
dit. Quoi qu’il en fo it, Pline ne doütOit
nullement que la Méditerranée n’eut été
autrefois un pays habité ainfi que le Pont-
Euxin & FHeiLespont.
V oic i de quelle manière il s’en exprime :
« Il ne luffifoit pas , dit-il, à l’Océan
« d’environner la terre .& d’en rongcr'cdm- •
» tinuellement les bords,;' ce n’étoit pas
» affez pour lui' erf s’oüvraiit un paÜ’àga
» entre Calpc & A b ïlâ ,’ d’avoir ' envahi
» un efpace prefqu’auiïi confidërable que
» celui qu’il 'occupoit déjà : non content
b d’avoir englouti les pays qué couvre
u la Prôpontide & FHeiiefpcnt, il a eii-
b core- abforbë au-delà du Bofphore , un
» pays entier, jufqu’à ce qu’il vînt enfin:
» le joindre aux Palus - Méotides , qui;
» eux-mêmes ne fe font étendus qu’aux
» dépens des .terres qu’ils ont inondées. » ;
I l ajoute que .tous les dç-troits qu’on remarque
dans ces mers , font, une preuve
certaine, que l’Océan y a autrefois forcé
les trop foibies barrières que la nature op-
pofoit à fa violence.
Au relie , on ne peut douter que tous
les déluges n’aient, été. caufés • principalement
par des débordemens de la mer.
L ’eau des 'pluies peut bien faire enfler les
rivières, & inonder une partie de pays
pea confidërable; mais pour fubmerger
des provinces entières & des royaumes;
pour .couvrir toute'la. terre an point de
s’élever au - delfus dés plus hautes montagnes
, il faüdroit fuppofér dans le ciel
des réfeivoirs immenfes, tels: que pour-
roient les imaginer les hommes affez mauvais
phyficiens , pour ignorer que la pluie
eft cauléepar les vapeurs qui s’élèvent de la
terre & de la mer, & qui fe raiTemblânt
dans la moyenne région de l ’air , font
obligées par leur propre poids de retomber
enfuite fur la terre. Ou bien il faut renoncer
à la raifon, & recourir au miracle
contre ce. que dicte le bon fens, Sc en
dépit mente de l’écriture qui ne parle'du‘
déluge de.JN’ o ë , que comme d’un évènement
naturel, quoique caufé par une volonté
toute-püiliante.11 ;
Ce font ces déluges particuliers' dont
nous venons de parler, ainli que les em-
brâfemens caufés par les volcans & les
terreins fulphureux, qui avoient fait croire
aux anciens que la ! terre étoit fujétte à
ces fortes d’accidens, & qu’elle y étoit
fujette d’üne manière .'confiante & réglée.
Ils étoient même perfûadés que ces déluges
& ces embràfemens cauferoient la
deftruétïon & la fin de toute chofe : non
à ,la vérité que fout pérît à-ia-fois, mais
parce que félon e u x , dans chacun des
ces évènemens, la plus grande partie des
hommes & des animaux étoient ou engloutis
dans les eaux ou confumés par le feu.
Pour ne pas accumuler ici un nombre
infini de citations qui difent toutes la
même chofe,''il fuffira?de rapporter un
paffâge iie Macrobe , qui'expofs la penfee
des anciens fur ce fujet d’une manière
claire & précifë. Il n’arrive jamais , dit
cet auteur , que le déluge couvre la terre
entière , ni que l’embrâfement foit général
dans le globe. Les hommes qui échappent
à la fureur de ces redoutables fléaux font
donc'comme la pépinière qui fert à répar
e r ! la diminution furvenue au genre humain.
