
IV. E spece scythique, homo scy-
t hic us,
Defcription. Les hommes y font moins petits
que dans Fefpèce hyperboréenne > ils ont auffi la
couleur de leur peau plus claire, avec les dents
toujours verticales, écartées, un peu longues &
grandes. Leur taille moyenne eft de cinq pieds ou
un peu plus 5 forcement olivâtres, ils ont le corps
robufte & mufclé, les cuifles greffes les jambes
courtes, avec les genoux fenfîblement tournés en
dehors & les pieds en dedans. Les plus laids de
tous les hommes, ils ont le haut de la face extrêmement
large & aplati, les yeux très-petits, enfoncés
, & tellement éloignés l’ un de l’autre, qu'il
y a fouvent entre lesdeux plus que lalargeur delà
main ; des paupières épaiffes furchargent ces yeux
bleuâtres } de gros fourcils rudes les couvrent. Le
nez eft fort épaté, les trous des narines feulement
le rendent fenfible fur une face ridée, même dans
la jeuneffe. Les pommettes font exceffivement
proéminentes > la mâchoire lupérieure eft rentrée
j le menton, s’aminciffant en pointe, termine
la figure en avant par fon alongement. Une barbe
afiez fournie ,- furtout à la mouftache, brune ou
tirant fur le roux 5 des cheveux plats, ni fins, ni
g ros , généralement noirs ou de couleur foncée,
complètent l’enfemble de phyfionomie le plus hideux
qui fe puilfe concevoir. L ’époque de la puberté
pour les deux fexes, & les autres phafes de
la v ie , y font à peu près les mêmes que chez les
Européens.
Habitat. Cette efpèce eft connue & confufé-
ment défignée fous les noms de Turc amans, de
Kirguifes 3 d’ Eleuths , de Tartares-KaLmouks, de
Mongols & de Mantchoux. L’efpèce fcythique habite
la Bucharie, laSougarie, laDaourie, fur toute
la furface de cette vafte région afiatique qui s’étend
en longitude des rives orientales de la Caf-
pienne jufqu’aux mers du Japon & d’Okhotsk, &
en latitude du quarantième au foixantième degré
nord, efpace immenfe fort élevé au-defliis du niveau
de l ’Océan, où fe ramifie l’énorme chaîne de
l ’Altaï, dont les parties méridionales font des dé-
ferts falés, non moins arides que ceux de l’Afrique
centrale, & duquel les eaux fluviales s’écoulent
vers les mers glacées à travers la Sibérie.
Nous avons, dans un Dictionnaire qui porte le
titre à!Encyclopédie ( 1 ) , au mot C heval, effayé
de prouver que la tradition des Centaures remonte
à l ’époque des temps obfcurs qualifiés d’héroïques,
où les premières hordes fcythtques, montées fur
des chevaux, pénétrèrent en Europe, mais qu’elles
n’ y purent pénétrer qu’après fa féparation de la
Mer-Noire & des mers du Nord. De vaftes marais
demeurés , comme nous venons de le montrer tout
à l’heure, entre l’Europe & l’A fie , après la
•(>) Sous la direûion de M. Courtin, rom. Y I , pag. 4-0.
