
A n g le te r r e a offert à 'M. Mar.tell, parmi des'
offemens d’oifeaux & de reptiles, les relies-d'un
grand Saurien, qui par la forme de Tes dents fe
rapporte à l’ Iguane ; ce qui lui fit donner d’abord
le nom d'Iguanodon t puis celui d' îguanofauras. Sa
Mille devoit être de plus de cinquante-cinq pieds
de long. A en juger par les débris organiques
trouvés dans le même terrain , cet animal devait
habiter les rivages de l’eau laléeë: de l’eau douce
des lacs.
Terrains tertiaires. — Immédiatement au-def-
fus d e là craie, dans cette' formation argileufe
d eau d ou ce , connue fous le nom à"argile piaf-
uque, & qui fépare la craie du calcaire greffier,
furtour dans nos environs de Paris où cette fuc-
cefiion de dépôts eft très-vifible, on a trouvé
des débris d’os de Crocodiles. Dans l’argile piaf-
tique d’Auteuil, M. Bequerel, de l’Académie des
fciences, a découvert un fragment d’humérus &
une dent d’un animal de ce genre.
L’argile plaftique d’Auteuil renferme des li-
gnices ou bois fofiile > c’eft un des caraétères qui
fervent à déterminer l’ analogie qu’elle peut avoir
avec d’autres dépôts contenant des débris de végétaux.
Ainfi, par exemple, les couches charbon-
neufes de Mimet, dans le département des
Bouches-du-Rhône, ont été reconnues pour de
véritables lignites par les géologiftes qui les ont
examinées $ on leur a trouyé auflî la mêfne relation
de pofition que celle de l’argile plaftique
d’Auteuil} mais ce qui femble confirmer l’analogie
de leur date & de leur formation, c’eft
qu’ on a trouvé dans ces lignites des offemens qui
ont appartenu à des Crocodiles > qui félon toute
apparence, & d’après le fentiment deM. Cuyier,
font de la même efpèce que ceux d’ Âuteuil.
Il eft probable que çes reptiles ont laiffé quelques
unes de leurs dépouilles dans cfautres terrains
analogues.
L’argile qui borde la côte orientale de l’Amer
rique du Nord renferme -suffi dès ofiemens de C rocodiles.
On en a trouvé un qui par la for me de fes
mâchoires & le nombre de fes dents, fe rapproche
du Crocodilus a eue us.
Si nous paffons des formations que nous venons
de parcourir à celle des gypfes qui recouvrent les
grands dépôts de calcaire groflier qui conftituent
ces bancs exploités en pierre de taille dans les
environs de Paris , nous y trouvons conftaté un
fait très-important, c’eft le changement d’efpèce
dans les débris de Crocodiles qu’ils recèlent.
Le calcaire groflier n’appartient plus , comme
on le fait, à la formation fecondaire; il eft féparé
de cette dernière par l ’argile plaftique ; il; ne
renferme, en grande partie, que des débris ou
des empreintes de moliufques marins, quelquefois
de poiffbns, ainfi que nous l’avons vu plus haut,
fouvent de plantes, mais jamais de reptiles, de
mammifères ni d'oifeaux. La formation gypfeufe
qui lui fucçède eft donc d’ une époque beaucoup
moins ancienne. Nous verrons bientôt quels font
les mammifères aujourd’ hui inconnus qu’elle re-
cè le ; nous ne parlerons maintenant que des reptiles
qu’on y trouve, lis y font très-rares ; ils n’y conftituent
jufqu’à préfenc qu’une feule efpèce, mais
très-différentede celles des terrains plus anciens,
puifqù’au lieu d’appartenir au Gavial, ou C rocodile
à long bec , elle paroît être très-voifine du
j Caïman a lunettes (Crocodilus fcleropsf Les deux
individus dont M. Cuyier a cbfervé les oflemens
/ n’étoient point-d’une grande taille j l’un pouvoit
| avoir environ deux pieds, &- l’autre fix pieds de
! long.
