font parallèles aux chaînes principales au milieu '
defquelles elles font creufées; les vallées tranf-
verfales les coupent , foit obliquement, foit à
angles droits. Nous ne citerons aucun exemple
de ces dernières, parce qu'elles font moins importantes
& beaucoup plus nombreufes ; nous
dirons feulement que les montagnes qui bordent
les premières ont ordinairement leurs couches
parallèles à la direction de celles-ci, tandis que
les fécondés, d’après leur dire61 ion, coupent
ces mêmes couches perpendiculairement ou obliquement.
Une différence eflentielle qui diftingue
les Pyrénées des Alpes, c ’eft que dans celle-ci
l’on trouve plufieurs exemples de vallées appartenant
à ces deux clalfes, tandis que dans les
premières prefque toutes les vallées font tranf-
verfales.
Les chaînes qui partent d’un même groupe
de montagnes forment de grandes vallées foit
longitudinales, foie tra.nfverfales , félon qu’ on
les compare à d'autres vallées, car toute vallée
principale efl toujours longitudinale à l ’égard de
celles qui viennent y aboutir. Suppofons deux
grandes chaînes divifées dans le fens général
d’un groupe de monragnes auquel e.les appartiennent
: elles formeront une vallée longitudinales
les branches qui partent de ces chaînes
formeront des vallées tranfverfales à l’égard de
l'enfemble de toutes les montagnes du groupe,
mais longitudinales elles-mêmes, fi on les compare
à celles que forment les rameaux ou les
contre-forts de ces branches. Ces lubdivifions s’é tendent
jufque dans les chaînes de collin,es,
jufque dans les plus petites vallées auxquelles
aboutifïent encore des vallons & des gorges. Il
fuit de ce principe, qui s’applique à la fois aux
rameaux & aux vallées,, que les unes & les autres
pOurroient être divifés en un grand nombre d’ordres,
fuivant leur plus ou moins grande importance.
Ceux qui ont quelque connoiflance, des montagnes
favent que le point de départ commun à
deux rameaux oppofés eft ordinairement marqué
par un exhauflement plus ou moins confidérable,
& que la naiffance de deux vallées oppofées l’ eft
par une dépreflion. Ces dépreffions portent, dans
les Alpes & dans les deux extrémités des Pyrénées
, le nom de colsy mais au centre de ces dernières
on les appelle ports. Ces deux expreffions
fynonymes défignent auflî les paflages qui fervent
de communication d’ un verfant à l’autre de la
-même montagne. Entre deux cols voifins fe trouve
une partie du faîte reftée ifolée, une cime. Les
cols font les points de départ de deux vallées oppofées
j les cimesy au contraire, font les points de
départ de deux rameaux oppofés.
Il eft encore dans les vallées un point important
à confidérer : c ’eft la ligne longitudinale
qui occupe la partie la plus baffe dans
toute fa longueur. Ainfi les deux côtés d'une.
vallée fe joignent en formant à droite Sc à
gauche une pente plus ou moins rapide, comme
les deux verfans d’ un même rameau ou d’une
même chaîné fe terminent en un plateau fur une
ligne qui règne dans toute la longueur. Cette
ligne porte le nom de faite ; la ligne qui fe prolonge
auflî au fond des valjées & dans toute leur
longueur a reçu le nom de thalweg. Ce nom
allemand, adopté en français comme expreflion
technique, fignifie chemin de vallée. Le thalweg eft
à proprement parler la ligne qui partage en deux
dans toute leur longueur le cour de h rivière ou
du ruiffeau qui coifie dans la vallée.
La plupart des vallées creufées dans les terrains
de féd ment, & furtout dans ceux de fédi-
ment fupérieur, préfentent une fÿmétrie tellement
régulière dans la correfpondance de leurs angles,
que les angles faillans font toujours oppofés aux
angles rentrans, de telle forte que fi l’ on rappro-
choit par la penfée les deux côtés de la vallée, il
feroic impoflible d’yreconnoître la foudure qui
s’opèreroit par un tel rapprochement. C ’eft ce
que l’on peut voir dans la planche i y , qui repréfente
le cours de la Charente avec fes ofcilla-
tions, fes finuofités. L’ elpace fur lequel elle eft
figurée forme une longue & étroite vallée creufée
dans des calcaires anciens.
