
très-vigoureux. Oblervation qui eft cependant en
oppofition avec ce que Spallanzani remarque dans
la partie de l'Etna appelée R é g io n e f e l v o f a > où
les arbres font moins beaux qu’ailleurs, où les
hêtres furtout ne fauroient être comparés à ceux
des Apennins & des Alpes.
La forêt appelée B o i s -B la n c fe compofe d’arbres
du genre h 'e r n a n d ia y elle eft traverfée par
une ravine, & ceffe à un efcarpement prefque à
pic qui eft la continuation de ce qu’on nomme
Y e n c lo s du v o l c a n , efcarpement appelé r em p a r t du
B o i s - B l a n c . Il eft formé de couches volcaniques
fuperpofées, & couvert d’une végétation vigou-
reufe. A la bafe du rampait, qui peut avoir i jo
à 2CO pieds de hauteur, on eft dans le G r a n d -
P a y s -B r û l é .
L a g ra n d e r a v in e du B o i s -B la n c eft rarement ar-
rofée par une eau courante ; mais les trous de la
lave en renferment toujours une .certaine quantité.
A propos de ce fait, M. Bory de Saint-Vincent
nous a fait faire une obfervation qui n’cft
pas fans intérêt pour la géographie phyfique :
c’eft que la rareté des fourçes eft un caractère
prefque général des régions où'lës volcans brûlent
encore , & même de ceux qui appartiennent
à une époque moderne de volcanifation. Ainfi
qu’il a eu oçcafion de le remarquer, les Canaries
font en général très-fèchus 5 les îles Eoliennes
ou Lepari le font peut-être davantage, &
les régions fertiles de l’Etna, fi vantées parles
voyageurs . font auffi très-pauvres en eau ; il y a ,
fuivant Spallanzani, des villages où l’on va chercher
à 10 milles de diftance celle que l’on boit.
L’jflande feule paroît faire exception à cette règle
; mais il eft à remarquer que grâce, à fa fi tua-
tion hyperboréenne, les glaces i k les neiges qui
couvrent fes cimes volcaniques font fans celle
fondues par la chaleur qui s’exhale de fon cratère,
& rend facile à expliquer l’abondance des eaux
que renferme cette île.
En fuivant de l’ëft à l’oueft le r em p a r t du Boisr-
B la n c qui dom ne la g ra n d e R a v i n e , on paffe au
pied du p i to n J o u v a n c o u r t (K), & en continuant à
monter on eft auprès du N e - [ -C o u p é (J) : on aperçoit
alors à yco toifes yers le nord le crapère
J o u v a n c o u r t .
Defcendons le rempart ; fuivons notre favant
guide, & nous nous trouverons dans la p la in e
d e s O fm o n d e s . Cette plaine eft comme entourée
par l 'e n c lo s d u v o lc a n , Elle eft circonfcrite par
des rochers. « Au fud, c’eft le p i t o n d e C r a c ,
& vis-à-vis, un rempart tantôt boifé & tantôt
dépouillé de verdure par des débouiis.
Ce rempart fait partie de l'enclos , & commence
au TrourCaron : le point où fe termine
la plaine des Ofmondes, à fa bafe, eft appelé
K e 7 - C o u p é , à caufe de fa forme. Ce N c ç - C o u p é ,
qui domine les environs ; eft une crête élevée de
mille toifes à peu près : on la diftingue depuis le'
piton Rouge, par de (Tu s le Bois-Blanc. Une crête
femblable, mais bien plus ha (Te, eft le point qui
fépare le rempart de .la terre des Ofmondes de
celui du Bois-Blanc ; elle s’avance en contre-fort
anguleux fur la plaine : je la nommai p o in te de
J o u v a n c o u r t . » Plus loin c’eft le cratère Faujas.
A l’eft de la plaine des Ofmondes, on trouve la
m o n té e d e s S u e u r s (M), au pied de laquelle commence
la grande r a v in e du B o i s - B l a n c , & plus
près du rempart le T r o u -C a r o n (L), profond enfoncement
où aboutiffent plufieurs petits torrens. A
l’oueft du piton de Crac s’élève le c ra tè re ou p ito n
auquel M. Bory de Saint-Vincent a donné le nom
de F a u ja s (D).
