jiuds & dépouillés de terres, pendant que
les dépôts abandonnés par la mer leur
préfentoient un fol fertile & d’une culture
facile. De-là il efl arrivé que les hommes
ont abandonné certaines contrées pour fe
porter en d’autres. C ’eft ainfi que peu à
peu l’Egypte inférieure & la Méfopotamie
qui font formées, comme les pays de collines
de la Tofcane, par les dépôts du
ÏJil & de l’Euphrate ôr.ganifés dans .le baf
lin de la mer, ont cté habitées depuis la
retraite de la mer. C ’efl ainfi que la Lombardie,
qui efl prefque entièrement le produit
du Pô & des rivières aflîuentes efl
devenue un pays très-fertile, fur-tout dans
les parties qui font couvertes par les
couches horifontaies. C ’efl ainfi que la
Flandre & la Hollande font les produits
des rivières qui y ont leurs embouchures ,
& qui y ont dépofé les matériaux qu’elles
ont enlevés des parties fupérieures de leur
cours.
On demandera peut-être quand & comment
le niveau de la mer s’eft baillé, &
que fes eaux-ont iailfé à fec toutes ces contrées'!
On répondra qu’on ne çonnoit
aucun agent dans la nature qui ait pu amener
cette révolution. Depuis environ
quatre mille ans, dont nous.connoiflbns
les évènemens , rien ne conflate qu ’ii fe
foit; opéré une diminution fenfible dans
le baffin de la mer, ni un abaiflement de
fon niveau. Cependant la malle prodi-
gieufe des matériaux que les fleuves cha-
rient dans la mer , auroit dû élever fes
eaux & produire des inondations remarquables
fur les terreins qu’elle ne couvroit
pas auparavant. Dira-t-on que les plantes
& les pierres fur-tout ont emp loyé une
quantité d’eau qui ne retourne plus à la
mer parce qu’elle a perdu fa fluidité ? &
que c’eft par ce travail continuel de la
nature que la mer tend à s’appauvrir
d’eau.
T A R
§. V |
Des collines en général.
Les collines de la Tofcane s’étendent
d’un côté jufqu’aux fommets efcarpés de
l’Apennin, & de l’autre jufqu’au bord de
la mer ; elles paroilfent divifées en divers
baflins circonfcrits par les contours rrès-
multipliés & très-variés des fommets plus
; ou moins élevés, plus ou moins efcarpés
des montagnes primitives. C’eft au milieu
de ces baflins que les torrens & les rivières
fe font ouverts des canaux , ên entamant
chaque jour les maflifs des collines , en en
rongeant & entraînant des parties con-
fidérables , & fe chargeant fur-tout d’une
grande quantité de terres qu’elles dépofent
enfuite dans les plaines inférieures dont
elles haufiènt ainfi la furface.
Les collines dont les fommets font les
plus élevés , font arnpied des plus .hautes
mohtagnes ; mais les fommetsles plus bas
fe trouvent dans les contrées yoifines
des bords de la mer ainfi que des lits
des grands fleuves.
Les parties de la Tofcane qui offrent
des collines , font à la droite de l’Arno ;
en en trouve beaucoup auffi dans la vallée
inférieure de i’A rn o , de Nie.vole : dans
la grande partie du cours,du Sefchio où
efl Lucques'; à la gauche de l’Arno : dans
une grande partie du val Délia Pefa,
Dell'Elfa , DelCEra , de Cecina 6c Délia
fine. Je les indique comme ; les ayant parcourues
d’après l’indication de Targioni
jans fes voyages.
Dans l’état de Sienne, il y a des traélus
de collines immenfes , telles font celles du
val di Marfa , & du val d’Ombrone.
