
près de1 Montigny ;■ ils pàifent à côté dès
nouveaux dans- Jes plaines arides emre
Andelot & Chaumont , & defcendent
jufqu à Donjeux où'ils fe perdent dans le
confluent de la Marné.: Ce Courant ayoit
, environ quatre lieues : de largeur, & les
prjncipaux effets de fon cours le font remarquer
dans les côtes d’Àlun & fur les hauteurs
au-delà de Briancourt. Les eaux ont
été toutes deflruétives pour ces pays éie-
ves p leur rapidité dans ces plaines .où
aucun abri ne fè préfentoit aux matières
chariees , entrainoit tout. Ce n’a pu être
qu’après une diminution çonfidérable &
lorfque les eaux ont été réduites à ne.
remplir plus que les limites des vallées de la
Marne & de la Suize, qu’à la faveur d’une
infinité de détours , les vafes, les fables,
& mille autres matières ont pu fe dépofer
derrière- certains abris 8c former des ter-
rems modernes dans le fond de ces. vallées.
Le torrent de la Marne acc*u de celui
tiv Suize , au-deflous de Chaumont, a,
par-là , vu augmenter confidérablement
les forces. La grande côte qui couvre Condé
à l’égard de Chaumont, en a beaucoup
fouffert, & a reculé fous leurs effors. réunis
ainfi que la côte de la Million qui ell au-
deffous, & à l’autre rive; par-là , s’efl
crcufé enfuite ce grand entonnoir de côtes
efcarpees & de rochers qui régnent auto
u r de Conde, 8c dans le milieu duquel
le village eft fitué , ayant au-devant de lui
les terrems dégradés , par la chute du tor- :
rent lur la cote delà Million, & derrière
lui versBretenay , les bonnes vafes qui font
reliées à i’abri de cette côte.
IX . C ell au-deffus de Villiers qu’on
peut remarquer que la Marne commence,
en quelques' endroits , à rouler fes eaux
fur le fable, & que- la bafe de la terre
des prairies ell compofée de lits continus
& généraux de fables. Depuis Langres
le fond de la vallée n’ell que roc fur
lequel la rivière coule; les prés, lorfqu’il
y en a , font .immédiatement pofés deffus,
& ils font allez bons & productifs, ayant <
immédiatement un lit de groflès pierrailles
, ou graviers à peine dégroflîs, de ia nature
des pierres du pays , & qui reffemblent
aux débris des démolitions. Il faut attribuer
le tout à la grande pente du terrein
& a ce que la vallée eft généralement
étroite ; en conféquence de ces deux
circonltances, les eaux avoientune grande
rapidité & -entrainoient tout ce qu’elles
démoliffoient & ne le dépofoient que lor fque
la pente étoit devenue:moins grande,
la vallée plus large 8c le cours moins rapide.
Dans les pays hauts, les démolitions qui
ne pouvoient venir d’affez loin pour être
réduites en gravier, y font,raflées fur les
derniers tems, parce que les eaux afioi-
blies dans leur courfe, les y ont lajfîees.
.Mais voici une objedion affez naturelle
que ceux qui ont vu le terrein peuvent
'nous faire. Si c’eft la rapidité de Gestor-
rens qui a empêché les fables de fe fixer
depuis Langres jufqu’à V illie rs, pourquoi
les vafes qui font, bien plus légères que
les fables font-qlles fi abondantes , fur-tout
dans les prairies . du côté de Langres ,
: de Vefaignes , de Foulain , &c . où ces
prairies . ont un grand fond de terres. ,
_ Pour lever cette objection , -il faut faire,
réflexion que les torrens ont dû avoir uné
diminution de force fuccelîive ; qu’ainfi
dans les tems où çes torrens étoient dans
leur plus grande force , il n’y avoit dans
j toutes ces vallées, ni amas de pierrailles,
ni de grèves, ni de vafes, tout étoit porté
& entraîné au plus loin ; que lorfque
les eaux diminuées n’ont plus eu la
force ni de démolir ces terreins , ni de
pouffer au loin les anciennes démolitions,
elles orit cependant eu la force long-
tems de charrier les vafes que les' fources
produifoient, '& celles que les pluies,
toujours confidéràbles de ces tems
amenoienc aulfi de deffus les abris des lieux
élevés , où les grandes eaux les avoient
dépôfées auparavant, & qu’enfin il y a eu
un tems où elles n’ont plus eu la force
d’emmener ces vafes & où elles les ont
abandonnées peu à p e u , comme elles
