
fableux eft couvert d’environ vingt-cinq braffes
d'eau. (J . H .)
PLAINES. On donne fer^om de plaines à des
terrains d’une grande été noue qui ne prefentent
m inflexions, ni protubérances remarquables,
quoiqu'il foit rare d’en rencontrer qui ioient d’ une
horizontalité parfaite. Prefque toutes, au contraire,
font inclinées vers un ou piufieurs points de leur
furface, moins, comme quelques auteurs l'ont
d it , pour que les eaux y trouvant un écoulement
nécelïaire, n'y forment point, en y féjournant,
des marais fmge'ux, dont les exhalaifons feroient
nuifibles aux animaux, que parce qu’ il eft prouvé
par les faits géologiques les mieux conftatés, que
leur inclinaifon eft due au contraire à l ’antique
écoulement des eaux qui couvraient leur furface
â l’époque où l'homme n’exiftoit point encore.
Les plaines occupent dans les grandes chaînes
de montagnes des plateaux élevés. Le plateau du
Thibet offre un exemple de ces vaftes plaines, il
femble fe perdre à l'horizon. Quelquefois les plaines
ne font que la vafte étendue qui fépare deux
chaînes de hautes montagnes : telle eft celle qu’ oc-
citpent plufïeurs parties de l’Egypte. D ’autres fois
encore, leur étendue efl trop confidérable pour
prendre le titre de vallées : telles font celles
u’occupent les ffeppes qui s’étendent au nord
e la mer d’Aral} telles font encore celles qui, fous
le nom de défères, continuent de fi grandes fur-
faces au milieu de l’Afrique.
Sur ce continent eHes fopt couvertes de fables
arides, mêlés de coquilles évidemment marines ,
qui repofent fur un fol argileux & falifère qui annonce
l’antique préfence des eaux de l’Océan :
tel eft le vafte défert de Sahara , dont les fables
mouvans, tranfportés au loin par l’aquilon, font
l'effroi, du voyageur. Quelquefois ces plaines fa-
blonneufes font traverlées par de grandes rivières
qui fe perdent dans ces fables , où elles forment
fouvent de vaftes lacs dus au peu de pente que
préfeutent ces terrains. Ainfî ce lac Tlaad , cette
mer intérieure, dont l’exiftence eft prouvée maintenant,
& qui le trouve fous le 11*. parallèle,
n’eft qu’un lac femblable , quoique fon étendue ,
que l'on évalue à cinquante lieues du nord au
fud , & à quarante de l’eft à l'ou e ft, puiffe la
faire confidérer comme une petite Cafpienne.
Les plaines ou lianes de l’ Amérique méridionale
, les pampas 3c les favanes font, lous certains
rapports , allez femblables aux déferts de l’Afrique
& aux fteppes de l'Afie : même nudité, même uniformité.
On en connoît qui ont plus de 440 lieues
de long, & leur longueur prefque toujours furipaffe
de beaucoup leur largeur. On y voit une belle végé-‘
tation pendant la faifon des pluies* mais pendant,
4e temps de la fécherèffe elles prennent l’afpeéf des
déferts. L’herbe s’y rédùic en pouflière, dit M. de
Humboldt} la terre s ’y fend 8c fe couvre de cre-
yaffes.
Ces plaines font peu élevées au-deffus gu niveau
des mers ; leur hauteur ne dépaffe pas 80 à
100 mètres} elles ont cependant plus de pente
que les déferts de l'Afrique & de l’ Afie i elles
n'ont pas ces cours d’eau qui fe perdent dans les
fables.
# Dans la zone équatoriale, les plaines de l’Amérique
font généralement inclinées vers le fud 8c
vers l’eft , 8c ce qui les diftingue, c ’eft l’ uniformité
'8c le niveau parfait du fol ; tandis qu’en
Afrique, les déferts offrent beaucoup d inégalités
, de collines, de ravines deflechées, & de
rochers qui s’élèvent au-deflus des fables.
Les plaines de l’Amérique préfer.tent cependant
quelquefois aufli des roches fra&urées de
grès 8c de calcaire qui s’élèvent à quatre ou cinq
pieds au-deflus du fol , ou des protubérances qui
failliffent à quelques toifes de nauteur.
Au milieu de ces plaines, dont l'immenfité fatigue
l’oeil du voyageur, 8c dont l’horizon femble
fuir à rnefure qu’on avance, quelques palmiers
s’élancent çà 8c là dans les airs } ils y font plus
nombreux qti’en Afrique, mais aufli on n’y voit
point d’oafis. Voye\ ce mot.
