
croyaient que l’embrâfement'générai le
punfteroit feulement & changerait fa
forme fans anéantir fa matière ; ilsefpé-,
roient que dieu formeroit enfiiiteun nouveau
ciel & une nouvelle terra;, où ils
habiteroient éternellement.
Tertullien accufe Origine d’avoir admis
une infinité de mondes, non à la manière
des épicuriens, qui en reco'nnpifîbient
une infinité actuellement fubli-ftante ; mais
en fuppofant qu’ ils auroient lieu fucceflî-
veroent 8c l’un après l’autre. . Ce qu’il .y.
a de certain , c’eft qu’Origèhe paroit fup-
poferla prée'xiftence de la matière, & il
dit pofitivement que le monde ne fera-
point anéanti, & qu’il changera feulement
de forme. Théophile d’Alexandrie n’avoit
pas d’autre fentiment. Le monde finira,
d it-il, « non pas par une deftruâion to-
» taie, mais feulement par un cliange-
» ment -de’fa fqrme ; c ’eft pourquoi l’a-'
» -pôtre a dit, la ligure de ce monde paffe.
» Il n’y aura donc que la.forme où: la fi-
» gure du monde- qui palfera, & fa fubf-
» tance ne pàffera, point. »
De ce qui vient d’être-dit, concluons
que quoique les chrétiens fotttinffent qùe,
le monde avoit été tiré autrefois*durnéaïit,
ils convénoient cependant avec les payens
que jamais il ne feroit anéanti. '
le terminerai cette fuite de toutes les
opinions desj différentes fe&es de philo-
fophes grecs , fyriens,phéniciens, payens
& chrétiens, par une réflexion que cette
leduré doit infpir'er naturellement, & fur
laquelle je hé puis-trop inlîfter. C ’elt que
toutes ces opinions n’ont aucuns fonde-’
mens, & portent par-tout fur de« idees
vagues , & ie ’plus'fouvent fur l’igriorahce
de l’état des. corps naturels dont on cher-'
che l’origine. Lorfqu’on apî’habitude
d’obferver , on voit d’un coup - d’oeil
que ces hypothèfes difparoîtront à me-
fure qu’on s’attachera davantage à l ’obfer-
vation de la nature, & qu’on le fera d’après
des principes certains1. Il n’y a que l’hif-
toire naturelle de la terré rédigée d’après
,cés principes qui puifle nous débarràffep
de ce fatras d’opinions, la plupartdu temps
ridicules; c’eft auflî dans ces vues que
j’S cru devoir en donnerici un précis.- Je
fuis donc très^étonné que, dans les circonfiances
adyeltes certains écrivains aient
cru que par;,l’é,tude des,auteurs , anciens
& de leurs-’Tyftêmes, ils,, ppuvoient ré-1
pandre de grandes lumières fur1 l’état du
globe & fu r fesiévolutions ; pendant que
c’eût par le fëeours de tous les.monumeiu
qui font difperfés à la furface du globe ,
qu’on peut rationner fur les grands phénomènes
qu’il nous préfente de toutes parts.
Ici les traits de notre érudition.font dépbfés
dans le fein dè la terre, feryiroht a
démentir ceux que les écrivains nourris
d’hypothèfes ont recueillis & raffemblés
par les longs & bizarres efforts d’uiié imagination
dominante.
X V I L
Ce que les anciens ent penféde la terre, &
de leur, géographie.
Pour ce qui regarde plus particulièrement
la fttrperlieiè du globe te r r e ftr e je
veux dire là" lituation différente dès terres
& des mers, des eontiitens St des ifles , la
difficulté des voyages d’une région à l’autre,
l’art-de la navigation qui a été lOng-tems à le
perfeâionger , ont laifle les hommes qui
nous ont - précédés dans une ignqrànce
extrême fur tous ces chefs. C’efl aux derniers
fîècles que cès connoilfances étoient
.refermées. Depuis deux cehraüs nous avons
fait plus de déc'ouvertes dans -la géographie
que nos ancêtres n’avoient pu en
imaginer dans l’efpacé de 6ooo ans : &
qùoiqu’dn ri’ait pas encore porté cette
Icience à’ Ton plus haut point de perfection
, à en juger par les progrès éton-
nans qu’on y a faits en fi peu de tems,
nous pouvons nous flatter que la curio-
fité de nos voyageurs, l’habileté de nos
J pilote*
pilotes & l’application de nos aftronomes
ne laifferont d’autre foin à la pollérité
que celui de jouir du fruit de leurs travaux
& de profiter, de leurs connoif-
fiiices.
