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grande partie de la Tartarie 8c d ’autres contrées
asiatiques. Sur leur fo l , compofé de fable, d’argile
& de fel, s’ élèvent des collines fablonneufes ,
s'étendent des lacs falés q u i, par l’évaporation,
répandent, fur une fuperficie allez conndérable,
une pouflière blanche & fine qui n’eft autre chofe
que du fel pur. Quelquefois ces lacs fe deflechent
ik biffent à découvert des couches de ce minéral
de plufieurs pouces d’ épaiffeur. Ces vaftes déferts
préfentent partout l’afpeét d’ un terrain abandonné
par la mer; on trouve encore dans l’argile & dans
le fable différentes efpèces de coquilles marines ,
& des offemens de poiffons.
Afin de donner une idée de ces plaines défertes,
nous citerons un paffage de Pallas qui peint celles
des environs de la mer Cafpienne, & quelques
phrafes tirées d’un voyage fait à Boukhara en .1810,
par le colonel ruffe Meyendorff, dans lefquelles
il décrit les fteppes des Kirghiz près de la mer
d’Aral.
«* La fteppe qui borde le Kouschoum , dit Pal-
*• las , eft tellement faline, & aride qu’il n’y a pas
»» moyen d’en tirer parti pour aucune efpèce de
* culture j le pays n’eft pas même propre à l’en-
*• tretien des beliiaux, c’ eft tout au plus fi l ’on
»• ttouve au printemps quelques places garnies
»• de verdure- dans les fonds. La contrée n’eft pas
>» plus riche en bois qu’en herbage j le peu de
*• buiffons qu’ on y rencontre ne s’élèvent pas à
» deux pieds. »
Suivant ce qu’il dit ailleurs, en parlant des fteppes
du Kouman, ce n’eft que vers la moitié du
mois d’avril qu’on voit des herbages, principalement
dans les vallons baignés par,des fources; & ,
d’après la relation d'un autre voyageur, il fait
l’énumération des végétaux qui croiffent dans la
partie haute 8c méridionale de ces plaines, 8c
dont les principaux font :
i ° . Une efpèce d’iris à feuille de chiendent
( iris nana 8c gramini folia ).
2°. La giroflée des montagnes ( fcheiranthus
montanus ) .
30. Une julienne à tigehériffée de poils ( hefperis
tri f i s ).
4°. L’aftragale pois-chiche ( aflragalus cicer ).
5°. L’aftragale ( afragalus pkisodes').
6 °. L’aftragale à crochets (aftragalus kamofus).
70. L’ onoime à feuilles, velues en forme de
lances ( onofma echioïdes ).
8°. Une efpèce d’ornitogalon ( ornitogalum om-
bellatum ).
90. Le crambe à feuilles rudes ( crambc orien-
talis )
io*. La véronique d’Autriche ( veronica auf-
triaca ) .
i i ° . Une efpèce de pafferage ( lepidium perfo-
liatum ) .
12°. La renoncule drapée ( ranonculus lanugi-
nofus ).
1 j 0. La renoncule d’IHyrie (ranonculus illyricus').
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140. Le géranium à bec de grue ( géranium
moschatum ).
15°* L’ immortelle commune ( xeranthemum an»
nuum ) .
160. L’herbe à efquinancie ( fherardia arven/îs).
170. Le liferon de Perfe ( convolvulus perfeus) *
Il ajoute que ces plaines font peuplées de lé zards
& de ferpens ; que les puits que les Kalmouks
y creufent fe remploient d’une eau potable, mais
toujours un peufaumâtre, & que vers la partie
orientale on voit croître entre les coliines de fable
une efpèce de poirier fauvage à feuilles de
faille ( pyrus falicifolia').
