
de notre temps dans les entrailles de la terre,
foit dans des fentes ou cavernes, ou par le
refroidiffement de lacs de lave fondue , nous
pouvons sûrement conclure que ces roches font
plus pefantes & moins poreufes que la vraie lave,
& plus criftallines, bien que compofées des mêmes
parties minérales. Comme les criftaux les plus durs,
produits dans le laboratoire,'demandent le plus de
temps pour leur formation, de même nous devons
fuppoferque, là où le refroidiffement de l'a matière,
a lieu par degrés infenfibles, il fe produit dans le
cours des temps une variété de minéraux beaucoup
plus durs qu'aucun de ceux qui font formés par les
procédés naturels, dans la courte période de
l ’obfervation humaine.
»» De plus, les roches volcaniques fouterraines
ne peuvent être ftratifiées de la même manière que
tes dépôts fédimenteux de l’eau 5 quoiqu’ il foit
évident que lorfque de grandes malles fe çonfondent
après la fufion, elles peuvent fe féparer en
divifions naturelles ; car on voit cela arriver
dans plufîenrs courans de lave. On peut aufli s’attendre
à ce que ces roches feront fouvent déchirées
par des trémblemens de térre, puifqu’ils
font fréquens dans les régions volcaniques, &
les filfures feront fouvent injectées de matière
pareille ; de forte que les dikes ou filons de
roche crifialline traverferont des ma fie s. d’une
compofition femblable. Il eft clair auffi qu’aucun
.débris organique ne fera enfermé dans de
telles malles, à moins que des couches fédi-
mentaires ne fe foient abaiffées à de grandes-
profondeurs , & , dans c e c a s , la chaleur agira
fur les fubliances fofïiles de maniète à oblitérer
toute trace d’organifation. Enfin,' ces formations'
ignées;profondément fituées, doivent être au-def-
îous de toutes les couches contenant des débris
organiques , parce que la chaleur vient de bas eh
haut & que l’intenfité néceflaire pour y réduire
les fubliances minérales à un état fluide, doit
détruire tous les corps organiques dans les
roches fous-jacentes ou qui y font renfermés.
Si par une férié continue de mduvemens d’ élévation,
de telles malles étoient, à une époque
à venir, amenées à la furface, de la même manière
que les couches marines fedimentaires on t,
dans le cours des ‘ans, été l'oulevées jusqu’au
fommet des plus hautes montagnes, il n’éft
pas difficile de prévoir quel problème embar-
rafîant le préfenteroit au géologue. Il pourrôit
alors étudier dans quelques chaînes de montagnes
les mêmes roches formées à la profondeur
dé plufieurs milles au-délions des Andes, de
l’iflande ou de Java, du temps de Leibnitz, &
en tirer la même conclufion que ce philofophe
avoit déduite de certains produits ignés d’ une
haute antiquité; car il imaginoit que notre globe
avoit été pendant une période infinie à, l’état ;
de comète, fans O céan, & également inba- !
table pour les animaux aquatiques éu terreftres.
Nous avons donné un aperçu général des différentes
natures de déjeélions volcaniques, telles
que les cendres y les débris de laves qu’ on appelle
rapilli, les blocs de laves incandefcentes
qui prennent dans les airs la formeg de bombes
^ les blocs de lave folide enlevés aux parois
du cratère; enfin les malles quelquefois con-
fidérables de roches arrachées aux entrailles des
volcans.
Prefque toutes les éruptions produifent des
cendres & des fables, ou des rapilli, des ciné rites
& des fpodites. Ces déjèttions légères’îo n t quelquefois
lancées à des diftances confidérables : en
473 > au rapport de Procope, celles du Véfuve
furent portées jufqu’à Conftantinople, c’eft-à-dire
à 27y lieues; en 1329, celles de l’Etna allèrent
tomber à Malte; en 1830, on les vit tomber à
Rome ; en 1766, celles de l’Hécla fe répandirent
a 50 lieues de là . Plufieurs témoignages attellent
que ces cendres peuvent même être portées plus
lpin encore. Les volcans de l’Afie & de l’ Amérique
en offrent, dit-011. des exemples. L’éruption
du Tomboro, dans l’ île de Sümbava, en 1815,
lança des'çendres iufqu’ à Bencolen, dans’'l’île de
Sumatra, e’ eft-à-dire à la diftance de 450 lieues
Ces--cendres forment des nuages lï épais, qu’elles
obcurciffent tout-à-coup l’ air dans les lieux où
elles fe répandent. Pendant l’éruption de l’Hécla,
en 1766, les nuages de cendres répandus dans l ’air
étoient fi grands que, bien que ce fût en plein j our,
on ne pouvoir, à plus de 50 lieues du volcan, fe conduire
qu'a tâtons. Le 4 avril 1768, celles que lança
te Cotopaxi répandirent une fi grande obfcurité à
San-Ambato & à Tacudga3 que les habitans-ne pbu-
voient fe diriger, en plein jour, qu’avec des lanternes.
