que la terre en eft préfervée durant tout l’hiver ,
c'eft-à-dire, huit ou neuf mois de l’année , & que
les vents y font beaucoup moins impétueux que
dans les régions tempérées, & à plus forte rai-
lon entre les tropiques, par une caufe tout op-
p o fé e , les couches formées par les dépôts ^fuc-
ceflifs des fleuves o n t , en approchant clés pôles,
plus d'étendue qu'à de moins hautes latitudes,
parce que les hautes eaux qui proviennent de la
fonte des neiges y font extrêmement abondantes,
s'étendent au loin, & féjournent long-temps, fur
les terres.
Entre l'Irtiche & l ’O b , un autre plateau plus
é le v é , plus inégal, & qui fe prolonge plus loin
que le premier, ne paroît cependant pas en différer
quant au mode de formation & à la composition ’
des couches. Seulement le fol y eft en général
plus argileux , ce qui peut -être dû à la décomposition
des fchiftes fort abondans dans les montagnes
comprifes entre les deux rivières.
Du bord oriental de l'O b , le fol s'élève comme
du côté oppofé, mais les pentes y font moins
roides, les formes moins abruptes. Les affluens
que le fleuve reçoit de ce côté ont leur fource
dans une chaîne de montagnes peu élevées que
Ton peut regarder' Comme un Contre-fort de l'Al-
ta ïs , & q ui, réparant le badin de l'Ob de celui de
LEniflTeï, forment vers le premier fleuve le verfant
occidental. On a quelques nivellemens barométriques
dans la partie la plusvoifine de l'Altaïs, &
comprile, par conféquent, dans le verfant du
nord : le refte a été peu vifité.
Outre les hautes montagnes comprifes dans le
verfant du nord , cette partie du badin dé l'Ob
eft cara&érifée par ces plateaux inclinés qui lui
font propres & qui fe prolongent jufqu'aux plaines
inondées lors de la fonte des neiges. Lorfque ces
plaines font defléchées par les chaleurs de l'é té ,
elles fe couvrent d’efflorefcences falines dans lef-
quelles lé fulfate de foude eft très-abondant.
Comme ce fol perd aifément fon eau de criftalli-
fation, & fe réduit alors en pouffière, l'air fe"
charge de particules falines qui incommodent
beaucoup ceux qui travérfent ces contrées dé-
fertes.
Verfant oriental. Cette partie du baflin de l'Ob
eft la plus étendue, la plus peuplée & la mieux
connue. Le plus grand nombre aes rivères qui la
fillonnent pour porter leurs eaux dans les fleuves,
prennent une direction très-oblique, & parcourent
un plus grand efpace que les principaux
fleuves de la France. La T o u ra , par exemple,
rivière du quatrième ordre, qui tombe dans.le
T o b o l, a un cours plus étendu que celui de la
Loire. Les crêtes de l'Oural, qui fôrmënt la fé-
paration des balfms du Volga & de l'O b , font
conftammerit à plus de 200 lieues de ce dernier
fleuve. Ces crêtes d'un élévation médiocre, ifo-
lées & fouvent fort éloignées les unes des autres,
ne font pas réunies pas des plateaux, comme les
ir.ontagfîés de l'intérieur de l'Efpagne î ce font
des marais qui rempliffent ces intervalles,
fouvent ces marais font la fource de ruiffeaux
qui fe rendent vers l'oueft au Volga, & vers
i eft, à l'Ob. On remarque auffi la même difpofi-
tion du fol entre la Kima qui tombe dans le
Vôlga,, & la Dwina qui a fon embouchure à Ar-
changel : le canal qui réunit ces deux rivières a
fon point de partage dans un marais imménfe qui
fournit des eaux à l'une & à l’autre, & dont {’élévation
au-deffus des mers eft beaucoup inférieure
à celle du baffin de Naurouze, qui alimente le
point de partage du canal du Midi.
