
nous adoptons, par cela même qu'elle n’eft point
fcientifique & qu'elle eft en ufagè chez les gens
du monde, abefoin d’être précifée & d'être renfermée
dans des limites fixes. Sans cette précautio
n , nous ferions entraînés à parler de différentes
fubfiances qui rentrent dans la claffe des
roches, & qui fouvent, par la. beauté de leurs couleurs
, peuvent être confédérées comme précieufes 3
parce qu’elles font plus ou moins rares : tels font
les poudingues & les brèches à ciment filiceux ;
tels font encore les bois agjthîfés , les jafpes de
différentes couleurs & les feld-fpaths. Enfin nous
pourrions citer aufli, parmi les fubftances fofïiles,
le jayet & le fuccin j parmi les métaux, les malachites
, les pyrites , que l’on employoit autrefois
en bijoux fous le nom de marcajjttes, & parmi les
matières volcaniques, l'obfidienne montée quelquefois
en bijoux de deuil.
Les véritables pierres précieufes, c’eft-à-dire
celles qui par leur emploi journalier méritent
tout-a-rait ce nom, font en petit nombre : tels
font le diamant, le, corindon, l’éméraude, le
fpinelle, la cymophane ; la topa ze , le z ircon, l’ o pale,
le grenat. Ces pierres fonr principalement
celles qui font généralement confédérées comme
pierres fines ; les noms par lefquels nous venons
de les défigner font ceux que leur donnent les
minéralogiftes ; leur couleur, leur nuance, la
beauté de leurs reflets, leur font donner par les
lapidaires plufieurs noms différens, ainfî que nous
le verrons bientôt. Souvent, par exemple, ils
affeélent la dénomination d’orientait à quelques-
unes de ces pierres, non -point parce qu’elles
viennent d’Oriem, mais parce qu’elles fe font
remarquer,par leur éclat. On fait que cette dénomination
eft fondée fur l’opinion, que parta*
goient la plupart des anciens joailliers, que les
plus belles pierres étoient toutes apportées de
l ’Orient en Europe.
Outre ces fubftances connues fous le nom de
pierres fines 3 la dénomination de pierres précieufes
en comprend encore d’autres que nous ne devons
point pafferfous filence, quoiqu’elles foient bien
moins eftimées; tels font : l'euclafe, la tourmalin
e , la cordiérite, la turquoife, le p é r id o t, l’ i-
docrafe , l’épidote , le difihène , l’hyperlthène ,
& plufieurs variétés de quartz. A ces diverfes
fubftances , nous ne joignons pas la phrénite,
qui raye à peine le v e r re , ni la lépidolite , dont
les reflets brillans font fouvent fort agréables j
mais nous pouvons y joindre le lapis , employé
quelquefois dans la bijouterie , & plus fréquemment
dans les objets d'arts j enfin, quelques variétés
de feld - Ipath ùiéritenc de prendre place
parmi les pierres précieufes.
Diamant. Cette pierre furpaffe par fa dureté
toutes les matières les plus dures ; elle nous vient
principalement de l’Inde & du Bréfil i cependant
on en recueille dans l'île de Bornéo. Le diamant
fe trouve ordinairement dans des terrains
d’alluvions ou de tranfport dont.l’âge trous eft
ablolument inconnu, mais qui font probablement
plus anciens que la plupart des terrains de même
nature qui exiftent dans notre vieille Europe. Si
l’ on connoiffoit une roche dans laquelle le diamant
fe trouvât en place, les terrains de tranfport
qui le renferment pourroient être afTez modernes
i mais comme.on ne lui connoît jufqu’à
prêtent d'autre giffement que des dépôts compotes
de cailloux roulés , liés entr’eux par une
matière argilo ferrugineufe & fableufe, il faut
bien admettre, ou que le diamant s'y eft formé
à une époque antérieure à celle ' de nos terrains
analogues, d'ans lefquels cependant on ne
trouve point de diamans, ou qu'il y a été entraîné
des flancs des montagnes dans les lieux où on
va le recueillir i mais , nous fe répétons, tant
que l’on n'en aura point trouvé dans ces mêmes
montagnes, on fera forcé de regarder leur pré-
fence comme le caractère diftinérif de certains
terrains de tranfport > ils rentrent, à cet égard ,
dans la clafle des terrains d'allüvions qui contiennent
des parcelles d’or, & q u i, par cela même,
diffèrent effentiellement des' terrains d’ alluvions
confédérés comme affèz modernes, & qui h’en
contiennent point.
