
pas 2 à 5 pieds de large : ces coulées font !
remarquables par la forme caniculaire qu'elles
adoptent & par la fragilité des petits ponts ;
qu'elles forment.
» Les chemins cachés de leur intérieur font j
dus au refroidiflement très-prompt de la partie
extérieure fur laquelle agit le contaéfc de l'air»
tandis q u e , fluide à l’intérieur, la lave ne ceflè
de couler.
» Les coulées de lave de l'efpèce que nous
venons de décrire font fort dangereufes j il
faut les franchir quand leur largeur le permet}
on ne fe hafarde à les traverfer qu’ un à un, 1
& avec toute la légèreté poflible ; elles fe brifent
aifément fous les pas, & en tombant, on eft
expofé à fe caffer les jambes, qui demeurent
engagées dans le trou.
» Je deflinai le cratère Bory par le côté le
moins élevé. Dans la vue que j'en ai donnée,
on diftingne au devant 'pluueurs des coulées
dont il vient d’être qusftion. (P I. 3 7 .)
» Il paroît affez fingulier qu'on trouve ici des
blocs anguleux & fouvent confidérables, d'une
lave bafaltique grife, très - compare , lardée de
grains de chryfolithe : cette lave reffemble à celles
qui compofent les chauffées prifmatiques ou les
coulées inférieures que les torrens mettent au I
jour dans différens endroits de la bafe des;
montagnes. Ces blocs font jetés en affez grande
quantité & au hafard jufqu'à 60 toifes de rayon
du cratère Bory} un des côtés extérieurs de
ce cratère eft compofé de la même lave bafaltique,
& reffemble à un mur de pierre sèche.
Je ne fais fi ceux qui pourront fuivre mes
traces, & qui vifiteront le volcan , par la fuite,
trouveront ces lienx comme je les ai décrits}
mais, fi d’ici-là il n’arrive pas une grande révolution
qui change,le fommet delà montagne, je
les engage à faire attention à la difpofition extraordinaire
de ce mur.
»» Par le côté qui regarde le mamelon central, j
(pl. 3 7 ) , la pente du cratère Bory paroît avoir
été très-récemment & fortement chauffée. Le fol ;
formé de pouzzolanes rouges, noires, de couleur
lilas ou orange, & de laves grifes pareilles à celles,
des petites coulées en canaux, mais par blocs
inégaux, plus ou moins volumineux} le fo l, dis-je,
eft rempli de bourfoufflures, de grottes, de fentes,
de crevaffes, plus ou moins béantes, dont les
parois vernies font hériffées de larmes de laves
d'une couleur rougeâtre. Quand on jette des
pierres dans ces fentes ou dans ices crevafies, il
arrive fouvent qu'on ne les entend pas arriver au
fond} une foule de coulées confufes, ramifiées &
compofées d’une lave boueufe, s’échappent de
tous côtés.
» Nous fîmes le tour du mamelon central pour
nous approcher le plus près poflible de la bouche
moderne. Voyant que les roches qui. en.étoient
lancées ne tcmboient que rarement en dehors de
fes parois, j’avois fait le projet de coucher fur
fes bords, pour jouir pendant la nuit d'une vue
que j'imaginai devoir être magnifique.
» En regardant le mamelon central, on ne peut
douter que ce cratère n’ait fouvent contenu, jufqu'à
fon orifice, des matières fondues, dont les
fcories s’échappant par deffus les bords , l’ont
élevé peu à peu. Pour les parties les plus compactes
de ces matières, elles, fe font fait jour
à la bafe du piton, où l’action, exercée par une
preflion fupérieure & peu éloignée, a imprimé aux
coulées qu'elles compofent des formes dé meringues,
de turbans & de limaçons, qui ont depuis 4
jufqu'à 10 pieds de hauteur, & font unies, entre
elles par des arêtes Caillantes qui ne font que des
canaux de communication.