« Le piton Faujas, dit-il, me dédommagea
des fatigues que j’avais éprouvées pour arriver
jufqu’à lui 3 il préfente un petit volcan
complet avec tous fes acceflbires : le temps fem-
ble avoir refpecté tout ce qui le caractérifoit, &
n’a rien changé à fa forme. On y voit un cône
tronqué, un cratère fur la tronquature, une cheminée
latérale qui regarde du côté de l’enclos ;
enfin, à fa bafe exifte un affaiffement duquel s’ett
échappée une coulée confidérable : cette coulée
s’eft dirigée vers la plaine des Ofmondes, On
trouve à fa fources des plaques éparfes, caflées
& entafieés dans tous les feus : ces plaques n’é-
toiejit cependant pas auffi polies que cellés du
brûlé du Bambou ; elles reflerabloient davantage
à ces tables de fcories de plufieurs pieds de fur-
face & de peu de pouces d’ép ai fleur qu’on trouve
fréquemment dans une pofition verticale à l'a
fur fa ce des coulées : on en trouve de femblables
au brûlé de Sainte-Rofe, où elles ne font pas
encore détruites. J’attribue la formation de ces
tablés au refroid flement plus promptTie la furface
d une lave fur laquelle fumage une couche peu
épaifle de craffe qui fe fige promptement. Si la
matière qui eft fous cette croûte figée vient à
augmenter, elle doit néceffairement la crever pac
fa preffion, & en foulever les morceaux qui
demeurent plus ou moins perpendiculaiies, fi
l’effort ne les renverfe pâs tout-à-fait.
» Le mamelon à la bafe duquel nous examinions
ces plaques n'a guère plus de cinquante pieds
d’élévation; il elt affez régulier, uni, rapide,
compofé de très-petits fragmens de pouzzolane
rouge, violette ou tirant lur la couleur de lilas,
avec des morceaux d’une laye poreufe, noire,
& en larmes : cette lave eft enduite d’un vernis,
qui fouvent eft rouillé à la furface. Le cratère
qu’on trouve au Commet a la forme d’un puits;
fon diamètre eft de douze à quinze pieds ; f.i
profondeur de vingt-cinq; l’interieur eft rempli
de débris ferrugineux ; des larmes de laves enduite
d’un vernis rouge tapiffent les parois fur lesquelles
croiffent déjà quelques moufles & des' fougères.
La petite cheminée qu’on voit du côté de l'enclos,
ne diffère de la principale que par fes dimenfions
qui font du double plus petites : fans doute les
débris dont le fond des deux foupirâux contigus
ell rempli nous cachent leurs points de jonction,
oui dévoient être au niveau de la bafe du monticule
Le piton Faujas a le pins grand rapport,
par fa forme & par fa fituation, avec M o n t e -N u o v o ,
& a dû fe former, comme lui, dans une grande
éruption, préeifément au point où les matières
préparées dans les profondeurs du volcan principal
fe firent jour fur Tes flancs. »
A l’oueft du piton Faujas on voit la g r o t te a
R o fem o n d (F). Cette caverne eft <une des plus
belles productions des feux foutérrains relie eft
formée d'une voûte dé 1 ) pieds de hauteur fur
20 de longueur- Outre la porte d’entréê elle a
deux ouverture, dont l’une en foupirail & placée
au Commet l’éclaire en dedans. Tout 1 intérieur
eft tar itlé de ftalaétites volcaniques longues d’un
demi-pied & plus, imitant tantôt le bronze, tantôt
le cuivre rouge poli, quelquefois même l'albâtre.
Ces dernières fons recouvertes d’une croûte gyp-
leufe d’un tiffu cri il al in qui préfente même des
rriftaux en crête de coq. « Voici, dit M. Bory de
Saint-Vincent, comme je conçois la formation de
la grotte de Rofemond, & des crittaux gypfeux
qui s y trouvent. Les feux volcaniques renfermés
dans le fein de la montagne, ayant fôulevé ici un
amas de rochers, auront formé fous l’un d’eux
une voûte dont les parois, à l’inftar d’un fourneau
à réverbère, auront été fortement chauffées. Devenus
fluides à leur lurface, ils auront coulé en
gouttes qui fe feront trouvées arrêtées en forme
de larmes lors du refroidiffemenr. Sont enfuite
furvenuesdes fumées vitrioliques (gaz acide ful-fu-
rique), telles qu i! s’en exale toujours des cratères :
ces fumées, qui peuvent avoir traverfé des matières
calcaires, les avoir diffoutes & s’en être chargées,
feront venues dépofer fur les patois de la grotte
cette couche blanche qui en lait l’ornement. »•
Au nord du piton Faujas & de la grotte de
Rofemond fe trouvent les b 'o rm ic a - le o s ( E E). Ce
font deux monticules de 20 à 30 pieds de hauteur
compofés de l a p i l l i . Au haut de Chaque formica-
léo fe trouve un-entonnoir. Ils iont a (fis fur des
coulées folides, compactes , épaiffes & continues.
