
tir du chaos : ces bancs calcaires formés par des
êtres doués d’une étonnanre fécondité, due i
comme nous venons de le d ire, à la chaleur de
l ’antique Océan, s’étoient, après une longue fuite
de liècles, couverts de végétaux dont les nom- .
breux débris accumulés avoient formé une couche
de terre favorable à la Végétation nouvelle;
tout fembloit prouver à l'homme la nouveauté de
fon arrivée fur la terre ; tout contribua à lui faire
croire que ce qui l’eniouroit avoit été créé pour
lui : il fe crut le dernier chef-d’oeuvre de la création.
Cependant de nouveaux continens, de nouvelles
îles fortirent encore des eaux > de là l’idée
de ces déluges dont tant de peuples ont conferyé
la tradition, & qui fut accréditée par l’irruption
très-récente de l’Océan q u i, rompant de hautes
chaînes de montagnes, morcela les premiers continens.
Les faits nombreux qui forment jufqu’ à préfent
les bafes de la géologie, & dont la férié préfente,
dans les divers terrains de nos régions tempérées,
d’immenfes débris de plantes & d’ animaux dont
les analogues ne fe rencontrent que dans les climats
méridionaux , & dont la parfaite confervaÿon s’op-
pofe à l’idée d’uné irruption marine brulque &
foudaine, qui les auroit iranfportés dans nos contrées,
prouvent iùfqu’à l’évidence qu’ ils ont dû
pour la plupart vivre dans les lieux mêmes où on
les trouve. C e n’eft donc qu’après une longue
fuite de fiècles que la diminution des eaux ayant
contribué à la diminution de la hauteur & confé-
quemmenc du poids de l’atmofphère, la chaleur fe
concentra dans-les plus baffes régions, que les
fommets élevés fe couvrirent de neiges, & que le
règne animal & le règne végétal perdirent de
leur fécondité. En effet, nous voyons que les
hautes chaînes de montagnes recèlent à différentes
hauteurs les plantes & les infeétes de divers
climats. Les forces vitales femblent y fuivre les
degrés de température.
Il n'eft pas inutile de rappeler ici que l’ air at*
mofphérique, dont la pefanteur a été prouvée
par les expériences de Galilée & reconnue par
M. Biot, être avec la pefanteur de l’eau à la température
de zé ro, dans le rapport de 1 à 770,30,
eft élaflique & compreflibie au plus haut degré i
que fa preflion, depuis les plus hautes régions de
l ’atmofphère, évaluée à quinze ou dix-huit lieues
d ’élévation, ou, fuivant Lalande, à 38,000 toifes,
eft égale à celle d’une colonne d’eau de trente-deux
pieds de hauteur ou d’une colonne de mercure de
vingt-huit pouces; que fa preflion fur le corps de
l’homme en évaluée à 32,562 livres , & que l’atmofphère
dilatée ou comprimée en raifon de la
chaleur & du froid, eft renflée fous l’ équateur &
aplatie fous les pôles, dans la proportion de 3 à 2,
fuivant les calculs de M. de Laplace.
Qu’on juge donc de l’aélion de l’atmofphère
primitive par l'influence qu’elle exerce encore fur
toutes les fubftances : elle délite les pierres, elle
dégrade les montagnes, elle.décompofe leurs roches
les plus dures, elle produit des efflorefcences
fur plufieurs fubftances minérales, elle forme cette
croûte blanchâtre qui recouvre les ftlex, enfin,
par fon aétion lente, mais uniforme, elle produit
dans les corps organifés aufli bien que -dans les
matières inertes, un balancement continuel de formation
& de décûmpofition qui avoit été obfervé
par les anciens philofophes, fc qui leur avoit
donné l’idée du mouvement univerfel.