j Les calcaires d’eau douce de diverfes localités,
fupérieurs , comme le gvpfe de Montmartre j à .la
! formation marine fecondaire, recèlent auflî des
oflemens de Caïmans femblablçs : tels font ceux
qui ont été découverts dans les marnières des environs
d’Argenton, qui paroiffént n’en différer
que par une taille plus, élevée, puifqu’ils pou-
voient atteindrè dix à quinze pieds i telles font
auflî les dents trouvées dans une marne calcaire
des environs de Blaye, 8c qui dévoient avoir appartenu
à un individu de huit ou dix pieds de
longj tels font enfin les oflemens découverts le
long des pentes de la montagne Noire , près de
Caftelnaudary,_& qui appartenoient à un Caïman
de neuf à dix pieds de long. '
Nous paflons fous filenCe les débris de Crocodiles
provenant de localités dont le terrain n’a
point été allez bien déterminé pour en aflïgner la
formation.
Les terrains fecondaires viennent de nous offrir
les Sauriens les pjusintéreffans de l’anpien Monde,
& les plus différens de ceux qui peuplent aujourd’hui
notre terre. Plus nous allons avancer dans
l'ordre des formations,plus nous trouverons d’a?
nalogie entre les antiques animaux aquatiques &
lès animaux qui vivent encore au fein des eaux.
Tonues. Afin d’éviter de revenir fur des détails
de localités déjà d é c r its , je ferai obferver que
1 on trouve des débris de çes animaux dans les
terrains les plu$ anciens de tous ceux qui renferment
des reftes organiqqes, comme dans les
plus récens.
Terrains intermédiaires. — Les lits fchifleux du
mont Plattenberg près de Glaris, en Suilfe, renferment
, avec les poiffons dont il a été parlé plus
haut, des reftes de Tortues marines qu’ il eft
difficile de rapporter à aucune efpèce connue,
j Cependant Scheuchzer y a reconnu le genre Cké-
. lonée.
Terrains fecondaires. — Dans le calcaire fecori-
daire des environs de Lunéville, on a trouvé
plufieurs offemens de Tortues du fous-genre des
Chelonées , qui diffèrent à la fois des Tortues vivantes
& des Tortues foffiles de Maeftricht. Celles
de Lunéville étoient d’une taille gigantefque 5
on en peut juger par la découverte d’un radius
long d e0,29 m ., & haut d’environ 0,06 î ce qui
indique une carapace de près de huit pieds de
longueur.
Le calcaire du Jura contient auflî des débris de
Tortues , mais qui paroiffént appartenir au genre
Emyde, qui vit- dans l’eau douce. Les carrières
des environs de Soleure, fur la rive gauche de
l’A ar, ont mis à découvert plufieurs de ces fra-g-
mens. Ces carrières font creufées dans une roche
de couleur blanchâtre , tirant au gris, au bleuâtre,
& quelquefois au jaunâtre , & qui a , dans quelques
localités, l’afped & les qualités de certains
marbres. Ses couches., généralement horizontales,
repofent en plufieurs endroits fur des bancs marneux
de formation intermédiaire.
Les carrières de Soleure préfentent dans leur
coupe la fucceflion des bancs ci après.
i° . Banc calcaire fendu dans toutes les directions,
&r contenant des huîtres, des (trombes,
des turritelles & autres coquilles marines.
20. Banc coquillier contenant, outre des huîtres,
des térébratules & des ourfins. On commence à
y trouver des débris de Tortues & des mâchoires
de quelques efpèces de poiffons.
30. Banc rempli des coquilles mentionnées ci-
deffus, mais accompagnées d’un grand nombre
de débris de Tortues 6c de dents de Crocodiles.
4°. Banc à peu près femblable au précédent, à
l'exception qu’on y retrouve des dents & des
mâchoires de poiffons.
y°. Banc coquillier.
6°. Coffche marneufe dans laquelle on trouve
le plus d’offemens de Tortues 6c les mieux con-
fervés ; ils font accompagnés de diverfes coquilles
marines univalves & bivalves.
70. Banc coqïiillier rempli de térébratules & de
vertèbres de poiffons j on y trouve des o s , mais
rarement.
8°. Banc coquillier femblable au précédent.
90. Calcaire pyriteux fans pétrifications.
io ° . Calcaire à gros grains, caffant, dans le quel
on ne trouve que des térébratules..