retraite des eaux, rendoient les communications
fort difficiles entre des peuplades qui ne navi-
guofent pas } auffi furent-elles d’abord afiez rares*
Au temps de Strabon, pour ainfi dire très-près de
nous, par rapport à l’ antiquité que fuppofent dans
la civilisation de quelques races humaines, diver-
fes traditions appuyées fur d’inconteftables vraisemblances}
au temps de Strabon, le centre de la
Ruffie étoit encore tellement impraticable, que
ce grand géographe croyoit l’Euxin en communication
avec l’Océan. Hérodote rapporte que c’é-
toit récemment que des hommes habitant à l’orient
des Palus Méotides, s’ étoient aperçus, en pour-
fuivant une biche, qu’on pouvoit pafler d’ un bord
à l’autre, à l’aide de quelques points où la vafe
s’étoit confolidée.Quepeni'er conféquemmentrde
ces hiftoriens & de leurs imitateurs , qui placèrent
le berceau des nations fcytbiques dans ces terres
baffes encore à demi défertes, où nepouvolent
exifter que des morues, des harengs & autres
poififons de mer, il n’ y a guère plus de trois à
quatre mille ans} que penfer furtout de ces auteurs
venus dans un temps plus éclairé, qui voulant introduire
leur érudition philologique dans l’hifioire
naturelle, fans confuiter auparavant la conftitution
phyfique des lieux , étayent leur fyftème avec de
telles abfurdités ? Ils fuppofent d’antiques forêts
fertiles en glands nourriciers là où n’exiftent que
des pins & des bouleaux épars fur des tourbières,
depuis que la végétation ne s’ y compofe plus de
fucus, d’ nlves & autres hydrophytes} ils y fo n t ,
fous de vaftes ombrages, pulluler des nations a
l’ époque où des phoques & des marfouins y ve-
noient paître. De là ces beaux paffages du grand
Montefquieu q ui, changeant tout-à coup de manière
de voir fur les dévaftateurs de l’Empire romain
, les fait venir des Tartares, « nation la pfys
glorieufe, compofée de dominateurs de l’Univers,
& que les autres nations femblent faites pour fer-
vir. » Malheureufement le nom de Tartares, ou
plutôt Tatars-, préfente une lignification auffi vague
que celle d’ indiens qu’on donna indifféremment
aux peuples du Gange, aux Malais, aux Canadiens
& aux Caraïbes des Antilles, ainfi qu’aux hommes
des terres magellaniques. Il n’ eft pas même connu
avant le douzième fiè c le , où il paroît avoir défi-
gné quelques reftes de Huns que fubjuguèrent les
Mongols fous Gengis-Kan, & qui par conféque.1 t
ne furent pas « les dominateurs de l’Univers. *>
Malgré ce qui vient d'être d it, & qui n’eft qu’un
réfumé de ce que nous avons imprimé dès longtemps
, avec les preuves à l’appui, on ne ceffe
point, & l’on neceffera point fans doute de longtemps
d’appeler peuples du Nord des peuples qui
nous furent tout au plus orientaux, de faire venir
les Goths des Scythes, les Scythes des Tartares,
& ceux-ci des plaines immenfes & naguère noyées
qui s’étendent entre l’Europe & la véritable Scy-
thie. Les perfonnes qui dans notre fiècle fe mêlent
d’écrire l’ hiftoire, puifantfans exception dans
les vieux livres, pour expofer à leur façon ce qui
fut dit avant eux de mille façons différentes , ne
fe donnent pas la peine d’etudier la nature ^des
lieux , & de s’ informer comment eft fait le théâtre
où fe paffèrent les événemens vrais ou fuppofés
qui font le fujet de leur glofe.^ Ils roulent leur
ftyle dans les ornières accoutumées, ne lifent que
leurs propres écrits entre tous les écrits de leur
temps, & ne fe doutent pas que des connoiffances
affez approfondies dans les fciences phyfiques
font indifpenfables pour écrire complètement bien
& raifonnablement fur l’hiftoire des hommes.
V. Espece sinique, homo sinicus.
Defcription. Un peu plus grande que celle des
Tartares-Scythes, la taille des hommes de cette
efpèce eft à peu près de cinq pieds quatre pouces,
peu s’élèvent au-deffus de ces dimenfions > leurs
membres font bien proportionnés, encore que la
tête foit grofife ; le corps eft peu chargé de grailfe,
mais l’embonpoint pafle chez eux pour une beauté.
Le vifage eft rond, Sc même élargi par le milieu ,
où les pommettes des joues font, {aillantes ; les
y eu x , dont les prunelles ordinairement brunes
paffent auffi au noir, mais jamais à la teinte bleue,
font petits, ouverts en amande , avec le coin incliné
en bas y tandis que l’autre extrémité , très-
relevée vers le haut des tempes, y eft fortement
empreinte de ces rides qu’on appelle vulgairement
patte d’ oie; ils font très-peu fendus, & femblent
ne faire que deux -lignes obliques dans la figure}
les paupières en font également groffes & bour-
foumées-, prefque dégarnies de cils; les fourcils,
très-minces & fort noirs , font, auffi fort arques }
le n ez , bien féparé du front par une dépreffion
profonde, eft rond & légèrement^aplati, avec les
ailes un peu ouvertes, & fans ên e trop gros ,
quoique des voyageurs l’aient comparé, pour la
forme, à une nèfle. La bouche eft grande & les
lèvres un peu groffes, généralement d’ un rouge
livide. Le menton, qui eft p e tit, eft en général
dégarni de barbe } les Thibétains n’en ont guère
qu’à la mouftache, qui naturellement foyeufe,
peut devenir exceflivement longue : rarement leurs
femmes en préfentent-elles l’ analogue ailleurs.