Sans doute que cette diminution de température
qui amena la diminution de notre atmo-
fphère, fe fit avec une telle lenteur que l’exiftence
des premiers êtres doit remonter à une antiquité
prodigieufe, puifque depuis 2000 ans, ainfi que l’a
fait obferver M. de Laplace, la chaleur que l’on
éprouve à la furface de la terre ne paroît pas
avoir.diminué d’une manière fenfible; mais eft-ce
à-l’homme, dont la vie eft ft courte, à aftigner
l’âge de notre planète ? Quelques milliers d’années
font pour lui le dernier terme de la durée;
l’infeéle qui ne vit qu’ un jour pourroit-il comprendre
ce que c’eft qu’un fiècle? C ’efl à tort que
plufieurs favans eftimables ont cru devoir chercher
à faire coïncider l’antiquité & le nombre des
révolutions de notre G lo be, avec des Traditions
qui ont pu être altérées, en paffant jufqu’à nous,
par des peuples ignorans & par des idiomes oubliés
: la géologie, ainfi que toures les hautes
fciences, ne peuvent que rendre hommage à la
puiffance de l’auteur de la nature, en reculant les
bornes de l’efpace &: de la durée. Les Grecs persécutèrent
Anaxagore pour avoir ofé dire que le
foleil était plus grand que le Péloponèfe; cette
•affertion paffa pour une abfurdité dangereufe, &
cependant qu’auroient dit les ennemis du philo-
fophe, f i , devinant la vérité, il eût avancé que
cet aftre eft cent dix fois plus grand que notre
planète ?
Aérolites, météorites ou météorolites. L’ un des
phénomènes atmofphériques qui aient le plus de
rapports avec ce que nous venons de dire de l’état
primitif de l'atmofphère de la terre , eft celui de
la formation de ces maffes pierreufes & métalliques
qui, outre les noms que nous venons de
citer, ont reçu ceux de bolides, de céraunites & de
booetilies, celui de pierres de foudre, parcè qu’on
les a regardées comme un produit du tonnerre,
celui d‘uranolites, parce qu’elles tombent du ciel,
ou celui de pierres de lune, parce qu’on les a confi-
dérées comme ayant été lancées par le fatellité de
la Terre.
Elles apparoiflent dans l ’air fous la forme d’un
globe de feu; elles y répandent une lueur & un
éclat que plufieurs obfervateurs n’ ont pas craint de
comparer à la lumière du foleil ; elles fe dirigent
de divers points du ciel vers la terre; leur chute
eft toujours annnoncée par une détonation violente,
que l ’on a fouvent comparée à celle de plu-
'fieurs pièces d'artillerie éclatant à la fois. Enfin,
des pKyfïciens ont calculé que ces pierres tom-
boient quelquefois de la hauteur de cent lieues.
Leur compofition généralement alfez identique,
autantqu’on en peut juger parles obfervacions faites
avec quelque méthode , depuis que la phyfique
& la chimie s’ occupent de ces recherches, eft un
amalgame de filice, de magnéfie, de fe r , de nickel
& de foufre.
On a fait les conjectures les plus variées fur la
formation & fur la chute de ces corps qui pèlent
quelquefois plus de deux cents livres, & qui femblent
devoir tenir le premier rang parmi les météores.
Mais malgré les intérefîans calculs de M. de
Laplace à ce fujet, on eft forcé de rejeter l’hypo*
thèfe que ces pierres auroient été lancées par les
volcans de la lune, depuis que M. Arago a prouvé
que ce qu’on a regardé, à la furface de cet t?e
planète, comme des feux volcaniques, n’en font
réellement point.
Toutefois, avant de fe hafarder dans la route
des conjectures auxquelles ces finguliers météores
, long-temps regardés comme fabuleux par
les phyficens, ont donné lieu, il ne fera peut-
être pas déplacé de donner ic i, en abrégé, la relation
générale de toutes les chutes d’aétolices qui
ont été obfervées depuis les temps les plus reculés
jufqu’à nos jours.
Epoques antérieures a 1 ère chrétienne.
Tite-Live rapporte que fous le règne de Tullus
Hoftilius, il tomba à Rome, fur le mont Albïn, une
pluie de pierres. Ces pierres pourroient bien, dit
Fréret, ne pas être de véritables aérolites, car elles
pourroient avoir été lancées par quelque volcan &
par le mont Albin lui-même. H eft à remarquer que
du temps de Fréret, il étoit permis de douter d’un
fait aufli extraordinaire que pouvoit le paroître une
pluie de pierres; mais aujourd’hui que ce phénomène
eft tout-à-fait avéré, rien ne répugne à
confidérer le récit de Tite-Live comme un fait
rempli d’exaélitude.