Les anciens divifoient le globe terreflre
en cinq Zones ou cinq parties comprifes
entre les deux pôles, comme nous l’avons
fait depuis. Ils donnoient à ces Zónes Icp
mêmes noms qu’elles ont de nos jours ;
mais ils en croyoient deux feulement habitées:
& que le froid excelïif ou les chaleurs
extrêmes ne permettoient pas d’habiter les
trois autres : & fans un pafiage de Géminus,
nous pourrions affiner hardimehtquec’étoit
là le fentiment général des anciens. Cet
auteur foutient que la Zone Torride n’efl
point inhabitable parce que , dit-il, on a
déjà découvert fous cette Zone des pays
où Fôn a trouvé des habitans. Pour ce
qui eft des Zones fro ide s, l’antiquité les
a toujours cru inhabitables.
On doit encore obferver que ce n’efl:
que par le raifonnement, 8c par la con-
noiffance que, les anciens avoient de la
figure fphëriqüe de laterre, qu’ils croyoient
que la ZôneTempérée méridionale pouvoir
être habitée. Ils favoient que cette
Zone étant à une même dillance de l ’E quateur
que la feptentrionale qu’ils occu-
poient, on devoit par conféquent y jouir
d’une même temt é raturé d’air ; d’où ils
concluoie.nt que l’une de ces Zones étant
habitée , l’autre pouvoit l ’être de même.
Du ref iei ls n’avoient aucune certitude
qu’elle le fû t, & ce n’étoit que par con-
jeâure & par yraifemblance qu’ils étoient
dans cette opinion ; car il eft confiant
que jamais les anciens n’ont eu aucune
coitnoiüànce des pays limés au-delà de la
ligne. Ils n’avoient aucun commerce avec
les habitait- de ces pays , 8c ne penfoient
pas même qu’il fût pofiîble d’en avoir
aucun. « Lorfque nous parlons , dit
* Géminus , des habitans de la terre
* auftrale , ce n’eft pas comme affûtant
Geographie-P hyjique. Tenu I .
' » certainement que cette Zone foit habitée,
# nous fuppofons feulement qu’elle peut
» l’être. C ar jamais nous n’avons rien
» appris touchant cette Zone ».
Pline parlant des Zones Tempérées dit
qu’elles font inacceflïbles l’une' à l’autre à
caufe de la chaleur du foleil qui brûle
celle dont elles font féparées. Macrobe
enfin s’étendant davantage fur, ce fujet,
afliire que les habitans de ces deux Zones
Tempérées n’ont jamais eu de'commerce
enfembie, & qu’il eft même impoffibie
qu’elles en aient aucun à caufe des chaleurs
exceffives de celle qui les diyife.
Outre les ardeurs brûlantes du fo le il,
les anciens avoient encore une autre rai-
fon de croire que-ces deux Zones étoient
inacceflïbles l’une à l ’autre. Ils étoient
perfuadés que l’Océan environnoit toute
la terre , & que s’étendant fous la ligne
de l’Occident à l ’Orient, il partageoiten
deux le globe terreftre, divifam aïnfi les
deux Zones Tempérées. Saint Clément
appelle les pays fitués fous la Zone Tempérée
auftrale , les mondes qui font au-
delà de l’Océan. Origènes dit à ce fujet,
que Saint Clément a fait mention de ceux
que les grecs nomment Antichtones qui
habitent un endroit de la terre entre lequel 8c celui que nous occupons , il ne peut
y avoir de communication. Saint Augustin
confondant les Antichtones avec les
Antipodes, étoit fi perfuadé que les deux
Zones Tempérées étoient incommunicables
entr’elles, qu’il foutenoit que la Zone
Auftrale n’étoit point habitée, parce que
les hommes,qui l ’occuperoient ne feroient
pas defeendtis d’Adam. Car , dit cet ancien
p è re , il eft. abfurde de croire qu’on ait
pu traverfer l’Océan. Les ftoïciens de leur
côté donnoient une raifon phyfîq.ue de ce
que l’Océans’etendoitainfifous l ’Equateur;
car comme ces philofophes s’imaginoient
que le feu des affres fe nourriffoit des
vapeurs 8c des exhalaifons de la terre ,
c’étoit pour cette raifon que l’Océan *’é