Le i er mai 1812, les cendres parties d’un
vo can de l’île. Saint-Vincent répandirent une telle
obfcurité fur la Barbade, à plus de-20 lieues de
diftance, qu’ à midi on ne pouvoit apercevoir
un mouchoir blanc placé à 6 pouces des yeux.
On a remarqué que ces matières pulvérulentes ne
tombent pas toujours sèches, mais qu’elles font
pénétrées de vapeurs aqueufes : ce qui leur
donne la propriété de s ’unir .& de former des
maffes Xolid-s à la furface du fol; e’ eft ainfl
qu’a près les tremblemens de terré de Caracas,
on a trouvé dans la montagne d’Aros une térre
blanche qui couvroit des efpaces immenfes, &
qui n’étoit que des cendres agglomérées.
Ces matières volcaniques pulvérulentes, ainfi
que 1e fait obferver M. Girardin| ne paroiffent être
que la matière lavique, q u i, lancée en l’ air, fous
forme de gouttelettes, s’ eff figée fubitement. « Les
fcories, les ponces & autres matières incohérentes,
folidesy ajoute-t-il, qui fe trouvent .fouvent à
la furface de la matière lavique incandefcente
renfermée dans 1e cratère, foulevéës par le courant
de gaz qui s’échappe de fon fejn, à une hauteur
confidérable au-deffus de U bouche volcanique
, - de maintenues en équilibre dans l’air,
pendant
pendant 30 ou 40 minutes, au moyen de nouvelles
matières que 1e volcan continue à vomir,
roulent continuellement les unes fur les autres,
s’entrechoquent, fe brifent, & finiffent par fe
réduire, en grande partie, en fable ou rapilli. La
quantité de ces rapilli que les volcans rejettent
eft incalculable; ils conftituent la majeure partie
des déjections & de la maffe de plufieurs montagnes
volcaniques. Leurs particules les plus
fines fe mêlent aux cendres & font entraînées avec
elles au loin, tandis que les plus groffières retombent
au pied & fur les flancs de la montagne.
Elles s’accumulent alors, & forment fouvent des
monticules plus ou moins élevés. »
Des maffes de laves lancées dans les airs
tombent fouvent fur la terre dans un état de
mollefle qui les fait s’aplatir en tombant, ou qui
leur permet de prepdre l’ empreinte des objets
qu’elles couvrent. Quelquefois elles ont plufieurs
toifes de circonférence: le Cotopaxi & le pic de
Teyde en offrent des éxemples; le premier de
ces volcans a même lancé des maffes femblables,
mais tellement énormes, qu’aucune force humaine
ne pourroit les mettre en mouvement. Ainli, en
1533, il rejeta de ces mafles qui avoient 3, 4 &
même près dé y mètres de diamètre.
D’autres fois ces maffes de laves forment des
boules revêtues d’une croûte fcoriforme ; fouvent
ces boules font, vitrifiées, d’autres- lois elles
font creufes, & reçoivent le nom de bombes j
enfin, elles font quelquefois encore compofées
de plufieurs couches dont tes unes pierreufes &
les autres yitrèufes. Ces bombes font ordinairement
aplaties, rarement fphériques ou ovales,.
Les déje&ions les plus rares font celles de
roches de diverfes efpèces qui n’ont point été
converties en laves. Ainfi, Ferrara trouva fur l’Etna
du granité qui avoit été lancé par ce volcan ; le
Véfuve a quelquefois rejeté du granité, du mica-
fchiste , de la diorite & du grès.
La hauteur à laquelle ces maffes font lancées
dans les airs eft fouvent prodigieufe. M d’Aubuif-
fon de Voifins a calculé que cette viteffe, pour le
Véfuve & l’Etna, étoit à peine égale à celte qu’ont
les boulets à la fortie de nos canons : viteffe qui
eft de 400 à 500 mètres par seconde. En ne l’évaluant
qu’à 300 pour ces volcans, on feroit étonné
de la hauteur à laquelle atteignent ces maffes.
