
Boeufs 8c de Chameaux , quoique l’animal parojfle
avoir eu la raille de celui-ci. Si on lui Cuppofe les
formes de l’Orgali , il devoit avoir neuf pieds de
haut} fi on lui donne celles de là C hèvre, il devoit
en avoir fix. Ces motifs ont déterminé
M. Bojanus à faire, fous le nom de Merycotherium,
un genre provifoire de l’animal folfile auquel les
dents qu’ il a étudiées ont appartenu. M. Defmarçft,
lavant mammalogifte, penfe que fi M. Bojanus
avoit pu comparer les dents dont il eft queftion a
celles de la Giraffe, il auroit pu trouver beaucoup
d’analogie entré ces deux animaux.
Un fait a fiez in té reliant dans l’hiftoire des ofle-
mens foflîles, relativement à ce qui concerne
les Eléphans ouïes genres très-voifins, c’ elt que
le continent de l’Amérique, qui dans fa partie
feptentrionale a dû communiquer avec l’Afie, ne
recèle qu’ un très-petit nombre de débris'de Mammouths
: ce qui, lelon nous, eft une nouvelle induction
en faveur de l’hypothèfe que cet animal a
vécu jadis fur une terre voifine du p ô le , 8c beaucoup
plus proche de l’Afie que du Nouveau-
Monde. D ’ailleurs, le peu qu’on en trouve paroît
avoir été long-temps roulé par les eaux. C ’eft ce
qui eft prouvé parla découverte qui fut faite,
en 1794, 'd ’une mâchelière dans le'marais de
Biggin, près de l’.origine de la branche occidentale
de la rivière de Cuivre; par plufieurs autres
dents trouvées dans la Caroline, dans l’Etat- de.
Kentucky, dans le Maryland & en Virginie, dans
les alluvions de plufieurs rivières; 8c enfin par
une molaire 8c une défenfe de fix pieds de long
& d’un pied de diamètre, qui a d û , lorfqu’ elle
t ’toit entière, avoir jufqu’ à dix pieds de longueur,
8c que l’on découvrit fur les bords de la rivière
Sufqueanna.
L e Mexique, l’ifthme de Panama , le Pérou
or.t offert des faits analogues; & fuivant l’ opinion
de M. Rembrandt Peale, ces animaux ont dû
être détruits bien avant l’ époque de l’ exiftence
de l’ animal gigantefque dont nous allons parler,
puifque leurs débris, fonè ordinairement dans un
très-mauvais état de confervation. Mais ne pour-
roit-on- pas croire aufli que ces débris ont ete
tranfportés fur le- continent américain de beaucoup
plus loin que ne l’ ont été ceux de la Sibérie ?
Maftodonte. M. Cuvier appelle ainfi un grand
quadrupède voifin de l'Eléphant par fa forme, par
fa trompe, par fes longues défenfes, par Tes
pieds , & qui n’en diffère que par fes dents, qui,
au lieu d’être formées de lames tranfverfales, ont
une couronne fimple hériflee de mamelons ou de
tubercules plus ou moins nombreux, plus ou
moins faillans: de là fon nom compofé de deux
mots grecs , ft*<rros 8c ouvres.
Les naturaliftes & les anatomiftes les plus célèbres
ont long-temps difcuté fur la forme de ce
quadrupède, & fur le genre dont il fe rapproche
le plus. La queftion fut éclaircie lorfque, par les
foins & le zèle de M. Peale, célèbre naturalifte
de Philadelphie, deux fquelettes entiers, com-
pofés d’oflemens découverts dans le balfin de la
rivière d’Hudfon, furent raffemblés il y a une
vingtaine d’années dans la riche collection de ce
favant.
M. Cuvier penfe que l’analogie qui exifte entre
fes dents 8c celles du Cochon ,& de l’Hippopotame
, prouve qu’ il devoit fe nourrir de végétaux
tendres, de racines & de planteifaquatiques.
Mais la découverte la plus remarquable eft
celle qui fut faite en 1806 dans la Virginie.