Celles-ci, qui cependant lont vieilles d'affez bonne
heure, & dont la taille eft plus dégagée que celle
de leurs-maris , font prodigieusement fécondés,
réglées à peu près comme dans la race caucafique.
La fécondité,fuit la même marché pour les hommes,
aux exceptions près de précocité^qu’y porte
l ’influence méridionale, laquelle paroît déterminer
chez toutes les efpèce s de l’hémifphère boréal,
l’ avancement de la puberté. L’oreille eft
grande & très-détachée, de forte qu’on en dif-
tingue la prefque totalité chez un Sinique en le
regardant en face. Les cheveux font liffes, plats,
& ne bouclent jamais j ils font en outre de moyenne
longueur, gras & toujours, noirs, difpofés fu r ie
front, de façon à y former cinq pointes plus dif-
tinélement que chez les autres efpèces d’hommes
où la chevelure n’eft pas implantée en rond. Les
femmes, que leur éducation, leur vie fédentaire
& la conformation artificielle â laquelle on contraint
leurs pieds, retiennent fous J’abri du toit
conjugal, ont fouvent le teint comparable à celui
des petites maîtreffes européennes, & les peintures
chinoifes nous les repréfentent prefque toutes
comme étant d’une blancheur éblouiffante. En
général,.l’ efpèce finique a la peau huileufe, jaune,
& paflant au brun même foncé fous le vingtième
parallèle & au-deffous, où le mélange de Malais
dans la prefqu’île occidentale de l’Inde a imprimé
quelques modifications à leur phyfionomie primitive
; on remarque néanmoins que beaucoup des
Siniques les plus feptentrionaux font auffi les plus
foncés en couleur-
Habitat. Les Chinois, depuis long-temps célèbres
entre les nations thibétaines, peuvent être
confédérés comme le type de l’efpèce, prefque
toujours, mais improprement, confondue avec la
précédente fous le nom de Mongole3 qui réellement
ne doit défigner qu’une race fcythique
tartare. Cette efpèce fe compofe encore des peuples
appelés Coréens, JaponaisTunkinois, Co-
chinchinois 3 Siamois, & des hommes qui peuplent
l’empire des Birmans. Sortis fous le 30e. degré
nord des montagnes du T h ib e t, pour s’étendre
du joe. au 40e., féparés- des nations fcythiques
par les vaftes déferts de Cobi ou Shomo, ils def-
cendirent vers le rivage des mers voifines en fui-
v-anr le cours de fix ou fept grands fleuves roulant
vers l’ eft & le fud à travers de riches plaines* L’ ef-
pace qu’ils peuplent aujourd’hui en longitude,
n’eft pas moins étendu & ne le cède point en fur-
face à celui que, dans l’oueft, occupe l’ efpèce
japétique >. mais il eft moins confidérable que les
contrées fur lefquelles fe répandirent l’efpèce pré-*
cédente & I’efpèoe arabique.
* * Efpèces communes a l'ancien & au nouveau
Monde , ou étant étrangères a l'un ou d l’ autre.
V I . E s p è c e h y p e r b o r é e n n e , homo
hyperhor&us.
Defcription.. Les Hyperboréens- font de petite
ftature} quatre pieds & demi conftituent pour eux
la taille moyenne ; un individu de cinq pieds y
pafferoit pour un homme fort grand. Ils font
trapus, quoique maigres} leurs jambes font
courtes & afiez droites, mais fi groffes, particulièrement
chez diverfes hordes, entr’ autres celle
des Borandiens , qu’on les croiroit enflées & malades.
Leur tê te , ronde, eft d’un diamètre dé-
mefuré. Leur vifage, fort large & cou r t, eft p la t,
furtout vers le front} leur nez eft ecrafé, fans etre
d’une trop grande largeur > les pommettes font
fort élevées 5 les paupières font retirées vers les