leur frayoient les dégradations, les crevaffes &
d'autres accidens, donnèrent aux fleuves formés
par les eaux réunies dans les grandes vallées
une largeur & une force bien fupérieures à celles
qu’offrent aujourd’hui nos plus grands fleuves s
car tout annonce que ceux-ci ont confîdérable-
rnent perdu de leur antique importance. Si telle
doit avoir été l’origine “des vallées creufées
dans les terrains granitiques & dans les terrains
calcaires ou formés de couches de grès, de
marnes & d’argiles, des deux époques qui ont
fuccédé aux terrains granitiques, on concevra
que dans les dépôts crayeux & ceux de fédi-
ment fupérieurs, l’action érofive des eaux ait
creufé d’ autant plus facilement des vallées, que
ces dépôts, faciles à céder aux influences inférieures
, ne préfentent aufli qu’une foi-ble ré-
jfïftance à des cours d’eau qui, dans l’origine,
ont été beaucoup plus confidérables qu’aujour-
d'hui. (J. H.>
VALORSINE. Cette vallée des Alpes, inté-
re flan te par fes fîtes, curieufe par fa conftitution
géognoftique, eft fituée fur le territoire de la
Savoie. entre la vallée de Chamouni & le Valais.
Elle eft étroite & fe prolonge fur une longueur
de 3 lieues. Un torrent, le Berard, forti
du revers occidental de l’importante montagne
du Buet, l’arrofe en formant de diftance en dif-
tance de fuperbes chutes. Un autre torrent tombe
en cafçade magnifique à quelque diftance du
village de Valorfine. A l’époque de la fonte des
neiges, les avalanches roulent avec fracas dans
cette vallée : le village même que nous venons
de nommer n’a pu s’en garantir qu’en faifant conf-
truire un rempart épais & élevé qui arrête ce
fléau périodique. L’hiver dure long-temps dans
cette vallée, & ce n’eft qu’au mois de juin que
s’accomplit la fonte des neiges.
Les brèches que l’on remarque dans la Val or-
fine, à plus de 1,000 toiles de hauteur, ont excité
l’ attention de plufieurs géognoftes. Elles
confiftent en un pfammite fchiftoide (voye% Roches)
, contenant des fragmens de gneifs & de
mica (chiffe, lequel eft difpofé en ftratës prefque
verticales. Ces fragmens font de diverfes grof-
feurs, depuis celle d’un grain de fable jufqu’à
celle de la tête ; les uns arrondis & les autres
anguleux. A la vue de cette difpofition , Sauffure
déclara qu’il étoit impoflible de fuppofer que de
pareilles couches fe fufient formées dans la portion
verticale où elles fe trouvent : il penfa que
ces cailloux avoient dû être dépofés horizontalement,
& redreffés depuis que leur pâte s’étoit
endurcie.Ils repofent fur des roches granitiques,
& font recouverts par des couches d’ardoiles &
d’autres roches qui c on fervent la même pofition.
Sauffure en tira la conféquence que toute cette
montagne avoit été fonlevée par une grande .com-
jnotion. (J. H )
VALTIERA. Nom d’une ville de la province
de Navarre en Efpagne. Elle eft célèbre par fes
mines de fel gemme; l’article Arva y renvoie,
mais il fera fait mention de ces mines à l’ article
Ebre du Supplément,
VAR. Cette rivière, qui n’a que 2y lieues de
cours, ne mériteroit pas un article particulier f i ,
depuis 1814, elle ne fervoit en partie de limite
entre la France & les états fardes. Elle prend la
fource au mont Camélione dans le comté de
Nice; à 6 lieues au-deffous de fa naiffance elle
entre dans le département des Baffes-Alpes, puis
elle quitte la France pour le Piémont, & après
s’être joint à une rivière encore moins importante,
appelée YEfteron, on la voit féparer les
deux états limitrophes jufqu’à fon embouchure
dans la Méditerranée. Il y a peu de rivières'auffi
inconftantes & aufli rapides dans leur cours ; aufli
eft: elle flottable dans toute fon écendue; aufli le
pont con.ftruit près de fon embouchure, pour
fervir de communi- arion entre le département du
Var & le comté de Nice, eft-il beaucoup plus
long que ne l’exigeroit fa largeur fi elle ne chan-
geoit fréquemment de lit. Ce pont en bois a
2,400 pieds de longueur.
