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«« Les bords du baflîn au - deffus duquel il eft
fitué font à peu près de niveau avec les plateaux
bafaltiques environnans, excepté du côté du le vant
, où il eft dominé par les roches phonoliti-
ques de RofEac. (PI. 44.) Il ne s’ouvre vers l’ oueft
que pour donner paffage à un ruiffeau qui eft alimenté
par les Cources que Ton voit bouillonner
fur le fond du lac. Celu i-ci eft de forme à peu
près circulaire ; fon diamètre eft de 800 mètres
environ ; fa profondeur actuelle n’eft que de 9 à
10 mètres} mais comme.il reçoit tous les débris
provenant des dégradations qu'ont éprouvées les
pentes intérieures de fon bafïin, tandis qu’ il n'en
fort que des eaux limpides ou à peine chargées
de quelque fédiment. il eft évident que fa profondeur
étoic plus confidérable autrefois. La furface
de fes eaux a dû être aufli plus élevée qu’aujour-
d’hui, puifque le lit du ruiffeau qui leur fert de
dégorgeoir va toujours en s’ abaiffant. §
Si l’exaétitude du coup-d’oeil de M. Bertrand-
Roux n’étoit atteftée par une foule d’obfervations
géologiques empreintes de la plus grande fagacité,
nous ne verrions pas , dans la defcription qu'il
donne de ce lac, des preuves fuffifantes qu’ il occupe
un ancien cratère, furtout fi on le compare
aux lacs Pavin & Chambon que nous avons examinés,
& qui ne nous ont pas préfenté ces caractères.
De l*&ge relatif des "volcans de V époque vulcanique.
Nous avons fait voir que les bafaltes en filons ou
en couches font fortis des entrailles de la terre,
& fe font frayé des routes à travers des roches
de différentes formations , ou à travers les bancs
d’une même roche. Ceux qui occupent des plateaux
, ou la bafe de certains cônes ignivomes,
ou la pente de quelques vallées, (ont d’une époque
fort différente; quelques-uns ont été vomis à la fur-
face du fol par des bouches ou des cratères qui,
pour la plupart, ont difparu : ils fe lient donc
avec les produits de l’époque lavique ancienne*
C ’eft de l ’âge relatif des cratères qui ont rejeté
ces bafaltes et ces laves que nous allons nous
occuper.
Depuis le jour où les montagnes de l’ Auvergne
furent regardées comme étant d’une origine ign^e,
& la plupart même comme ayant été formées de
la même manière que les volcans modernes, on
foupçonna qu’elles n’étoient pas toutes de la
même epoque. Quelques auteurs s’emparèrent de
cette intereffante queftion; Defmareft, auteur des
premiers volumes du Dictionnaire di Géographie
phyfique de cette Encyclopédie, détermina en
Auvergne trois époques de volcanifation, ainfi
qu’on peut le voir par les planches qu'il fit exécuter
pour accompagner le texte qui devoit terminer
une tâche honorable que la mort eft venue
interrompre. De nouvelles obfervations ont prouvé
que l ’on pouvoit reconnoître dans le pays que
Defmareft avoit fort bien étudié pour fon temps
future époques de volcanifation que nous allons
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indiquer à l ’aide de quelques deflins qui re&ifie-
ront ce qu’il vouloit établir par ceux qu’il a fait
dreffer.
Nos idées fur ces quatre époques font parfai-
tefhent conformes à celles que M. Jobert aîné a
expofées dans le discours préliminaire des Recherches
fur tes ojfemens foffiles du déppartement
du Puy-de-Dôme. Nous lui emprunterons donc
quelques-unes de fes obfervations, & nous reproduirons
à l’appui l’ une des coupes qu’ il a publiées
; nous en avons fur les lieux mêmes reconnu
l’exaélitude.