. » Pendant les premiers jours de juin 1791., il
s'exhaloit du mamelon central une vapeur ardente,
& ce cratère lançoit des gerbes de feu ;
il s'échappa de la montagne un courant de laves
qui arriva à la mer, le 13 juillet, après s'être
précipité en cafcade fur les flancs du dôme &
avoir cotoyé la bafe du rempart de Tremblet, dans
le grand Pays-Brûlé. C e courant recula le lit
de la mer de plus de 50 p^s, fur une largeur
de 300 } les matières vomie s furpaffoie.nt l’eau
de plufieurs to ife v En donnant à ces matières
700 toifes feulement de largeur moyenne, fur
2 de profondeur, pendant toutes les finuofités
qu'elles ont parcourues fur une ligne de $36o$
toifes, qui font prefque deux lieues, on verra
qu’il eft forti, en un mois, à peu près 7,988,400
toifes cubiques de laves arrachées au fein du
volcan.
H Le 4 juillet, on reffentit, à une heure du
matin, dans les quartiers de l’ île les plus éloignés
du volcan, une légère fecouffe de tremblement de
terre} on ne s'en aperçut point à Sainte-Rofe, ni
à Saint-Jofeph. Le 17 du même mois, on entendit
dans tout le pays un bruit extraordinaire , que l’on
compara à celui du canon, & àuflitôt on vit s’élever,
du fommet de la montagne , une énorme colonne
de fumée, aufli noire que des fcories :
elle etoic verticale, épaiffe, & remarquable par
quelques places blanchâtres qui fe difîinguoiene
dans fon étendue : le foleil paroiffoit fan glane ; le
ciel étoit terni par.des vapeurs rougeâtres. Quelque
temps après, le faîte de la colonne s’étant agité,
fe courba vers la terre : elle avoit alors la figure
d'un arc dont les deux extrémités é.toient appuyées
fur le volcan. Jamais on n’avoit rien vu de pareil
depuis que rîle étoit peuplée. Tous les habitans
étoient dans l ’épouvante & dans la confterna-
tion : lê cratère Dolomieu dut fa naiff113.ee à
, cet événemeut. Le bruit qu’on entendit.fut celui
de l’ affàiffement qui le forma. Sans doute les
! laves rejetées cette année par la montagne
| aveient laiffé dans fon dôme quelques grandes
cavités, dont les voûtes s'affairèrent fur elles-
mêmes.
» Un
« Un officier inftruit, M. Berth, qui vifîta
la nouvelle bouche douze jours après fa formation
, la trouva obronds, de ic o toifes environ
de diamètre , & de 120 pieds de profondeur}
fts pavois étoient forméts de couches
horizontales, diftinétes, rouges, & comme interrompues
: entre plufieurs de ces couches
fortoient des vapeurs qui avoient l'odeur de
l’acide fulfurique fumant. Le fond n'étoit qu’un
amas de fcories & de débris d’où s’ échappoient
çà & là des fumées fulfureufes qui avoient coloré
en jaune plufieurs parties de la fournaife.
Il paroît que l’éruption fe termina par là formation
du cratère Dolomieu, duquel il ne s’échappa
aucun courant de laves.
» Quand nous avons vu le cratère Dolomieu
pour la première fois (pl. 35), il avoit à peu près
les mêmes dimenfîons que lui avoit trouvées
M. Berth : fon côté méridional étoit cependant
moins profond } il paroiffoit avoir été foulevé
par un mouvement intérieur de la montagne :
c ’étoit du bord de ce foulèvement intérieur que
jaiiliffoient les gerbes de feu dont nous avons
parlé.
» Rendus au bord du cratère, nous vîmes
au-devant de ces gerbes un baflin dans lequel
retomboient des matières lancées } elles s’en
échappoient enftfte par un petit ruiffeau de deux
toifes au plus de largeur. Ces matièrès arri-
voient, après avoir formé quelques cafcades. &
diverfes finuofités, à la bafe feptentrionale du
limbe du cratère, ,où elles difparoiffoient dans
un gouffre affez étro it, et que nous avions
perpendiculairement fous nos pieds. Aucune'
vapeur fulfureufe, exhalée de ce torrent de feu ,
ne nous incommoda, & ne nous avertie du danger
de s'en tenir fi près. C ’efi de quelques fentes des
parois opposées que s'échappoient des fumées
bleuâtres affez épaiffes, dont l'odeur fuffocante.
étoit arrivée plufieurs fois jufqu’ à nous. Les
vents de terre s’étant heureulement fixés, nous
mirent, pour toute la nuit, à l’abri de leur im-
preflion malfaifante.