Au Bréfil, les dépôts qui renferment des diamans
font en général fitués dans le fond ou fur
lés bords des larges vallées, jamais fur les flancs
des montagnes^ils repofent prefqu’à la fuperficie
du fo l, & les portions de terrain qui en renferment
le plus font très-riches en oxide' de fer gra-
nuliforme. Ils y lont ordinairement enveloppes
d’ une croûte terreule qui , au premier afpeét,
les empêche d'étre reconnus.
Dans la partie de l'Amérique que nous venons
de nommer, cette , pierre précieufe fe trouve
au milieu des vallées des montagnes de Minas-
Géraë s , & dans celles que parcourt la rivière de
Jigiton-honha, qui fe jette dans le Rio-Grande,
ainfî que dans les vallées de !a Parana, & en général
au bas du verfant occidental de la chaîne de
la Serra do Mar, dans la plupart des rivières qui
fillonnerit ce baflin.
Dans l’Inde, les localités qui en fourniflènt le
plus, font la vallée qüe traverfe le Pennar, celle
où coule le Mahameddy, & celle que parcourt
la Parna. Il feroit trop long de citer tous les lieux
où on les recueille ; les provinces de Vifapour ,
de Hydrabad, d’Oriffa, d’ Altahabad, font celles
qui paflent pour être les plus riches,
i Au Bengale, la rivière de Gouel en charrie tel*
lement, qu’on pourroit la confidérer comme une
efpèce de mine ; mais il parôît que les diamans les
plus recherchés de l’ Inde, font ceux des environs
de Golconde, au pied des montagnes des Gates.
Dans l'île de Bornéo, la localité la plus riche
eft la vallée que traverfe la rivière de Succadau.
Un minéralogifte allemand, M. Efchwege, a
étudié avec foin le giffement du diamant au Brefil.
l i a reconnu que dans les rivières, les débris
roulés de fer hydraté brun & de iafpe annoncent
la préfence d’un grand nombre de diamans. 11 a
même obfervé que certains agglomérats a ciment
de fer hydraté contiennent des criftaux de cette
pierre précieufe enchâfles de manière à faire croire
qu'ils y font dans leur gangue naturelle. Le fer
hydraté qui les entoure provient des fehiftes ferrugineux
qui conftituent les cimes des montagnes
au pied defquelles coulent les rivières diamantifères
; ce qui explique pourquoi ces rivières les
charrient.
C e qu’ il y a de curieux dans cette obfervation,
c’eft: qu’il paroïtroit que le véritable giilement des
diamans eft la roche fehifteufe dont nous venons
de parler. Cette affeition importante mérite cependant
d'être confirmée par des recherches
ultérieures.*
Corindon. C*eft à cette fubftance que fe rapportent
les pierres défignées fous les noms fuivans : le
fapkir blanc, le faphir rouge 3 connu des lapidaires
fous le nom de rubis oriental ,* le fapkir vermeil ou
rubis calcedonieux y le faphir jaune ou topaze orien- ,
' taie , le faphir violet ou améthyfie orientale3 le faphir
vert ou émeraude orientale, le faphir bleu clair Sc le
faphir bleu-intflgo ; le premier appelé par les lapidaires
fapkir femelle, & le fécond faphir mâle.
Le corindon reçoit encore, à caufe de la diver-
fité de fes reflets, le nom de faphir girafol »celui
de faphir chatoyant, enfin celui de faphir étoilé ou
faphir de chat des lapidaires. \
C ’eft dans l'île de CeyJan, dans le royaume de
Pégu, dans la Bohême & dans le Vélay, que cetre
fubftance fe trouve ordinairement. Dans cette
dernière contrée, c’ eft dans le lit du ruifleau
d'Expailly qu’on en fait la recherche, à l'époque
où il eft à fec. Il repofe ordinairement au milieu
du fable ferrugineux que ce ruifleau amaffe au
fond de certaines cavités de fon lit. 11 paroît 1
qu’ il accompagne fréquemment les fables volcaniques.