Quoique le verfant oriental foit traverfé par une
multitude de rivières, que fes montagnes foiéne
peu élevées & que les marais couvrent plus de la
moitié de fa furface, on y remarque cependant
que les vallées y font très-fréquemment rétrécies
par des rochers à travers lefquels les rivières pa-
roiffent avoir creufé leur paffage. En quelques lieux,
l'induftrie humaine a rétabli ces digues naturelles,
& les étangs ou lacs dont elles foutiennent les
eaux fervent à faire mouvoir, durant lès longs
hivers de ces contrées, les ufineS que les Rudes
y ont établies. Il eft extrêmement probable que ce
pays fut autrefois couvert dé lacs , comme l’eft
encore aujourd’hui le nord de la Ruffie d’ Europe
&r une partie de la prefqu’île feandinave, & dans
l'autre continent, le nord des Etats-Unis & les*
régions qui s'étendent depuis les grands lacs jusqu'aux
glacés du Groenland.
1 La plupart des bancs de roches coupés par les
rivières qui Sortent de l'Oural pour fe rendre à
l'O b , font d'un fpath calcaire dont les criftaux ap-
prochenfqùelquefois de la grofleur & de la tranfi
parence des rhomboïdes dù fpath d'Iflande : d'autres
font des marbres blancs ou très-peu colorés ,
& d'autres des roches feldfpathiques. Les formations
fécondaires y font aflez rares, & les efpaces
couverts de végétation font d'une fi grande étendue,
que, fans la rigueur du climat; aucune contrée
ne feroit plus fertile que celle-ci ne 'pourroit le
devenir.
Comme l’ inclinaifon du verfant eft à peine fen-
fible, on ne peut y remarquer, comme dans
celui du nord, des gradins par lefquels on s'élève
depuis les bords du fleuve jufqu’au fommet des
montagnes. En général, toute cette contrée n'eft
qu'une plàine légèrement ondulée', fur laquelle
on aperçoit de loin en loin quelques coteaux ou
quelques buttes qui terminent l ’horizon vers
l'oueft, & qui difparoilfènt promptement lorsqu'on
eft forti de la région dite des montagnes.
Cette plaine n'a pas moins de 400 lieues de longueur
fur plus de 200 lieues de largeur moyenne.
La pente moyenne dans le fens de la largeur eft
au-aeflous de deux mètres par lieue ; dans le fens
de la longueur, elle n'eXcède pas un mètre pour
la même diftance, en forte que la pente réelle
peut être évaluée à deux mètres par lieue, ou
o B
à peu p rè s , i TiW de la hauteur. Comme cette
inclinaifon eft à peine fuffifante pour l'écoulement
des eaux, on en conclura que les marais de ces
contrées réfifteroient à tous les moyens connus
de defféchement, que l'homme y lutteroit vainement
contre la nature, & que tous fes efforts ne
parviendront jamais qu'à préparer une partie du
fol pour fes cultures, en abandonnant tout le réfte
aux eaux ftagnantes.
Les principaux affluens de l ’Ob qui viennent
du verfant oriental, font la Sob, qui tombe dans ce
fleuve au nord de B érézow, la T o u ra , qui pafle
à Verchotourié, & i l f e t t , fur laquelle eft la ville
d'Ekatherinebourg.
Verfant occidental. Cette partie du baflin de l'Ob
n'a été décrite avec quelqu'étendue que dans fa
partie du fud, fur les routes qui conduifent de
Toboisk aux ëtabliflemens rufles fur l'Eniffex &
dans la Sibérie orientale. On peut la comparer
en tout au verfant oppofé : la pente du terrain y
paroît encore plus fôible i & les marais plus
étendus. Les terrains falés s’y multiplient. Les
rivières n'y ont pas un cours auffi prolongé, tant
parce qu'elles le dirigent prefque perpendiculairement
au fleuve , que parce que leur fource n'eft
pas auifi éloignée. Il réfulte de cette difpofition
que l'Ob ne reçoit fur fa rive droite , furtout
dans la partie inférieure de fon cours, aucune rivière
comparable à celles qui viennent de l'Oural.
Ces rivières coulent dans des valléesplus ouvertes
que celles du verfant oppofé : on y remarque
cependant auffi des rétréciffemens analogues à
ceux dont nous avons parlé, & qui donnent
lieu de cfbire que l’intervalle entre l'O b &
l'Enifleï fut couvert autrefois d'un plus grand
nombre de lacs qu’on n’y en trouve actuellement.