M. Smith Barton & M. Pichon, conful-général
de France aux Etats-Unis, ont communiqué à ce
fujet, à M. Cuvier, les détails ci-après : On trouva
à cinq pieds & demi de profondeur, fur un .banc
de pierre calcaire remplie d’impreffions de coquillages
marins , a fiez d’offemens poür pouvoir
1 en conftruire un -fquelette prefque complet. 'On
retira du milieu de ces débris une maffe à demi
broyée de petites branches de g rame n s , de
feuilles & de reftes d’une efpèce de rofeau qui
croît encore dans la Virginie. Le tout paroifloit
être enveloppé dans une forte de fac, que I on
regarda comme l’eftomac de l’animal. Ce fait, eft
certainement fort extraordinaire, mais il acquiert
quelque degré de vraifemblancé lorfqu on le compare
aux fofiiles charnus de la Sibérie.
M. Cuvier divife le genre Maftodonte en fix
efpèces, le Mafia don maximus , le M. anguftidens ,
le M. Ândium, le M. Hutnboldii, le M. minutus 8c
le M. tapiroides.
Le grand Maftodonte eft celui dont nous venons
de parler, dont les dépouilles font fi nombreufes
dans les terrains de l’Amérique feptentrionale.
Cependant quoiqu’ il paroilfe particulier au^ nord
du nouveau continent, il feroit poflîble qu on en
découvrît quelques fragmens en Europe, puif-
que M. Cuvier cite une dent, d’une efpèce qui
paroît être très-voifine, 8c qui a été découverte
dans un terrain d’alluvion dès environs d A fti,
par l’abbé Borfon, profefleur de minéralogie à
Turin.
Le Maftodonte a. dents étroites eft l’efpèce (font
plufieurs dents ont, ainfi que nous venons de le
dire, été trouvées dans plufieurs contrées du nord
& du midi de l’Europe. On en a découvert en
Tofcane un fquelette prefqu'entier ; aux environs
de Sienne, de Padoue | de Livourne , de Rome ,
& dans le Val d’Arno, ainfi qu’auprès de Reichen-
berg en Bavière, dans un terrain fablonneux.
D’autres parties de l’ Allemagne en ont aufli fourni ;
telles font les localités des environs de Darm-
ftadt, de Worrns, de Krembs fur les bords du
Danube, 8c de Vienne en Autriche. On en a aufli
trouvé aux environs du lac de Zurich en Suilfe ;
en divers lieux de la Pologne, auprès de Wilna;
& e n France dans le calcaire d’eau douce d’Orléans,
dans des terrains de tranfport à Dax,
à Avaray, à Auch fur les bords du Gers, aux environs
de Lyon, de Montpellier, de Caftelnau
& de Simarre. '
Prefque partout ces débris gifent dans des terrains
d’attérifiement marin ancien , où ils font
confondus avec des offemens d’autres animaux.
M. Marcel de Serres a obfervé qu’ aux environs
de Montpellier ils font accompagnés d’ofiemens
de Boeufs, de Rhinocéros, d’Eléphans , d’Hip-
popotames, de Cerfs 8c de Cétacés, & qu’ils
font placés entre deux lits d’huîtres à bec ( Oft.
crajftjjtma). Ces oflemens, généralement arrondis
& difperfés, annoncent qu’ils ont été tranfportés
par les eaux.
Il eft à remarquer que fi le Maftodonte à dents
étroites ne fe trouve point dans l’ Amérique feptentrionale,
il n’en eft pas de même pour l’Amérique
du Sud ; on eh a trouvé au Pérou , 8c l’on
doit à M. de Humboldt la connoiflance d’une localité
fort intéreflante appelée le Camp des Géans}
fituée près de Santa-Fé de Bogota, à une élévation
de 2500 mètres au-defîiis du niveau de la mer.
Ce que cette dernière localité offre d’extraordinaire,
outre fa hauteur, c’eft l’amas confidé-
rable de ces oflemens mêlés à d’autres débris
d’animaux; c’eft le fel marin dont ils font pénétrés,
qui attefte leur long féjour dans l’Océan.
Il eft probable que des recherches pourroient
conduire à la découverte d’oflemens femblables
dans d’autres contrées méridionales, puifqu’en
creufant un puits à Sainte-Hélène , on èn a trouvé
dans un terrain d’alluvion à peu de diftance du
rivage.
D’après toutes ces données , il fembleroit que
le Maftodonte à dents étroites eft propre à quelques
régions méridionales & tempérées , comme
le grand Maftodonte paroît propre aux régions du
Nord.
L e Maftodonte des Andes. Le type de cette efpèce
a été trouvé aufli dans l’ Amérique méridionale.
