vient à fé oreiller des canaux fouterrains,
fuivis , continus, & qui ont des débouchés
., ou dans la partie inférieure du
canal de la rivière , ou allez loin du canal
par les fources. Enfin, les pierres dures
qui font allez folides pour former des
voûtes dans toute l’étendue de ces canaux
fouterrains, s’affaiffent dans d’autres parties
où elles ont moins de folidité ; &
ces éboulemens forment des entonnoirs
par où l ’eau des rivières gagne fenfible-
ment les canaux fouterrains , . & qui en
font proprement les orifices. Il ne fuffit
pas que ces canaux fouterrains aient une
capacité allez grande pour recevoir l’eau
que leur fournit le courant de la rivière,
qui fe perd par les entonnoirs., il faut
auffi qu’ils puillent verfer l’eau à mefure
qu’ils la reçoivent. Il eft donc néceiTaire
que ces rivières-qui fe perdent, continuent
à couler intérieurement en malle, réunie ,
ou en filets diyifés ; car fî.les. cauaux fouterrains
pouvoient fe. remplir, l’eau refluerait
par les entonnoirs, & le courant des rivières
n’éprouveroit plus de diminution :
au lieu que les entonnoirs , dans l ’état ordinaire
des choies,, continuent toujours à
abforbër l’eau de la même manière.
Cependant, lorfque- ces rivières éprouvent
des crues confidérabies après des pluies
abondantes , elles ne font pas pour .lors
abforbées en entier par les entonnoirs, &
le courant qui garnit leur lit eft la partie de
l’eau furabondante à celle que les entonnoirs
abforbent.
Comme la perte des rivières eft dépendante
des canaux fouterrains, dont nous
avons indiqué la formation, - il :eft vifibie
que.,, -fuivant les circonftanc.es. favorables à
leur ouverture ou à leur obftrudion , il
pourra fe faire qu’une rivière qui ne fe perd
point, commence à fe perdre en partie :
que celle, qui feperdoit en .partie , fe perde
en entier : que celle qui-fe perdoit , celle
de fe perdre , fuivant que l’eau abforbée
aura ou n’aura pas d’écoulement fu iv i, &
des débouchés continus par les canaux fouterrains.
Enfin comme le fol doit être de nature à
fe prêter au travail de l’eau qui fe creufe à
elle-même des canaux fouterrains, il eft
évident que les rivières ne fe perdent que
dans des cantons particuliers où ce fol
régne. C ’eftpour cette raifon qu’on trouve
plùfieurs rivières qui fe perdent dans des
aronmflêmens particuliers , & dans la
même partie correfpondante de leur cours.
C ’eft ainfî qu’on a trouvé en Normandie
quatre rivières qui fe perdent ; lavoir : la
Riiie , l’I to n , l’Aure , la rivière de Sap-
André , & quelques ruiifeaux voifins dans
un efpace qui n’a pas plus de quinze à
vingt lieues d’étendue. En Lorraine , la
Meufe fe perd i ’efpace d’une lieue & demie
au-delfus de Neufchâteau , & reparaît fans
aucune diminution après avoir coulé par
des iflùes fo.uteiraines : à l’Eft de Neufchâteau
, la rivière de Vichery fe perd ,1’efpace
de trois lieues : à l’Oueft de Neufchâteau ,
on trouve les rivières de la Fauche & de
V éfaigne qui difparoifferit de même , ainfî
que les ruiifeaux d’Ecot & de Clinchamp :
enfin un peu plus loin , trois ruiifeaux qui
ont leurs débouchés dans la Marne, au-
delfus de Bologne , fe perdent auffi. On
compte fept ruiifeaux & quatre rivières qui
coulent par des canaux fouterrains, dans
un efpace de neuf lieues de longueur .fur
trois de largeur. De même en Angoumois,
aux-environs de la Rochefoucauld, le Ban-
ci iat , le Tardoire &, la Ligonne, difpa-
roilfent par des entonnoirs difperfés dans
une étendue de trois lieues , le long de
leurs canaux. On trouve le même phénomène
du côté de RufFec, dans la même
contrées.
