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animal , a fu pouffer plus loin les recherches de
M. Jefferfon. Selon lui, le Mégalonix avoit une
main tout-à-fak femblable à celle du Cabaffou;
elle étoit compofée de cinq doigts, dont le médius
& l'annulaire étoient gros , courts & armés
d'ongles très-forts; Y index 3 moins fo r t, portoit
un ongle moins puiffant; enfin, le pouce & le
petit doigt étoient peu développés. Par l'avant-
bras, il reffembloit au grand Fourmilier; enfin
tous fes membres fe rapprochoient du Parefleux.
Nous terminerons ce que nous avons à dire fur
les cavernes par un expofé des obfervations que
M. Bertrand-Geflin a communiquées àM. Al.Bron-
gniart, relativement aux offemens de lavafte caverne
d ’Adelsberg en Camiole. 11 a d'abord remarqué
que c ’eft à tort que M. le chevalier
Lewengreff a prétendu qu'on ne les rencontroit
qu'à deux lieües de l’entrée. Creufée dans un calcaire
blanc compacité, cette caverne a , comme
toutes les autres, pour fol un limon argileux
rouge, contenant, dès la première faite, divers
offemens auflî abondans que ceux que l'on remarque
dans d’autres cavités plus connues. Mais
ce qui excita l'attention de M. Bertrand-Geflin,
après une demi-heure de marche dans la caverne,
ce fut un anias de forme -conique f compofé de
blocs calcaires qui fembloient être le réfultat
d’un éboulement. Ces blocs, aufli aigus dans leurs
arêtes que s'ils avoient été nouvellement brifés ,
étoient mêlés avec un limon argileux jaunâtre.
C'eft à la partie fupérieure de cet amas, à une
djzaine de pieds au-deffus du fol de la caverne ,•
& dans le limon argileux qui réunit lesfragmens
calcaires, qu’ il découvrit un fi grand nombre d’ of-
femens appartenant à un jeune Ours, qu’il ne doute
point qu’il ne l’eût recueilli prefque complètement
s'il étoit parvenu à foulever tous- les blocs, ll ren-
contra encore fur le fol de la caverne de petits amas
de limon & de fragmens calcaires , ainfi que des
blocs ifolés. Vainement il chercha à s'affurer que
ces blocs & ces fragmens provenoient des ébou-
lemens de la partie fupérieure de cette grotte, les
ftalaétites dont elle eft tapiffée l ’empêchèrent de
découvrir aucune crevaffe. Une éxcurfion de plus
d'une heure lui prouva donc que les offemens s'y
trouvent enfouis de deux manières : i°. dans le
limon rougeâtre qui forme le fol; i° . dans des
amas de fragmens calcaires qui n'ont été ni tranf-
portés ni roulés , & qui font réunis par un limon
jaunâtre. 11 en conclut qu’ en général la préfence
des offemens fofliles des cavernes peut être, attribuée
à deux époques peu éloignées. La première
eff celle où ces cavités étoient habitées par des
animaux qui y ont été furpris par une irruption des
eaux. La fécondé eft celle de leur nanfport par
fuite d’ une cataftrophe générale qui les. auroit
entraînés avec des alluvions & qui lès auroit introduits
dans les cavernes par jquelqu'iffue, par
quelque crevaffe, ou à là fuite de quelqu’éboule-
meut. Cette dernière époque fçrpit, félon lu i ,
o s s
évidemment contemporaine de celle qui a formé
les brèches offeufes.
Terrains tourbeux. Ces terrains rentrent naturellement
dans la férié des alluvions, fî on les
confidère fous le feul rapport de leur mode de
formation; mais la date récente à laquelle ils appartiennent,
leur augmentation pour ainfi dire
journalière, les offemens d'animaux qu’ils renferment
, & qui ne diffèrent point ordinairement
des animaux vivans, nous déterminent à les pré-
fenter ici fous un autre point de vue.