Jofeph de Juflieu en-avoit découvert des débris
en 1761 dans la vallée de Torrija, par le 23e
deg. de latitude àuftraie. M. de Humboldt en a
recueilli dans la cordilière de Chiquitos 3 près Santa-
Cruxde la Sierra3 à 18 deg. de latitude auftrale, 8c
dans la province de Quito, près du volcan d’Imba-
burra , à 400 mètres de hauteur.
Les dents de cette efpèce diffèrent de celles
du grand Maftodonte par la configuration de leurs
tubercules, q u i, au lieu d’être difpofés en lo -
fanges, font figurés en trèfles 8c divifés comme
ceux du Maftodonte a dents étroites.
Le Maftodonte Humboldien eft défigné ainfi par
M. Cuvier, parce que c’ eft à M. de Humboldt que
la decouverte en eft due. C ’ eft de la Conception,
au Chili , qu’ il a rapporté en France une dent de
cet animal. Elle diffère de celles des efpèces précédentes,
en ce qu’elle eft plus petite d'un tiers
au moins & qu’ elle eft carrée.
Le petit Maftodonte. Une dent de cette efpèce
annonce un animal plus petit que les autres. Les
mamelons en font élevés, & chacun d’eux préfente
à fon fommet un creux arrondi. Elle a été trouvée
en Saxe.
Le Maftodonte tapiroïde paroît avoir habité le
fol de la France; une de fés dents , un peu plus
petite que celles de l’efpèce précédente, a été
découverte dans le calcaire d’eau douce de
Montabufard près d’Orléans, avec des os de Pa-
l&otheriums. C et animal a donc vécu à une époque
plus ancienne que celle des animaux que l’on
trouve dans les terrains d’alluvion que nous paf-
fons en revue.
Ses collines pointues font crénelées dans le
fens de la largeur de la d en t, 8c ne font point
divifees dans l’autre fens. Elles indiquent, fuivant
M C u v ie r , quelques rapports de reflèmblance
avec les dents des grands Tapirs.
Edentés gigantefques. — La découverte de ces
fofîiles extraordinaires par leur taille, qui les
rapproche des Eléphans, & par leur organifation
qui les place à côté des Pareffeux, des Pangolins &
des Tatous, animaux de petite dimenfion, eft un
fait récent de la plias haute importance en géologie.
On a fait bien des conjectures fur le Mammouth
& le Rhinocéros de la Sibérie ; on a ha-
fardé bien des fuppofitions fur le grand Maftodonte
de l’Amérique feptentrionale : l’antique exiftence
de ces quadrupèdes géans eft un fait matériels
l ’explication de leur deftrudtion offre un champ
libre aux faifeurs de fyftèmes. Mais pour compliquer
la queftion relative à la difparition des animaux
qui ont été victimes des derniers cataclifines
que notre planète a éprouvés, il falloit qu’on découvrît
fur le nouveau continent le Megalonix 8c
le Mégathérium, 8c dans notre vieille Europe un
Pangolin d’une taille coloflale. Nous nous occuperons
du premier à l’article des Cavernes a ojjl-
mens. Nous allons donner une courte defeription
des deux autres.
Mégathérium. C ’eft de tous les animaux fofliîes
le plus rare 8c le plus récemment découvert ; il
n’e"ft connu que depuis l’année 1789.11 n’en exifte
encore que trois fquelettes : c’ eft au Bréfil 8c au
Paraguay qu’ ils ont été trouvés. Le plus complet
orne le Cabinet d’hiftoire naturelle de Madrid;
il a été déterré à quelques lieues de Buenos-Ayres,
fur les bords de la rivière de Luxan, & à une
lieue de la ville de ce nom, dans un terrain d’al-
luvion qui bords cette rivière, 8c qui n’eft élevé
que de 10 mètres au-defliis de fon niveau.
Quoique cet animal ait des rapports très-prononcés
avec ieParefleux, il s’en éloigne par des
différences effentielles, qui en font un genre particulier.
«c 11 a , dit M. Cuvier, la tête & l’épaule
« d’ un Parefieux; fes jambes 8c fes pieds offrent
» un fingulier mélange de caractères propres aux
m Fourmiliers & aux Tatous. «
La longueur de fon fquelette eft de 4 mètres,
depuis l’extrémité de la tête jufqu’ au coccix ;
L 1