Ainfi quoique le monde ne foit
' point nouveau, il paroît l’ê tre, parce que
les hommes réduits à un petit nombre,
retombent dans la barbarie & la groflléreté
inféparables de la folitude & du’ petit
nombre : jufqu’à ce que venant à fe multiplier
; la nature les porte à former des
fociétés , où régnent d’abord cette candeur
& cette fimplicité innocente, qui a
fait donner le nom d’âge d’or aux premiers
fîècles ; mais il paroît que cet. âge
: a peu duré & qu-’il ne revient plus, Nous
ajouterons ici ail fu'j et de l’inondation de l’O-
. céan,qu’on fuppofe avoir formé la Méditerranée
en rompant l’ifthme de Gibraltar,
que cette fuppofition eft au moins très-
. hafardée. Nous • dirons même que l ou*-
- vérture "dù'Bofphpre en fens contraire
jette beaucoup de doute fur cette marche
de l’Océan , & fur Cette vafte anticipation
qu’il auroit faite au milieu des terres. Un
badin comme celui de la Méditerranée ne
fecreufepas par une inondation; un débordement
d’eau ne fe fait pas un lit aulfi
profond, par une feule irruption ; &
comment imaginer que l’ouverture d’un
détroit ait lieu fubitement par l’effort
d’une maffe d’eau quelque confidérable
qu’on la fuppofe? Au relie, pour la dif-
euffion de toutes ces difficultés, nous
renvoyons aux mots Gibraltar & Méditerranée.
On y verra que les anciens partaient
de tout fuperficiellement & fans rien dif-
cuter.
S.TÉN O N ,
Notice des ouvragés de Sténon, rèlatifs
à l’hijloire naturelle de la terre ,
ƒavoir : '
r ° . Préface d’une differtation fur- les
corps -folides contenus dans d’autres foliées,
:
2n. Mémoire fur les dents de chien de
mer , tirées du fein de la terre en Toff
cane.
Sténon -dans le temps' qu’il 'étoit pro-
feffeur d’anatomie à Pile , Sc dé l’académie
del Cimento , voyagea dans la Tofcane ,
& obferva. }es différens objets : que lui
offrit le fol dé ce grand Duché. Eli ana-
lyfant fes obfervàtions,il parvint à fe rendre
compte de la’cpmpofition»& delà ftruc-
ture de la terre dans cette contrée ; il
y diftingîia même les différens maflifs qui
contenoientles corps organifés, dépouilles
des animaux marins, de ceux qui n ’en of-
froient aucuns veftigés ; en un mot, les
collines à couches" horifontales remplies"
de'coquiliages , des montagnes a couches,
inelinees'. C ’eft ‘ en fë livrant fur-tout1 à
G éographie- P hyfiq ue. J ’orne J
la difeuflion que lui occafionna la compa-
raifon des dents d’un chien de mer qu’on
tiça de:la Méditerranée, & dont il fit l’anatomie
, avec . les dents foffilës qu’il avoir
recueillies de différentes parties delà ToC-
cane, qu’il forma le plan de fa differtation ,
où, il paroît qu’il avoit principalement
pour but de démontrer que les dents fol-
files avoient appartenu à des animaux parfaitement
femblabiés à celui qu’il avoit
diffequé, ,
En mettant par ordre les réfultats de
fes méditations à ce fujet, Sténon fut
entraîné à difeuter ce qui concernoit les
couches-de la terre & les matériaux qui
étoient entrés dans, leur compofition; en
conféquence de ce travail., il conçut le
projet d’un ouvrage où tous les faits qu’il
avoit recueillis devaient être préfentés dans
un grand développement ; mais plufieurs
circonftances fe font oppofées à la publication
, Sc il s’eft borné à n’en donner
que la préface ; ce dernier écrit , où les
objets ne font qu’indiqués, a cependant
toujours été très-eftimé des naturalifles.
Targioni qui a fuccédé. à Sténon en
Tofcane dans fes .recherches fur l’hiftoîre
naturelle de ce pays intéreffant, trouva en
I lifant fort ouvrage, & en comparant fes
âffertions avec la nature, de quoi fe péné-
, trér du plus grand refpefl pour fon talent
d’obfeiver & d’analyfer Tes obfervations.
' CYtoit avec ce talent qu’il étoit parvenu,
de l’aveu même de Targioni, à connoîtré
la nature Sc l’origine des collines d’une
: maniéré plus claire & plus précife que
ne FavOientfàit ies’ naturaiiftes qui Favoient
'précédé, & à tirer de fon travail des
théorèmes bien affinés & très-lumineux
fur ces fortes de maflifs.
Mais en même teins Targioni penfe que
!les idées qu’il avoit prifes en obfervant les
montagnes primitives vinrent à la traverfe,
& donnerèfit. lieu , torfqu’il rédigeoit plu-
• fleurs belles affërtipris fur ces montagnes.