Voici ce que dit des fteppes des Kirghiz & des
contrées fablonneufes qui les environnent le c o lonel
Meyendorff : «* Si l’on fe repréfente plu-
» fieurs lacs falans, quelques plaines unies dont
» le fo l, formé d’une argile molle & bleuâtre,
” cède fous le pied du voyageur, enfin tous les
| »» indices ordinaires de la diminution 8c de la re-
*• traite des eaux de la mer , on aura une idée
*° affez exaéte de la nature du terrain de cette
» contrée. »
Dans un pays auffi aride, ajoute -t- il, chaque
goutte d’eau devient précieufe, 8c les Kirghiz
n’ oublient jamais l'endroit où ils en ont trouvé
une fois dans leur yie. La trace d’ un fentier indique
toujours le voifinage d’ une fource, d’un lac
ou d’un puits, car ce font autant de points de
réunion pour les nomades de ces déferts, & les
fentiers s’y forment ainfi naturellement. «< Nous
» nous dirigeâmes, dit-il plus loin, fur le Coul-
» Koudouk, ou Puits de l’Efclave, fitué fur la li-
99 fière du défert de Bourzouk, qui offre l’afpeâ
99 le plus fingulier : il fe compofe de fable mou-
»9 vant qui forme un grand nombre de dunes fort
9» roides , élevées de 3 à 4 toifes , & fituées les
99 unes a côté des autres. C e défert change de
»3 configuration à chaque coup de vent un peu
» fo r t; quelques herbes, quelques buiffons epi-
»* neux, parmi lefquels fe trouve une efpèce de
»3 robinia , croiffent çà & là , & les longues racr-
>» nés de ces végétaux, femblab’es à des ferpens,
3* rampent à découvert fur les flancs de ces coi-
»• lines mobiles. >3
Si nous voulons compléter ce que nous avons
à dire fur les fteppes des Kirghiz, nous ajouterons,
d’après le naturalifte Pander, que la plupart des
lacs qu’elles renferment font cara&érifés par une
grande quantité d’acides muriatique & fulfurique
contenus dans leur partie faline : « Ceux-ci for-
33 ment en é té , lorfque l’eau s’évapore, une croûte
33 blanche de lepaiffeur d’un pouce jufqu’à plu-
>3 fieurs pieds, qui couvre la plaine argileufe. Du
93 muriate, du fulfate de foude & d’autres fels fe
33 trouvent fouvent ifolés, quelquefois réunis ;
33 quand ce dernier cas a lieu, le premier couvre
»• le fécond, & il eft quelquefois recueilli par les
33 Kirghiz. »
M- Pander penfe, d’après la nature des terrains
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rains qui environnent Boukhara, qu’il feroit
facile, au moyen d’ irrigations, de rendre propres
à la culture une grande partis des fteppes.
33 Les déferts fabionneux, d it - il, auxquels on
*9 joint ordinairement une idée effrayante de fté-
»» rilité, n’offrent pas le tableau de cette complète
»» nudité qu’on leur attribue fi fouvent. Leurs col-
»» lines fablonneufes font garnies de brouffailles,
»» & les vallées ou entonnoires dans lefquelles
»» l’ eau de la neige fondue s’affemble, font preuve,
39 du moins au printemps,, par leurs herbes &
»3 nommément les carex, de la poflibilité d’ une
*» végétation qui femble même s ’accroître annuel-
x> lement. »
Il nous femble convenable de donner ici la nomenclature
des plantes obfervées par M. Pander
dans les fteppes des Kirghis : il attribue à la rigueur
du fro id , auquel fuçcèdent des chaleurs
extrêmes, le défaut de grands arbres qui diftin-
gue ces contrées > on n’y voit point, comme dans
les déferts de l’Afrique, ces vaftes oafis qui
font un fi fingulier contrafte au milieu des fables
arides qui les entourent ; des groupes de peupliers
qui n’ atteignent que la hauteur de 5 à 6 pieds,
des faules & des brouffailles, forment il eft vrai
de petites oafis, mais feulement fur le limon fertile
que charrient les ruiffeaux ou les petites rivières
t près des fources d’eau douce, 8c même
des fources thermales. Les légumineufes prédominent
dans ces groupes de verdure >. le tamarix
8c le robinia frutefeens s’y trouvent en affez grande
quantité.
Parmi les boraginees, on remarque le myofoiis ,
Yanchufa 8c le lithofpermutn. .
Quant aux crucifères , ce font : la moutarde (fi-
nap is ) t i’arabette ( arabis) , & le raifort ( ra-
phanus).
Uhypoxis, l’ anthérique ( anthericum ) , l’a il,
l ’ornitogale 8c l’ afphodèle fe distinguent parmi les
plantes bulbeufes.
