
dégradations confîdérables qu’offrent les
rochers & les .longues chaînes de montagnes
; telles font ces coupures énormes ,
ces larges ouvertures produites par des
éboulemens. ou par des affaiflemens qui
rempliffent les plaines de débris énormes
de montagnes dont les bâfes manquent ;
& ces débris offrent des grès irrégulièrement
femés à la furface des terres éboulées
, ou bien de longues couches de
terre bouleverfées fans 'ordre. C ’eft de
cette forte que fe préfentent aux yeux
des obfervateurs , les portes qu’on trouve
dans les chaînes des montagnes & dans
les ouvertures de certains détroits; comme
les Thermopyles, les portes duCaucafe,
des Cordelières, du détroit de Gibraltar,
entre les monts Calpé & A b y la , la porte
de l’H ellefpont, les détroits de Calais, de
Palerme, &c.
Lorfque ces affaiflemens n’ont agi que
fur les couches intérieures , ou que les
eaux feules ayant miné profondément les
terres , ont entraîné dans l ’intérieur des
montagnes, les fables & les autres matières
de peu de conliftance, & n'ont lâifiè que
les voûtes formées par les rochers & les
bancs de pierres , il réfulte de toutes ces
dégradations, des cavernes : c’eft dans ces
conduits fouterrains qu’e certains fleuves
difparoiflent, comme le Niger , l’Euphrate
, le Rhône. C ’ell dans ces cavernes
formées au fein des montagnes , que font
les. féfervoîrs des fources abondantes; &
lorfque les voûtes dans ces cavernes s’af-
faiffent & les comblent-, lei eaux qu’elles
contiennent fe répandent au dehors & pro-
duifent des inondations t fubites ’ & im-
'prevues,. .
Les eaux de .pluie produifent auffi à la:
furface. extérieure de grands changemens.
Les montagnes diuiinuènt de hauteur | &
les plaines fe rempliffent par les produits,
journaliers de cès deftruâions ; les cimes
des montagnes fe dégarniflent de terre , &
il ne relie que les pics. Les terres entraînées
par les torrens & par les fleuves dans
.les plaines , y ont formé des couches
irrégulières de gravier & de fable ; on en
trouve de larges amas le long des rivières
& dans les vallées qu’elles traverfent. Ces
|couches ont cela de particulier, qu’elles
éprouvent desinterrupliôns, qu’elles n’annoncent
aucun parallélifme ni la même
épaiflèur ; & dans l’examen des amas de
gravier , on reconnoît qu’ils ont été lavés,
arrondis& dépofés irrégulièrement par les
to'urnans d’eau , &c. Parmi ces fables &
ces graviers, on trouve fans ordre , fans
difpolition régulière , des coquilles flu-
viàtiles , des coquilles marines brifées et
ifolées , des débris de cailloux, des pierres
dures, des craies arrondies , des os d’animaux
terreftres , des inllrumens de fe r ,
des morceaux de bois , des feuilles , des
impreflions de moufles ; & les différentes
parties de cet affemblage fe lient quelquefois
avec un ciment naturel produit par
la décompofîtion dé certains graviérs où
par des mines de fer;
Aux environs des étangs-, des lacs &
des mers, le long des rivières ou .près
des torrens , on trouve des endroits bas ,
marécageux , dont le fond efl un mélange
de végétaux imbibés de bitume; des arbres
entiers y font renverfés fuivant une meme
direction. Cfertàines couches limoneufës
durcies fe font moulées fur les rofeaux des
marais qu’elles ont recouverts ; fouvent ces
couches de Végétaux ou en naidre, ou eh
empreintes dans la pierre , ou dans la
terre durcie, font recouvertes par des
amas de matière qui forment une épaiffeur
de cinquante , foixante , cent pieas ; ces
additions. & ces terres accumulées font
cônfidérables., furtout au pied des hautes
plaines ou des montagnes , paroiffent
être des adoffemen? qui s’appuient & s’étendent
vers les montagnes les plus
élevées.