Une autre pluie de pierres eut encore lieu à
Rome, fuivant le récit de Pline Çt de Julius
Obfequens, fous le eonfulat.. de Cellarius & de
Manlius Torquatus.
Pline rapporté que l’année qui précéda la défaite'de
Craffus, il tomba en Lucanie une pluie
de . fer (fpongiarum feri fimilis ), caraCtère qui fe
rapporte affez à certaines aérolites modernes,
dont l’afpeCt eft en effet fpongieux. Le naturalifte
romain affure que de fon temps on montroït encore
une pierre qui tomba du ciel auprès du
fleuve Negos, dans la Thrace, la fécondé année
de la 78e. olympiade. Ce phénomène donna
même lieu au philofophe Anaxagore d'enfei-
gner dans fes cours, que la voûte célefte eft
çompofée \de groffes pierres que la rapidité du
mouvement circulaire tient éloignées de la terre,
vers laquelle elles retomberoient toutes fans ce
mouvement. On a fait de nos jours des fuppoiïtions
qui ne font pas plus raifonnables, pour expliquer
ce phénomène.
On pourroit encore enrichir cette nomenclature
d’une foule de récits femblables que nous
ont laides les Anciens; tel feroit celui de la chute
d’ une pierre qui paroît avoir eu lieu en C rè te ,
1478 ans avant notre ère, & qui fut regardée
comme le fymbole de Cybèle; les pierres cônfer-
vées à Orchomenos, fuivant Paufanias, la maffe de
fer du mont Ida; l’ancyle tombée 700 ans avant
notre ère, qui ne feroir peut-être aufli qu'une
maffe de fer météorique ; la pierre tonfbée dans
le lac de Mars, fuivant Tite-Live, 176 ans avant
notre ère. Enfin, celles qui tombèrent, fuivant de
Guine, pendant les années 644, 211 & 192 en
Chine avant l ’ère vulgaire, & plufieurs autres
qui tombèrent encore dans le même pays pendant
le fiècle qui précéda notre è re , font des faits
qui méritent d’être confiâtes.
/ Si nous continuons notre énumération, nous
verrons que le phénomène de la chute des aérolites
a été tellement fréquent, qu’ on a peine à
croire que dans le fiècle dernier, des hommes
d’un mérité diftingué aient pu douter de fa réalité.
Le catalogue que nous ahons en donner, d’après
celui du phyficien Chladni, commence au
premier fiècle de notre ère , fuivant les renfeigne-
mens fournis par M. Abel Rémufat, d’après les
hiftoriens chinois.
Aérolites tombéés apres le commèncement de l'ére
chrétienne.
Il eft peu de contrées où le phénomène des
météorites ne fe foit m.mifefté. Nous allons relater
ici ceux qui ont été confiâtes dans les différens
pays, où le fouvenir en a été confervé par les
monumens hifloriques.
Chine. — Dans les années 2, 10 6 ,15 4 , 310 &
3 3 3, plufieurs pierres tombèrent fur divers points
de cette contrée.
616. Chute confié érable.
8 V9- Pierres tombées au Japon.
88f. Même phénomène dans cette contrée.
1657. Dans la Corée.
1516. Deux pierres.
Turquie & Grèce. — L’an 4f 2 , trois grandes
pierres tombèrent en Thrace ; c’étoit l’ année de la
ruine d’Aquilée par Attila. La chronique du comte
Marcellin en fait mention en ces termes : hoc temporel
très magnï lapides è coelo in T . 'acià cecidere.
Vers 648, à*. C.onftantinople, il tomba une
pierre ignée. . .
1706, le 7 juin, pierre à Lariffe. '
1740, le 25 oftobre, à Rafgrad en Romanie.
1805 , en juin, à Ço n flan tin o pie.
Egypte & Syrie , Arabie , Perfe. — Au fixième
fiècle, il tomba des pierres fur le mont Liban,
& près d’Eme.fla en Syrie.
Vers 570, près de Bender en Arabie.
8 5 1 , en juillet ou août, dans le Tabariflarr.