On voit par cette énumération que tous les
bancs qui conftituent la roche calcaire des environs
de Soleure font dus à des dépôts marins, &
cependant les Crocodiles & les Tortues foflïles
que l’on ;y trouve ne vivent que dans les eaux
douces. Beaucoup d’autres formations préfentent
ainfi le mélange d’animaux d’eau douce avec des
animaux d’eau de mer. Nous effayerons d'en donner
l’explication à l’article T e r r ain .
Sur plufieurs Emydes des environs de Soleure,
examinées par M. Cuvier, une feule fe rapproche
un peu de YEmys ƒerrata ; deux grandes efpèces
font tout-à-fait inconnues ; une d’elles femble annoncer
un genre particulier i mais M. Hugi, pro-
feffeur d’hiftoire naturelle au collège de Soleure,
prétend que dans les nombreux débris qu’il a recueillis
de cette lo calité , il a reconnu plus de
vingt efpèces différentes.
Le lias des Anglais , calcaire qui appartient à
la férié oolithique, renferme , félon MM. Cony-
beare & Philipps, des os & des palais de Tortues.
Dans les fables fecondaires de la forêt de T il -
' gâte en Angleterre, M. Cuvier a cru reconnoître,
parmi les oflemens de Tortues qu’ on y trou v e ,
une efpece d’Emyde analogue à celle de Soleure.
Je ferai remarquer à ce fujet que les deux lits , l’ un
de fable ferrugineux très-fin , fortement agglutiné,
1 autre placé au-deffous & formé d’ un agglomérat
de petits cailloux roulés, réunis par du fable &
par des infiltrations calcaires, font évidemment
dus à des attériflemens marins, ce qui eft encore
an.exemple de la préfence de quelques animaux
d’eau douce dans des terrains dépofés par l'Océan.
Dans le calcaire fecondaire de la montagne de
Saint-Pierré près Maeftricht , on trouve des débris
de Tortues mêlés avec des reftes de moliufques
marins & les offemens du Saurien dont nous ve-
nons de parler. Mais ces Tortues font marines;
elles paroiffént appartenir au genre Chélonée, quoiqu’elles
different de toutes les Chélonées connues.
La dentelure dont leur plaftron eft armé les
rapproche un peu de la Tortue caret, quoique
d autres caradtères , ainfi que leur grande taille ,
les en diftinguent d’une manière bien fenfible.
Terrains tertiaires. — La formation argileufe de
r ile de Sheppey en Angleterre, regardée avec
raifon, par le .géologifte Buckland, comme la continuation
du dépôt d’argile plaftique des environs
de Paris, puifqu’en effet elle repofe en Angleterre
& en France fur la craie, renferme auflî des
reftes de Tortues foflïles; ils appartiennent au
genre Emyde. M. Cuvier y a reconnu une efpèce
quia beaucoup de rapports avec YEmys expan fa.
Les terrains calcaires des environs de Bruxelles
confiderés par M. d’Omalius d’Halloy comme
poftérieurs a la craie, 6c conféquemment analogues
à la formation calcaire des environs de
Paris, recèlent auflî des offemens de Tortues;
mais dans le petit nombre de celles que leur état
a permis de birn obferver , il a été impoffible d’en
rapporter une feule à quelqu’efpècç connue.
Celle-que M. de Burtin croyoit être une Tortue
marine du genre' Chélonée, n’ a , fuivant M. C u vier
, que quelques rapports très-éloignes avec
l’Emyde ou Tortue d’eau douce. La figure qu’il
en donne dans fes Recherches f r Us offemens f o f -
fie s ( tom. V , 2e; p artie), eft celle d’un individu
parfaitement confervé, que l’on v • >it dans le cabinet
de l’Académie de Bruxelles. Les dimenfions
de fa carapace font 0,57 m. fur 0,53 m ., ou
environ -4 pouces de long fur iz de large.
L’argile ferrugineufe des côtes orientales de
l’Amérique feptentrionale, aux environs de l’embouchure
de la Delaware, argile qui paroît en
quelques endroits repofer fur des terrains anc
iens, mais que le profeffeur américain Finch
regarde comme analogue à Y argile de Londres ,
qui eft elle-même analogue au calcaire groflîer du
b a {fin de Paris 5 1 argile des côtes de l’Amérique.,