
7 4 * V O L
gneurement ces couches purement lacuftres &
marines * bien que fouvent elles (oient immédiatement
contiguës ? Pourquoi fur les limites méridionales
de U Limagne d’Auvergne Ÿ où plusieurs
éruptions éclatèrent & élevèrent les marnes &
les calcaires horizontaux * aucune de ces couches
d ’eau douce n’ acquit-elle jamais la difpofi-
tion conique & cratériforme ?
" Mais continuons à examiner quelques-uns des
plus célèbres exemples fournis de ces cratères
d’éléyation. Le type le plus parfait de cette configuration
particulière eft* dit-on* fourni par P-île
de Palma ; & en même temps que nous contredirons
les opinions théoriques du baron de Buch,
nous ne devons pas oublier tout ce-que la géologie
doit à festalens & à fon zèle* & entr’autres
ouvrages, fa defcription claire & exaété de cette
île.
Dans le milieu de Palma s’élève, à la hauteur
de 4,000 pieds* une montagne préfentant la
forme générale d’ un grand cône* dont la partie
fupérieure a_ été tronquée & remplacée par une
énorme cavité en forme d’entonnoir* d’environ
4,ooo- pieds de profondeur, & dont les bords
qui l ’entourent atteignent à leur point le plus
élevé la hauteur de 7,000 pieds au-deffus du
niveau de la mer. Les flancs extérieurs de la montagne
font légèrement inclinés & en partie cultivés
; mais le fond & les murailles de la cavité'
centrale, appelés par les habitans la Caldera (la
Chaudière) , présentent de tous côtés des rocs
raboteux & incultes, prefque complètement dépourvus
de végétation. Les côtés de la Caldera
font fi efcarpés, qu’il n’y a aucun fentier par lequel
on puifie y defcen ire : la feule entrée eft
par une grande ravine qui, coupant à travers les
rocs qui entourent le cirque* court jufqu’ à la
mer. Les côtés de cette gorge font dentelés, bri-
fés & en précipice. Dans les murailles efcarpées
de la Caldera , on ne voit que des couches de
bafalte & des conglomérats de fragmens de cette
la v e , qui s’jabaiffent avec la plus grande régularité
du centre à la circonférence du cône. Maintenant,
d’après la théorie des cratères d’ élévation
* on veut nous faire fuppofer que d’abord *
une férié de couches horizontales de matières
volcaniques fe font accumulées les unes fur les
autres à l ’énorme profondeur de 4,000 pieds :
circonflance qui* feule, impliqueroit la proximité,
au moins d’une ifîue d’où feroient forties d’im-
menlës quantités de roches ignées. Après l’agrégation
de la mafle* la force expanfive fut dirigée
fur un point donne avec une énergie tellement
extraordinaire , qu’elle fouleva pour ainsi dire
corporellement la mafle entière jufqu’à ce qu’ elle
atteignît la hauteur de 7,000 pieds au-deflus du
niveau de la mer, en laiflant un grand gouffre ou
une caviré dans le milieu. Cependant, nonobftant
ce prodigieux effort d’explofions gazeufes concentrées
fur un au fl j petit efpace* les couches* au lieu
V O L
d’être brifées, contournées & jetées dans le plus
grand dëfordre, ont acquis cette douce inclinai-
fon & cet arrangement régulier &-fymétriqite qui
caraélérife les flancs d’un grand cône d'éruption,
comme l’Etna. Nous admettons que des tremble-
mens de terre* lorfqu’ ils agiffent fur de grandes
étendues de terrains, puiflent les élever ou les
abaifler fans déranger confidérablement la pofi-
tion relative des collr e s , des vallées & des ravins.
Mais eft-il pofîible de concevoir que des
fluides élaftigues puiflent, fur un feul point* tra-
verfer la croûte de la terre* & là aufli où les couches
ne font pas compofées d’argile molle obéif-
fante* ou de fable incohérent,-mais de foli'de bafalte
, & qu’ ils les aient foufflées en manière de
veflie ? Les roches, au contraire/,n-auroi?nt-elLes
pas été fracturées* fendues* jetées dans une po.fi-
tion verticale & fouvent renverfée* & avant
qu’elles euflèiit atteint la hauteur de 7*000 pieds,
n aurojens-elles pas-été réduites en un monceau
confus & chaotique ?
