
tous ou de Barkol & ' la Mongalïe ,
remplit celle-ci de rochers & de hautes
montagnes, fépare fous le nom changé
de Kinghan les eaux de l ’Amur d’avec
celles du Hoangho ou fleuve jaune , &
finit enfin par la chaîne qui forme la
Corée ainfi que les écueils & les Ifles
fituées aux environs du Japon.
La quatrième chaîne enfin & fa continuation
principale , eft celle qu’on con-
noît proprement fous le nom d’Altai &
qui garnit la frontière de Sibérie depuis
Flrdch jufqu’au fleuve Amur. Sa plus
grande élévation efl hors de la domination
ruffe ; elle court d’abord depuis
la haute montagne du Boghdo, palfe au
delfus des fources de l’I rtich , & s ’avance
par une fuite de montagnes couvertes de
neige dont les flancs font fort efcarpés
& pleins de gros débris-, entre l’Irtich
& l’O b y : c’efi là où les montagnes
fchifieufes du fécond ordre qui l’environnent
& qui font percées par des
noyaux graniteux , forment le département
des mines le plus important de
l’empire Ruffe ; c’efl de-là que la grande
chaîne va fe rendre au lac Telezkoi d’où
le fleuve O b y prend fa fouree, en réunifiant
en même tems plufieurs torrens
& rivières qui viennent fe jetter dans ce
tronc principal. Cette chaîne femble
enfuite s’éloigner pour embraffer & réunir
dans une vafte enceinte ou baflin les
grandes rivières qui forment le Jenifeï &
qui font toutes enfermées dans cette ceinture
de malles élevées qui y prennent le
nom de Saiannes , & qui continuent fans
la moindre interruption vers le lac Baï-
Ical. Quoique ce premier rang de montagnes
granitiques dont on vient de rapporter
la fuite, foit extrêmement élevé ,
même au point que la cime & la croupe
de quelques unes s’élèvent jufqu’à la
région des nuages, l’on voit cependant
par le cours des rivières qui compofent
le Jenifeï & le Selanga, que le plan général
du terrein va en hauffant au-delà
de cette chaîne : & il fe trouve effectivement
au delfus des feurces de ces rivières ,
outre l’élévation générale du terrein $ une
chaîne plus haute, parallèle à la première
qui provient de la réunion d’une branche
principale de Kanghai, & va fe jetter
en partie entre les fources du Tchikoi &
des fleuves qui forment le fyfième des
eaux de l’Am u r , d’où s’unifiant au prolongement
de la première branche qui
environne le lac Baikàl, elle forme la
dernière continuation de cette puilfante
chaîne quî parcourt l’extrémité orientale
de l’Afie , & qu’on fera connoître après
avoir conlîdéré l’efpace qui' fe trouve
entre les grandes chaînes dont nous venons
de parler , & les hautes Alpes du Thibet.
Par les rapports des voyageurs, ‘fur-
tout de ceux qui ont fouvent accompagné
les caravannes Ruffes dellinées pour
Pékin , il eft hors de doute que cet
immenfe défert, qui s’étend depuis les
confins du Thibet jufqu’aux frontières
de Nerchinsk fous le nom de Gobée ou
de Cha-mo , n’eft véritablement qu’un plateau
des plus élevés, auquel nous ne eon-
noifions que la feule plaine de Quito de
comparable ; une grande partie des plaines
de la Mongalie entre la chaîne altaïque
& celle de Khanghai, de même que les
petites plaines ou vallées qui fe trouvent
au milieu de ces chaînes en différens
endroits, font à peu-près à la même élévation
au delfus du niveau de la mer &
des plaines.
Ceux qui font le voyage de Pékin
voient femfiblement le pays s’élever depuis
la frontière de Selenginsk dont le territoire
eft déjà fort haut, jufqu’à la montagne
Khan-Oula; on trouve alors les
rampes fort rôides de cette montagne à
franchir, & l ’on entre enfin prefque fans
defcendre dans la vafte plaine de Gobée,
où l’on ne trouve plus qu’un loi uni
fans arbres, avec des collines peu con-
fidérables , quelques lacs falés & un grand
nombre de petites fources qui fe perdent
dans les fables, jufqu’à ce qu’oit defcende
par des gorges de montagnes & par des
pentes fort rapides vers la grande muraille
, d’où tout le pays s’incline encore
fenfiblement, jufqu’aux plaines de Pékin.
