Au cap de Waîton , Vis-à-vis de Harwich, on"
en découvrit encore dans des couches de gravier.
A Newham, près de Rugby, on déterra en
181 y, toujours dans des couches d'e'gravier, mais
mêlé d’argilé , deux crânes & d’autres os appar- :
tenant à des Rhinocéros, avec - des défenfes d’ E-
. léphars & quelques bois de Cerfs. Dans le même
terrain, maïs depuis, on découvrit encore plufieurs
oflemens dè cet animal.
Enfin, dans diverfes parties de la Sibérie . le
célèbre Pallas découvrit un grand nombre d’ofle-
iriens de Rhinocéros-^ 8c même, en 1771, il trouva
enfe-vêli dans le fable, près du Wilhoui, rivière qui
fe jette dans la Léna, par le 130e degré de longitude^
un Rhinocéros .entier avec fa chair & fa
peau. •
Les obfervations que M. Cuvier a eu occafion
défaire furies divers oflemens foffiles de Rhinocéros,
l’ont conduit aux généralités fuivantes :
Deux grandes efpèces dominoient lorfque ces
animaux, vivoient : l'une fe reconnoît à l'épaifleur
de fes os-, c’eft celle dont les narines étoient fé-
parées par une cloifon ofleufe 5 les pays 011 on la
découvre font la Sibérie & l’ Allemagne : l’autre
non cloilonnee appartient principalement à l’Italie.
La première avoit la tête plus groffè, les jambesî
moins élevées, le ventre plus près de terre que,
l ’efpèce unicorne.i fa tête n’avèit point comme
celle-ci, de protubérances ou de c allô fit é.s irrégulières
3 elle étoit lifte comme celle du Bicorne du
Cap. Les pieds fe terminoient par trois fabots
comme ceux du Rhinocéros d’a'ujourd hui. Se's
poils étoient très abondans, furtout aux pieds,
comme nous l’apprend la description qué Pallas,
a donnée de l’animal qu’il a découvert & qui étoit
.encore fi bien çonfervé. Les Rhinocéros des Indes
& du Cap en manquent, 8c principalement aux
pieds. L’efpèce fofille d’ Allemagne 8c de Sibérie
eft. inconnue aujourd'hui.
Pallas préfuma d’abord que les'-poils dont
étoient couverts les Rhinocéros cjue l’on retrouve
en Sibérie , annonçoient que ces animaux étoient
conllitués pour habiter un pays moins chaud que
celui qu’ils habitent aujourd’hui ; mais il changea
d’avis, ainfi qu’on peut le voir par la traduction
fuivftnte d’une partie du Mémoire qu’il adrefia à
l’Académie de Pétersbourg, .& qui fut imprimé
dans le recueil de cette Société, tome XV il.
« 11 s’agit, dit Pallas, d’ur.echofe qui tient du
prodige, favoir, d’un Rhinocéros entier trouvé
« dans une partie très-froide de la Sibérie orien-
» taie..................... J’âürois préfumé qiie cette’
« affertion ne méritoit point l’ attention des gens
» inftruits, fi je n’a vois tranfinis à votre Acadé-
» mie les parties* fofliles, & furtout le crâne en-
» tier de ce cadavre 3. ainfi j’en appelle fur ce
m fait, au témoignage de cette ilJuftre Ccm-
•33 -pagnie.
« Etant arrivé à Ireuth , au mois de mars 1772,
» il me fut préfenté, enfer autres c-uriofités , ia
» tête d’un animal d’une grandeur confidérable,
>3 couverte encore-de fbfi cuir naturel, & pré-
» Tentant même plufieurs relies de tendons 8c de
» ligamens. La figure 8c les veftiges des cornes
» me la firent reconnoître auflitôt pour une tête
* de Rhinocéros. Pouvant à peiné me perfuader
s» moi-même de ce que je voyois , je fus enfin
33 confirmé dans mon jugement par deux pieds
33 du même animal, favoir, un de derrière juf-
33 qu’au fémur, & l’extrémité d’un des pieds de
33-devant. On y voyoit diflinétement, 8c la divi-
33 fion caraélériftique des doigts du Rhinocéros,
3? 8c le cuir avec les fibres des plus groffes des
33 chairs, comme fi c’eût été véritablement une
33 momie naturelle. Je reçus ces objets de
33 M. Adam de Bril, gouverneur de la Sibérie
33 orientale. Voici la relation que M. J.éaiï Argu-
33 noff publia fur cette découverte, en langue
33 ru fie, au mois de décembre 1771, 8c datée de
33 lrhi ver nage fitué à l’embouchure du fleuve
>3 Wilhoui ; elle me Fut tranfmife à Ireuth le 27
33 février fuivant; l’original eft dépofé à l’ Aca-
33 démie le voici :
« Ce mois de décembre on trouva dans la
3j rive fablonneufe du fleuve Wilhoui, fous une
33- colline efearpée , à quinze brades de l’eau , le
.33 cadâvre d’un ahimal à demi en-feveli dans le
>3, fable ; fi longueur étoit de quinze empans , 6c
>3 fa hauteur de dix , autant qu’on peut rèftimer.