* La grande Canarie eft une^îîe de forme circulaire,
analogue à celle de Palma. Dans la baie de
Bengale, i’île de Barren/ dont le nom lignifie
ftérile3 eftpropofée aufli comme un exempléTrap-
pant du même phénomène, & Ià^-* dit-on* nous
avons l’avantage de comparer l'ancien volcan d’élévation
avec un cône & un “cratère d’éruption
dans fon centre. Lorfqu’on la voit de l’Océan ,
cette île préfente de prefque tous les côtés une
futface de rocs nus qui s’élèvent en pente douce
vers l’intérieur; mais fur un point* il' y a une
fente étroite par laquelle on peut pénétrer dans
le centre & y découvrir qu’ il eft occupé* par tin
baflin circulaire rempli par,îles eaux de la mer,
bordé déroutés parts par des rochers efcarpés* &c
dans le milieu duquel s’élève un cône volcanique
fréquemment en éruption. Le fommet de ce cône
eft de 1,690 pieds"français de hauteur, correfpon-
dant à celle des bords qui entourent le baflin ; de
forte qu’ on ne peut l’apercevoir de la \i\-.v que
par ie-ravin , qui relfemb’e précifément à la gorge
profonde par laquelle on pénètre dans la Caldera
de rîle.de Palma* & dont on dit queTanalogue
plus ou moins carattérifée fe trouve dans tous les
cratères de foulèvement.
» Le cône du haut pic de T e y d e , à Ténériffe,
eft aufli repréfenté comme fortaut du milieu
d’un cratère d’élévation ; placé comme une tour
environnée de fon folié & de fon baftion * le folié
étant les reftes de l’ancien gouff-.e, & ie baftion
l’efearpement de l ’enceinte circulaire* de forte
que Ténériffe eft une exa&e contrerpartie de
l'î.e Barren, excepté que l’ une.elt élevée à une
hauteur immenfe * & que l’autre eft encore de niveau
avec la mer* & en partie cachée fous fes
eaux.
» Maintenant* fans énumérer d’autres exemples,
confidérons quelle forme on peut efpérer que
prendront les ■ volcans fous - marins. 11 y a lieu
dé conclure, d’après le peu de rapports que nous
pofledons fur les éruptions au fond d e 'la mer,
qu’elles fe font de. la même manière que fur la.
furface d’un continent. Il eft très-poflible que les
phénomènes volcaniques, lorfqu’ils fe développent
à des profondeurs que l’on ne peut fonder,
foient extrêmement différens ; mais .lorfqu’ ils
ont été aperçus par, les équipages de vaif-
feaux paflant par hafard* les exploitons de fluides
aériformes au -deflous des eaux ont exactement
reflemblé à celles des volcans fur terre. Des fragmens
de roc* des Icônes embrafées, des cendres
pulvérilées* font lancés* & dans plufieurs cas
des îles coniques ont été formées & ont enfuite
difparu; comme* loifqu’ en 1691 & 172a, de petites
îlès parurent près de Saint-Michel-des-
Açores, ou comme Sabrina, en 18 1 1 , près du
même endroit, & * en 1783* Nijoë* près de-la
cqtp d’ Illande. Quand les cônes ont difparu, ils
étoient probablement formés de matières détachées,
aifément réduites par les courans & les
vagues à l’ état d’écueil fous-marin. Lorfque ces
îles fe font cohfervées* comme celles d’Hiera , &
de la nouvelle & la petite Kameni (planche
lupplémentaire, figure .X I ) , elles confiftoient
en partie en lave folide. Quelque doute que
l’on ait pu avoir- quant à l’adion de volcans
entièrement fous - marins, toujours doit-il être
clair que dans les cas nombreux où ils. élèvent
leurs pics jufte au-deflus des vagues, le fable* les
feories, les fragmens dé ro ch e r , doivent s’accumuler
autour deTiflue, en un cône avec un cratère,
tandis que les matières plus légères font
entraînées à diftance par les marées & les cou-
rans, comme elles 1e font par les vents , dans les
éruptions en plein air. La lave qui fort du cratère
fe répand fur le fond de la mer en cherchant les
nivtaux les plus bas ou en s’accumulant fur elle-
même, d’après fa liquidité, fon volume, la rapidité
de fa congélation ; fuivant enfin les mêtnes
lois que si elle couloit dans l’atmofphèré.
