
nement, de façon à reprendre fa pofition première.
Si quelques petites pierres fe trouvoient placées
fur la ligne de jonftion des deux dalles, elles
tomberoient dans l'ouverture quand le pavé s'élèverait
& feraient englouties, de forte qu’on
n’en verroit aucune trace lorfque le pavé ferait
abaiffé de nouveau. De la même manière, lorfque
la terre étoit foulevée, de grande maifons,
des arbres, du bétail & des hommes étoient
engouffrés en un inftant dans les fentes & les crevaffes,
& lorfque le terrain redefcendoit, la terre
fe refetmoit fur eux, de forte qu’on n’en pou-
voit rien découvrir fur la furface. Dans quelques
cas, des individus furent engloutis par une fe-
couife & rejetés vivans avec des colonnes d’eau
par une autre qui fuivit immédiatement la première.
» A Jerocarne, pays qui, d’après les académiciens,
fut la c é r é de la manière la plus extraordinaire
, les crevaffes s’étendoient dans toutes les
direélions, comme les caffures d’une vitre, &
comme une grande partie en eft reliée après les
fecouflfes, il eft probable que le terrain a été
fans pouvoir reprendre fa pofition première.
Dans le voifinage d’Oppido, point central
d’où le tremblement de terre étendit fes violens
mouvemens, plufîeurs maifons s’enfoncèrent dans.
la terre, qui fe referma immédiatement fur elles.
Dans le canton adjacent de Canna-Maria, quatre
fermes, plufieurs magafins d’huile & quelques
habitations fpacieufes furent fi complètement engouffrés
dans une crevaffe, qu’on n'en pouvoit
apercevoir aucun veftige. Le même phénomène
eut lieu à Terranuova, Santa - Chriftina & Si-
nopoli. Les académiciens dirent, entr’auttes, que
lorfque de profonds abîmes fe furent ouverts
dans les couches argilaçées de Terranuova, &
que des maifons y eurent été englouties, les côtés
des crevaffes fe refermèrent avec tant de violence,
qu’en creufant pour retrouver des objets de
valeur, les ouvriers obfervèrept que le contenu
des maifons & quelques parties détachées étoient
mêlés enfemble en une maffe compacte.
» Il eft inutile d’accumuler les exemples de fem-
blables événemens s mais il y en a tant de bien reconnus
pendant ce tremblement de la Calabre, que
I on peut ajouter foi aux narrations de cataftrophes
femblables répétées fouvent dans l'hiftoire, où
l’on dit que des villes entières ont été englouties,
& n’ont laiffé à leur place qu’un étang
bu un efpace nu.
,, Sur le penchant d’Oppido, il s’ouvrit une
longue large crevaffe, & bien qu’une grande
portion du fol y fut précipitée, ainu qu’un grand
nombre d’oliviers & partie de terre plantée de
vigne, il relia, après la fecouffe, un gouffre
en forme d'amphithéâtre, de yoo pieds de long
fur 200 de profondeur.
D’après Grimaldi, plufieurs fentes & crevaffes,
occafionnées par le premier choc, du j février,
furent confidérablement élargies, alongées & approfondies
parles convulfions violentes du 28 mars.
y» Le même obfervateur trouva dans le territoire
de San-Fiti une nouvelle ravine d'un demi-mille de
long, de deux pieds & demi de large & de vingt-
cinq pieds de profondeur. Il en vit une autre de
pareilles dimensions dans le territoire de Rofarna.
U n r a v in s d e p r è s d 'u n m i l le d e lo n g , d e ioy p ie d s de
la r g e & d e 3O d e p r o fo n d e u r , s'ouvrit dans le diftrièt
de Plaffance, où furent auffi formés deux gouffres,
l’un dans un lieu appelé Cerzulle, de trois quarts
de mille de long, de 1 yo p ie d s d e la rg e & de plus de
100 pieds de profondeur; & l’autre à la Fortuna,
de près d'un quart de mille de long, de plus de
30 pieds de large & d’environ 22 y pieds de profondeur.
ïj Dans le diftritt de Fofolano, trois gouffres
furent ouverts : l’un de 300 pieds carrés, fur plus
de 30 de profondeur j l’autre de près d’un demi-
mille de long, de iy pieds de large & d’environ
30 de profondeur j le troifième étoit de 750 pieds
carrés.