Un obfervateur q u i, regardant l’orient, fe pla-
ceroit près du village de Champeix, fur le bord de
la Coufe de Nefchers, petite rivière qui va fe jeter
à Coude , dans l’Ailier, auroît à fa droite, à 3 lieues
de là , le puy de Saint-Romain, fur la rive droite
de l’A ilier, & à une lieue & demie fur fa gauche
le puy de Solignat, non loin de la petite rivière
de la Coufe dTJfoire^ Il verroit vis-à-vis de lui -le
plateau d‘Anciat 3 qui domine le village d eNefchers
fur le bord de la C ou fe , & un peu fur la droite
le plateau de Pardines, qui fépare le cours de la
Coufe de Nefchers de celui de la Coufe dTJfoire
(fig- V I I , planche fupplémentaire); le puy de
Saint Romain y le plateau d’Anciat, celui de Pardines
y & le puy de Solignat ( fig. V I I I , même
planche ) , font couverts de bafaltes encore fur la
place où ils ont été dépofés. Ces bafaltes repofént
fur des cailloux roulés, ce qui prouve qu’ils ont
coulé dans des vallées.
« Les puys de Solignat & de Saint-Romain, dit
M. Jobert, font élevés, l’un de 85-7 mètres, &
l’autre de 783 au-deffus delà mer. Leur fommet éft
couvert d’ un lambeau bafaltique qui a dû faire
primitivement partie de coulées qui venoient, pour
le premier, dans la direction de Chambourguet
(fig. V I I ) , & pour le fécond du puy de la
Tache. Nous les confidérons comme de la même
époque, parce que la différence des niveaux
paroit provenir , l’oit de la diftance du point de
départ, foit de la plus grande inclinaifon du fol
fur lequel la lave a coulé. On pourroit fuppofer
qu’ ils ont fait partie'd’une feule nappe, & alors la
ligne B. D. G. A. (fig . V i l l ) repréfenteroit la
partie du terrain parcouru par la lave dans cet ef-
pace } mais en ayant égard à la pofition relative
des puys , on eft conduit à penfer que Solignat &
Saint-Romain étoient féparés par une faillie indiquée
par la ligne A. N. L. B. (fig. VIII ) , dont
la forme eft luppofée, & préfenteroit néceffai-
rement les anfractuofités d’un terrain raviné. La
ligne A . N. L. reprefente donc les bords fud-
oueft de la vallée dans laquelle ont coulé les laves
de Saint-Romain, & L. B. nous offre l’équivalent
du bord feptentrional de la vallée dans laquelle
eft venu fe répandre le bafalte de Solignat. En
admettant cette hypothèfe , fondée fur les lois de
la pefanteur qui oblige les matières fluides à s’écouler
liir les points les plus bas, on reconnoîc
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que la vallée défignée par la ligne B .C .E . D. L. a
été creufée après la première, & qu’alors la lave
de Pardines eft venue y prendre la place qu’elle
occupe aujourd’h u i} fucceflivement les vallées
E. F. G. N . , pour la coulée d’Anciat, ont été
formées par des caufes identiques. Les coulées
de Saint-Romain & de Solignat prifes colleélive-
ment, celles de Pardines, d’Anciat de de Nefchers
repréfentent donc chacune une époque de volcanifation
diftinéfe, & l’efpace de temps qui a fépare
les éruptions eft mefuré par le terrain qui a été enlevé
dans des momens de calme, ou , ce qui eft
la même chofe, par la différence de niveaux des
coulées. O r , les diftances de hauteur font celles-
ci : 236 mètres entre Pardines & Solignat, 201
mètres entre Anciat & Pardines, & 60 mètres
entre Nefchers & Anciat. Pourfuivant notre rai-
fonnement, nous voyons que la profondeur des
deux premières vallées eft à peu près dans le même
rapport, c’eft-à-dire que les trois coulées font
féparées l’une de l’autre par des efpacès égaux :
ce qui indique entre les éruptions une périodicité
remarquable } & , de plus , il eft fort poflible que
la coûtée de Nelchers foit féparée de celle d’A nciat
par un intervalle aufli confidérable, parce que
les caufes qui ont creufé les trois dernières vallées
ont pu agir avec moins d ’intenfité après la fin de I
la période des volcans anciens , & que ia .coulée
de^ Nefchers appartient aux volcans modernes,
qui font tellement diftinéts des premiers , que les
naturaliftes ont établis entr’eux des lignes de démarcation
beaucoup plus prononcées. »
Il eft probable qu’en étudiant avec foin les cou-
rans de laves & de bafaltes de l’Auvergne, on
reconnoîtroit des époques d’éruptions intermédiaires
aux quatre grandes'époques déterminées
plus haut. 11 eft tout naturel, par exemple, que
les cratères de cette contrée aient plufieurs rois
vomi des matières en fufion} mais c ’eft un fait
remarquable que la plupart des produits des quatre
grandes époques ci-deffus mentionnées repo-
fent fur des dépôts de trar.fport qui annoncent
des plaines bafles ou des fonds de vallées. A la
vérité les alluvions que recouvrent les plus anciens
volcans de l’Auvergne font rares. M. Jobert l ’a
également fait obférver. On pourroit en tirer la
conféquence que les granités qui conftituoient la
fuperficie du fol n’ avoient éprouvé qu’ un foible
foulèvement en formant des baffins où fe raffem
blèrent les eaux douces des grands lacs de
la Limagne, & en donnant naiffance aux plateaux
qui lts circonfcrivoient. Les cailloux roulés de
ces alluvions ne font que des fragmens de roches
granitiques, parce qu'aucun dépôt ne dominoit
encore les plateaux de granité.