33 Le commandant de f endroit. afliire que cet
>3 animal eft abfolument inconnu aux habit ans du
33 pays, & que jamais il n’en fut vu de femhlable
33 dans la contrée. Lë gouverneur-général ayant
34 déjà publié,cette ordonnance, en vertu de l’ai
l quelle tout ce qu’on découvriroit de curieux
33 dans fon département devoir-lui être tranfmis
34 par 'les çommandans , la tête & deux pieds-de
33 l'animal découvert furent envoyé s. à Ireuth bien
33 confervés, & avec la plus grande diligence. Le
33 refte du- cadavre, tfès-corrompu , quoique
33 couvert encore de fon cuir, ayant été aban-
»3 donné , a difparu , excepté un troifième pied
33 qui, fut envoyé à la préfeélure de Jaent. >3
ce Au moment où je reçus la tête 8c les pieds,
■ »3 continue Pallas:, le cuir.& les tendons avoiei-t
» encore certaine moMefi’è , produite fans doute
»3 par l’humidité la terre. If s’en exhaloit une
*3; odeur fétide , non telle que la puanteur des
»s chairs récemment corrompues, mais abfolu-
33 ment analogue à celle des latrines, & comme
33 ammoniacale.
» Comme je me.hâtois alors afin de franchir le
»3 lac Baïcal fur la glace, avant le dégel, je ne
33 pus m’occuper'dune defeription plus citconf-
33 tanciéè , ni.avoir affez de temps pour me Hp-
33 curer le deflin de ces patries foifdes. Ainfi,
>3 l ’ordonnai à Ireuth de les faire foigneufement
J3 fécher dans un four où je les lailfai ; mais a
» peine put-on y réuflir, vu le foin continuel que
33 cela exigeoit, à caulè de la matière graffe &
en exfudoit en grande quantité à mefure qu'il
fâlloit augmenter la chaleur. De là il arriva que
la partie fupérieure de la jambe de derrière &
tout le pied antérieur furent brûlés par le trop
grand feu qu’on fit imprudemment , & Ceux
qui étoient chargés de l’opération les jetèrent..
33 Mais la tête & l’ extrémité du pied de derrière
né fubirent prefqu’aucun changement dans
l’opération, & ce fut dans cet état qti on nie j
les fit paffer.......................... ï®* parties
molles, qui àvoient conferyé aüfli une grande
partie de fubflances graftës dans lés moelles, ont
changé Lur odeüf eft prié puanteur infeéte de
chairs dëüéchéeS par l’ardeur du foleil, après
quelque putréfaétion, & la corifervent encore.
»3 Cët animal rt’éfoit pas un des individus les
plus grands 8c des plus âgés' yîe fon efpèce,
comme le prouvent tes 6s du crâne ; cependant,
fi l’on en compare la grandeur avec celle des
cfâties plus âgés trouvés én diverfes parties de
la Sibérie, on peut en inférer que c’étoît un
animal adtilté. .
33 La longueur dé la. tête dénudée de la peau,
depuis la crête de Pos occipital jufqu’à l’extrémité
du bec offeux, égale’ deux pieds trois
pouces & demi, mefure de Paris. On ne m’a
pas apporté les cornes avec la tête ; peut-
être avoient-elles été détachées par l’eau où
le'cadavre' avoit flotté, ou par les gefts du
pays qUi S’occupent de la chaffe. Néanmoins
ôri y voit des veiligés bien évidenS dè la- corne
nâfale & de la frontale, favoir : cette' airë inégale,
un peu protubérante entre les orbites', de
forme ptefque rhomboïdale 8c fans cuir ; elle
éft incruftée dans Un péviofte mince, 8c comme
cornue & hériffée. de nombre de petits fi!a-
rnens droits, iemblables aufli à de la corne. Le
aüir qui enveloppe en grande partie la tête , êft,
d.iris fon état fec, d’uné fubftaricë très-tenace',
nbreufe, femblable à du cuir tanné fort dur,
propre'a faire des femelles de fôuliers ; à PeX-
.teriéur d’un bfun-noirâtre, mais blanchâtre
dans 1 intérieur : jeté att feu, il répand l’odeur
d uri ciiir qui-brûlè. (
>3' Autour de la' bouche, où furent autrefois
des lèvres molles & charnues , il eft corrompu
déchiré, dre forte q'ü il la-iflé à nu les extrémités
ofieufes des mâchoires. A diverfes placés
d\ï côté gauche, qui a été plus' long-temps
e'xpofé aux injureis dé l’air, le cuir paroît çà 8c
là carié &c comme rongé à la fuperficie extérieure
; m’ai s du côte droit, q'uéj’ ai répréférité,
le Cuir a été çonfervé en gran’de partie', afFcz
entier pour qu’on voie- encore’ dans roiït ce
côté là, & même entre les orbites, nombre de
p'bres, ou pour mieux dire de" petites lacunes’
fut lefqüelles gifoien't autrefois- les poils.