La tourbe eft un compofé de végétaux herbacés
ou marécageux convertis en une fubftance
noirâtre, qui contient fréquemment des relies
de tiges ou de racines réduites à l’état charbonneux,
mais encore reconnoiffables. Elle préfente
fouvent trois fortes de couches, qui diffèrent
ielon la nature du fond fur lequel elle repofe &
des plantes dont les dépôts fe'" fuccèdent. Une
defeription de celle que l'on exploite dans la
vallée de la Somme, pourra donner une idée
affez exaéte des couches dont nous parlons. La
partie fupérieure, placée au-deffous de la terre
végétale, eft une maffe de tiges & de rofeaux
entrelacés qui font encore reconnoiffables^ : au-
deffous c’eft un dépôt brun foncé qui paroît être
bituminifé, qui devient noir en fe deffechant^ &
i dans lequel on reconnoît le tiffu végétal. Enfin,
le dernier dépôt renferme une grande quantité de
bois , de troncs & de branches d'arbres qui re-
pofent fur un lit d’argile. Sur le bord de la vallée
ces dépôts ne defeendent qu'à fix ou dix pieds ;
mais au milieu ils acquièrent une épaiffeur d’environ
trente pieds. ".
Le dernier dépôt dont nous venons de parler,
eft quelquefois tellement décompofé qu’il n'offre
qu'une maffe noire & limoneufe, dans laquelle on
ne voit plus de traces d’organifàtion végétale.
Suivant l’opinion de Faujas, c’eft à une tourbe
femblable qu’il faut rapporter cette terre connue
fous le nom de terre d'ombre ou de Cologne, qui
occupe iine étendue de plufieurs lieues dans le s .
environs de cette ville. Ce dépôt, qui a plus de
cinquante pieds d’épaiffeur, & qui renferme encore
des végétaux reconnoiffables & des troncs
d*arbres d’une grande dimenfion, eft „recouvert
d'une couche de cailloux d'environ quinze pieds
de hauteur.
On trouve dans la tourbe de la vallée de la
Somme, & principalement au-deffous du dépôt
fupérieur, de nombreux offemens de Boeufs. Ils
font remarquables par leur grandeur , qui furpaffe
même celi,e de l'Aurochs, .auquel M. Cuvier
penfe qu’ ils peuvent .avoir appartenu.; Mais les
débris les plus abondans font ceux du C e r f & du
Chevreuil ; on y a même recueilli des bois d’ une
dimenfion confidérable.
C e qui prouve combien ces dépôts font récens,
c’eft la découverte faite dans les tourbières de la
même yailéej d 'une tête & 4’une dent de Caftor,
q u i , bien qu’un peu plus grandes que celles de
l’efpècé ordinaire, fe rapportent à celle d Europe.
Dans le dépôt le plus profond , les os de. ces
tourbières font accompagnés de coquilles fluvial
e s . j
Très-fréquemment on y trouve, avec des débris
deRuminans, des défenfes de Sangliers : c ’eft
ce que l’on obferve dans plufieurs localités,
ainfi que dans les tourbières de la Flandre.
M. Delaunay, dans un Mémoire fur l'origine des
f o files accidentels des provinces belgiques, dit qu aux
environs d’Aloft on trouva dans une tourbière
la partie offeufe d’un Sanglier inconnu en Europe,
autant qu’on en peut juger par la taille extraordinaire
que dévoie avoir l’animal, & furtout par
la longueur de fes défenfes. Il eft très-difficile
de déterminer d’une manière exaéte à quelles ef-
pèces appartiennent les Sangliers & les Pochons
foffiles. Mais il eft prudent de ne point confidérer
comme perdus les animaux qui diffèrent de ceux
de nos jours par des cornes ou des bois d’une
dimenfion confidérable; car, ainfi que l’a fait ob-
ferver M. Cuvier, à l’époque où ces animaux vi-
voient, paifibles habitans des vafles forêts que
l’homme n'avoit point encore explorées, ils pou-
voient atteindre une haute ftature. Auffî ce favant,
qui penfa d’ abord que le bois qui a été découvert
en 1802' dans une tourbière fituée près du
petit Svedala en Scanie, étoit celui d'une efpèce
du Daim inconnue , reconnut-il, en examinant
avec foin un deflin de ce foffile, qu'il avoit appartenu
à une efpèce de Renne. Les tourbières
de cette province de la Suède renferment d’ailleurs
beaucoup de débris du même animal.
Les mêmes dépôts tourbeux contiennent auffi
des reftes du. Boeuf aurochs ou Bifon. On y a
même trouvé un fquelette entier de cet animal.