Suivant M. de Humboldt, les llanos qui s’étendent
dans le fens de l’équateur ƒ font quatre fois
moins larges que le grand défert de l’Afrique.
Plus ces plaines fe prolongent dans cette direction
, plus elles font chaudes, plus elles font brûlées
par le foleil. Voyej Llanos, Pampas, Sa-
ViNfiS.
En A fîe , les plaines prefentent le même caractère
qu’en Afrique, irais elles font généralement
plus eievées } ce font de vaftes plateaux placés les
uns au-deflus des autres. (V o y e \ Plateau.) Les
moins élevées font celles qui s’étendent le long
de la mer Glaciale jj ou celles qui féparent la mer
d’Azof dé la mer Cafpienne. Ces plaines renferment
encore quelques lacs qui fe deflecheront &
difparoîtront comme ont ditparu ceux qui s’éten-
doient jadis dans l’immenfe plaine qui fe termine
au golfe Perfique. On ne retrouve plus la plupart
dè ceux que Strabon 8c Pline ont décrits } la mer
d’Aral même a dû fe deffécher avec une rapidité
étonnante , puifque, fuivant c e que lès Kirghis
ont aflhré au colonel Georges Mayendorff, eft
moins d'un fiècle fes eaux fe font retirées d’environ
quinze lieues de la .montagne de Saribou-
lak. ( Voye% la Relation du voyage d* Orenbourg a
Boukhara, fait en iSzo par ordre de l'empereur
Alexandre. )
En Europe 8c dans le nord de l'Amérique, les
plaines occupant de véritables baffms , leur fond
a dû plus facilement fe couvrir de lacs d'eau
douce alimentés par les eaux pluviales & par celles
qui defeendirent des montagnes après la retraite
des mers } de là ces nombreufes formations lacuf-
tes qui ont fuccédé aux dépôts marins , c e qui
né s obfèrve point ni dans l'Afie ni dans l ’Afrique
} de là aufli ces alluvions fi confidérables 8c fi
fécondes , atteftées par les terres rougeâtres qui
forment h dernière couche du fol dans la plupart
des contrées de la France, de l'Allemagne, des
Pays-Bas 8c de la Pologne, & qui fe retrouvent
aulfi '* mais avec que’ques caractères differens, dans
les Etats-Unis d’ Amérique.
Cependant les parties les plus baffes de la plaine
qui fe prolonge entre l’Obi 8c le Jenifleï, fur Jes
bords de la mer Glaciale, font tour à-fait maré-
cageufes 8c infertiles, mais leur infertilité n'eft
caufée que par l'âpreté du climat.
Dans la Chine, les plus grandes plaines font
celles qui s ’étendent entre le Hoan-Ho 8c le Yang-
tfe-Kiang : leur fertilité eft encore due aux alluvions
dont elles font couvertes.
Lorfque ces grandes furfaces de terrains ont été
long-temps le lejour des eaux douces , elles font
couvertes du dépôt argileux 8c rougeâtre dont
nous venons de parler, qui eft une fource de ri-
cheffes pour l ’agriculteur. Ces terrains font très-
fréquens dans les pays de formation fecondaire ou
tertiaire. Mais lorlque les plaines ont été longtemps
le féjoiïr des mers, tomme lés fteppes de
l'Ane 8c les déferts de l’Afrique, elles font généralement
rebelles à la culture, fi ce n’eft dans
quelques parties où la perfévérance de l’homme
a lu vaincre les obttacles .qu’offre leur furface fa-
blonneufé 8c ftérile , ou dans .celles qu i, devenues
le réfervoir des eaux pluviales, y entretiennent
une humidité favorable à-la végétation, 8c y
produilènt ces oafis que l’on rencontre dans les
lteppes 8c dans les déferts, où elles deviennent
le centre d’une population plus ou moins nom-
breufe, 8c dans lefqueiles le voyageur iaime à
trouver le repos lorlqu’il a parcouru les fables
brulans qui les entourent.
On trouve des plaines à différentes hauteurs
& dans toutes fortes de terrains > on Conçoit ai-
fémeïit que la nature du fol doit les rendre plus
ou moins fufceptibles de culture 8c de fertilité,
mais généralement les plus baffes font les plus
féconde s: telles font, en France, celles de la
Beauce 8c de la Normandie } en Autriche, celles
des environs de Vienne } telles font aufli celles de
la Hollande 8c de la Belgique.