» A droite des gerbes, étoit un trou un
peu éloigné, duquel je n’àvois d’abord rien vu
fortir} mais, durant l’obscurité, il s’en échap-
p oit, de temps en temps & par a c cè s , des
flammes bleuâtres, femblables à celles de l’ef-
prit de vin » elles etoient pouffees avec une certaine
violence, comme celles d ’une lampe à
émailleur, & produifaient à peu près le même bruit:
ces flammes paflàgères excédoient rarement trois
pieds de hauteur} leur lueur étoient fans doute
effacée par l’éclat des gerbes de matières fondues.
Ce font là les feules flammes que j’aie vues dans le
cratère } & il y a lieu de croire que les volcans
n’en produiienç pas d'autres : ce que l’on a
appelé flammes dans les éruptions ne sont que
des vapeurs ardentes.
» Les cratères ne font que des ch. minées de
Géographic-Pnyfique. Tom, Ifp
fourneaux volcaniques} àuflitôt que les réfervoirs
plus profonds fe vident, les fubllances qui, dilatées
par le feu & par l'expanfion des gaz, s'étoient
élevées jurqu'à ces cratères, baiffent & forment
d’une chaudière de matières liquides un précipice
dont 1 e fond fe fige. Pour ce qui s’échappe inférieu -
rement, on le voit fortir plus haut ou plus bas, félon
des circonftances particulières dont nous trouverons
plufieurs exemples fur le r.fte de l’ île. Ne voit-on
pas à Bourbon des coulées délavas qui onc fait leur
percée au bord de la m :r , c ’eft-à dire à près
d’une demi-lieue perpendiculaire au-deffous du
Volcan? D’autres, un peu plus élevé es, ne font
qu’ au niveau de la plate-forme qu’enferre l'en c
lo s, & b.aucoup font extérieures à c~tte barrière
fingu.ière qui iimiteroit les percées de
laves , fi les matières étoient triturées feulement
dans le dôme de la montagne. »
Coup d’oeilhiftorique furies principales éruptions volcaniques.
Le foin & la fagacité qui ont préfidé aux
recherches que M. Lyell a faites fur les régions
volcaniques de l’Italie , nous engagent à donner
la traduction de l’efquiffe hiftorique qu’il fait des
phénomènes volcaniques de cette contrée, depuis
les temps les plus reculés.
« La feule région volcanique connue des Anciens,
étoit celle dont la Méditerranée forme une partie}
mais ils ne nous ont tranfmis que des rapports très-
imparfaits des éruptions qui ont eu lieu dans fes trois
principales provinces ; favoir : le territoire autour
de Naples, la Sicile & les îles adjacentes, & l'Ar-
I chipel grec. La defeription la mieux fuivie de ces
rapports, eft celle qui concerne le premier de ces
arrondiffemens, & l ’on ne peut le confi Jérer trop
attentivement, puifque beaucoup de renfeigne-
mens hiftoriques font indifpenfables pour nous
aider à obtenir une connoiffance claire de la liaifon
& de l’aCtion alternante des différentes ouvertures
dans le même groupe volcanique.
«e Les volcans napolitains s’étendent depuis le
Véfuve par les Champs Phlégréens jufqu’à Pro-
cida & Ischia, prefque fur une ligne. ( Planch. 31
& 33.) En dedans de l’efpace ci-deffus défi-
gné, la force volcanique s’eft quelquefois développée
en fimples éruptions fur un nombre confi-
dérable de points irrégulièrement féparés} mais une
grande partie de fon aétion a été bornée à un point
principal & habituel le Véfuve ou la Somma. Avant
l’ère chrétienne, depuis les temps les plus anciens
dont nous ayons quelque tradition, cette principale
bouche étoit dans un état d'ina&ivité. Des
convulfions terribles eurent lieu alors de temps en
temps à Ifchia ( Pithecufa ) , & femblent s’être
étendues jafqu’à l ’île voifine de Procida ( Procitd)\
car Strabon raconte que cette dernière île fut v io lemment
féparée d’ Ifchia, & Pline dit quelle tire
fon nom de ce qu’elle eft le produit d’ une éruption
d’Ifchia.
« Ile d’Ifchia. Le$ tremblemens de terre & les
Y y y y