
R o m é .
N OT ICE de fon Ouvrage fu r la char
leur du globe de la Terre,
Je préfente ici le travail de ce phyficien
fur la chaleur du globe , parce qu’on y j
trouve ralfemblé tout ce qu’ont écrit fur i
les différentes caufes de cette chaleur, plu- i
fieurs écrivains célèbres , avec fes répon- !
fes , qui renferment la difcuffion de leurs |
opinions. Gn y voit le précis de ce que
Bailly a publié en faveur des fyftêmes de
Mairan & de Buffon, Ces deux phyficiens
y parlent auffi quelquefois , & font valoir
leurs hypothèfes par tous les moyens que
leur fournilfent les faits qu’ils ont interprétés
à leur manière , & même par des
calculs qui femblent avoir donné une certaine
forme févère à cette difcuffion. Romé
vient au milieu de tous ces raifonnemens
leur oppofer des faits fimples avec une
grande modération & beaucoup d’intelligence
: enforte que l’on trouve d'ans cet
ouvrage les pièces de ce grand procès ,
£c tout ce qui peut déterminer un homme
iaftruit à prendre un parti dans cette quef-
tion importante.
Sans entrer dans la difcuffion des conséquences
ultérieures que Buflon & Bailly
pnt prétendu tirer du feu central, relativement
à la théorie de la terre ou à fa population
> Qn examine ici les faits qui peuvent
fervir de bâfe à cette hypothèfe ; &
comme ces faits ont été très-élégamment
expofés par Bailly dans fes Lettres à Voltaire
fur l'origine des fciences Lt arts 8c fur
\'Atlantide, on fuit pas à pas cet écrivain
dans l’expofition de ces faits.
Il me femble qu?on eft parvenu à faire
voir qu’il n’eft aucun de ces faits qui puifle
faire admettre comme une vérité fondamentale
un paradoxe auffi étrange que
celui-ci. La chaleur qui s'échappe de l'intérieur
de la terre , efl dans notre climat
au moins vingt-neuf fois en été O quatre
cens fois en hiver 7 plus grande que. la chaleur
qui mus vient du folàil. B uF F . Intro-
duét. à l’hift. des minéraux. Part. I.
On examine enfuite ce qui a pu conduire
Mairan , 8ç les phyficiens qui l ’ont
fu iv i, à une conclulian lî contraire aux
notions communes ; & l’on s’attache, à
montrer que.-la-première çaufe, dq.çèttç
méprife vient de ce que , dans l’évaluation
de la malle de chaleur produite à la fur-
face du globe par la préfence du fo le il,
on n’a pas eu égard à l 'évaporation &
aux autres météores qui modifient fans
çeffe cette chaleur , fait en plus.foit en
moins ; 8c qu’ainli i’on a fuppôfê que la
chaleur de l’été , de même que celle de
l’hiver, était toujours proportionnelle à
l ’aétionplus ou moins direfle & plus ou
moins prolongée du foleil dans nos climats
: tandis que dans le fait cette chaleur
eft continuellement tempérée ou augmentée
par les météores , & par l’état
plus ou moins humide & plus ou moins
chargé de forêts des contrées où les rayons
folaires exercent leur adion.
La fécondé caufe de l’erreur qu’on impute
à Mairan , v ien t, à ce qu’il paroit ^
par les difcuffions de Romé , de ce que
cet académicien a regardé comme une chaleur
réelle les io oq degrés de chaleur au-
deflous du point de congélation qu’il fait
entrer dans fon calcul ; tandis que ces
ioqo degrés de chaleur ne peuvent nous
être fenfibles que comme degrés de froid,
& ne font en effet qu’une diminution prqi
greffive de mouvement ; diminution qui
pe peut arriver jufqu’au froid abfolu qui
n ’exifte pas dans la nature , & dont par
conféquent le terme me peut être affigné,
ni entrer comme, élément dans aucun calcul
relatif à la chaleur aduelle du globe.
On paffe enfuite après cette difcuffion aux
preuves tirées des faits, par lefquelles on
s ’attache à établir :
i ° . Que la chaleur intérieure 8c particulière
du globe à quelque profondeur
qu’on parvienne,'n’excède jamais le degré
de la température des caves de POb-
fervatoire.
2°. Que l’adiori de cette chaleur eft
nulle à la furface , & conféquemment ,
que celle que nous y éprouvons ne peut
provenir d’ailleurs que de l’adion du foleil
fur notre atmofphère 8c fur tous les
corps fublunaires.
3 °. Que la différence effedive de 32 degrés
que nous donne l’obfervation entre
la plus grande chaleur de l’été & le plus
grand froid de l’hiver, eft très réelle pour
lès animaux & les végétaux ; mais bien inferieure
à celle qu’on devroit éprouver ,
fi la maffe de chaleur produite par la pré-'
fence fucceffiv.e du foleil fur différents
points du globe , n’étoit continuellement
amortie & tempérée par l'évaporation qui
l’accompagne.
4 ° . Que toute chaleur qui dans l’intérieur
du globe excède le terme de 10 degrés
au deffus de z é ro , eft le produit de
quelques circonftances dépendantes des
agens chimiques ou de la fermentation, &
de l’inflammation des couches pyriteufes 8c bitumineufes, par le concours de l ’air
& de l’eau qui s’y font introduits au
moyen desiflites ouvertes depuis la furface
de la terre.
J®. Que fans le concours de ces agens
extérieurs les maffes pyriteufes ne pouvant
point entrer en décompofition, elles con-
ferveroient le degré de température propre
au g lob e, de même que tout ce qui fe
rencontre fous terre hors de la portée des
rayons folaires.
Enfin Romé conclut que c’eft avec rai-
fon que tous les hommes s ’accordent à regarder
le foleil comme la fource de la chaleur
& de la vie à la fuperficie du glob»
qu’ils habitent.
Quant à ce qui concerne la température
inhérente au g lo b e , n’eft-il pas naturel
de fuppofer que le fond de chaleur dont
jouit la terre à fa furface eft le réfultat des
différents degrés qu’il peut avoir acquis
par l’adion fucceffive du foleil , 8c qui
Te font accumulés pendant la fuite des fiè-
cles qui ont précédé , autant que la denfité
du globe le comportoit, ainfi que l ’énergie
des rayons folaires : de forte que le globe
ayant une fois acquis ce fond de chaleur, il
n ’a pas dû augmenter piar celle de nos étés,
ni diminuer par le froid de nos hivers. Il
eft naturel de croire que ce fond de chaleur,
a été une longue fuite de liècles à fe former:
mais une fois bien établi, il a dû fe répandre
uniformément dans toutea les parties J
& c’eft de cette diftribution uniforme que
réfulte cette égalité alfez confiante de nos
étés & de nos hivers d’une année à l’autre.
Cette provifion de chaleur acquife , & le
concours des circonftances qui y ont coopéré,
rie rentrent nullement dans l’hypothè-
fe de Buffon, ni dans celle de Mairan &
de leur copifte Bailly.
Leglobe a été expofé à l’adion des rayons
folaires depuis, que le fyftême planétaire
exifte ; il a donc dû prendre. une certaine
température mèfurée par cette adion.
Ainfi le mouvement de la terre autour du
foleil , & fa diftance à eet aftre étant donnés
, on a l’énergie de la chaleur du foleil ;
l’on peut en apprécier les effets , & parvenir
même à une certaine précifion fur cet