De Montelupo, jufqu’aux Alpes de
l’Apennin, c’e ft-à-dire dans la Tofcane
fupérieure , il y a de grandes parties de
collines ; toute la vallée fupérieure de
l’ Arno , le yal de la Chiana , font occupéspar
ces longs traélus; mais ces collines
font d’une ftruéture & peut-être d’une origine
différente des autres qui font dans certaines
parties, parce qu’elles ne renferment pas
des-corps marins, comme celles qu’on
a indiquées plus haut. Targioni les place
dans une _ clafîe à part ; & il compare
cette forte de collines à beaucoup d’autres
qui fe trouvent dans certains pays de
l’Europe.
Maintenant,pour donner une idée,générale;
de l’origine des çoiiiues de la Tofcane
inférieure , lefquejles paroilfent avoir été
principalement, l’objet des recherches de
Targioni, il efl convenable de préfenter
ici le précis de ce que plufieurs courfes
l’ont mis à portée d’obferver & de con-
jeéhirer.
Ces collines paroilfent avoir été une
plaine continue, formée par une fuite de
plufieurs dépôts pu fédimens horifontaux,
qü’ume eau chargée de ces fubftances a
Iailfé précipiter dansJej baflins qui fe trou-
voient au pied des montagnes.. C ’eft de
ces montagnes que cette eau avoit détaché
toutes ces fubflances , de la même
maniéré que feroit un fleuve , lequel fe-
roit obligé de féjourne'r pendant plufieurs
fiècles au milieu d’un maffif de montagnes
qui s’pppoferoient a fon paflkge. C’eft
a la fuite de ce travail de l’eau & des dépôts
formés dans la mer, que plufieurs fommets
tortueux de montagnes fe trouvent dif-
perfés dans les pays de plaines , & que les
collines en occupent les intervalles. Tous
ces dépôts ont été mis à découvert par
la retraite de la mer qui s’efl Of é; ée dans
un temps dont nous ne pouvons fixer
l’époque ; enforte que tout ce qui for-
tuott le fond de la mer s’eft trouvé par
cette retraite & abailfement de nivea -,
fupérieur de plufieurs toifes à la mer actuelle.
Depuis cette révolution & cette
Récouverte., les eaux des pluies tombant
*ur ces plaines élevées ont dû fe porter
vers la mer, & dans la fuite de plufieurs
fiècles fillonner de -vallons le pays de
collines, 8c l’avoir réduit à l’état où il fe
trouve aâueliement.
Targioni conjeâure que dans certaines
contrées- de la Tofcane les eaux des fleuves
'qui avoient été obligées d’arrêter leur a ur-
fe , & de féjourner dans une'grande vailée
environnée de montagnes, avoient, comme
nous l’avons dit, rencontré une digue qui
-les avoit forcées à s’étendre- & à former
'des1 lacs où elles ont. dépofé les limons
dont elles étoient chargées. Si l’on fup-
pofe maintenant qu’il s’eft formé enfin te
une brèche dans' la digue qui fàifoit. du
fleuve un lac, il s'enfuit de-là que le fleuve
fe déchargeroit dans la plaine au-deffus
de laquelle il s’eft arrêté , en s’échappant
par cette ouverture; & l’on comprend
aifémeiit que r r .^ e sn devenue courante
aura détruit bientôt fon dépôt jufqu’à ce
qu’elle l’ait réduit à-peu-près au niveau
de la plaine inférieure, & que les amas
horifontaux formés par le limon qu’il
charioit fe féroient rongés & excavés par
lui-même , & les torrens qui s’y formoient
par la réunion des eaux pluviales. En un
mot , la plaine faitepar les dépôts du fleuve
feroit de la même nature & de la même
ftruéture que celle des collines de Voiterre,
& de la Tofcane fupérieure.
C’eft làjuftement lefyftême du célèbre
Nicolas Sténon , fur la formation des col-
fines de la Tofcane, dont il a publié les
théorèmes généraux dans la préface de la
diflertation de j'olido intra folidum nattirailler
contento. D’après des oblervations
réitérées, Targioni déclare que Sténon a
bien connu l’état des collines , & que fes
théorèmes qui font en petit nombre font
exaéts , & annoncent la plus grande faga •
cité. On peut les voir à l’article de Sténon ,
qui renferme le précis de ce travail important.