» Enfin, une montagne calcaire, appelée
Zefirio, à l’extrémité méridionale de la pénin-
fule italique, fut fendue en deux fur une longueur
de près d’un demi-mille, & fur une largeur
irrégulière. Plufieurs de ces crevaffes étoient en
forme de croiffant.
» Dans le voifinage de Serofinara, il fe forma
foudainement un lac, par fuite de l'ouverture
d’une grande crevaffe du fond de laquelle l'eau
s’élança brufquement* Ce lac fut appelé lac del
Tolfilo. Son étendue étoit de 2,380 palmes de
long fur 1,250 de largeur & 70 de profondeur.
Les habitans, craignant les effluves de cette
mare ftagnante, effayèrent à grands frais de la
deffécher par des canaux, mais ils ne purent
y parvenir, parce qu’elle étoit entretenue par
des fources fortant du fond de la crevaffe. Il y
eut auffi, près de Poliftina, un petit enfoncement
circulaire.
é On montra, dans le voifinage de Mileto, à fir
William Hamilton plufieurs fiflures profondes qui,
bien qu’aucune d’elles n'eût plus d’un pied de
large, s'étoient affez ouvertes pendant le tremblement
de terre pour engloutir un boeuf Si 100
chèvres.
! 23 Les académiciens trouvèrent auffi, en traversant
à leur retour les diftricts par lefquels ils avoient
commencé leur tournée, que beaucoup de fentes
s’étoient graduellement refermées, de forte qu’el-
■ les avoient diminué de plufieurs pieds & que les
bords fe touchoient prefque. Il eft naturel que
ceçi arrive dans des couches argilaçées, tandis
que dans les roches plus folides on peut s’attendre
qu’elles refteront ouvertes pendant des fiè-
cles. Si l’on pouvoit s’affurer que ce fait fut
général dans les pays agités par des tremblemens
de terre, il fourniroit une explication fatisfai-
fante d’un phénomène commun dans les veines
minérales
minérales. Ces veines confervent fouvent leur
entier volume tant qu’ elles font dans desfroches
calcaires &r granitiques Si dans d’àutrès matières
dures ; mais leurs dimenfions fe contractent, elles
deviennent de fimples filons , ou,font même entièrement
coupées, lorfque des maffej d'une nature
argilacéey font interpofëes. Si nous fuppofons que
les fiffures font remplies de fubftances métalliques
ou autres, par un procédé qui demande des fiècles
pour être terminé, il eft clair que le s murailles
oppofées des fentes, dans lesacouches qui confinent
en matériaux fufceptiBw!? de céder, doivent
fe réunir ou fe rapprocher de très-près, avant
qu’il fe foit paffé un temps fuffifant pour l’accumulation
d’une grande quantité de matière minérale.
a Grimaldi affure que les eaux thermales de Saint-
Euphemia, dans la Terra-di-Amato , qui fourdi-
rent pour la première fois pendant le tremblement
de-1638, acquirent, en février 1783, de l’augmentation
tant*"en 'quantité qu'en degré de cha-.
leur.---Ce?fait lemble indiquer une liaifon. entre la
chaleur intérieure & les fiffures eau-fées-par les
tremblemens de terre de la Calabre, quoique cejte
contrée ne renferme aucune roche volcanique:ancienne
ou moderne.
