
hauteurs pleines de fources & couvertes de toutes
fortes d'arbres fruitiers. Elle fut bâtie par Hippodame
, natif de Milet, que les Athéniens avoient
employé pour la conftruétion du port de leur
ville, & qu’on met au nombre des meilleurs architectes
de la Grèce. Elle étoit, félon Strabon
& Ariftide, difpofée en forme d’amphithéâtre,
entourée de murailles femblables à celles de Mu-
nychie , & ornée de magnifiques bâtimens, de
larges rues , de belles avenues, de bofquets, de
grandes places, &c. Aucune ville, fi nous en
croyons Strabon, ne l’emportoit fur Rhodes.
Pline nous apprend que de fon temps il y avoit
dans cette ville plus de trois mille ftatues, la
plupart d’un travail exquis, & félon Ariftide,
Rhodes feule avoit plus de tableaux & de ftatues
de prix que toutes les autres villes de la Grèce
enfemble. Elle s’étoit rendue fameufe du côté
des fciences, & étoit fréquentée pour cette rai-
fon par plufieurs Romains. .
L’école la plus renommée de peinture qui
exiftât chez les Grecs au temps d’Anacréon,
étoit établie à Rhodes, & le célèbre peintre. Protogène
l illuftra par fes chefs-d’oeuvre. Les portraits
de Ménandre, roi de Carie , &c d’Enée, fils
de Neptune, tracés par Apelles, & ceux de Per-'';
fée, d’Hercule & deMéléagre, de la façon de !
Zeuxis, font fort vantés par Pline & par d’autres ;
anciens écrivains. Le portrait de Méléagre fut j
trois fois touché par la foudre > mais cet accident
ne diminua en rien la beauté ni l’éclat des cou- ■
leurs.
La ville moderne eft encore un endroit aflez
confidérable, agréablement fituée fur la pente
d’une montagne qui peut avoir une lieue de tour,
& environnée d’une triple muraille. Les rues en ■
font larges, droites & bien pavées , & les mai- j
fons font bâties dans le goût italien. Mais le
port a bien perdu de fon ancienne fplendeur, & il
eft fi peu profond, qu’il ne peut plus recevoir de
grands vailïeaux qui rendoient autrefois fon com-
merce fi floriifant. '
Les Rhodiens defcendans des Telchinæ, qui
étoient originaires de l’ile de Crète, s’adonnèrent
de bonne heure au commerce & à la navigation
, & fe virent dans la fuite, pendant quelques
fiècles, les maîtres de'la mer, au point que -
leurs lois connues fous le nom de lo i s R h o d i e n n e s 3
devinrent une efpèce de code pour décider toutes
les difputes qui avoient rapport à la marine.
Ces lois étoient fi juftes, fi fages, qu’on les incorpora
dans les Pan de des, & qu’elles furent ob-
fervées dans toutes les provinces de l’Empire romain.
Amans de la liberté , les Rhodiens jouirent
de leur bonheur tant que leurs mains induftrieufes
trouvèrent dans le ftin de cette terre fertile la
fubfiftance qui leur étoit neceftaire ; mais du moment
que le defir de pofféder un inutile fupeiflu
leur fit enfreindre ces lois bienfaifantes $ lorfque
la richèffe vidorieufe dans la lutte que la pauvreté
foutenoit contre elle, parvint au pouvoir fupréme,
& que des diftindions humiliantes fe furent établies
entre celui qui défendoit la patrie & celui
que cette partie nourrilfoit, les champs jadis fertiles
furent abandonnés aux efclaves. Le relâchement
des moeurs, l’affoiblilTement de l’efprit public
& le mépris des lois corrompirent les fources
de la félicité publique, & les Rhodiens devenus
inquiets, turbûlens & jaloux , fe détruifirent les
uns les autres. Ces divifions dévoient nécefîaire-
ment attirer fur Rhodes les étrangers, ordinairement
fi habiles à profiter des diflentions inteftines
des peuples libres. Ils fubirent plufieurs fois le
joug des Romains 5 devenus enfuite fujetsdes Génois
& des Arabes, ils appartinrent pendant deux
cents ans aux chevaliers de Saint Jean de Jérufa-
falem, qui défendirent la ville avec une valeur fans
égale contre la puififante flotte de Soliman II, juf-
qu’à ce que la place fut livrée à l’ennemi par un
traître en 1522.