>3' A la région de la »naEHoiVe, il: refté mêîrib
en plufieurs places dir côté droit'beaucoùp dé
p’ôils riaillafît coifinre'-erî faifeeaux", mais dété-
33 riorés en grande partié jüfqli’i là ràciné. fis ont
33 çà & là jufqu’à trois lignés dé long; ils font
si un peu roides, d’un gris-cendré, eXcepfé tlri ou
33 deux poils noirs ajoutés à chaque fâifceàü 8c
33 plus forts que leS autres. <
33 On voit avec étonnemént que la partie du
33 cuir qui couvre les orbites & formé les pâu-
>3 pières, foit veftée en grande partie ïntaéié ;
33 de forte que l’on aperçoit clairement les oU-
>3 veïtùrës des paupières , quoique difformes , &
>3 pouvant admettre à peiné le doigt, de finëmë
33 qué le cuir deffiché formant autour dès païi-
33 pièfes des ridés un peu circulaires; mais la
33 cavité orbiculaire deS yeux éft remplie d'une
33 boue àrgileùfè 8c d’un humus animal, tel que ce
33 qui s’étoit infinüé dans une partie dè la cavité
33 du crâne. Il y à aufli foUs lé cuir des fibres
33 te'ndinéüfes, én grande quantité & afle^ fermes,
»4 qui font des relies des- mufclès temporaux &
33’ mafletèrés , fans omettre dans lé gofiet des
33 faifcéaüx ré'narqnab'és'de fibres tëfgoiaes.
» Les extrémités des mâchoires né préfeii-
33 tent aUcun veftigé de dents ni d’alvéoles.
35 Combien y a t-il donc dé fièclës -que le S
33 débris de ces Rhinocéros ont été ënfëve’is dans
33 ces contrées boréales ? Je laide ceci à décider
33 à ceux qui réfléchifient que leurs' r'éftes n'ont
33 pu fé trouver là qu’après- y avoir été apportés
>3 par un bôulevérfement arrivé fur notre Gl'obë,
33 & tel qu'aucunë hiftoirè né nous én rappéllé
>3 la mémoire, fi ce n’ eft le récit du'déluge. Mais
33 que ces corps aient pu fè cônférver dari's cés
33 coiïtréês- là pendant un fi grand nombre de
>3 fièclës , oft ri’éri fera pas furpris lorfqu’oft
33 faüra que le fol de ces contrées , prefque t’ou-
33 jours gelé', n ac.]üiért un peu de mollëfle qü à
33 fa fur face, ou au plus à un ou deux piéds de
33 profondeur, pendant le très-court été qül në
33 s’étend guèré au-delà’ de juillet Ces corps une
>a fors gèles avec le fol où ils fe trouvent, ri’ont
33 donc pu s’y foflilifer que par hafard, lorfqu’ik
33 ont été découverts par des alluviôhs ou autres
»s événérriens.
33 Mais ce qu’il y a de plus étonnant, c’eft leur
33 trarifport des contrées méridionales de l’ Afië
» dans les parties glaciales du.Globe. La cataf-
»3 frophe a donc été caufée par le paflage violent
>» 8c rapide d une mer , qui a traverfé l’Afié pour
33 aller fe' jètér dans le Nord , & c’éft ce qué fem-
»3 blént prouver évidemment lés corps marins
33 qu’on rencontre fi fo'Uvént avec ces débris d’a-
33 nimaux afiaciq'Uës.
»' 11 n’eft pas inutile dé rappeler ici quel eft
33’ éntorë l'état aélüel de la chaîne de l’Xcoiift ,
33 qui p'ärCouft tôute l’Afie orientale jùfqü’à l’O-
» céa’n . formé lés limites méridionales Je toute
»3 la SibéVie. Cêtté chaîne éli hërifl’ée dé roches
» arrachées évidemment de leur bafé, coupéé en
>3 rlorrtbre d’endroits, iht'érfbmpüe par des lits
, 33' de fleuves qui fè* portent ad noLd pat des' vallées