Cependant les plaines de la Bavière 8c de la
Suiffe, entièrement compofées de fables 8c de
débris calcaires qui s’appuient fur les pentes des
montagnes formées de calcaire juraffique 8c de
calcaire gris compadte, paroiffent avoir été recouvertes
par des allnvions marines} elles jouif-
fent d'une allez grande fertilité.-
L’ un des pays de l ’Europe qui préfente les plaines
les plus vaftes, eft-fans contredit la Hongrie ;
elles y font très-nombrèufes , mais les plus confi-
dérables en occupent le centre. Elles font, dit
M. Beudant, comme un grenier d’abondance pour
les cantons environnans que leur élévation enlève
à la culture. Suivant ce favant minéralogifte , qui
a exploré ce pays avec beaucoup de foins 8c de
fagaeïté : vers la partie occidentale de la Hongrie
s’étend une plaine, dont la forme à peu près elliptique
peut avoir environ quarante lieues dans (en
plus grand diamètre, 8c vingt-cinq dans le plus
petit. Elle eft formée à l’oueft par les montagnes
de Presbourg 8c de l’Ajra, qui la réparent des
plaines de l'Autriche 8c de la Moravie ; à l'e f t ,
elle eft terminée par les montagnes de Bakony 8c
de ..Rude, qui fe d irigent du fud-oueft au nord-
oueft depuis le lac Balaton jufqu’au Danube.
Toutes les eaux qui fillonnent cette plaine vont
fe réunir à ce fleuve, qui la travetfe obliquement
depuis Pretbourg .jutqu’à Komorn. Sa hauteur
moyenne dans la partie la plus baffe, eft d’environ
cent vingt mètres au-deffus du niveau de la
mer, mais par des pentes très-douces elle le relève
graduellement jufqu’au pied des montagnes
qui la bordent.
La furface de -cette plaino n’eft: point à coirr-
parer, par fon étendue , à la plus centrale de la
Hongrie } c e lle -c i, fuivant M. Beudant, s’étend
d'un côté depuis les montagnes qui forment les
frontières de laGallicie orientale jufqu’au D’anube,
de l’autre depuis celle de Bakony 8c de Bude juf-
qu’ à la maffe la plus occidentale des montagnes de
Tranfÿlvanie} elle peut avoir, d it- il, cent vingt
lieues du nord au fud , depuis le Danube jufqu’aux
montagnes de V ih o r le t, 8c quatre-vingt de
l'oueft à l'eft depuis la chaîne de Bakony jufqu’ aux
montagnes de la Tranfÿlvanie. Cette énorme
plaine, l’une des plus confidérables de l ’Europe ,
eft un vafte défert dans fa plus grande étendue.
Depuis le Danube jufqu’aux parties montagneufes,
elle fi'a pas moins de quatre mille lieues carrées.
On n’y rencontre aucun chemin fixe, 8c les habita -
tions y font difféminées à de grandes diftances.
« Qu’eft-ce encore que ces habitations, dit M.
» Beudant ? de miférables cabanes, bâties en
* vterre mêlée de paille , ou en efpèce de briques
« groflières deflechées au foleil. Pas un arbre,
» pas une colline ne peut en général arrêter la
»» vue j 8c ce fo! uni q u i, par l’effet àà la réfrac-
» tion , femble partout s’élever en pente douce ,
»2 forme un horizon vifuel au bord duquel on
» peut en quelque forte prendre la hauteur des
» aftres comme à l’horizon de la mer. Le coeur
»> fe refferre au milieu de cette immenfité dont
y» l ’oeil cherche en vain les bornes, 8c où règne
» partout, pendant le jour, un filence profond}
4 aufli eft-ce avec plaifir que le voyageur, fati-
»3 gué d’ un tableau fi monotone, Yoii arriver Ta
»> nuit qui doit lui dérober l’étendue de l’efpace
au centre duquel il eft placé. Tout femble d’ail-
» leurs fe ranimer alors} le filence eft au moins
» interrompu par le cri des oifeaux d’eau , 8c
» bientôt des feux nombreux allumés par les pâ-
» très, par les payfans 8c par les voituriers qui
» couchent dans la plaine viennent .égayer la
V» contrée, 8c affiner au moins qu*oa n’eft pas au
» milieu du défert. »»