C ’eftauflï fur de femblables plans élevés ,
couverts de graviers & cailloux , & fur
de telles plaiues produites par la dégradation
de la vieille roche , que font fîtués
les lacs de Balkhache , de Lop & de
Kokonour, ainfi qu’une infinité de réfer-
voirs plus petits qui raffemblent quelques
ruiffeaux des montagnes qui les environ- 1
nent, & s’oppofent ainfi à la décharge de
ces eaux au déhors*
L ’étonnante élévation de tous ces déferts
n ’eft pas feulement prouvée par les différens
dégrés de hauteur des chaînes
qui environnent ce centre de l’Alîe, d’où
découlent les grands fleuves diftribués
à la furlàce de. ce vafte continent &
bien ait defious desdites plaines , ce qui
favorife leur long cours jufqu’aux mers
différentes ; elle l’efl encore par des obfer-
vations barométriques des miflîohnaires
jéfuites & autres voyageurs qui s’y font
trouvés, ainfi que par le froid qui y.
régne , même en été , fous une fituation
aufli heureufe.
D ’ailleurs toutes les plus baffes vallées
des montagnes qui - forment pour ainfi
dire les bords & les gradins de cette
prodigieufe hauteur, démontrent l’élévation
de leur polîtion par des arbriffeaux
rabougris & rampans & par leurs autres
productions végétales. Il n’eft que trop
connu que les plantes alpines d’Europe
croiffent en Sibérie par-tout. dans, les
plaines & vallées où l’on approche de
la grande chaîne. Une circonftance plus
remarquable encore eft, que ce n’eft qu’aux
environs de la chaîne altaïque que commencent
à fe montrer les belles plantes
& les beaux arbuftes particuliers à la
Sibé rie , 8c tant recherchés des connoif- 1
feurs étrangers. D ’ailleurs plufieurs animaux;
ennemis des plaines & par confé-'
quent moins enclins à fe. répandre, comme
le buffle à queue fde cheval, le tigre ,
la zibeline, le putois ro u x , le porte-
mufc , le lapreau de roche &c. , font
reliés dans ce centre montagneux de
l’A lie. Ce n’eft point dans ces pays élevés
que l’on doit chercher des preuves de
l ’affertion de ce philofophe Bourguet, re-
nouvellée par Buffom, fur les angles cor-
refpondans des montagnes ‘qui d’ailleurs
fouffrent beaucoup d’exceptions dans les
chaînes granitiques, & même encore fouvent
dans les montagnes des ordres inférieurs.
Voilà donc une grande étendue de
pays xroifés de montagnes qui fe trouvent
infiniment au-deffus des plaines du
continent, & fituée fous des parallèles
allez variés pour que les produétions du
Nord & du Midi y aient pu trouver
dans les premiers âges du monde les fîtes
propres pour leur végétation ou pour leur
vie. Si l’on fuppofe que le niveau des mers
étoit anciennement allez élevé pour couvrir
les pays à couches horifontales des
côntinens que nous trouvons aujourd’hui
remplies de coquilles marines,'le centre
de î’Afie aura formé une grande ifle
entourée de montagnes & préfentant tout
autant de grands caps & de grandes
chaînes marines qu’il part de branches
montagnèufes de ce centre. En fuppo-
fant qu’au commencement ce plateau
n’eût offert que du granit fans aucun
débris , la décompofition que cette roche
a éprouvée; depuis 8c qui fe ■ continue
chaque jour par l ’effet des météores , a
dû bientôt produire des amas de gravier,
de roche pourrie , & de ce limon qu’on
voit dans les Alpes, & qui les rendent
extrêmement fertiles pour la produâion
de toute forte de végétaux.
La chaîne que l’on a dit s’infinuer
entre les origines des fleuves Onon 8c
Jngoda & celles du T ch ik o i, & qui eft