus
importantes rivières font le Banjermajftn3 qu’ on n'a I
remontée que jufqu’à 50. lieues de fon embouchure,
qui fe trouve au fud dans la baie de ce
nom ; la Poutianak, qui a la fiehne fur la cote occidentale,
& que les Hollandais ont remontée, en
1823, jufqu’ à 200 lieues dans lesterres; le Sambalc
6c le Bornéo, fur la même côte ; 6c le Pajjir3(ur la
côte orientale : mais on ne connoît, pour ainfi
d ite , que les embouchures de ces trois rivières.
Cette île produit le r iz , Je coton, la canne à fuc
r e , le poivre, le camphre, le girofle, la muf-
cade 6c la patate ; le fandal, l ’ébène 6c différens
bois de teinture y croiftent en abondance. On y
recueille diverfes efpèces de rotangs : le rotang
commun ( calamus rotang Linn.) dont on fait des
cannes ; le rotang a fang de dragon {calamus draco) ,
précieux par là réfine qu’ il fécrète ; le rotang vrai
( calamus verus ) , qui fert à faire des nattes,
des baguettes à battre les habits 6c les fiéges
dits de canne. Enfin les forêts de Bornéo font remplies
d’arbres d’une hauteur prodigieufe.
Les animaux de cette île font le tigre, la panthère
, le cheval, l’éléphant 6c la plus grande ef-
pèce de linge, le fimia pongo 6c l’orang-outang
( fimia fatyrus). On y trouve aufli des boeufs fau-
vages & l’axis ( cervus axis Linn.), efipèce de cerf
qui fe tien t, dit Pennant, dans les lieux marécageux
, & que les naturels appellent cerf d'eau.
Le climat de Bornéo n’eft point aufli chaud que
le pourroit faire croire là fituation fous la ligne
équinoxiale : le thermomètre de Réaumur n'y def-
cend ordinairement qu’à 22 degrés, & s’élève rarement
au-deflus de 27 à 28. Les brifes de mer 6c
les vents de l’ intérieur, ainfi que les pluies continuelles
qui tombent depuis novembre jufqu’en
mai, refroidiflent fingulièrement l’atmofphère.
. La population de l’île n’eft évaluée qu’ à a,000,coo
d’ habitans , compofés en grande partie ae Malais,
ou plutôt d’ un mélange de ce peuple avec des Javanais
, des Bougghis 6c des Macalfares ; 200,000
Chinois font répartis dans I’île ; l’intérieur e f t ,
comme nous l’avons d it, peuplé par les Dayaks ;
mais les contrées les plus inacceflibles font habitées
par dès Papous: ou Négrillos.
Sumatra. Cette île , dont la longueur eft de 390
lieues 6c la largeur de 60 à 80, eft couverte de
pâturages & fertile en r iz , en grains, en épice- j
ries 6c en fruits. L’arbre qui produit la gomme de ;
benjoin & celui qui donne le camphre , croiftent j
dans une forêt fituée fur la côte occidentale de i
de l’île : le poivre eft fa principale richeffe. Qn j
y récolte encore plufieurs fruits précieux, tels
que le mangouftan, qui réunit la douceur du raifin 1
à l'acidité de l’orange 6c qui pafle pour un remède
univerfel; le fruit de l'arbre à pain, celui de
Y eugenia malaceûfis, qui reflemble par fa forme
à une poire; des ananas, des citrons, des oranges
& des grenades. Située.fous la ligne, qui
la traverfe par le milieu, les pluies en rendent
l’air malfain ; dans l’intérieur, deux chaînes
de montagnes, couvertes d’arbrifleaux, renferment
des mines d’or 6c d’argent. Les côtes font
prefque partout garnies de refcifs de corail.
B a l i ou la p e t it e J a v a , eft extrêmement peuplée.
Située à l’eft de Java, elle a environ 14 lieues
de tour, renferme une ville du même nom, 6z
abonde en riz 6c en fruits de toutes efpèces ; mais
elle eft dépourvue de bois. Plufieurs lacs fervent
à l’irrigation des terres. Ses habitans font noirs 6c
très-belliqueux ; quand ils meurent, on brûle fur
leur bûcher celle de leurs femmes qu’ils ont le
plus aimée..
M a d u r a n’a que 30 lieues de long, fur 7 à 10
de large : elle n’eft féparée de Java quo par un
canal fort étroit.
B a n c a a y 2.lieues dans fa plus grande longueur,
& 20 dans fa plus grande largeur. Les pluies y font
fréquentes depuis feptembre jufqu’en avril. Les
principales rivières font le D e b o u s 6 c le P y r i n g ,
fur la côte occidentale , le M e r a v ia n y fur la côte
oppolée, 1*A n t u n 6 c le L a y a n y , qui fe jettent dans
la baie de Klabert. Les forêts produifent une
; grande variété de beaux bois, 6c furtout d’ébène.
L’île renferme des cerfs, des fangliers & des
i couleuvres.
S a v u ou S a v o u , que l’on peut regarder comme
. appartenant au groupe de la Sonde, a environ
8 lieues de longueur, fur 3 à 4 de largeur. Ses
produ&ions font les mêmes que celles des autres
îles.
N a tu r e g é o lo g iq u e d u te r r a in d e c e s î le s . Le fol de
l’île dé S um a t r a eft peu élevé dans fa partie orientale
; il paroît compofé de fable vert, de craie &
de terrain d’alluvion, qui recouvre une grande
étendue, 6c qui eft traverfé par prefque toutes
les grandes rivières qui exiftent dans cette contrée.
Ces dépôts d’alluvion augmentent continuellement,
à raifon du peu d’élévation du niveau
deTÎIe au-deflus de la mer, 6c tendent à reculer
la li nite des eaux 5 aufli la ville de Palembang,
qui étoit jadis un port de mer, eft-elle aujourd’hui
éloignée de 60 milles de l’embouchure de la
rivière. A l’ oueft de cette ville, il exifte une
chaîne de montagnes qui s’étend dans la même
direction que celle de la péninfule de Malaga,
.c ’eft-à-dire du fud-oueft au nord-eft.
M. William Jack, à qui nous empruntons ces details
, extraits des M ém o i r e s d e la S o c ié t é g é o lo g iq u e
d e L o n d r e s , croit que la bafe de l’île eft primitive ;
le granité fe trouve à Ayer-Bangy 6c à Ménany-
Kaban , mais les roches de trapp font les plus
communes. Les montagnes élevees 6c prefqu'ifo-
lées font volcaniques ; elles diffèrent de celles de
Java, en.ee que celles-ci font coniques, & que
i les autres forment une chaîne de crêtes.
En parcourant la côte occidentale du nord au
fud, on trouve d’abord des montagnes calcaires qui
fe terminent à la pointe d’Achéen; à la baie de