Au nombre des plantes graffes, il faut citer la
joubarbe ( fempervivum ) , & furtout les euphorbes.
Les arbuftes qui ornent certaines parties fertiles
de ces déferts, font : l’amandier nain ( amyg-
dalus nana ) , un églantier voifîn de la rofa
berberifolia, le chèvrefeuille tartare ( lonicera tar-
tarica ) j la feule ombellifère qu’on y ait remarquée,
eft la ferula perfica. Trois plantes furtout
méritent quelqu’attention : une férule, dont
il paroît qu’ on pourroit tirer une gomme dont
l ’effet médicinal feroit femblable à celui de
Yajfa fetida ; une rhubarbe ( rheum cafpiçum ) ,
qui feroit employée avec autant d’efficacité que
le baume palmatumj enfin, une . foude ( fal-
fo la ) q ui, fur les bords des ruiffeaux, atteint la
hauteur de 10 à i 5 pieds, tandis que les autres
efpèces de foude ne dépaffent pas 3 pieds.
Le favant chargé de recueillir dans l’expédi-
ton faitç en Boilkharie les objets relatifs à l’hif-
Géograpkie-Phyjîque. Tome V',
S T E 4 4 .1
toire naturelle, a donné la defeription des animaux
de cette contrée 8c des fteppes qui l'entourent :
plufieurs efpèces font identiques avec celles qu'a
. décrites Palias, mus d’autres font évidemment
des efpèces nouvelles.
Mammifères. Les fteppes de la Boukharie pa-
roiffent être la patrie de la Tou ris , tant on y
trouve de nombreufes variétés de cet animal ; on
y voit auffi des rats, des loirs, des campagnols,
des hamfters & des marmottes.
Parmi les rongeurs, le lièvre baikal eft le feul
animal dans ces déferts qui s’affocie à la fouris.
Plufieurs efpèces de carnivores, tels que des
renards, des martres, des belettes 8c des putois,
s’y montrent auffi.
Le hériffon & le blaireau font les feuls demi-
carnafliers qui habitent les fteppes. Pallas fignale
auffi le fanglier.
Voici les efpèces nouvelles rapportées de ces
déferts :
i° . Arctomys fulvus. Petite marmotte de 13
pouces de longueur, en y comprenant la queue,
qui en a trois.
2°. Arctomys leptodactylus. Marmotte plus petite
que la précédente, & dont la fourrure eft
compofée de poils longs, ferrés & foyeux du plus
beau jaune.
13°* Arctomys mugofaricus. Sans ongles aux
pieds de devant.
40. Dipus telum. Petit Animal à trois doigts,
voifîn des gerboifes.
y°. Dipus lagopus. De couleur ifabelle fur le
dos, tacheté de pointes brunes vers les reins, &
le ventre blanc.
6°. Dipus platurus, dont la queue eft large 8c
aplatie.
70. Meriones tamaricinus, dont la queue, garnie
de longs poils, offre des traces légères de
demi-anneaux colorés. s
8°. Meriones meridianus3 décrit par Pallas, fous
le nom de mus longipes.
90. Meriones opimus. Efpèce remarquablement
lourde & graffe.
io°. Mus lineatus.Souris plus grande que celle
des champs, ayant, depuis la nuque jufqu'à la
! queue, une raie étroite d’ un noir fon cé , 8c deux
autres plus larges 8c moins foncées fur les côtés.
i i ° . Sorex pulchellus. Petite mufaraigne, l’ un
des"plus petits quadrupèdes de ce genre, ayant
le dos gris d’ardoife, 8c les côtés blanc dé neige.
O iseaux. Les efpèces nouvelles en font moins
nombreufes.
i° . Corvus Panderi. Efpèce de geai, qui refl'em-
ble par fon plumage au corvus glandarius.
2°. Sylvia c&rulecula. Qui fe rapproche beaucoup
de la gorge bleue de Sibérie.
30. Sylvia caligata. Efpèce différente de tous
nos becs-fins d’Europe, 8c qui reffemble le plus à
la fauvette des rofeaux. (Sylvia arundinacea. La
T h r .)