Les rivages de la mer annoncent de
même des dégradations produites par les
eaux. A l’ embouchure des fleuves, nous j
trouvons des îles , des amas de fable , ou
des dépôts de terre dont les eaux des
rivières fe chargent, & qu’ elles dépofent
lorfque leur cours efl rallenti. Quelques
obfervateurs ont prétendu que certains
fleuves çharrioiënt le tiers de terre , ce
qui efl exagéré ; mais il fuffit de faire
envifager cette caufe avec toutes les réductions
qu’on jugera convenables , pour
conclure l’étendue de ces effets. Certaines
côtes font minées par les flots de la mer :
elle en reéôuvre d’autres de fable : elle
abandonne certains rivages, fe jette fait
des invafions fur d’autres, ou petit à
’petit , ou par des inondations violentes
& locales.
Un autre principe étendu de deftruc-
tiou efl le feu ; certaines montagnes brûlent
continuellement : elles éprouvent par
Veprifes des accès violens, des éruptions
daiîs lefquelles* elles lancent au loin des
tourbillons de flammes, de fumées , de
cendres, de pierres calcinées ; & dans
la fureur de leur embrafement , les laves
bu matières fondues fe font jour à travers
les flancs de la montagne entr’ouverts par
l’expanfion des vapeurs qui redoublent la
fureur du feu. Je trouve tous les volcans-
dans des montagnes, leur foyer efl peu
profond, & leur bouche efl au fommet
& dans le plan de l ’horifon. Certains
volcans font éteints, & on les reconnoît
alors aux précipices énormes que des
montagnes offrent a leurs fommets, qui
font comme des cônes tronques, ouverts
en forme de cratères, & aux laves ou
matières fondues, qui font difperfées fur
les croupes & dans les plaines voiflnës.
Le fond de la mer n’eft pas exempt
de ces tourmentes violentes; il y a auflï
de ces volcans dans les montagnes dont
le fommet efl fous les flots. Ils s anon-
cent près des îles dont ils font la continuation
& les appendices. Ces volcans
fous - marins élèvent quelquefois des
maffes de terre énormes qui paroiffent
au-deffus des flots , & vont figurer parmi
les îles; ou bien ces matières enflammées
ne trouvant pas dans leurs exploitons des
maffes contre lefquelles elles puiffent
agir, élèvent les flo ts, & forment des
jets immenfes, des typhons ou trombes
affreufes. La mer efl alors dans une
grande ébullition , couverte de pierres calcinées
& légères qui y flottent fur un
efpace très-étendu , & l’air efl rempli
d’exhalaifons fulphureufes.
Tous ces effets font ordinairement
accompagnés de tremblement de terre,
phénomène qui porte au loin la défola-
lion ou les alarmes. On peut en diflin-
guer de deux fortes ; des tremblemens
locaux , & des tremblemens étendus ; les
tremblemens locaux circonfcrivent leurs
commotions , s’étendent en tous fens autour
d’un volcan ou de fon. foyer. Les
autres fuivent certaines bandes de terrein,
& furtout celles qui font parfemées de
montagnes, ou compofées de matières
folides ; ils s’étendent beaucoup plus en
longueur qu’en largeur. Ces convulfions
défaflreufes s’annoncent par différens mou-
vemens. Les uns s’exécutent par un
foulevement de haut en bas; les autres pat-
une inclinaifon telle que l’éproüveroit
un plan , foulevé par la partie la
plus haute & fixé par le bas ; enfin ,
d’autres par un balancement qui porte
les objets agités vers les différens points
d e l’horifon & par dés reprifes marquées.
De ces différentes agitations réfultent les
commotions meurtrières , irrégulières ,
brufquées , fuivies de grands défaflres,
& ces fecouffes tranquilles qui balancent
les objets fans les détruire. On peut mettre
parmi les effets des tremblemens de terre,
les affaiflemens & les éboulemens de certaines
montagnes , les fentes, les précipices
8c lès abîmes.
Les fecouffes fe propageant par les montagnes
& par les chaînes qui fe ramifient