Ces angles faillans & rentrans ne font pas moins
vifibles dans les terrains plus récens que ceux
qui fervent de lit à cette partie de la Charente.
Avant que la géologie n’ eût fait les progrès
qui en ont changé complètement la face
& le but, la difpofiiion que nous faifons re-
| marquer porta Bourguet à attribuer la formation
| de toutes les montagnes à l'a&ion des eaux i
\ c’étoient les courans marins qui avoiént laifié,
dans la difpofition de ces angles, la trace de
leur courfe rapide. Buffon adopta cette idéeL
& en fit même une des bafes de-fa théorie fur la
formation des montagnes. Nous ne rappoiterons
pas ce que dit à ce fujet le Plinev français, mais
comme les Lettres philo/'opkiques de Bourguet font
beaucoup moins lues que la Théorie de la Terre,
il ne fera peut-être point inutile de relater ici
les propres paroles de ce dernier :
« On s’eft aperçu depuis long-temps que les
» chaînes des plus hautes montagnes alloient
» d’occident en orient} enfuite l’on a vu qu’il y
»j en avoit de fort confidérables qui tournoient
» du nord au fud : mais perfonne n’avoit décou-
» v ert, avant l’auteur de ce Mémoire, la furpre-
« nante régularité de la ftruèture de xres grandes
mafles. Il a trouvé, après avoir paffe trente fois
» les Alpes en quatorze endroits différens, deux
»* fois l’Apennin, & fait plufieurs tours dans les
>» environs de ces montagnes & dans le Jura,
>» que toutes les montagnes font formées dans
» leurs contours à peu près comme les ouvrages
-o de fortifications. Lorfque le corps d’une mon-
»» tagne. va d’occident, en. orient, elle forme des
» avances qui regardent autant qu’ il efl poffible
„ le nord St le midi, c ’eft-a-dire que, quand la
„ longueur de la montagne forme une ligne pa-
„ rallèle à l’équateur, (is angles, font parallèles
„ au méridien, & lorfque fa longueur forme une
„■ ligne parallèle au méridien, les angles font
» parallèles à l’ équateur. Cette régularité ad-
„ mirable efl fi fenfible dans les vallons, qu il
„ femble qu’on y marche dans un chemin cou-
„ vert fort régulier. Car f i , par exemple', on
>» voyage dans un vallon du nord au fud, on
3» remarque que la montagne qui eft à droite
so forme des avances ou des angles qui regardent
>» l’orient, & ceux de la montagne du cote
>3 gauche regardent l'occident, de forte, nean-
»3 moins, que les angles faillans de chique cote
»3 répondent réciproquement aux angles rentrans,
>3 qui leur font toujours alternativement oppofés.
>3 Au contraire, fi le vallon va d occident en
» orient, les angles de la montagne qui eft a
»» gauche répondent au midi, & ceux de la
33 droite répondent au nord. Les angles que^ les
»3 montagnes forment dans les grandes vallées
>3 font moins aigus, parce que la pente eft moins
33 rapide & qu’ils font plus ou moins éloignés
33 les uns des autres. Dans les plaines , ils ne
>3 font fenfibles que dans le cours des rivières,
»3 qui en occupent ordinairement le milieu. Leurs
33 coudes naturels répondent aux avances les plus
>3 marquées ou aux angles.les plus avances dçs
>» montagnes auxquelles le terrain ou les rivières
»» coulent va aboutir. Cette conftruétion, qui eft
>» commune au lit de la mer, a celui des. lacs,
33 des fleuves, & aux vallons, eft tellement vraie
>» que l’auteur oie en appeler atix yeux de tous
»s les hommes. .
33 dfs répandues ou alluvions de dix mille, trente
33 mille ans, à des comètes, à des périclofes ou
»» circulations perpétuelles, parce que leur grande
»3 pénétration leur auroit fait voir d’ abord que
33 ces belles inventions ne fauroient s’accorder
>3 d’aucune manière avec les phénomènes qu’on
» vient d’indiquer, fans parler des autres qui ne
»3. s’ y accordent pas mieux.