. ' . ,
Éméraude. Les minéralogiftes réunifient fous le
nom à’éméraude, plufieurs pierres qui diffèrent de
couleur ; telles font l’éméraude v e r te , connue des
lapidaires fous le nom éméraude du Pérou, 1 émeraude
vert-pâle, appelée aigue-marine, l’ém.éraude
vert-bleuâtre-, autrement dite béril, l'émeraude
jaune de miel, appelée éméraude miellée par les
lapidaires, & enfin l’éméraude blanche.
La plus belle de toutes ces pierres, l’éméraude
verte du Pérou, fe trouve dans la vallée de Tun-
ca , entre les montagnes de la Nouvelle-Grenade
& celles de Popayan. La roche ’dans laquelle on
la trouve , paroît être une des plus modernes de
celles qui conftituent les terrains primitifs : c'eft
un fehifte argileux très-carboné, qui même, fui-
v an tM . Beudant, a. de l’analogie avec plufieurs
fehiftes intermédiaires; cependant, fuivant les
obfemtions de M. de Humboldt, c ’ eft dans une
amphibolite fchiftoide, notamment dans le mica-
fehifte, que cette belle pierre fe rencontre.
L’ aigue - marine & le béril fe trouvent communément
dans les montagnes de la Daourie, fur
les frontières de la C hine, ainfî que dans les monrs
Altaï & dans les monts Ourals en Sibérie. Les
roches qui les renferment font granitiques ; la variété
à laquelle elles appartiennent eft le granité
graphique. Ces éméraudes ne fe trouvent point
mêlées indifféremment dans la malle de la roche,
elles y font ordinairement accompagnées de crif-
taux de. quartz de différentes couleurs, & très-
fréquemment de criftal enfume.
C ’eft dans la même roche, mais généralement
dans d’autres contrées que celles de l'Afie , que
l’ on trouve les autres éméraudes; ainfî les roenes
granitiques du Conneéticut, dans l’ Amérique fep-
tentrionale, celles de Fimbo, de Brodbo , en
Suède, & en France cel es des environs de L imoges,
celles de Marmagne près d’ Autun , &c
enfin celles du fol même fur leouel eft bâtie la
ville de Nantes, en-renferment plufieurs variétés.
Les différentes éméraudes que nous venons de
nommer, fournîtes à l’analyfe, ont donné, dans
diverfes proportions, de lafilice,^ de 1 alumine,
de la glucine ; mais la belle éméraude verte a
prouvé que fa couleur eft due a la préfence d une
Certaine quantité d’oxide de chrome.
Spinelle. Cette pierre , que les lapidaires con-
noiffent aufli fous le nom de rubis 3 fe rire de
l’ Inde , & principalement de l’île de Ceylan. C ’ eft
dans les fables des torrens & des rivières de cette
île qu’on en trouve fouvent accompagnées de
faphirs, de topazes, d'hyacinthes & d’un grand
nombre d’autres pierres. Il eft fort rare que le
rubis foit fur fa gangue ; cependant plufieurs minéralogiftes
penfent que fon giffement appartient
aux terrains de micafchifte. Les roches rapportées
de Ceylan par M. Lefchenault, & que l’ on remarque
dans 4a collection du Muféum d hiftoire
naturelle, le montrent enchâffé dans des calcaires
. magnefiens, dans des calcaires micacés & dans
des roches quartzeufes également chargées de
mica, que M. Beudanty:onfidère comme appar-
; tenant à la formation- du granit alpin. Le fpinelle
d’Akeii en Suède fe trouve aufli dans une gangue
calcaire ; on a même cru en reconnoître dans
des roches volcaniques : tels font les bafaltes
de Monferrier dans le département de l ’Hérault,
les roches de Lach fur les bords du Rhin : on
croit même qu'il en exifte dans les laves du Véfuve.
/ j. i
Le fpinelle eft principalement compofé d’alumine
& de magnéfie ; fa couleur rouge eft attribuée
à la préfence de l'acide chrômique.
Cymophane. Cette pierre, dont la couleur eft le
vert tirant fur le jaunâtre , nous vient du Bréfil,
des monts Ourals & de Ceylan ; cependant elle
exifte aufli dans le ConneCticut aux Etats-Unis,
& la roche dans laquelle on l’a trouvée, a fervi à