Elevons-nous maintenant jufqu’à la cime du
volcan. Le m am e lo n c e n t r a l (A) eft appelé ainfi
par M. Bory de Saint-Vincent parce qu’il eft
place entre le c ra tè r e B o r y (B) au nord & le c ra tè re
D o lom ieu (C) au fud. Ce mamelon a 160 pieds de
hauteur au-deffus de fa bafe; fes fhnes fout
t-fearpes & fa forme arrondie. (P/. 37.) On trouve
à fon lommec un cratère de 240 pieds de diamètre
& de 80 de profondeur. A- l’époque où M. Bory
ûe Saint-Vincent le vifita, on voyoit feulement
fortir de fes crevaffes des vapeurs légères. Au
fud otieft du cratère Dolomieu fe trouve le c ra tè r e
Rouge (I) 3 plus loin au fud de celui-ci le c ra tè re du
pas B o r y s & enfin au fud du cratère Dolomieu le
mamelon au tr o is tr o u s (G) , cratères qui ne nous
offrent rien d'intéreffant. Nous pailerons devant
la pointe de Tremblet en graviffant le rempart de
ce nom qui termine jufqu’à la mer l’enceinte du
Grand-Pays Brillé, & forme ce- qu’ on appelle le
r em p a r t d e l 'e n c lo s du v o l c a n . En dehors de cette
enceinte on remarque plufieurs cratères, mais nous
ne les décrirons pas, parce qu’ils font éteints &
qu’ils appartiennent la plupart aux volcans anciens
qui fe rattachent à la région des falazes.
Avant de quitter le v o lc a n d e B o u r b o n , il eft
bon de donner une idée des changemens que les
différentes éruptions lui font éprouver. En 1760,
ce volcan n’avoit qu’une feule ouverrure qui cou-
ronnoit la fournaife ; un foupirail latéral jetoit
des flammes. Il étoit beaucoup plus haut qu’au-
jourd’hui ; il s’abaiffa depuis, & un nouveau cratère
s’ouvrit ( ainfi qu’on peut le voir par la ligne
de points comparés au deflm du volcan , p l . 34 ).
En 1791 il s’éleva de nouveau, caries volcans
ont des phafes d'élévation & d abailïemenc.
Nous avons décrit l’état dans lequel M. Bory de
Saint-Vincent trouva le cratère Dolomieu. d ms
la nuit du 27 au 28 odtobre 1801. * Loriqu’il
; le revit, environ vingt - un jours plus tard
, l'afpeft de ce cratère étoit bien changé ; il
s’étoit prodigieufement accru. ( P/. 36 . ) «La
bouche du volcan préfentoit une v-file chaudière
de plus de ico toifes de diamètre, pleine jusqu’au
bord de matières fondues a fiez fluides pour
former des vagues. Au centre , & là où j'avois
vu les gerbes du 6 brumaire , s’élevoient en dômes
& retomboient fur eux-mêmes des flots de lave
liquide &r. en incandefcence, tandis que toute la
furface de la chaudière étoit un peu ternie par
line couche de feorie fort mince. Le jour, cetre
couche paroiffoit noirâtre, mais dans la nuit elle
laifloit percer une certaine lumière. Des fentes
en zig zag , pareilles aux carreaux de la foudre ,
très-multipliées , & à peu près difpofées comme
les rayons d’une circonférence, gerçoientla croûte
feorieufe qui fui voit une efpèce de mouvement
d’ondulation concentrique. »
« De petites gerbes de feu s’élevoient de temps
en temps en divers endroits de la furface du cratère
: celles-ci, bien moins confidérabies que le
jet central, montoient fouvent à une grande hauteur
, & produifoient alors un effet magnifique ;
lancées comme des fufées perpendiculaires ou
obliques, elles m’effrayèrent d’abord, parce que
je craignis que les matières qui les compofoient
ne nous atteigniffent. Il n étoit plus temps de rétrograder
; il étoit nuit, nous étions environnés
de frffurès profondes dans lefquelles nous
euffions couru nique de nous précipiter ; d’ail-
: leurs, les éclats que quelques-unes de ces gerbes
lancèrent jufqu’à nous ri’étoient que de petits
morceaux d’une efpèCé de feorie qui couvroic [a.
chaudière, & dont nous avions trouvé de nombreux
fragmens fur toute la montagne. Ces fragmens
étoient prefque fans confiftanie, & fe réduiraient
én poufiîère fous les doigts > leur fus