Le lit du fleuve eft généralement encaifle &
d’une grande profondeur. Près de fon embouchure
, il n’y a plus de fonde. Il paroît que les
plus gros vaiffeaux pourvoient le remonter au
moins jufqu'à l’embouchure de l'Irtiche, & que
fes principaux affluens permettrpient auffi une navigation
très-étendue, fi la rigueur du climat n’y
mettoit un obftacle insurmontable.
Nature du fo l. Dans les régions montagneufes,
le fol eft prefque partout un mélange d'argile &
de filice, & on ne-le rencontre nulle part d’une
nature décidément calcaire, quoique les roches
de chaux carbonatée y foient très-communes. La
couche de terre végétale y eft d’une grande épaif-
feur. On n’y trouve point d'autres tourbes que j
celles qui ont cônfervé le tiflu fibreux, & qui
proviennent évidemment de la décompofition des
moufles dont les terrains marécageux font couverts.
Ces amas de végétaux à demi décompofés
colorent en brun prefque toutes les eaux..courantes
, parce qu'à peu près toutes les fources font
dans les marais. Jufqu'à prélent on n'a fait dans
cette contrée aucune recherche de houille ; il y a
o B 5
lieu de croire que c e combuftible exifte dans les
montagnes & peut-être dans quelques parties des
plaines. On n'a pas plus de données fur les amas
de lignites qui ne peuvent manquer dans un pays
où les rivières enarient, lors de la fonte des
neiges, une grande quantité d'arbres flottans. Les
débris d’animaUx terreftres n’y font pas rares.
(Voyeç S ib é r ie .) Les naturaliftes n'y ont pas encore
obfervé les dépôts marins, & ce que
l’infpeCtion de la furface a pu apprendre n'annonce
; que des formations d’ eaux douces.
Climat. Non-feulement le baflin de l ’Ob , mais
tout le nord de l'Afie eft plus froid que le nord
de l'Europe à la même latitude. On remarque de
plus que cet abaiflement de température eft plus
fenfiblé à mefure qu’on avance à î'e ft, & que les
froids dé l ’Amérique feptentrionale font, en
quelque forte, annoncés & préparés en Afie
(y'oyef T em p é r a tu r e ) . C e n’ eft pas, comme on
l'a prétendu , parce que l’ Afie feptentrionale eft
inclinée vers la mer Glaciale, que cette partie de
l’ancien mondé ne jouit pas d'une température
auffi douce que fa pofition femble la lui permettre:
nous avons vu que cette inclinaifon n’eft prefque
pas- fenfiblé , & d'ailleurs elle diminue encore
vers lé Kamtchatka, où le froid eft cependant
plus v if, à la même latitude, que dans aucune
autre partie du continent.
Les plus hautes cimes de l'Oural font boifées
& par conféquent la température y permet encore
la végétation des arbres. Cependant le thermomètre
y defeen d quelquefois au-deflbus de la congélation
du mercure, même au fud de cette chaîne
de montagnes. Quelques fommets de l'Altaï font
couverts de neiges perpétuelles, Si la température
des contrées voifines en eft fenfiblement affectée
: mais ces variations locales & circonf-
crites n'ont que peu d’influence fur le climat dans
un efpace auffi étendu que -celui que nous confi-
dérons. Dans les plaines, au y8e. degré de latitude,
on voit fouvent le thermomètre s'abaiffer
au-deflbus de 40 degrés cen.trgrades, & quelquefois
il tombe à plus de yo°. V e r 4 l’embouchure du
fleuve, l'hiver n’eft plus fupportable que pour
les animaux arCtiques ôc pour les races d'hommes
modifiées par l’influence prolongée de ces climats
rigoureux.
Végétation. Les arbres qui peuplent les immenfes
forêts du baflin de l'Ob font le pin fyiveftre,
différentes efpèces de fapin , le pin cembro (cèdre
de Sibérie ) , le mélèze , le tremble, le bouleau,
le tilleul & quelques efpèces moins nombreufes
& moins utiles. Lepùtier ( cerafus padus), le for-
bier des oifeieurs ( for bus aucupana), l’aubier &
quelques efpèces de fpirées y montrent leurs fleurs
au printemps dé cés contrées 5 des rofiers, des chèvre
feuilles, descyiifes, des atragènes, & c ., viennent
un peu plus tard, & prolongent la durée de
cette belle faifon. Le iis martagon, des anémones,
des renoncules, des oeillets même contribuent