Le Var prend fa fource & coule jufqu’à quelques
lieues de Ion embouchure dans des terrains
de granité &: de fchifte, puis il traverfe des
roches appartenant à la formation fecondaire.
(J. H.)
VARDAR. UAfcius des Anciens porte aujourd’hui
le nom de Vardary c’eft le plus grand fleuve
de la Macédoine, qu’il traverfe pour aller fe
jeter dans le golfe de Salonique. Avant d’aban-
dônner cette province, dit un géographe grec,
il coupe une petite chaîne de montagnes, & circule
dans une étroite vallée par laquelle on diruit
que les eaux d’un lac intérieur fe font échappées.
Les hauteurs qui l’environnent fe préfentent
comme un vafte rideau de la teinte la plus finiftre :
le fleuve prend lui-même un fombre caractère
de trifteffe; retiré entre fes deux rives, il précipite
fon cours & fuit, de rapide en rapide , des
lieux où li nature fe montre auftère. (J. H. )
VAUCLUSE. Ce nom, tiré du latin vallis claufi,
qui lignifie vallée clofe, eft célèbre par la belle
fource ou fontaine qui donné Ton nom à l’un
des plus beaux départemens de 1$ France. Cetre
fource eft tellement abondante qu’elle forme' une-
petite rivière appelée U Sorgue, qui, dans le
vallon même & tout près de fa najflànce, copie
avec rapidité &r s’étend majeftueufement fur une
largeur qui ind’que qu’elle eft capable de porter,
bateau à d’être ptililée popr divers travaux io-
dullriels.
Il faut fuiyre au bord de cette riyière un
fentier
fentier rocailleux pour arriver à la fontaine de
Vauclufe. Les arbres qui bordent la Sorgue &
qui fe penchent doucement fur fa furface limpide,
les arbuftes qui couvrent les petites îles
qu’elle baigne en divifant fes eaux, les belles
prairies qui garniffent les deux rives, forment un
coup d’oeil enchanteur qui explique la prédilection
de Pétrarque pour ces lieux encore tout
remplis de fon fouvenir. Plus on approche de la
fource, plus la rivière, refferrée dans fon lit
inégal, devient rapide & bruyante. Bientôtelle
n’offre plus que des nappes écumeufes divifées
par des rochers qui fe font écroulés de la maffe
au pied de laquelle on va voir la fontaine. Celle-
ci occupe l’extrémité d’un vallon étroit, terminé
par une montagne à pic dont la bafe eft creufée
en une vafte caverne occupée par les eaux de
cette fource curieufe. Au-deffus du niveau de
celle-ci, la montagne s'élève à 116 toifes, &
la fource elle-même eft de 56 toifes au-deffus du
niveau de l’Océan. Les efcarpemens dont on eft
entouré, les aiguilles pyramidales qui femblent
menacer de leur chute le curieux qui s’eft approché
jufqu’à la fource, forment un tableau pit-
torefque & fauvage. Le baflîn occupé par la fontaine
eft prefque Circulaire & fon diamètre eft
d’environ 829 toifes. Quand les eaux font baffes,
c’eft-à-dire vers le mois d'odtobre, leur niveau
ne s’élève qu’à environ 40 pieds des bords du
baflîn; on peut alors, avec de grandes précautions
, defcendre dans cet entonnoir prefque jufqu’à
lafurface.de l’eau, qui, unie comme une
glace & d’une teinte fombre, annonce une profondeur
confidérabie , que l’on n’a point encore
pu mefurer. Le baflîn s’étend dans la profondeur
du- rocher, qui forme une belle voûte au-deffus
de les contours, & qui’ laifle voir à fleur d’eau
les fentes par lefquelles la fonte des neiges vient
augmenter la fource. Au mois d’ avril, celle-ci
eft dans fa plus grande hauteur; alors les eaux
coulent par-deffîis les bo^ds de l’entonnoir, &
l’on ne peut plus apercevoir la voûte de la
caverne. Elles atteignent quelquefois un figuier
qui a pris naiffance à plufirurs mètres au-deflus,
dans une des fentes du rocher. Arrivées à cette
hauteur , ce n'eft plus ce calme profond qui entoure
la fource lorfqu’on peut defcendre jufqu’à
fa furface : fes flots écumeux s’échappent au contraire
avec un fracas horrible, & avec une force
qui femble capable de tout renverfer.
