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que par la vapeur que Ton voyoit de temps
en temps foi tir de l'Océan.
Entre 1‘Amérique & l’A fie , dans le voîfinage
de l'î’e d’Oumnak, l’ une des Aléoutiennes, le
8 mai 1796, on vit- fortir une colonne de fumée
du fein des flots > à la fuite d’une terrible
fecoulfe, s’élever une nouvelle île , qui
lança des pierres jufque fur celle d’Oumnak ;
un mois après, cette île étoit plus élevée, &
ne cefïoit de vomir des flammes ; enfuite, il
n’ en (ortit plus que des vapeurs & de la fu-
mee, quatre ans après, elle difparut. C e pendant,
en 1804, fa furface étoit encore tellement
chaude, qu’il étoit impofiible d’y marcher.
Elle avoit alors deux milles & demi de circonférence
& une élévation de 3 jo pieds. Son
cratère exhaloit une odeur agréable de pétrole.
Lorfque le capitaine Langfdorf la v i t , le 18
aoiît i8 c6 , on remarquoit fur fa partie nord-oueft
quatre cônes difpofës en échelons : le plus
grand, qui paroiffoit avoir quelques milliers de
>ieds d’élévation , avoit la forme d’une co-
onne & s’éievoit perpendiculairement. Il brû-
loit du côté du nord, & rejetoit jufqu’à la
mer une lave molle, tandis que fur fes flancs
plusieurs ouvertures & crevaffes lançoient une
grande quantité de vapeurs fulfureufes. Ori
s'apercevoit encore à *cette époque que l’île
continuoit à croître en circonférence & le pic
en hauteur.
Près du Kamtchatka, plufîeurs phénomènes
femblables fe font développés. Nous ne citerons
pas tous ceux qui fe font manifeftés
dans cè genre; mais nous rappellerons l’éruption
fous-marine qui eut lieu en 1780, à dix
lieues de Reikianes, près de la côte fud-oueft
de l ’Jflande, Des flammes fortirent pendant
plufîeurs mois de la mer, puis on en vit s’élever
une île } elle lança des flammes & des pierres-
ponces, & bientôt après, elle difparut.
Des falfes ou volcans d'air et de boue. Si l’on
veut confidérer comme volcaniques tous les phénomènes
qui produifenc à différens intervalles le
rejet avec violence de diverfes matières liquides
ou gazeuses lancées d’une profondeur plus ou
moins grande au-delfous de la furface de la terre,
les falfes pourront rentrer dans cette catégorie.
Mais il ne faut pas fe diffimuler que d’après la
définition même que nous avons donnée des
volcans, les falfes doivent en être diftinguées;
c'eft pour éviter que l’on attribue à une même
caufe des phénomènes de deux ordres différens,
que nous croyons devoir en dire, un mot dans cet
article.
Les volcans dont nous venons de décrire les
terribles effets ont évidemment leur foyer à une
profondeur confidérable,c’ eft-à-dire au-deflous des
terrains granitiques} ils annoncent leur exiftence
par des dégagemens de fumée, de gaz enflammés,
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& de matières liquides ou en incandefcence, qui
indiquent dans leur foyer une chaleur violente,
& une caufe qui eft & fera long-temps encore
hypothétique. Dans les falfes au contraire tout
indique un centre d’action fituée à une profondeur
peu confidérable; il s’y manifeftë, il eft vrai,
de la chaleur, mais jamais on n’en voit fortir des
matières incandefcentes ni liquéfiées. Leur principale
aétion confifte en un dégagement de gaz
qui s’enflamment, il eft vrai quelquefois, et dans le
rejet de matières argileufes mélangées avec de
l’eau et accompagnées prefque toujours de bitume,
de pétrole, de naphte & fouvent de fel
marin, puifque c’eft à la préfence de ce minéral
que ces prétendus volcans ont dû le nom de
falfes qu’on leur a donné dans le pays de Modène.