Celles que le Véfuve lança en 1779 relièrent
10 à 25 fécondés en l’ air. Dans l’éruption qu’ il eut
en 1715, les pierres qu’il lança ayant été 8 fécondés
à tomber, M. délia l orre calcula qu’elles s’étoient
élevées à la hauteur de 9ÖÓ pieds ; on a rrême
évalué que ce même volcan lançoit des pierres à
1,200 mètres au-deffus de fon cratère. En 1669 &
en 1819, l’Etna lança de grandes maffes de pierres
à une lieue de diftance ; mais, en 1533, le gigan-
tefque Cotopaxi jeta, à 3 lieues de fon cratère, des
maffes de 10 mètres cubes.
Géographie phyjiaue. Tome F*
La force qui foulève la lave du fond des volcans
jufqu’à leur orifice doit être ajoutée auffi- à celte
qui la pouffe au milieu des airs.
« Si 1e pic de Ténériffe, dont la hauteur eft de
3,700 mètres au-deffus de l’Océan, verfoit, dit
M. d’ Aubuiffon de Voifins, des laves par deffus
fon cratère, la force qui fouleveroit la colonne,
à partir du niveau de la mer, équivaudroit à 1,000
fois la preffion de l’atmofphère ; & fi une ouverture
s’opéroit dans 1e volcan, à ce niveau, la lave, ainfi
que les pierres & les corps qu’elle poufferoit devant
e lle , en fortiroient avec une viteffe de zyo
mètres par fécondé. «
Il eft rare que les grands volcans aient affez de
force pour élever la lave jufqu’à leur cime ; ou
plutôt, comme dit M. d’Aubuiffon, « les flancs de
la montagne n’ offrent pas à cette longue & peTanta
colonne de pierres fondues une réfiftance fuffifànte
pour la contenir ; les flancs du volcan fe fendent,
& la lave fe fait jour par une ouverture & s’en
échappe avec rapidité. « A aucune des époques
qui nous font connues, le pic de Ténériffe & les
grands volcans d’Amérique n’ ont verfé de lava
parleur cratère; & fur 10 éruptions de l ’Etna,
9 fe font par 1e flanc de la montagne. Mais il n’en
eft pas de même du Véfuve & des volcans encore
plus petits : habituellement la lave en fort en débordant
par deffus 1e cratère, & couverte de
de fcories qui nagent à fa furface : fa couleur eft
d’ un rouge-brun, & fon mouvement fe fait avec
lenteur.
Les courans de lave ne fuivent pas toujours une
marche uniforme. Sortis plus ou moins rapidement
des flancs de la montagne ou de fon cratère, leur
viteffe fe ralentit lorfqu’ils arrivent à fa bafe. Ils
s’étendent alors & fe divifent en plufieurs courans
, félon les accidens que préfentent 1e terrain,
ce Tantôt, comme l’ a obfervé Dolomieu, la matière
fe route fur elle-même, celle qui eft deffus paffant
fucceflivement deffous ; tantôt elle fe fige à fa
furface & forme une forte de pont fous lequel
coulelalave reftéeliquide au-deffous. D’autres fois
les courans fe répandent lentement, en confervanc
une furface Unie, fur laquelle s’élèvent des jets de
flamme & de fumée, ou bien ils fe couvrent de
nombreufes bourfoufflures. Quelquefois à la fortie
du volcan la lave eft parfaitement liquide; mais
bientôt elle acquiert une vifcofité & une ténacité
telles que de groffes pierres qu’on lance à fa fur-
face n’ y produifent qu’ une dépreflion prefque in-
fenfible. Dans la lave du Véfuve de 1*76$; Hamilton
avoit de la peine à enfoncer un bâton ; il traverfa
même un courant qui avoit environ 20 pieds de
large & qui couloir encore, mais avec lenteur.
Au furplus, la viteffe des courans de lave dépend
principalement de l’inclinaifon des terrains qu’ils
traverfent. M. délia Torre en a vu forcir du Véfuve
& parcourir 800 mètres dans une heure. Hamilron
en a obfervé un qui, dans 1e même temps, parcourut
1,800 mètres. En 1776, un autre fit un trajet de