Après cetce defcription qu il étoit indifpen-
fable défaire, nous donnerons quelques details
fur l’état phyfique & chimique des eaux de Vauclufe,
ainfi que fur la minéralogie, la géologie
&da botanique des rochers qui forment fon enceinte,
& celle d’une grande partie de la vallée
qu’àrrofent fes eaux.
La température moyenne des eaux de Vauclufe
eft de 10,30 degrés du thermomètre de Réaumur :
vers le i cr feptembre, époque de fon maximun
Géographie- P hyjtque. Tome V .
de température, elle eft de 10,80 degrés; vers
la fin d'avril, elle eft dans fon minimum, le
thermomètre marque alors 9>^° degrés î ainfi
elle varie annuellement de 1 degré. Sa pefanteur
fpécifique ne diffère pas fenfiblement de celle de
l’eau diftillée. Elle eft fans faveur & d’une limpidité
parfaite. D’après la defcription que le docteur
Guérin a faite de cette fontaine, nous donnerons
l’analyfe qu’ont fournie 70 livres de fon
eau, formant un pied cube.
Grains.
Carbonate de chaux.......................... • 48
Muriate de chaux................................. 19 5°
Sulfate de chaux................................. iy
Alumine.......................................* • • • 3
Silice..................................................... 1 80
Total...-----. . . . 87 30
On y a obfervé de plus la prefence du gaz acide
carbonique.
Les caractères phyfîques & chimiques de cette
eau prouvent qu’ elle eft une des plus pures que
l’on connoiffe, & qu’elle eft excellente pour tous
les ufages domeftiques.
D’après les obfervations & les calculs du favant
médecin que nous venons de citer, la fource dans
fon état le plus bas fournit 1 toife cube par
fécondé, & 3 lorfqu’elle approche de fon maximum
de hauteur. D’après la moyenne, qui eft
de 2 toifes cubes par fécondé, elle fournit en
un jour 172,800 toifes cubes, & 63,092,000 en
une année, ou 13,627,872,000 pieds cubes. C ’eft
à peu près la quantité d’eau pluviale qui tombe
annuellement dans les environs d’Avignon, fur
une fuperficie de 30 à 40 lieues carrées.
La montagne d’où fort la fontaine de Vauclufe
eft compofée d’un calcaire à gros grains
qui, dans certaines parties de la vallée, alterne
avec des couches de grès. Ce calcaire eft difpofé
en couches horizontales; d’après la nature des
foffiles que Ton y trouve , il appartient à la formation
fecondaire : il paroît fupporter des collines
renfermant du gypfe en bancs affez puif-
fans pour être exploités. Sa fuperficie eft dans
plufieurs endroits couverte d’ un dépôt d’argile
rougeâtre qui annonce un terrain d'alluvion. Les
plaines & quelques coteaux des environs font
couverts de cailloux roulés, parmi lefquels on
en trouve qui ne font que des fragmens de bafalte;
les autres font formés de quartz, de porphyre,
de petro-filex, de jafpe, de granité, de lèrpen-
tine, de roches calcaires & de variolite. On a
reconnu aufli dans les couches des environs de
Vauclufe les fubftances minérales fuivantes : la
chaux carbonatée rhomboïdale, des calcaires
compactes prenant le poli du marbre, la chaux
fulfatée criftallifée, l’argile commune & le fer
limoneux.
Nous terminerons la defcription de Vaucluie
K fckk