Depuis ce temps Rhodes, qui fut la patrie du
fage Cléobule , de l’aftronome Hipparque & des
poètes Timoléon & Anaxandride, fe trouve fous
le pefant empire des Turcs, avec lefquels les habi-
tans, dont le nombre peut à peine s’élever aujourd’hui
à 40 mille , fe mélangèrent, plus qu’aucun
autre peuple de la Grèce. (G. A. de M . . . . )
RHODOPES. Chaîne de montagnes qui partage,
dans la direction du nord-oueft au fud-eft,
la Thrace en deux parties à peu près égales. Dans
une longueur de 120 lieues elle embrafle tout le
fyfteme th ra c ien des montagnes de la Grèce & forme
avec l’Hémus un angle dont l’arc peut s’évaluer
à deux degrés de longitude. V o y t ^ y pour dé plus
amples détails, le mot Okbellus.
(G. A. de M ....)
RH(ENE { M o n t ) . Cette chaîne de montagnes
(en allemand Rfuzn-Gebirge') appartient à un fyf-
tème qui commence à l’eft, à peu de diftance des
monts Fifchtelberg, près des fources du Rodach ,
rivière qui fe jette dans le Mein , & fe termine
au fud-oueft , aux dernières pentes des monts
Vogeîs entre la Lahn & le Mein.
Les monts Rhoene occupent le centre du fyf-
tème : nous confidérons les chaînes auxquelles ils
fe rattachent comme leurs dépendances > ils projettent
au nord & au fud deux rameaux qui ont
environ 10 lieues de longueur & qui fe croifent
avec les longues chaînes dont nous venons d’indiquer
la dire&ion de l’eft à l’oueft. La partie la
plus orientale de cette dernière, porte le nom de
S o n n en b e rg & s’adoflè au Thuringerwald. Sur fon
verfant feptentrional plufieurs rivières prennent
, leur fource : la plus importante eft la Werra qui
va fe jeter dans le Wefer j fur le verfant oppofé
elle donne naifîance au Rodach & à la Saale qui
fe jette dans le Mein. L’étendue de cette branche
1 jufqu’aux monts Rhoene eft d’environ 25 lieues.
Aux lieux où la Werra prend fa fource, le Sonnenberg
projette un rameau d’environ 1 y lieues
de long & qui fe termine vers le nord-oueft , fur
les bords de la Nefifa, affilient de la Werra.
La branche qui porte le nom de monts Vo-
gels fe prolonge de l’eft à l’oueft fur une étendue
de 20 lieues jufque fur les bords de la Lahn, d’où
elle redefcend au fud-oueft pendant 18 lieues juf-
qu’aux rives du Mein. Son verfant feptentrional
fournit les eaux de la Fulda & de Lohm qui fe
jette dans la Lahn. Le verfant oppofé donne naif-
fance à la petite rivière de Kinzig & à la Nidda
qui fe jette dans le Rhin.
Quant aux monts Rhoene, ils fournififent fur
leur verfant feptentrional la petite rivière de l’Ul-
fter qui fe jette dans la Werra, & fur le verfant
méridional, le Sinn qui fe réunit au Mein.
A l’extrémité orientale du fyftème dont les
monts Rhoene occupent le centre, on voit s’élever
la formation granitique> mais le terrain du
qui fe terminent fur la rive oppofée ; auffi les
cours d’eau qui aboutififent à la rive droite font-
ils auffi moins confidérables que ceux qui abou-
tiffent à la rive gauche.. Le plus important ^de
ceux-ci a à peine cinq lieues de longueur : c’en
la Lonza. Les plus grands cours d’eau de la
rive gauche font : i°. la Vifge ; fon cours eft de
plus de huit lieues ; la plus longue de fes branches
milieu duquel ils fortent appartient totalement à
la formation de calcaire fecondaire, fur lequel
s’élèvent les fommets pyroïdes de ces montagnes |
& les dépôts bafaltiques qui les conftituent.
. (J. H.)
