
car elle dépend, comme on l ’a dît, de la
réfiftance qu’un fleuve a trouvé a rongei
les parties d’une telle colline à caufe de la
racine '-d’une montagne primitive qui lui -
fert de bâfe, parce qu’elle a été enfevelie
fous elle. Ces racines compofées de filons
& de malfes compaflès, ont réfifté a la
coupure des eaux beaucoup plus que n’a
-pu le faire le terrein meuble des collines;
& femblabies à des éperons , ces racines
ont obligé les courans des fleuves à former
un détour, & à prendre unéautre dirrffion
enliqne droite , qu’ils ont fuirie tant-qu ils
li’oiiL plus trouvé de pareils obflaCies qui
les ont obligés à décrire une autre ligne
courbe, & à fe replier dans une direflion.
toute oppofée. L ’infpeâion des canaux des
fleuves dans les vais que nous avons indiqués,
démontre mieux ces vérités que tout
autre raflbnn'auent qu’on pourroit ajouter
à ces détails.
Nous ferons remarquer que nous n’entendons
parler ici que des canaux des
fleuves qui ont une pente affez confidë-
rable, A qui le font ouvert une route à
la mer à travers les coupures des collines j
car les fleuves qui coulent au milieu d’une
plaine (pacieufeferpentent, nonpar la réiif-
tancé du terrein au milieu duquel ils
marchent; mais parce qu’ils ont rencontré
plufîeurs obftacles , foit dans les dépôts
voifîns de leurs embouchures, fpir dans
la confluence d’un fleuve plus confîdé-
rable. Car en plufîeurs circonflances les
eaux qui viennent de parties élevées ne
peuvent déboucher à mefure qu’elles arrivent;
& par conféquent il eft ncceffaire
qu’une partie de ces eaux fe difperfe dans
les plaines, comme on le voit dans le cours
tortueux de l’À rn o , au milieu de la plaine
de Pife.
En récapitulant ce qui a été dit jufqu ici,
on voit queies canaux des fleuves ont ete excavés
à travers les montagnes primitives &
les collines, depuis le temps que la terre
a été découverte par la retraite de la mer :
d’où l’on doit conclure que la propofltkm
générale, que les vallons & les canaux j
des rivières ont ete excaves par les courans
de la mer, lorfqu’elle recouvroit
la furface de la terre , ne. peut fubfifler.
Ce principe général étant une fois dé-
montré.faux , la théorie de la formation
des montagnes & des collines propofée par
M-uttré Buffon, fe trouve totalement
détruite. 11 eft certain que dans la mer moderne
il y a beaucoup de courans & de
très-rapides. Il eft aufli très-avéré que ces
courans changent de direAion& de vi telle
félon la direétion & les contours des inégalités
qui fe trouvent dans le lit de la mer;
mais il ne s’enliiit pas que ces courans fe
foient excavé un lit fembiable a celui des
fleuves. D’ailleurs, il n’eft pas prouvé que
tous ces courans foient modifiés ainli
qu’ils le font, par le fond de la mer. -Car
fi le fond de la mer offre une plaine uniforme,
il ne peut ÿ avoir de courans en
aucune forte produits par ce fond. Si donc
il y a des courans & qu’ils foient occa-
fîonnés par les inégalités du fond de la
mer , on ne peut pas dire que ces inégalités
aient été dans les premiers temps formées
par ces courans ; & enfin que ces inégalités
reflemblent en aucune maniéré aux
vallées qui fillonnent la liirface de nos con-
tinens. Il y a d’ailleurs beaucoup de courans
qui ne font que fuperfîciels & feulement
occafîonnéi par le flux & reflux,
ou par des mouvement femblabies, & par
conféquent ils n’ont rien de commun avec
le fond de la mer. Voye^ dans le diflion •
naire les articles courans , vallées, &c.
§, I I I .
Réflexions fur l'ouverture du détroit de U
Golfoline,
Jufqu’à préfent, j’ai préfentc un précis ds
ce que Targioni a écrit fur l’approfondif-
fement des canaux des fleuves, lorfque le*
eaux courantes a’ont pas., félon lu i , re«r
contré d’obftacles locaux & infurmon-
tables dans les trajets qu’elles ont parcourus.
Maintenant pour donner une idée
complette de toute fa doflrine à ce fujet, je
vais y joindre ce qu’il penfoit fur l’ouverture
des digues qu’il a fuppofées dans certains
.détroits des vallées, & fur-tout dans
celui de la Golfoline , qu’offre la. grande
vallée de l’Arno affez près de Florence.