» Il eft étonnant que l’on n’ ait pas aperçu une
3» chofe aufli vifible. Cependant elle elt la clef
»» principale de la théorie de la terre ,* elle èll comme
>• le mot d’une énigme qui fait juger du plus ou
»3 moins de jufteflè des explications qu’ on a voulu
»o donner, & renverfe toutes les hypothèfes in-
33 ventées jufqu'ici pour cet effet, fans déroger
»> en rien à la capacité de leurs auteurs. Si les
33 favans dont on a parlé ci-deffus avoient eu
33 occafion de découvrir la véritable ftrudture des
» montagnes, & qu’ ils euffent fait attention a Ja
» connexion des unes avec les autres, & s ils
» avoient obfervé encore un phénomène capital
» dans cette recherche, que l auteur croit avoir
o» vu le premier, depuis environ quinze ans, c eft
» que tous les coquillages qu’ on trouve dans
33 les bancs des montagnes & dans les couches
»» de la terre, font toujours remplis,, fans excep-
>’ tiôn, de la matière même des bancs & des
3* couches où ils font renfermés : fi ces fayans
*• hommes avoient confidéré ces phénomènes
>3 comme il faut, ils n’auroient jamais eu recours
' 33 à des inondations particulières, à des ouragans,
M ou à des tremblement de terre épouvantables, a
Plufieurs difficultés s’oppofent à l’admiflion de
l’opinion de Bourguet; de Laméthrie, dans i&
Théorie de La Terre, s’eft attaché à la réfuter en fai-
fant remarquer que les courans des mers ont trop
peu de foi ce, furtout dans les grandes profondeurs,
pour qu’on puiflè leur attribuer l’ origine des premières
vallées; qu’il en eft de même des courans
qui fe forment dans les grands lacs ; que les
fleuves ont dû fuivre des pentes toutes formées
au lieu de creufer des vallées; que dans les montagnes
primitives les bords des vallées ne préfentent
point la corr fpondance des angles faillans
& rentrans,.que Bourguet regarde comme générale.
A Cet égard, Sauflure qui pafla la moitié de
fa vie dans les Alpes, Pallas qui le premier fit
connoître celles de l ’Afie feptentrionale, s’accordent
pour déclarer que dans les chaînes granitiques
les vallées offrent beaucoup d’exceptions
à la règle de Bourguet. De Laméthrie ajoute que
toute vallée, foit des terrains primitifs, foie des
terrains fecondaires, part d’une grande montagne
ou d’une chaîne qui auroit oppofé au courant
i un obftaele infurmontable ; que certaines vallées
fermées de tous côtés n’ offrent qu’une petite'
iffue à l'écoulement des eaux : celle de Chamouni
eft dans- ce cas ;. elle eft bordée par d’énormes
montagnes, 8z n’a qu’ une échancrure étroite par
laquelle l ’Arve s’écoule. Que feroient d’ailleurs
devenus, dit-il>les terrains que les eaux auroient
emportés ? où les auroient - elles dépofes ? On
pourroit répondre à quelques-unes de ces ob-
jeétions, fans qu’il foit cependant poffible d’admettre,
comme une règle générale, l ’opinion
de Bourguet; c e f t ce que nous examinerons,
bientôt.
Hutton, dans fa Théorie de la Terre, car lorfque
la géologie n’étoit encore qu’ une fcience con-
jeôlurale, chaque auteur prétendoit à l’honneur
d’enfanter une théorie générale, Hutton, difons-
nous, prétendit expliquer l'origine des vallées.
Si une rivière, d it - il, étoit un firnple ruiffeau
fans branches coulant dans line étroite v allée,
on pourroit croire qu’un torrent rapide auroit
primitivement ouvert le canal qui conduit fes
eaux à l'Océan; mais en confidérant qu’ une infirmé
de petites vallées font filionnées par des
cours d’ eau qui vont fe réunir à une rivière principale
, on eft forcé de convenir que ces canaux
ont été creufés par les mêmes eaux qui les ar-
rofent. Playfair, l’annotateur de Hutton, cherche
à fortifier cette hypothèfe par fa propre opinion.
; En fuivant, dit-il,, le cours d’une grande rivière,