RHONE. Ce fleuve, le plus rapide de l’Europe
, prend fa fource dans les Alpes, au pied
des glaciers de la montagne de F u r c a , autrement
dit la F o u r c h e , à deux lieues du mont Saint-Go-
thard, auquel cette montagne fe joint. L’extré-
mité du baffin où fe réunifient les premières eaux
du fleuve eft formée par le mont Gallenftock, j
auquel fe joignent à l’occident le Grimfel, & à
l’orient la Furca & l’extrémité du mont Saint-
Gothard. Le faîte des montagnes qui forment ce
baffin jufqu’au lac de Genève, pré fente fur la
rive droite du Rhône plufieurs fommités, dont
les plus importantes font, à partir du Grimfel : le
Finfterarhorn, leMonch, le Jungfrau, le mont
Attels, les Diablerets, la Dent de Mordes, la
Tête de Moine & la Dent de Jamant. Sur la rive
oppofée, depuis la Furca, les points culminans
font : le mont Gries , le mont Galen, le Ma-
derhorn , le Simplon, le Fletschorn, le mont!
Fée, le mont|lofe, le mont Servin, le mont
Combin, le mont Velan, le grand Saint- Ber-'
nard, le mont Beut, le mont Rion, & la Dent
d’Oche.
Des deux lignes de faîtes qui s’étendent à
droite & à gauche du fleuve, & dont nous venons
de citer les points les plus élevés, partent
des ramifications qui forment un grand nombre de
vallées tranfverfales qui viennent fe terminer au
Rhône. La grande vallée qu’il félonne tranfver-
falement s’étend du nord-eft au fud-oueft , depuis
le Gallenftock jufqu’à la Dent de Mordes , fur
une longueur de vingt-fix lieues. Les vallées qui
viennent fe terminer fur la rive droite du fleuve
font généralement moins confidérables que celles
defeend du mont Rofe; i°. le Borgne,
qui defeend du mont Servin : fon cours eft
de fept lieues; î°. la Dranfe, qui defeend du
mont .Saint-Bernard, & qui parcourt auffi près
de fept lieues. . y
À partir de la Dent de Morcîes, qui s avance
comme un cap jufqu’au bord du fleuve, le Rhône
change de diredion & fuit péndant huit lieues
celle du nord-oueft, jufqu’à fon entréedans le
lac de Genève, dont la longueur de l’eft à l’oueft
eft de quinze lieues. Il le traverfe dans cette di-
reûion. A la fortie de cè lac, il reçoit les eaux
de l’Arve, rivière confidérable qui prend fa
fource au Col de Balme, & parcourt, enferpen-
tant, un efpace de dix-huit lieues.
Avant fon entrée dans le lac de Genève,
entre le Simplon & la Dent de Mordes, le
Rhône, dont les eaux font jufqu’alors bour-
beufes, dont le cours eft peu finueux, & dont
la rapidité eft d’abord médiocre , baigne un grand
nombre d’îles. 11 dépofe à l’entrée du lac une
grande quantité de limon ; les alluvions qu il y
forme tendent à diminuer l’étendue du lac : ainlt
l’on a remarqué que le village de Provallay, qui
étoit autrefois fur fes bords, en eft éloigné d’une
demi-lieue. A fa fortie du lac , fa rapidité augmente
avec fes lïnuofités. A partir de ce point,
fon lit eft élevé de près de 400 mètres au-deffus
du niveau de la mer, & comme il parcourt
jufqu’à fon embouchure environ quatre-vingts
lieues, fa pente peut être évaluée a cinq mètres
pat lieue ; ce qui explique fuffifamment la rapidité
de fes eaux fur plufieurs points de fon cours.
C’eft furtout depuis le lac de Genève jufqu aux
environs de Lyon que le Rhône eft le plus finueux.
Mais avant de décrire fon cours, il convient de
nous arrêter à l'endroit où il femble vouloir fe
cachet dans le fein de la terre pour paroître en-
fuite avec plus de majefté & fuivre fa courfe avec
plus de viteffe. Non loin des dernières pentes du
Jura, le fleuve coule au milieu de rocs efearpés;
près de Gréfin , il paffe fous deux arcades naturelles
, féparées par un rocher contre lequel fes
eaux fe bnfent en écornant. En cet endroit le
Rhône a peu de largeur ; plus bas, fon coûts, interrompu
pat de nombreux obftacles, forme plufieurs
calcades, qu’augmente encore la chute
fréquente des roches efearpées qui s'élèvent fur
fa rive droite. C’eft après avoir franchi tous ces
obftacles que le Rhône fe précipice au fond du
gouffre connu fous le nom de p e r ie d u R h ô n e . Ce
gouffre eft formé de rochers qui fe font écrouies