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§ V.
Sur toutes Us cirdonfiànces qui ont concouru
à la génération des montagnes primitives.
Avec ces idées préliminaires , Walle-
rius fe prépare à expliquer la génération
des montagnes. Lorfqu’on en fait l’exa-,
men , on trouve qu’elles font compofées
de maffes pierreufes énormes , fouvent de
différente nature , foit en les prenant fur
la longueur , foit en les prenant auffi fur
la largeur des bancs, foit enfin en les
fuivant fur leurs faces extérieures & apparentes
, foit fur les parties les plus profondes
vers lefquelles on ait pu pénétrer.
On peur citer des exemples remarquables,
dans une chaîne de montagnes qui a quelques
milles fuédois d’étendue ; on voit
quelquefois le fommetcom pofé d’une pierre
calcaire, un peu plus loin le fommet eft
formé d’un granitblanchâtre ou rougeâtre :
ailleurs le fommet offre une pierre fabion-
nsufè , & enfin, il finit par une mâffe
de porphyre & ainfi defuité : & chacune
de ces matières occupe à la tête de cette
chaîne une étendue plus ou moins con-
fidérabie. Ces différentes natures de pierres
paroilfent fort étroitement unies. Quelquefois
mêmes différentes fortes de roches
ou de pierres font entièrement enchaffées
dans d’autres fous la forme de rognons
.plus ou moins volumineux : & il n’efl
pas rare d’obférver ces phénomènes dans
des montagnes calcaires primitives , lorl-
qu’on fe fert de poudre à canon pour les
miner. Souvent auffi on trouve une mon-
tagnecompofée d’une forte de matériaux qui
font divifés & féparés par une pierre la-
melleufe . laquelle forme des bandes perpendiculaires
à l’horifon ou même plus
ou moins obliques. La. roche’ de corne
fchifletife & quelques autres pierres de
rcche, &c. font ordinairement arrangées
de cette manière.
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Si l’on fuit l’examen des montagnes, on voit
ici une nature de pierre poféefur une autre,
de telle forte que ces malles paroiffent coivt-
pofées de couches fort épaifïes & dilpolées
horilontalement. Là, on rencontre différentes
pierres placées latéralement les unes à
côté des autres. Mais qui pôurroit décrire
toutes les formes variées que préfente la
ftruâure extérieure & intérieure des montagnes
? Elles font en plus grand nombre
qu’on ne le croit communément.
Toutes ces bifarrèries de phénomènes (ont
beaucou Dpfus multipliées qu’on ne le
penfe. En faveur de ceux qui n’ont pas
eu occafipn d’obferver avec exââuude
l’enchaînement intérieur ou extérieur des
montagnes, Wallerius ajoute une coni-
paraifon qui achèvera de leur faire comprendre
la ftruâure de ces maffes étonnantes
; elles reffemblent dans leur étendue
& leur intérieur à un marbre brèche
greffier, préfentant un affembiage de malfes
très-variées quant à la couleur & a la
nature des matières. Ici ces maffes affectent
une figure plus ou moins ondulée ;
là eilès en offrent une autre. , fuivant
la nature de chaque pierre qui s’y
trouve réunie.
De plus, & ceci mérite la plus grande
attention, ces mafl’es variées dans les montagnes
où les matières dont elles , font
formées ne tiennent pas feulement les
unes aux autres par agglutination , car on
n’apperçoîf pas la ligne de contaâ qui les
fépare • mais elles font tellement mêlées,
qu’une roche fernble fe changer infenfible-
ment & par degrés’dans une autre roche ;
ce font ces nuances infenfîbles. qui trompent
les obfcrvateurs lorfqu’ils croient
qu’une pierre de fable peut devenir un
jafpe. Leur mélange elt fi intime qu’il' le
fait même Remarquer au point de contact,
lorfqu’on a lieu dé les y r o m p r e pour, en
faire la' féparation.