«Nous pouvons chercher enfuite quels caractères
peuvent aider lé géologue à distinguer des cônes
formés entièrement, ou en grande partie3 fous les
eaux de la mer d’avec ceux qui font formés fur
terre. D’abord* de grands lits de coquilles & de
coraux fe dépofent fouvent fur des côtés inclinés
des cônes fous-marins * particulièrement dans
la mer Pacifique, & ces couches alternent fouvent
avec la lave. Au lieu d’alluvions contenant
des coquilles terreftres, comme quelques-unes
de celles qui couvrent Herculanum , on peut
s’attendre à trouver de grandes couches de fable
tufacé & aggloméré fur les parties des flancs d’un
volcan*’ comme Stromboü, qui font plongées fous
les eaux. La preflion d’une colonne d’eau étant
beaucoup plus confidérable que celle de l’at-
mofphère * doit empêcher la fortie dés fluides
élaftiques & de la lave, jufqu’ à ce que la réfiltance
foit augmentée dans .la même proportion ; de là
cône fera formé, il fera fujet à faurer & à être
tronqué à un niveau plus bas que dans une eau
peu profonde où en plein air. Ajoutez à cela' que
lorfqu un volcan fous-marin a réparé fon cône il
eft expofé. à être détruit par les vagues* comme
dans plusieurs cas que nous avons cités. L’ iflue
fera alors bouchée par des couches de fables & des
fragmens de ruchers pouffes dedans par les marées
& les courans. Ces matériaux font beaucoup plus
promptement confolidés fous l'eau qu'à l'air
d’autant .plus que la matière minérale y eft abondamment
introduite par les fources qui fortent du
terrain dans toutes les régions volcaniques qui ont
été examinées loigneusement jufqu’à préfent D*-s
lits de travertins folides, & dans les pays chauds
dès bancs de corail , doivent fouvent obftruer la
bouche dans de'longs intervalles de repos 8r en
ajoutant à la force répreffive, augmenter la violence
des éruptions. Dans un volcan fous-marin les
probabilités de la defti-udion d'une plus gran le
partie du cône, & de la formation d'un cratère
plus étendu,, font donc évidentes, & les dimen-
iions des cratères de foulèvement, fi on les rapporte
à de fembiables opérations, ne peuvent
nous fuiprendre. Pendant une éruption, en 1444
accompagnéei.d’uri épouvantable tremblement dé
terre-,.le fommet de l'Etna fur détruit, & il resta
'un énorme cratère, d'où la lave coula. Le fegmenc
de ce cratère fe voit eucore près de la Cafainglefc
& lorfqu’ il etoit entier, il devoir avoir plufieuis
milles de diamètre. Le cône fut enfuite reformé ;
mais cela n'auroit pas eu lieu fi aifément, fi l'Etna
eut été. placé, comme Stromboli, dans une mer
profonde, & fon pic expofé à la fureur des vagues
?uppofons que le cratère de i 444 ait été rempli
de lits de corail & de conglomérat* & que des
éruptions fubféquentes les aient jetés au-dehors
de manière à ce que le cône eût été tronqué
jufqu’à_la limite fupérieure de la région boifee* il
fe feroit formé alors un baflin de trente milles italiens
de circonférence, excédant de cinq ou fix
milles Je.circuit du golfe de Santorin. Nous favons
cependant, par de nombreufes coupe s, que les
couches de bafalte, de trachvte & de brèche
trachytique , dans cette partie du grand cône de
1 Etna, s’inclineroient doucement en partant du
centre vers tous les points de la circonférence
excepté qi elques-uns où des irrégularités (broient
occ.afionnées par lès petits cônes enterrées dont
nous avons déjà parlé. Que fi ce gouffre étoit de
nouveau rempli* & la bouche obftruée de forte
que de nouvelles explofions d’une grande violence
pufient tronquer le cône encore une fois j if-
qu a la limite inférieure de la région boifée
il s enfuivroit un gouffre de cinquante milles itj-
hens de circonférence. Cependant, même alors,
les ruines du cône de l'Etna pourroient former
une île circulaire entièrement compofée de x< es
volcaniques, s'abaiffant légèrement à l'extiri-.ur