Le fol de. tous ces différeras cantons fe
reffcmble fîngulièrement : par-tout l’eau a
pu s’ouvrir entre les bancs de pierres , des
iffues & des paffages continus , & enfin des
canaux fouterrains par l’enlèyement des
couches de terres marneufes aifées à dés
layer : les lits de pierres folides paroiffent
propres à former des voûtes & à foutenir le
poids des matières furincombantes dans la
plus, grande partie de ces canaux : & enfin
les larges fentes qui s’y trouvent en certains
endroits , ont favorifé ces éboule-
meliî & ces afiaiffemens allez fréquens, qui
ont ouvert les entonnoirs, qu’on doit,
ainfî que nous l’avons dit ci-delfus, regarder
comme les orifices des canaux fouterrains.
Telles font les circonftances qui concourent
à la difparition & à la réapparition
des'rivières dans les pays de pierres calcaires,
où fe trouvent les couches hori-
fontales. Nous ajouterons ici un exemple
tiré d’un canton à couches inclinées, & où
l’on pourra reconnoîtreà-peu-prèsla même
marche ; c’eft de la perte du Rhône que
je veux parler. On avoit annoncé la perte
de cette rivière comme une Angularité étonnante
: mais rien de plus limpie que ce
phénomène. L é Rhône difparoît fous des
couches de rochers, qui traverfent fon canal
, & qui font inclinées dans le fens du lit
de ce fleuve. L ’extrémité inférieure de ces
couches inclinées, a été mife à découvert
par le confluent d’une rivière qui fe jette
dans le Rhône un peu au-deffous de l’endroit
où ce fleuve reparaît. Les eaux de ce
fleuve, en creufant fon l i t , ont trouvé dans
cette partie des couches de pierres dures &
de terre; elles ont détrempé les terres, &
fefont ouvert par-deffous les couches de
pierres dures, une iflue & un paffage qui
a été déterminé par le débouché favorable
dont j’ai parlé, Comme ce travail de l’eau
a eu des progrès , elle s’eft ouvert plufîeurs
paffages à différentes hauteurs, fuivant que
les couches de rochers qu’elle entamoit,
ont favorifé fes excavations. Ainfî lorfque
les eaux du Rhône font baffes , elles difpa-
roiffent vers le pont de Lucey ; & les premières
ouvertures fuffifent pour abforbër
abforbent l’eau qui parvient jufqu’à elles ;
mais lorfque le Rhône éprouve des crues
confidérabies par i’A rv e , il recouvre les
voûtes qui le- cachent dans les deux premières
le volume de ieau ; les ouvertures fupé-
rreuresfont pour lors à découvert. Dans les
moyennes eaux, ces ouvertures fupérieures 1
circonftances.
Sénèque ne diflingue ici que deux chiffes
de rivières qui perdent leurs eaux : les unes
difparoiffent tout-à-coup pour toujours ;
les autres fe perdent peu-à-peu & reprennent
leur nom & leur cours. Les obferva-
tions que les modernes ont faites, les ont
mis à portée de modifier ces diftindions ,
qui ne font applicables que dans certains
cas j ainfî on auroit tort-en généralifant la
diftinclion de Sénèque, de croire que les
rivières qui difparoiffent tout-à-coup ne re
paroiffent plus, ou que celles qui fe perdent
peu - à - peu , reparoiffent toujours. On
trouve les plus grandes variétés dans toutes
’ les circonftances qui accompagnent ce phénomène
; mais en général il fenible que ces
rivières qui ne reparoiffent plus dans le
même canal, fourniffent l’eau de plufîeurs
fources abondantes qui donnent naiffance
à une nouvelle rivière, laquelle n’a plus le
même nom, ni la mêrne diredion. C ’eft
ainfî qu’en Angoumois le Bandiat fournit
les eaux de la Touvre qui fe trouve tout-a-
coup une grande rivière de foixante toifes
de largeur, & dont le cours n ’eft que d’une
lieue & demie. On pourra retrouver de
même les eaux des rivières qui fe perdent,
fi on fuit la correfpondance des niveaux, &
la trace de la marche des eaux fouterraines
par les entonnoirs. Noyes^ l’article Rivières
qui fe perdent, dans le didionnaire.
X I.
S i K 8 Q U I .
Des crues du Nil.
Je me propofe de traiter un fujet important,
c’eft la queflion pourquoi le Nil fe
déborde pendant les mois d’eté : quelques