Telle eff en abrégé la defcription fidelle
& la forme extérieure & intérieure dés montagnes
fuédoifes feptentriouales -, comme
nous l’a tracée Wallérius. Il eft porté ,
à croire que ces formes leur font communes
avec les autres montagnes de la
terre. On en doutera d’autant moins que
les dernières obfervations de Pallas. favo-
rifent, fuivant lui., cette opinion. Pallas
a remarqué que les chaînes de montagnes
de ia Ruffie Afiatlqus étoient- compofées
de granit ; or, le granit fe reffembie partout
& les voyageurs n’ont pas décou-,
vert une nouvelle nature de roche ou de
pierre. Il faut l’avouer , quoiqu’on
manque d’obfervations, exaétes iur plufieurs
contrées, & qu’on doive regarder comme
bien incomplètes celles des voyageurs qui
n’étoient pas minéralogilles. Cependant fi
on les rejette, ce ne peut être qu’à caufe
d’une nomenclature fautive , quoique^ la
confufion des noms ne faffe. fouvent rien
à la chofe. Si l’on obferve partout les
mêmes genres de pierrë que dans le Nord,
ce que.prouve allez la préfence des quartz,
des granits, des roches de corne dans
tous lès lieux de la terre, Wallerius penfe
que la ftruâure des différentes montagnes
primitives où l’on rencontre ces matières,
ell néceffairement la même.
En réfléchiffant fur toutes ces obfervations,
voici l’idée qu’on fe forme de la
génération des montagnes, elles font corn
pofées de maffes coagulées ou concrètes ,
d’une grandeur énorme, féparées l’une de
l’autre, qui ont nagé dans l’eau, molles
& prefques fluides , & fe font enfuite précipitées
& accumulées. Le mouvement
de rotation du globe couvert d’eau , autour
de fon axe , a dû entaffer confufément ces
maffes prefqùè ’ fluides qui en faifoient
partie & y étoient renfermées : elles ont
donc dû prendre les formes qu’on a décrites.
L’endurciffement des corps folides qui
préfuppofe l’état de molielfe ou de fluidité
confirme cette opinion; les différentes
manières dont on a dit ci-deüùs que
les folides étoient produits, attellent également
cette fluidité antérieure. En effet,
°n a dit que la coagulation ne pouvoit
avoir lieu que dans une matière fluide
& que la concrétion préfuppofoit I approximation
& le mouvement des particules
élémentaires , ce qui n’eft encore poffible
que dans un fluide. Enfin, ces petites
maffes pierreufes entièrement renfermées
dans des rochers d’une autre nature, ache-
.; vent de rendre cette opinion très yraifem-
blabie, puifque , fuivant Sténon, elles
n’ont pu être inférées que dans des maffes
fluides ou molles.
L’éminence & les protubérances latérales
des montagnes que l’on apperçoit
; dé tous côtés, prouvent-elles autre chofe
: que la compreffion & la dilatation de la
inaffe inférieure & molle, occafîonnée
par.la malle fupérieure , fituarion qu’elles
I ont confervée en acquérant de la dureté ?
Les folides feraient-ils fufceptiblès d’une
compreffion & d’une dilatation fembiable ?
On peut en dire autant des rochers d’ag-
grégaiioû , c’eft- à-dire des montagnes formées
de fragrnens plus ou moins grands,
plus ou moins ovales, à angles ulës &
abattus par le frottement, telles qu’on en
voità Quedlîn en Norwege , à Porlfîalletj
en Suède , &c. Onnefauroitdouter queces
fragrnens n’aient été d’une confîftance
molle & qu’on ne doive attribuer leur
brifure à des maffes encore plus moiles;
c’eft ce qu’on peut conclure non-feulement
de leur figure arrondie que, luivantWallerius
, iis n’ont pu acquérir après s’être
: endurcis, mais encore de leur forme appla-
tie & comprimée à une profondeur proportionnée
à ia maffe dont ils ont été
preflês. Ils ont pu être brifés ou lors de
la précipitation ou lors du mouvement
des eaux , comme jon le dira ci-après. Il
ne s’enfuit pas pour cela que l’origine de
tous les rochers aggrégés foit la même.
Ceux dont les fragrnens ne font ni aron-
dis , ni comprimés , & dont les angles ne
font point ufés, ont probablement été brifés
dans le teins du delfechement & fe
font enfuite raffemblés & agglutinés.
i Si l’on fe rappelle maintenant ce que
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