Les éruptions volcaniques font ordinairement
précédées de commotions plus ou moins violentes
& de divers phénomènes, atmofphériques, parce
que leur aétion, s’étendant affez loin en profondeur
& en largeur, ébranle en quelque forte
toute notre planète; tandis que les falfes, circonf-
crites dans de petites limites, n’ont aucune influence
ni dans la profondeur de l’écorce du glo be , ni
dans la maffe atmofphérique qui l’entoure. Trompés
par l’apparence, les premiers obfervateurs,
remarquant à la furface du fol qu’ occupent les
falfes des petits monticules creufés en entonnoir
à leur fommet, ont cru voir, dans cette reffem-
blance avec les grands cônes volcaniques, des
volcans pygmées ; de là les noms qu’on leur a
donné de volcans d'air, volcans de boue, volcans
d'eau & volcans vafeux. Mais quelle analogie peut-
on trouver entre les volcans & les falfes I lorf-
qu’on fait que le principal agent de celles-ci eft le
gaz hydrogène carburé? Le puy de la Poix, près
de celui de C rou e l, aux portes de Clermont en
Auvergne, préfente une fource, uneforte de petite
mare, d ’où s’échappentcontinuellemént des bulles
de gaz hydrogène : ira-t-on claffer cette mare
parmi les volcans? Non fans doute, & cependant
cette mare eft le réfultat de la même caufe qui
donne naiffance aux falfes. Cette férié de compa-
raifons fuffit pour que l’on comprenne que, s’ il
entre dans notre plan de préfenter un tableau
des phénomènes volcaniques, nous devons en exclure
celui des falfes qui appartient évidemment à
un ordre tout différent.
Coup d'oeil hifiorique fur les principaux tremblemens
de terre. Nous avons partagé les tremblemens.de
terre en deux claflfes : ceux qui s’étendent au loin,
& même fimultanëment fur des efpacesûmmenfes,
& ceux qui ne-parcourent qu’ une petite étendue:
on peut les fubdivifer encore fuivant qu’il prennent
une direction horizontale, verticale, ou circulaire.
Par la première direction, ils forment des ondu-
j lations quireffemblent à celles de la mer; par la
i fécondé, une partie-des terrains eft foulevée, &
S l’autre engloutie; par la croifîème, le mouvement
! femble tourner autour,d’ un point central. Durant
ces divers phénomènes, des fources tariflentj
des rivières difparaiffent &: fe perdent fous terre;
d’autres, arrêtées dans leur courfe par lé changement
de niveau du terrain, forment de vaftes
marais; enfin, des fources nouvelles jailliffent des
flancs des montagnes ébranlées & déchirées. Nous
allons confidérer les changemens que les tremblemens
de; terre ont produits fur la furface &
même dans l’épaiffeur de la croûte terreftre.
« Des irrégularités dans les faifons, ditM. Lyell,
précèdent ou fuivent les chocs; de foudaines bouffées
de vent, interrompues par des calmes plats ; de
violentes pluies dans des pays où durant des faifons
de tels phénomènes font inaccoutumés ou inconnus}
le difque du foleil devenant rouge, l’ air reftant
brumeux fouvent pendant plufîeurs mois; le de-
dégagement hors du fol de fluides électriques
& de gaz inflammables avec des y aPeilrs fulfureufes
& méphitiques ; des' bruits foüterrains
femblables au roulement d’une voiture, ou à une
décharge d’artillerië , ou au tonnerre dans le lointain;
les animaux pouffant des cris de détreffe &
montrant un degré extraordinaire d’alarme, comme
fentant mieux que l’homme le plus léger mouvement;
celui-ci éprouvant une (enfation fembiable
au mal de mer, & des étourdiffemens : tels font les
phénomènes, & d’autres qui ne fe rapportent pas
immédiatement à notre fujet, qui fe iont.répétés
depuis des temps très-reculés et dans toutes les
parties du globe. »»
M. Lyell fera notre guide dans ces recherches;
nous ne pouvons donc mieux faire que de donner
encore la traduction de différens paffages de fon
ouvrage.