Il eft ,aifé de voir que l’efearpement de
la montagne à’Artimino efl fembiable poulie
nombre & la direflion des couches & .la
nature de la pierre, à ce que nous offre, ia
coupe delà Golfoline , qui eft de l’autre
côté oppofé du lit de l’Arno. D ’où on
peut-être tenté de croire que dans des
temps reculés ces maflîfs étoient u n is ,&
qu’ils formoient une digue par - deffus
laquelle les eaux de l’Arno s’épanchoient,
après avoir fait un lac dans la plaine de
Florence. Il n’efl plus queftion, fuivant
cette fuppefîtkm, que d’expliquer la manière
dont ces deux montagnes ont été.
coupées, & dont l’eau eft parvenue à fe faire
jour àttravers cette.digue. Targioni co'u-
fidère d’abord qu’en fuppofànt cette digue,
les eaux de l’Arno & de l’Ombrone, après
leur réunion , ont dû s’élever jufqu’au
niveau de cette chauffée naturelle, & qu ’en
ralentilfant leur mouvement & s’étendant
dans -toüte la large plaine où efl placée la
ville de Florence , elles y ont dépofé la
plus ƒ grande partie de la terre dont elles
étoient chargées ; qu’enfin elles fe font élevées
.jufqu’à ce qu’elles aient pu franchir
la digue. Cette digue étoit le dos d’un
fomrnet alongé 8c d’une malle telle qu’on
la voit encore dans, la partie la plus baffe
de la vallée. Ce fomrnet pouvoit même
etre an peu abaiffé comme on le reconnaît
aux deux avances oppo-fëes de la Golfoline
& d’Artimino. Ces eaux parvenues à la
hauteur de la digue, & palfant d’un canal
très lange à. un débouché fort étroit, ont
dit acquérir une très-grande vîtelfe , & en.
ooniéquence de cette énergie, il eft très-
«oyabie que dans le cou rs de p uffeurs fièclps
elles -aient entièrement enlevé ia digue
& fe foient creufé un canal plus profond
& plus large ,, en un m o t, comme celui
qu’on; nomme le détroit de la Golfoline.
Celte- d.eftruélion & cette excavation ont
dû. fe continuer jufqu’à. ce que l’eau ait
perdu toute l’énergie que lui imprimoit fa
chûte , c’eft-à-dire julqu’à ce que le fond
du canal fût de niveau à la-plaine d’Empoli
& à celle de Florence, ou ce qui eft
la même chofe., jufqu’à ce que le cou-
; tant de l’Avno fût au même, état où il fe
1 trou ve maintenant,Si au travail de l’eau l’on
réunit ce que dans la fuite des ficelés les
travaux des hommes ont pu faire, & fi l’on
calcule la pente confidérabie de 1 Vau ds
l’Arno, dans le trajet.de la plaine de Fio-
jrence, Targioni croit qu’on donnera une
(grande force à fa conjeflure; enforte , qu jl
;en réfulteroit que cette ouverture de la
Golfoline peu à peu élargie & approfondie,'
l’-eati qui autrefois étoit obligée de
I s’arrêter dans la plaine de Florence s’tfl
' écoulée, & qu’elle, a entraîné avec elle
tous les fedimeps qu’elle y avoir dépofé s
ien .couches faorifontalps, Ceux .qui ont
; obfervé avec quelle impétuofité. les. eaux
d’un p etit torrent rompent & emportent
avec elles des piaffes de pierres énormes ,
& parviennent à .excaver des montagnes
compofées de couches très - épaiffes ,- ns
(taxeront pas de témérité cette conjecture.
I l eft vrai qu’on pourroit faire quelques
objeflions contre cette hypo.thèfe ; qu’on
pourroit. d’abord oppofer plufîeurs esta- ,
rafles comme celles du Rhin', du Nil , de
i’Adige& du Téveronei, qui fe font maintenues
contre les efforts .de l'eau depuis
très-long-tæmps fans avoir été ainfi enlevées
, & prétendre que la digue de la Golfoline
n’a pu être entamée comme ou l ’a
fuppofé ci-devant. Targioni penfeque les
circonflances font bien différentes. Les
catarafles des fleuves dont il efl queftion,
doivent être, félon lui, confidéréej
comme le glacis naturel d’un moulin. Ces