Il ne diffère de l'efpèce vivante que par l’élévation
de fa taille, qui eft d’au moins un quart plus
confidérable. On y déterra, comme dans la plupart
des tourbières, des os d’ Elan & de Sanglier,
animaux qui n'exiflent plus en Suède depuis un
temps immémorial. Enfin on y trouve quelquefois
des reftes de YUrus ou Boeuf primitif, qui furpaffe
de beaucoup plus la taille du Boeuf domef-
tique, que le Bifon de ces tourbières ne furpaffe
l’Aurochs de Lithuanie.
Cette différence de taille entre des animaux
foffiles & des animaux vivans n'a rien d’extraordinaire
; mais ce qui a droit de le paroître x c ’eft
q ue, fuivant Breiflack, les tourbière-s de l’A mérique
contiennent de femblables dépouilles r
quoique les Européens n’aient vu à leur arrivée
fur ce continent aucun Boeuf femblable au nôtre.
Les terrains tourbeux de l’Irlande & de l’Angleterre
renferment auffi des fragmens appartenant
aux deux efpèces de Boeufs. L'Allemagne
en poffède dans les mêmes terrains ; mais les
tourbières de cette contrée & de l'Angleterre
poflèdent de plus que celles de la Suède, des offemens
de Caftor. Une tête appartenant à cet
animal a été retirée de la tourbe à douze pieds
de profondeur, près d'Urdingen fur les bords du
Rhin.
Le^offeméns de Cétacés font rares dans les
terrains tourbeux Le feul exemple que l’on puifte
citer eft la découverte d’une dent de Narval,
dans un marais fitué près de l’Anadir en Sibérie.
On trouva en 1817, dans la même contrée,
plufieurs offemens &: quelques défenfes, dont
l’une avoit environ neuf pieds de long.
Ma fl o don te. Nous avons vu qu’en Sibérie les offemens
de Mammouth ne font point généralement
épars, qu’ils font au contraire réunis dans quelques
terrains d’alluvion , où ils forment des amas plus
ou moins confidérables : il en eft de même de ceux
du Maftodonte; quoiqu’ on en trouve dans une
foule d’endroits de l’Amérique feptentrionale,
certaines localités en font fournies d’ une manière
prefqu’extraordinaire. •
Le plus célèbre de ces dépôts eft fitué dans le
Kentucky, à gauche & au fini-eft de l'O h io , à
quatre milles de ce fleuve, prefque vis-à-vis la
rivière de M l amis, dans un lieu enfoncé entre
deux collines, occupé, dit M. Cuvier, par un
marais qu’ entretient un filet d’eau falée, & dont
le fond eft une vafe noire 8c puante. C ’eft fur les
bords du marais, à trois ou quatre pieds de profondeur
, que l’on trouve les os fofliles de Maftodonte,
avec des offemens de Cerfs, de Buffles
& d’autres animaux. La vafe qui les contient a
été analyfée par M. Chevreul; elle eft compofée
de foixante-quinze pour cent d'argile, de feize de
fable, & de cinq de fulfate de chaux. L’argile
renferme du carbonate de chaux, du fulfure de
fe r , & un peu d’ oxide de ce métal. Cette vafe,.
félon M.' Chevreul, reffemble beaucoup à c e r taines
terres tourbeufes de la Picardie.
M. Smith Barton, profeffeur à l’Univerfîté de
Penfylvanie, écrivoit en 1806 à M. Cuvier : Un
voyageur intelligent a vu dans un endroit particulier,
près de la rivière des Indiens Ofagesy des m illiers et oj-
femens de cet animal, & il y a recueilli , entr autres y
dix-fept défenfes „ dont quelques-unes avoient fix pieds
de long & un pied de diamètre ; mais la plupart de
ces os étoient dans un grand état de décomposition.
La pofition verticale de ces offemens dans la
v afe , femble indiquer que ces Maftodontes s’ y
étoient enfoncés vivans.
Dans le comté de Monmouth, Etat de New -
Jerfey, on découvrit, il y a quelques années,
près de Longbranche un amas confidérable d’os
de Maftodonte, au fond d’un, marais. Ils conte-
noient dans leurs cavités du fulfate de chaux r
ainfi que du phofphate de fer & de chaux ; quelques
uns même en étoient couverts. Ils étoient
placés auffi dans une pofition verticale. D’après
l’examen des lieux, le fond vafeux dans lequel
ils étoient enfouis avoit huit pieds d’épaiflèur..
Au-defious on trouva une plus grande épaiffeur