, « C ’eft feulement , dit-il, depuis cent cinquante
ans, lorfqüe Hooke publia pour la première fois fes
idées relativement à la liaifon entre les phénomènes
géologiques & les tremblemens de terre, que; les
changemens permanens opérés par ces convulfions
ont excité l’attention. Avant ce temps , la narration
de l’hiftorien étoit prefqu’exclufivement bornée
au nombre de corps humains qui avoient péri &
des cités qui avoient été ruinées, à la valeur des propriétés
détruites, ou à la defcription de certaines
apparences atmofphériques qui éblouiffoieht ou
terrorifioient les obfervateurs. La création d’un nouveau
lac, l’engouffrement d’ une cité ou l’élévation:
d’une nouvelle île, étoient quelquefois, il efi vrai,
mentionnés comme étant trop vifîbles ou comme
intéreffànt trop la géographie poür être paffés
fous filênce. Mais aucunes recherches n’étoient
faites dans le but de s’affurer de la quantité
précife de dépreffion ou d’élévation du terrain,
ou des altérations particulières dans la pofition
relative de la terre ou de la mer,' & l ’on fai-
foit très-peu de diftinttion entre l’élévation du
fol par les éjections volcaniques & fon fou-
lèvement par des forces agïffant de bas en haut.
La même remarque s’applique à la plupart des
rapports modernes, & nous avons d’autant plus de
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raifon de regretter ce manque d’informations, que
dans toutes les occafîons où un efprit d’examen
fcientifique a animé les témoins oculaires de ces
événemens, ils ont noté des faits calculés pour
jeter beaucoup de lumière fur les premières modifications
de la ftrufture de la terre »
Au lieu de commencer, comme le fait M. L y e ll,
par les dernières relations authentiques des tremblemens
de terre, nous les préfenterons dans leur
ordre chronologique; mais nous ne nous occuperons
aufli que de la période des cent-quaranta
dernières années. On fi’en verra pas moins combien
de détails manquent dans les relations , à
mefure que l’on s’ éloigne, & combien elles doivent
être peu inftructives dans les maigres annales
des époques antérieures.
Jamaïque.— 1(392. Le tremblement de terre de
cette année eft un des plus violens qu’ ait éprouvé
l’île delà Jamaïque ? fa direction fut horizontae :
le fo l, gonflé & é le vé , préfentoit l’afped du
roulis de la mer; l’île fut traverfée par de nom*
breufes crevaffes ;. deux ou trois cents d ’entre
elles s’ouVrirent & fe fermèrent avec rapidité ;
une population nombretife fut engloutie dans fes
déchirures. Quelques victimes, après avoir été
ainfi englouties, furent rejetées fur le fol, avec une
grande quantité d’eau; d’autres furent étouffées
dans ces déchirures, preffées de droite & de
gauche par les terres qui fe rapprochoient, & qui
ne laiffèrent qu’une partie de leurs corps hors de
ces crevaffes. La ville de Port-Royal, qui contenoit
plus de 1,030 maifons, fut prefqu’entièrement
détruite.
Sicile. — 1693. Dès fecouffes épouvantables
s’étendirent, le 11 janvier, fur toute la Sicile;
Catane & 49 autres villes furent détruites;
100,0001 individus environ furent victimes de
cette cataftrophe. Le fond d elà mer, dit Vicen-
tino Banajutus, s’enfonça à une grande profondeur
dans les ports, les baies, & toutes les
parties ouvertes de la c ô te , tandis que fur d’autres
points l’eau s’élevoit en bouillonnant fur le
rivage. De nombreufes & longues fiflures de différentes
largeurs s’ ouvrirent dans diverfes directions
; quelques-unes lancèrent de l’eau fulfureufe,
& lu n e d’elles , dans la plaine de Catane, à
quelques milles de la mer, rejeta de l ’eau falée.
Dans la ville de Noto, à fîx lieues au fud-oueft de
Syracuie* les pierres des édifices d’une des principales
rues, fur une longueur d’ un quart de
lieue, coulèrent fur leur baie & demeurèrent fur
le côté ; dans une autre rue s’ouvrit une crevaffe
affez large pour engloutir un homme à cheval.
Quito. — 1698. Le 19 juillet de cette année,
un tremblement de terre fit écrouler une partie
du cratère & de la cime du volcan de Carguairazo,
& fit fortir des flancs brifés de la montagne un
torrent d’eau & de limon.
J a v a . — 1699. Le tremblement de terre que
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