» La violence du mouvement de bas én haut
du terrain fut complètement démontrée par ce
que les académiciens appellent sbal^o, Xaut,
bondiffement en l'a ir, à la hauteur dé plufieurs
verges, de maffes adhérant légèrement à la fur-
face. Dans quejques yijle.s .j une grande partie du
pave fut lancée en l ’air, Sc les pierres furent trouvées
couchées fins deffus deftous. Il eft iinpoffible
de ne pas admettre qu'elles furent poulfées én haut
parTimpulfïon qu’ elles avoient reçue , & que
î'adhéfîon d’ unè'des extrémités de la mafTé étant
plus grande que celle de l’autre, un mouvement de
rotation leur avoit été communiqué. Lorfque la
pierre eut été lancée à une hauteur fuffifante pour
exécuter un peu.plus d’ un quart de révolution ,
elle redefeendit fur- le tranchant & tomba èn-
fuite’ fur le côté de deffous en defius. •
» Les effets dont on doit s’ occuper enfuite, font
ceux qui ferhblent plus immédiatement liés avec la
formation des vallées dans lefquellés l’aélion de
l’eau a fouvent été combinée avec celle du tremblement
de terre. Le pays agité étoit principale-'
ment compote, comme nous l’avons précédemment
d it, de couches argilaçées, entrecoupées
de vallées étroites & profondes, quelquefois de
5 ou '600 pieds de profondeur. Comme les bords
en étoient prefque perpendiculaires, on concevra
aifément qu’au milieu dès divers mouvemens de
la terre, les précipices fufpendus1 au-de(liis des
rivières furent fouvent renverfés. Auffi trouvons-
nous que les inondations produites par des
ébculemens dans le cours des rivières font
confptées parmi les conféquenceS' les plus -dé-
faftrèufes des; grands tremblemens de terre,
Géographie-pfiyjîquc. Tome K,
dans toutes les parties du monde : car les
plaines d’alluvions, au fond des vallées, font
ordinairement les parties les plus fertiles & les
mieux peuplées de tout le - pays ; & fpit que
l'emplacement d’ une ville foit au-defius ou au-
deffous du barrage momentané du canal d’une
ijy iè re , elle eflr’ expofée à être endommagée
fort par un la c, foit par une inondation.
*33 De chaque côté de la vallée profonde ou du
ravin de Terranuova, des maffes énormes furent
détachées du pays plat adjacent & jetées dans le
lit de la rivière, de manière à donner naiffance à
de grands lacs. On voyoit fouvent des chênes,
des oliviers, des vignes & du blé , croiffant au
fond du ravin, & auffi peu endommagés que
les mêmes végétanx dont ils avoient été féparés
dans la plaine à au moins y00 pieds plus haut,
& à la diftance d’environ trois quarts de mille.
Dans une partie de ce ravin étoit une énorme
maffe de 200 pieds de hauteur fur 400 pieds de
diamètre à fa bafe, & qui avoit été détachée
par un tremblement de terre antérieur. Il eft bien
attefté que cette maffe defeendit lé ravin pendant
un efpace d’environ 4 milles, après avoir été mife
en mouvement par lé tremblement de terre du y
février. Hamilton, qui examina la localité, déclara
que l’on pouvoit fe rendre compte de ce
phénomène p ar la déclivité .de la v a llé e , la
grande abondance de pluie qui tomba , & le
grand poids des matières alluviales qui preffoient
par derrière. La force d’ impulfion des terres mu-
vitines ou laves, nom que l’ on donne dans le prys
à la vafe coulante, eft-fans doute très-grande; mais
lê tranfport de maffes que l’on pourroit comparer
à de petites collines, tranfport opéré à une
diftance''dé plufieurs milles en une feule fois ,
eft un effet que l’on n’auroit jamais pu préfumer
; & ce fait pourroit fervir d’avertiffemer.t
aux géologues qui aiment à citer les phénomènes
d’alluyions comme preuves de la violence fu-
périeute des caufes aqueufes dans les anciens
temps.
33 La première notice envoyée à Naples des
deux gliffemens de terrain dont on a parlé ci-
défius, & qui formèrent un lac près de Terranuova,
étoit conçue en ces termes : « Deux
33 montagnes, des deux côtés oppofés d ’une
» vallée, ont marché depuis leur place primi-
>3 tive jufqu’ à ce quelles fe foient rencontrées
>3 au milieu de la plaine; & là , fe joignant en-
33 femble, elles ont intercepté !e cours de la
« rivière.
33 Les expreffions dont on fe fert ici reffem-
blent fingulièremen$à celles appliquées à des
phénomènes probablement très - analogues , que
l’on dit être arrivés à Fez pendant le grand
tremblement de terre de Lisbonne, de même
qu’à la Jamaïque & à Java, à d ’autres époques.
>3 Non loin de la ville de Soriano, qui fut ren-
verfée par le grand choc du y février, u:;«
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