A la fécondé époque, les alluvions fur lefquelles
repofent les bafaltes font encore peu nombreufes}
mais ce qui les diftingue de celles de la première,
c eft qu’ on y remarque des débris roulés de ba-
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faite qui proviennent -évidemment des anciens
dépôts bafaltiques de l'époque antérieure.
A la troifième époque, les plateaux txhauflés
de 800 à 5>oo mètres par les dépôts de laves por-
phyriques & bafaltiques donnent à l’écoulement
des eaux attirées par les fommets feldfpathiques,
une grande rapidité. Les alluvions acquièrent une
puiffance confidérable ; elles forment ces dépôts
remplis d’offemens d’animaux, dont nous avons
donné ci-deflus la longue férié 5 les matières volcaniques
y dominent : ce qui annonce une grande
activité dans l’ aétion des feux fouterrains. C ’eft
fur ces alluvions que repofent les bafaltes de
Pardines.
_ Enfin, la quatrième époque comprend principalement
tous les puys qui ont confervé leurs
cratères, & qui offrent la plus grande analogie
par leurs formes, la difpofition de leurs courans
de laves & même par la nature de celles-ci, avec
les volcans encore incandefcens. Leurs coulées
ont non-feulement formé des chauffées au fond
tles vallées, mais elles ont occupé même le lie
des ruiffeaux & des rivières dont elles ont fouvent
détourné les eaux , ainfi que nous l'avons vu plus
haut} elles ont même aufli couvert les pentes des
plateaux qui formoient les bords des baffins. On
les reconnoît facilement à leurs laves poreufes &
recouvertes de feories.
Cependant, ainfi q u e j ’a très-judicieufement
fait remarquer M. Bertrand-Roux, dans la Defcription
géügnoflique des enviions du puy en Velay 3
il faut bien fe garder de trop généralifer le principe
qui diftingue les coulées en anciennes &
modernes, fuivant qu’elles dominent ou occupent
les vallées, ou du moins il faut apporter une
grande attention dans l’application de ce principe,
afin de ne pas toujours prendre pour des dépôts
d’âges différens ceux qui couvrent les plateaux
ou le fond des vallées 3 car certaines vallées
peuvent être antérieures ou poftérieures à ces
dépôts, ou même leur être contemporaines.
D’après ces confidérations, M. Bertrand-Roux
diftingue dans le département de la Haute-Loire
trois époques de volcanifation :
i° . Celle du Mécène ou du norcL-eft. C ’ eft la plus
ancienne, & celle que Defmareft confidère comme
la fécondé. Les laves que ces volcans ont reje-
Jtées, dit M. Bertrand-Roux, forment à l ’oueft
et au nord du Mézenc un vafte plateau qui couvre
en grande partie les communes des Etables, de
Saint-Front, de Fay-le-Froid, de Chandeyrolles,
de Laufmne, &c. ( PI. 47.) Il eft à remarquer que
les cratères d ’où font forties toutes ces laves font
à peu près affacés. A peine pourroit-on , ajoute-t-
il , déterminer l'emplacement d’ un petit nombre
d'entr’eux.
2.0. Les volcans intermédiaires font fitués géographiquement
, ainfi que le fait remarquer M. Bertrand
Roux, encre les précéderis & les plus ré-
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