avoient peu à peu abandonné les fables,
devenus auflï trop abondans. C ’eft une
chofe certaine que les prairies fe relèvent
encore ; mais on a là-deflus des idées trop
vagues 8c trop générales ; on s’imagine
que c’eft l’ouvrage journalier des pluies
8c des orages qui ramènent fur le fond
de k prairie les terres labourables qui font j
fur les côtes & fur les pl aines fupérkiure-s de i
droite & de gauche. Cetteraifonyentrepour
quelque chofe , en certains lieux , mais
pretque pour rien en général. Ce ne font
point les terres labourables des côtes &
des-contrées latérales qui fournifîènt aux
prairies la matière dont elles fe relèvent ;
ca r, par cette raifon, dans toute la longueur
d’une grande vallée, on verroit que,
lorfque les parties fupérieures abondent
en terre , les prairies d’en bas devroient
avoir un grand fond de la même nature
de terre, & que lorfque les parties fupérieures
font fèches & pierreufes , les prairies
d’en bas devroient y avoir rapport
& être auiïi fèches & pierreufes. C ’eft ce
qui ne fe remarque pas dans le cours de
la vallée de la Marne , & ce qui né, fe
peut voir dans aucune autre vallée. Les
dépôts qui y font ne font pas l ’ouvrage
de nos pluies journalières, mais originairement
celui des anciens torrens.
La quantité de la terre des prairies a
toujours rapport à la pente de la vallée
& à fa largeur, ce qui juftifie que leur
véritable origine doit dater des tems mêmes
de la force 8c de la décadence des grandes
eaux dont elles ont été les derniers dépôts.
Quant aux accroiffemens qu’elles reçoivent
aujourd’hui , ce font las prairies de la
tête delà vallée qui les fourniffent aux
prairies inférieures ; c’eft une prairie même
qui fe détruit en un endroit pour fournir
à une autre prairie plus baffe. Le
courant aétuel de nos rivières dans les
crues d’hiver, mange le's rivages, en fait
fondre des quartiers entiers.; ces parties
de terres délayées, troublent les eaux qui
les emportent & qui les dépqfent dans
leur débordement fur les prairies inférieures,
8c même fur les terres labourables
les plus baflès qui font dans le cas d’être
fubmergées. Il fuit de ceci que ce font les
prairies fupérieures qui fourniflent toujours
aux.inférieures : il faut donc, & cela fe prépare
toits les j ours, que les prairies hautes
diminuent & difparoiffent peu à p eu , parce
qu’elles n’ont aujourd'hui d’autres moyens
' pour réparer leurs pertes , que, les vafes
de leurs propres fources , qui font à pré-
fent très-peu de chofe, & fe rapport des
pluies qui ne peut être çonfidérable. D’a-
: près ce changement futur , il faut juger
du paffé. Tant de grandes vallées 8c la
: multitude innombrable de vallons, que
: nous favons maintenant être fans, fources
& fans prairies , ont néanmoins été après
les torrens qui les ont creufés, des lieux
humides , revêtus de vafes 8c formant des
prairies femblables aux nôtres. La vie paf-
torale devait donc être alors néceflàire-
ment & plus aifée & plus commune ; la
moitié, de la terre nesfevoit former qu’une
prairie, & devo.it par-là offrir, avec une
abondance, extrême & facile , la fubfiftance
à tous fes habitans ; mais peu à peu ces
heureux dépôts ont difparu 8c leur qualité
a diminué. Les hommes, au contraire,
fe font multipliés; les;lieux bas n’ayant
plus fuffi. à leur fubfîftance, ils font devenus
laboureurs par néceflîté, en s’établif-
..fant dans les lieux hauts où les terres
étoient devenues fèches & pierreufes, par
la ceflation des fources, & par l’enlèvement
des meilleures vafes. Ce font-là de
ces variations auxquelles la terre a été
fujette dans fes différentes parties, & par
lefquelles , fuivant les progrès des âges ,
elle a montré différens fpeftacles 8c fait
changer la manière de vivre des habitans.
X . Si quelque chofe parle en faveur
du déluge d’Ogyges , à tort réputé fabuleux
par bien' des auteurs , c’eft ce que
l’on dit en avoir été la fuite. Ceux qui
en parlent, npus apprennent en même-
tems , que la Béptie inondée a , été plus
de deuxxencs. ans fans être habitée & cul-
C a